Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.98/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_98/2009

Arrêt du 18 juin 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Aemisegger et Reeb.
Greffier: M. Parmelin.

Parties
A.________,
recourant, représenté par Me Jean-Luc Maradan, avocat,

contre

Président de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, case
postale 56, 1702 Fribourg.

Objet
procédure pénale; assistance judiciaire,

recours contre l'arrêt du Président de la Chambre pénale du Tribunal cantonal
du canton de Fribourg du 23 mars 2009.

Considérant en fait et en droit:

1.
A.________ se trouve en détention préventive depuis le 14 octobre 2008 sous les
inculpations d'actes préparatoires à enlèvement et séquestration, de tentative
d'extorsion et chantage, et de menaces à l'encontre de B.________.
Par acte du 20 octobre 2008, complété le 2 novembre 2008, il a déposé une
plainte pénale contre B.________ pour faux dans les titres, abus de confiance,
fraude fiscale, blanchiment d'argent, escroquerie et usure. L'instruction de
cette plainte a été confiée au Juge d'instruction du canton de Fribourg qui
instruit une enquête pénale contre B.________ pour diverses infractions de
nature économique.
Le 24 février 2009, A.________ a requis l'assistance judiciaire pour toute la
durée de la procédure pénale et la désignation d'un avocat d'office en la
personne de Me Jean-Luc Maradan. Le juge d'instruction a préavisé
défavorablement la demande au motif qu'il entendait ne pas donner suite à la
plainte et rendre une ordonnance de refus d'ouvrir l'action pénale, ce qu'il a
fait le 20 mars 2009. Le Président de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du
canton de Fribourg a rejeté la requête au terme d'un arrêt rendu le 23 mars
2009.
Par un acte intitulé "recours pénal", A.________ demande au Tribunal fédéral
d'annuler cet arrêt et de renvoyer le dossier au Président de la Chambre pénale
pour nouvelle décision au sens des considérants. Il requiert l'assistance
judiciaire.
Le Président de la Chambre pénale a renoncé à se déterminer et s'en remet à
justice.

2.
La contestation portant sur une décision rendue en matière pénale, le recours
au Tribunal fédéral est régi par les art. 78 ss LTF. Le recours en matière
pénale est immédiatement ouvert contre le refus d'accorder l'assistance
judiciaire à une partie à la procédure pénale, nonobstant le caractère incident
de cette décision, dans la mesure où elle est de nature à lui causer un
préjudice irréparable (ATF 133 IV 335 consid. 2 p. 337). La décision attaquée a
été rendue en dernière instance cantonale, le recours à la Chambre pénale
n'étant pas ouvert contre les décisions de son président selon l'art. 202 al. 1
du Code de procédure pénale fribourgeois (CPP/FR). Le délai imparti aux cantons
pour instituer des tribunaux supérieurs statuant sur recours au sens de l'art.
80 al. 2 LTF n'est pas encore échu (cf. art. 130 al. 1 LTF).
Aux termes de l'art. 81 al. 1 let. b LTF, la qualité pour former un recours en
matière pénale est reconnue à quiconque a un intérêt juridique à l'annulation
ou à la modification de la décision attaquée. En principe, cet intérêt doit
exister non seulement au moment du dépôt du recours, mais encore au moment où
le jugement est rendu (cf. arrêt 1B_7/2007 du 6 mars 2007). En l'occurrence, la
requête d'assistance judiciaire formulée par le recourant est sans objet en
tant qu'elle porte sur l'instruction de la plainte déposée à l'encontre de
B.________ puisque le juge d'instruction en charge du dossier a refusé d'ouvrir
l'action pénale au terme d'une ordonnance rendue le 20 mars 2009. Le recourant
ne prétend pas avoir dû assumer des frais d'avocat durant cette phase de la
procédure. En revanche, il peut se prévaloir d'un intérêt digne de protection à
se voir désigner un avocat d'office pour l'assister dans la procédure de
recours contre l'ordonnance de refus d'ouvrir l'action pénale, de sorte qu'il
convient d'entrer en matière sur le recours dans cette mesure.

3.
Le recourant reproche au Président de la Chambre pénale d'avoir considéré à
tort que les conditions posées à l'octroi d'un avocat d'office n'étaient pas
réunies.

3.1 Le principe, l'étendue et les limites du droit à l'assistance judiciaire
gratuite sont déterminés en premier lieu par les prescriptions du droit
cantonal de procédure, dont le Tribunal fédéral revoit l'application et
l'interprétation sous l'angle de l'arbitraire. Dans tous les cas cependant,
l'autorité cantonale doit respecter les garanties minimales déduites de l'art.
29 al. 3 Cst. et le Tribunal fédéral vérifie librement que cela soit bien le
cas (ATF 129 I 129 consid. 2.1 p. 133 et les arrêts cités).
Le recourant se prévaut de l'art. 29 al. 4 de la Constitution fribourgeoise,
dont la teneur est identique à celle de l'art. 29 al. 3 Cst. Il se réfère aussi
à l'art. 36 CPP/FR, applicable au lésé en vertu du renvoi de l'art. 40 al. 1
CPP/FR, qui définit les conditions d'octroi d'un défenseur d'office au prévenu
indigent. Il ne prétend pas que cette disposition lui conférerait une
protection plus étendue que celle découlant du droit constitutionnel fédéral,
de sorte que c'est à la lumière de l'art. 29 al. 3 Cst. qu'il y a lieu
d'examiner le présent recours.

3.2 Aux termes de cette disposition, toute personne qui ne dispose pas des
ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins que
sa cause ne paraisse dépourvue de toute chance de succès; elle a en outre le
droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde
de ses droits le requiert. Selon la jurisprudence, il se justifie en principe
de désigner un avocat d'office à l'indigent lorsque la situation juridique de
celui-ci est susceptible d'être affectée de manière particulièrement grave.
Lorsque, sans être d'une portée aussi capitale, la procédure en question met
sérieusement en cause les intérêts de l'indigent, il faut en sus que l'affaire
présente des difficultés en fait et en droit que le requérant ou son
représentant légal ne peuvent surmonter seuls (ATF 130 I 180 consid. 2.2 p. 182
et les arrêts cités). Le point décisif est toujours de savoir si la désignation
d'un avocat d'office est objectivement nécessaire dans le cas d'espèce. A cet
égard, il faut tenir compte des circonstances concrètes de l'affaire, de la
complexité des questions de fait et de droit, des particularités que présentent
les règles de procédure applicables, des connaissances juridiques du requérant
ou de son représentant, du fait que la partie adverse est assistée d'un avocat,
et de la portée qu'a pour le requérant la décision à prendre, avec une certaine
réserve lorsque sont en cause principalement ses intérêts financiers (ATF 128 I
225 consid. 2.5.2 p. 233; 123 I 145 consid. 2b/cc p. 147; 122 I 49 consid. 2c/
bb p. 51/52, 275 consid. 3a p. 276 et les arrêts cités). La nature de la
procédure, qu'elle soit ordinaire ou sommaire, unilatérale ou contradictoire,
régie par la maxime d'office ou la maxime des débats, et la phase de la
procédure dans laquelle intervient la requête, ne sont pas à elles seules
décisives (ATF 125 V 32 consid. 4b p. 36 et les arrêts cités).

3.3 Le Président de la Chambre pénale a considéré que l'octroi d'un avocat
d'office au recourant n'était pas nécessaire pour recourir contre l'ordonnance
du juge d'instruction du 20 mars 2009 refusant d'ouvrir l'action pénale. Cette
décision répond point par point aux faits dénoncés par A.________ dans sa
plainte du 20 octobre 2008 et son complément du 2 novembre 2008. Le recourant
reprochait entre autre à B.________ de ne pas lui avoir versé le salaire dû
pour son travail de graphiste en vertu d'un contrat passé avec une société
apparemment inexistante, dont il était l'un des associés. Il l'accusait
d'escroquerie, d'abus de confiance et de faux dans les titres. Le juge
d'instruction a refusé d'ouvrir une instruction pénale à raison de ces faits
parce qu'il s'agissait d'un litige à caractère exclusivement civil. Il revenait
ainsi au recourant, pour contester avec succès ce point de la décision devant
la Chambre pénale du Tribunal cantonal, de démontrer que les faits dénoncés
revêtaient également un aspect pénal en établissant notamment que les
conditions d'une escroquerie étaient réunies. La réalisation de cette
infraction suppose en particulier que la preuve d'une astuce soit établie (cf.
ATF 135 IV 76 consid. 5.2 p. 79). Il n'est pas évident pour une personne placée
en détention préventive de réunir les éléments nécessaires à rapporter cette
preuve. A cela s'ajoute que le recourant est de langue maternelle italienne et
que s'il a une maîtrise suffisante du français pour s'exprimer oralement ou
pour écrire des lettres simples dans cette langue, il n'en va pas
nécessairement de même s'agissant de rédiger une plainte motivée ou un recours
contre une ordonnance de refus d'ouvrir une action pénale, ce d'autant qu'il ne
dispose d'aucune formation juridique. Force est de constater que la cause
présente donc bien une certaine difficulté au niveau des faits et du droit. De
plus, les intérêts en jeu sont importants pour le recourant s'agissant à tout
le moins des infractions précitées d'escroquerie et d'abus de confiance
reprochées à B.________ puisque leur réalisation pourrait avoir une incidence
sur l'issue de la procédure pénale pendante devant les autorités judiciaires
vaudoises. Par ailleurs, le juge d'instruction a notifié l'ordonnance de refus
de suivre à la plainte déposée par le recourant au Ministère public et à
B.________, à l'étude de son conseil. Il n'est pas exclu que ces derniers
soient amenés à prendre position sur le recours formé par l'intéressé. Pour
cette raison également, l'assistance d'un avocat s'imposait.
Le Président de la Chambre pénale a dès lors violé le droit fédéral en
considérant que l'assistance d'un avocat d'office ne se justifiait pas aux
motifs que la cause ne présentait pas de difficulté spéciale sous l'angle des
faits ou du droit et ne nécessitaient pas de connaissances juridiques
particulières. Par conséquent, la décision querellée doit être annulée et la
cause renvoyée au Président de la Chambre pénale pour nouvelle décision, le
Tribunal fédéral étant lié à cet égard par les conclusions du recourant (cf.
art. 107 al. 1 LTF).

4.
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours dans la
mesure où il est recevable, ce qui rend sans objet la requête d'assistance
judiciaire présentée par le recourant. Le canton de Fribourg, qui succombe, est
dispensé des frais judiciaires (art. 66 al. 3 LTF). Il versera en revanche une
indemnité de dépens au recourant qui obtient gain de cause avec l'assistance
d'un avocat (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. La décision attaquée
est annulée et la cause renvoyée au Président de la Chambre pénale du Tribunal
cantonal du canton de Fribourg pour nouvelle décision dans le sens des
considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Une indemnité de 1'500 fr. à payer au recourant est mise à la charge du canton
de Fribourg.

4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant et au Président de
la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg.

Lausanne, le 18 juin 2009
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Parmelin