Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Subsidiäre Verfassungsbeschwerde 2D.68/2009
Zurück zum Index II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Subsidiäre Verfassungsbeschwerde 2009
Retour à l'indice II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Subsidiäre Verfassungsbeschwerde 2009


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

2D_68/2009
{T 0/2}

Arrêt du 26 janvier 2010
IIe Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Müller, Président,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffier: M. Dubey.

Parties
1. A.________,
2. B.________,
tous les deux représentés par Me Gian Luigi Berardi, avocat, Fondation Suisse
du Service Social International,
recourants,

contre

Vice-président du Tribunal de première instance du canton de Genève, place du
Bourg-de-Four 1, case postale 3736, 1211 Genève 3,

Objet
Assistance juridique,

recours constitutionnel contre la décision de la Cour de Justice de la
République et canton de Genève, Assistance juridique, du 23 septembre 2009.

Faits:

A.
Par mémoire du 16 juillet 2008, les époux A.________ et B.________ (ci-après
aussi: les intéressés), originaires de Somalie, ont interjeté un recours auprès
de la Commission cantonale de recours de police des étrangers du canton de
Genève (ci-après: la Commission cantonale de recours) contre la décision rendue
le 9 juin 2008 par l'Office cantonal de la population leur refusant une
autorisation de séjour en Suisse au titre de l'art. 36 de l'ancienne ordonnance
du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (aOLE; RO 1986 1791). Le
même jour, A.________ a requis l'octroi de l'assistance juridique et demandé la
nomination comme défenseur d'office de Gian Luigi Berardi. Ce dernier est
avocat, inscrit au registre cantonal des avocats et salarié de la Fondation
suisse du service social international (ci-après: la Fondation), reconnue
d'utilité publique. Par décision du 8 août 2008, faisant référence à l'arrêt du
Tribunal fédéral du 27 mai 2008 dans une cause similaire concernant aussi la
désignation comme défenseur d'office de Gian Luigi Berardi (2C_241/2008), le
Président du Tribunal de 1ère Instance avait "limité aux frais à l'exclusion
des honoraires de Me Berardi" l'assistance juridique accordée à A.________ pour
la procédure devant la Commission cantonale de recours. Me Berardi ne pouvait
être désigné défenseur d'office aux frais de l'assistance juridique, parce
qu'il était salarié de la Fondation d'utilité publique qui représentait les
intéressés. La décision du 8 août 2008 a été confirmée par le Vice-Président de
la Cour de justice et un recours formé ensuite devant le Tribunal fédéral a été
déclaré irrecevable (arrêt 2D_144/2008 du 23 mars 2009).

B.
Durant la procédure devant la Commission cantonale de recours, l'Office
cantonal de la population a fait savoir aux intéressés, par courrier du 29
octobre 2008, qu'il était disposé à transformer l'admission provisoire en
permis de séjour. Le 22 janvier 2009, ces derniers ont retiré leur recours,
sous réserve de l'octroi de dépens.

Par décision du 5 février 2009, la Commission cantonale de recours a considéré
qu'il ne se justifiait pas d'allouer une indemnité de procédure aux
intéressées, l'Office cantonal de la population ayant revu sa décision en
raison d'un changement de l'état de fait pertinent et non pas en raison de
l'intervention de leur mandataire. Par mémoire du 11
mars 2009, les intéressés ont déposé une réclamation contre la décision du 5
février 2009.
Par décision du 31 mars 2009, après avoir estimé les chances de succès du
recours du 16 juillet 2008 avant qu'il ne devienne sans objet et constaté qu'il
aurait dû être rejeté, la Commission cantonale de recours a écarté la
réclamation et partant refusé d'accorder des dépens.

C.
Le 27 mai 2009, les intéressés ont sollicité l'assistance juridique pour former
un recours auprès du Tribunal administratif contre la décision rendue le 31
mars 2009 par la Commission cantonale de recours leur refusant les dépens et
demandé la nomination comme défenseur d'office de Me Gian Luigi Berardi.

Par décision du 15 juin 2009, le Vice-Président du Tribunal de 1ère instance a
rejeté cette demande au motif que la cause était dénuée de chances de succès.

Par acte du 22 juillet 2009, les intéressés ont déposé un recours auprès de la
Cour de justice contre la décision rendue le 15 juin 2009 par le Vice-Président
du Tribunal de 1ère instance. Ils ont conclu à l'annulation de cette décision
et à l'octroi de l'assistance juridique, sans requérir expressément la
désignation de Me Berardi en qualité de défenseur.

D.
Par décision du 23 septembre 2009, le Vice-Président de la Cour de justice a
annulé la décision du 15 juin 2009 et octroyé aux intéressés l'assistance
juridique limitée aux frais pour le recours auprès du Tribunal administratif
contre la décision prononcée le 31 mars 2009 par la Commission cantonale de
recours. A l'appui de sa décision, il a jugé que la cause n'était pas a priori
dénuée de chance de succès. Dans les considérants, il a ajouté que Gian Luigi
Berardi ne pouvait pas être nommé au bénéfice de l'assistance juridique compte
tenu de la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_241/2008 du 27 mai
2008).

E.
Agissant par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, les intéressés
demandent au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 23 septembre 2009 et de
renvoyer la cause pour nouvelle décision au sens des considérants,
subsidiairement de réformer la décision du 23 septembre 2009 dans le sens de la
désignation comme défenseur de Gian Luigi Berardi. Ils se plaignent de la
violation des art. 8, 9 ainsi que 29 al. 2 et 3 Cst.

Le Vice-Président de la Cour de justice se réfère à l'arrêt attaqué. Le
Vice-Président du Tribunal de 1ère instance conclut à l'irrecevabilité du
recours.

F.
Les recourants ont encore adressé de nombreux courriers au Tribunal fédéral en
date du 1er décembre 2009, du 3 décembre 2009 et du 19 janvier 2010. Dans le
dernier, ils font état d'une décision rendue le 10 janvier 2010 par le
Vice-Président du Tribunal de 1ère instance nommant au bénéfice de l'assistance
judiciaire Me Gian Luigi Berardi dans une affaire de police des étrangers. Pour
ce motif, ils sollicitent un second échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
1.1 Les recourants ont déposé à bon droit un recours constitutionnel
subsidiaire. Le recours en matière de droit public est en effet irrecevable
contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une
autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne
donnent un droit (art. 83 lettre c ch. 2 LTF). Cette restriction vaut également
pour les décisions incidentes de nature procédurale, par exemple en matière
d'assistance judiciaire ou d'effet suspensif; autrement dit, le recours n'est
recevable à l'encontre de telles décisions que si la contestation matérielle a
pour objet un véritable droit à une autorisation de séjour, par opposition à
une simple expectative (cf. arrêts 2D_144/2008 du 23 mars 2009, consid. 2;
2C_597/2008 du 24 septembre 2008, consid. 1.1). En l'espèce, les recourants ont
fondé leur demande d'autorisation de séjour sur l'art. 36 aOLE qui ne leur
confère aucun droit. Le recours en matière de droit public étant irrecevable,
seul subsiste la voie du recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 LTF).

1.2 Selon l'art. 93 let. a LTF applicable au recours constitutionnel par renvoi
de l'art. 117 LTF, une décision incidente peut faire l'objet d'un recours
devant le Tribunal fédéral si elle peut causer un préjudice irréparable.
1.2.1 Le refus de l'assistance juridique en matière administrative est une
décision incidente qui cause en principe un dommage irréparable, de sorte que
le recours constitutionnel est immédiatement ouvert (arrêts 8C_422/2009 du 28
novembre 2009, consid. 1.2; 2D_144/2008 du 23 mars 2009, consid. 4; 2C_143/2008
du 10 mars 2008, consid. 2; ATF 129 I 129 consid. 1.1 p. 131). La décision par
laquelle le juge refuse un changement de défenseur d'office ou rejette une
requête tendant à la désignation d'un défenseur d'office expressément proposé
constitue également une décision incidente, qui ne met pas fin à la procédure
(ATF 126 I 207 consid. 1a p. 209; 111 Ia 276 consid. 2b p. 278 s.), mais en
principe une telle décision ne cause pas de préjudice irréparable (arrêts
8C_422/2009 du 28 novembre 2009, consid. 1.3 et les références citées; 2D_144/
2008 du 23 mars 2009, consid. 5).
1.2.2 En l'espèce, le dispositif de l'arrêt attaqué "octroie à B.________ et
A.________ l'assistance juridique, limitée aux frais, pour le recours devant le
Tribunal administratif [...]". L'art. 6 du règlement genevois du 18 mars 1996
sur l'assistance juridique (RAJ; RSGE E 2 05.04) distinguant notamment les
frais de justice d'une part, de la nomination d'un avocat et de sa rémunération
d'autre part (art. 6 let a et c RAJ), il y a lieu de comprendre, contrairement
à ce qui prévalait dans la cause 2D_144/2008, qui avait pour objet le refus de
nommer un défenseur d'office expressément désigné en la personne de Me Berardi,
que le présent litige porte sur le refus de principe de nommer un défenseur
d'office aux recourants. Ce refus peut leur causer un préjudice irréparable, de
sorte que le recours constitutionnel subsidiaire est recevable au moins sous
cet angle.

1.3 Pour le surplus, déposé en temps utile (art. 100 et 117 LTF) par les
destinataires de l'arrêt attaqué, qui ont pris part à la procédure devant
l'autorité supérieure précédente de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1
let. d et al. 2 et art. 114 LTF) et ont un intérêt digne de protection à
l'annulation ou à la modification de celui-ci (art. 115 LTF), le présent
recours constitutionnel subsidiaire est en principe recevable en vertu des art.
113 ss LTF.

1.4 Les recourants concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de
la cause pour nouvelle décision à la juridiction compétente, ce qui est
admissible au regard de l'art. 107 al. 2 LTF (ATF 133 II 409 consid. 1.4.1 p.
414 s.; arrêt 2C_26/2009 du 18 juin 2009, consid. 2.2), puisqu'il ressort
clairement de leur écriture qu'ils entendent demander
une réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que l'assistance judiciaire totale
leur soit octroyée.

1.5 Conformément à l'art. 102 al. 3 LTF, selon lequel, en règle générale, il
n'y a pas d'échange ultérieur d'écritures à celui prévu par l'al. 1 de l'art.
102 LTF, la requête des recourants sollicitant un deuxième échange des
écritures est rejetée. Elle doit d'autant plus être écartée qu'elle est fondée
sur des nova irrecevables (art. 99 al. 1 et 105 al. 1 LTF).

2.
2.1 Le recours constitutionnel subsidiaire ne peut être formé que pour
violation des droits constitutionnels (art. 116 LTF). Le Tribunal fédéral ne se
saisit que des griefs soulevés et motivés de façon détaillée par la partie
recourante (art. 106 al. 2 et 117 LTF; ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 133 III
439 consid. 3.2 p. 444). Il statue sur la base des faits constatés dans la
décision attaquée et ne peut rectifier ou compléter les constatations de
l'autorité précédente que si les faits ont été établis en violation des droits
constitutionnels (art. 118 LTF). La partie recourante doit par conséquent
expliquer de manière circonstanciée en quoi un droit constitutionnel aurait été
violé dans l'établissement de faits, faute de quoi il n'est pas possible de
tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte
attaqué. En particulier, l'autorité de céans n'entre pas en matière sur des
critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation
des preuves (cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4 p. 254/255; 133 IV 286 consid. 6.2
p. 288).

2.2 Les recourants font état de nombreux faits qui ne ressortent pas des
constatations retenues par l'instance précédente, sans exposer concrètement,
conformément aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, en quoi les faits établis
l'auraient été en violation de droits constitutionnels. Ces faits sont donc
irrecevables. Il n'est par conséquent pas possible de les prendre en
considération et de s'écarter de ceux retenus par la décision cantonale.

3.
Invoquant l'art. 29 al. 1 et 2 Cst. (mémoire p. 12, let. g), les recourants
font valoir qu'en limitant l'assistance juridique aux frais sans exposer pour
quels motifs elle ne l'accordait pas complètement, l'Instance précédente n'a
statué que partiellement sur leur demande d'assistance juridique commettant
ainsi un déni de justice et violant leur droit d'être entendus.

3.1 Commet un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst.,
l'autorité qui refuse indûment de se prononcer sur une requête dont l'examen
relève de sa compétence. Ainsi, la juridiction qui n'entre pas ou pas
complètement en matière sur un recours qui lui est soumis dans un domaine dont
elle a la compétence matérielle, locale et fonctionnelle pour en connaître
commet un déni de justice formel (arrêts 1A.196/2006 du 12 mars 2007 consid. 5;
4P.291/2001 du 10 septembre 2002, consid. 5.1; ATF 118 Ib 381 consid. 2b/bb, p.
390/391; ATF 117 Ia 116 consid. 3a et les arrêts cités). L'interdiction du déni
de justice est un droit de nature formelle dont la violation entraîne
l'annulation de la décision attaquée, indépendamment du sort du recours sur le
fond (cf. arrêt 1A.196/2006 du 12 mars 2007 consid. 5; ATF 121 I 230 consid. 2a
p. 232 et les arrêts cités).

Le droit d'être entendu de l'art. 29 al. 2 Cst. implique pour l'autorité
l'obligation de motiver sa décision; elle peut toutefois se limiter aux points
essentiels pour la décision à rendre (ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88).

3.2 En l'espèce, dans le recours qu'ils lui ont adressé, les recourants ont
demandé à l'Instance précédente d'annuler la décision rendue le 15 juin 2009
par le Vice-Président du Tribunal de 1ère instance et de leur octroyer
l'assistance juridique. Dans la décision attaquée, l'Instance précédente a
considéré que le Vice-Président du Tribunal de 1ère instance avait jugé à tort
la cause dénuée de toute chance de succès. Puis, sans exposer de motivation et
dans la même phrase, elle en a conclu que l'assistance juridique devait être
octroyée "uniquement pour les frais". Dans la phrase suivante, évoquant l'art.
4 al. 4 RAJ, elle a constaté que Me Gian Luigi Berardi ne pouvait pas être
nommé défenseur d'office des recourants en raison de la jurisprudence. Ce
constat toutefois ne la libérait pas ipso jure de se prononcer sur l'octroi de
l'assistance judiciaire complète dûment sollicitée par les recourants, à tout
le moins de l'admettre ou de la refuser motifs à l'appui. En effet, ne pas
nommer Me Berardi en qualité de défenseur au bénéfice de l'assistance
judiciaire en se fondant sur la jurisprudence de la Cour de céans ne dispensait
nullement l'Instance précédente de se prononcer sur l'éventuelle désignation
d'un autre défenseur. En ce sens, la présente affaire est différente de la
cause 2C_241/2008 en ce que les recourants n'ont pas conclu directement à la
désignation de Me Berardi - la décision attaquée étant en ce cas dûment motivée
- mais bien à l'octroi de l'assistance judiciaire complète, ce qui inclut la
désignation éventuelle d'un autre défenseur. Les recourants se plaignent donc à
juste titre de ce que l'instance précédente ne s'est pas prononcée sur leur
demande d'assistance judiciaire complète sans en motiver la raison.

Ce faisant, l'Instance précédente a commis un déni de justice et a violé le
droit d'être entendus des recourants.

4.
Le recours doit ainsi être admis pour ce seul motif déjà, dans la mesure où il
est recevable et l'arrêt attaqué annulé. Partant, il est superflu d'examiner
les autres griefs soulevés par les recourants.

Succombant le canton de Genève, dont l'intérêt patrimonial est en cause, doit
supporter un émolument de justice (art. 66 al. 4 LTF). Le canton de Genève
versera une indemnité de dépens aux recourants qui ont obtenu gain de cause.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est admis dans la mesure où il est
recevable et la décision attaquée annulée. La cause est renvoyée à l'autorité
précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge du canton de
Genève.

3.
Le canton de Genève versera aux recourants une indemnité de 1'500 fr. à titre
de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué à la représentante des recourants, au
Vice-Président du Tribunal de première instance et à la Cour de Justice de la
République et canton de Genève, Assistance juridique.

Lausanne, le 26 janvier 2010
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Müller Dubey