Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.54/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_54/2009

Arrêt du 10 mars 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Eusebio.
Greffier: M. Kurz.

Parties
A.________,
recourant, représenté par Me Kathrin Gruber, avocate,

contre

Procureur général du canton de Vaud,
case postale, 1014 Lausanne.

Objet
détention après jugement,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de
cassation pénale, du 19 janvier 2009.

Faits:

A.
Le 25 août 2008, A.________, ressortissant géorgien en détention préventive
depuis le 23 janvier 2008, a été condamné par le Tribunal correctionnel de
l'arrondissement de Lausanne à dix-huit mois de privation de liberté. Cette
condamnation a été confirmée le 3 octobre 2008 par la Cour de cassation du
Tribunal cantonal vaudois, dont les motifs ont été notifiés le 11 décembre
2008.
Le 8 décembre 2008, A.________ a requis, auprès du Président de la Cour de
cassation (le Président), la suspension de l'exécution de l'arrêt du 3 octobre
2008, jusqu'à droit connu sur le recours en matière pénale qu'il entendait
former auprès du Tribunal fédéral. Le 10 décembre 2008, le Président a admis la
demande de suspension, "jusqu'à ce que le condamné passe sous l'autorité de la
juridiction fédérale". Par lettre du 12 décembre 2008, le Président précisa que
sa décision précédente n'équivalait pas à une remise en liberté; elle visait
uniquement à sauvegarder les droits de l'intéressé jusqu'à la saisine du
Tribunal fédéral; la précédente décision de refus de mise en liberté, rendue le
24 octobre 2008 et confirmée le 4 novembre 2008 par le Tribunal fédéral (arrêt
1B_275/2008) restait en vigueur. Sur recours de A.________, le Tribunal fédéral
a, par arrêt du 17 décembre 2008 (1B_330/2008), renvoyé la cause au Président
afin qu'il rende une nouvelle décision motivée.
Le 18 décembre 2008, la Cour de cassation a confirmé le refus du Juge
d'application des peines d'accorder la libération conditionnelle après
exécution des deux tiers de la peine, en raison du comportement du condamné et
du pronostic défavorable.

B.
Statuant à nouveau le 23 décembre 2008, le Président a rejeté la requête de
mise en liberté, en raison du risque de récidive et de fuite.
Par arrêt du 19 janvier 2009, la Cour de cassation cantonale a confirmé cette
décision. Le condamné ayant recouru au Tribunal fédéral contre l'arrêt de la
Cour de cassation du 3 octobre 2008, le Président de la Cour de droit pénal
avait, par ordonnance du 15 janvier 2009, statué sur la demande d'effet
suspensif et de mise en liberté. Le recours avait effet suspensif de plein
droit, de sorte que la requête formée par le recourant était sans objet; un
retrait de l'effet suspensif - requis par le Ministère public - n'était
envisageable qu'en cas d'exécution anticipée. Quant à la mise en liberté
provisoire, elle n'avait pas de connexité suffisante avec l'objet du recours
sur le fond; elle devait au demeurant être refusée compte tenu du risque de
fuite. La Cour de cassation a estimé que la question de l'effet suspensif avait
été traitée par le Tribunal fédéral, et qu'elle n'avait plus à l'être par
l'autorité cantonale; le recours était sans objet sur ce point. Les conditions
posées à la détention préventive, soit l'existence de charges suffisantes, le
risque de fuite et, subsidiairement, le risque de récidive, restaient remplies.

C.
Par un même acte daté du 27 février 2009, A.________ forme un recours en
matière pénale contre l'arrêt du 18 décembre 2008 (liberté conditionnelle,
affaire 1B_163/2009 traitée par la Cour de droit pénal), ainsi que contre celui
du 19 janvier 2009; s'agissant de ce dernier, il en demande la réforme en ce
sens que le recourant est immédiatement mis en liberté provisoire, soit par le
biais de l'effet suspensif, soit en annulation de la détention préventive. Il
demande l'assistance judiciaire.
Il n'a pas été demandé de réponse.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1 LTF, est ouvert contre
une décision relative au maintien en détention.

1.1 Le recourant a qualité pour agir au sens de l'art. 81 al. 1 let. a LTF; il
a agi en temps utile (art. 100 al. 1 LTF).

1.2 Le recourant estime que l'admission de son recours contre le refus de
libération conditionnelle pourrait rendre sans objet le recours concernant la
détention. Il n'y a toutefois pas lieu de suspendre la présente cause: dans la
mesure où le recourant conteste l'existence d'un titre de détention ainsi que
les motifs de son maintien en détention préventive, il doit être statué dans
les plus brefs délais sur la légalité de la privation de liberté (art. 31 al. 4
Cst.).

2.
Le recourant estime que la situation juridique ne serait pas claire lorsque le
condamné en détention préventive forme recours auprès du Tribunal fédéral.
Selon l'art. 103 al. 2 let. b LTF, l'effet suspensif serait automatique, ce qui
impliquerait la libération du recourant, sauf décision contraire du juge
instructeur selon l'art. 103 al. 3 LTF. Dès la saisine du Tribunal fédéral, les
autorités cantonales ne seraient plus compétentes. Le recourant soutient,
contrairement à ce qui ressort de l'ordonnance d'effet suspensif rendue le 15
janvier 2009 par le Président de la Cour de droit pénal, que celui-ci était
compétent pour statuer sur la détention provisoire.

2.1 Selon l'art. 434 al. 3 CPP/VD, lorsque l'arrêt de condamnation peut faire
l'objet d'un "pourvoi à la Cour de cassation du Tribunal fédéral" (selon
l'ancienne terminologie de la loi fédérale d'organisation judiciaire), le
condamné demeure sous l'autorité du Président de la Cour de cassation cantonale
jusqu'à ce qu'il passe sous celle de la juridiction fédérale, ou jusqu'à ce que
l'arrêt cantonal soit devenu définitif faute de recours au Tribunal fédéral.
Cette disposition a pour but d'éviter un conflit négatif de compétence lorsque
le condamné saisit le Tribunal fédéral et qu'il y a lieu de rendre une décision
sur sa détention. Selon l'art. 103 al. 2 let. b LTF, le recours en matière
pénale a effet suspensif dans la mesure des conclusions formulées, s'il est
dirigé contre une décision qui prononce une peine ferme ou une mesure privative
de liberté.

2.2 Contrairement à ce que soutient le recourant, cette dernière disposition
tend à éviter l'exécution immédiate du jugement de condamnation à l'égard d'un
condamné jusqu'alors en liberté (Basler Kommentar zum BGG, 2008, p. 1013-1014).
La suspension de l'exécution de l'arrêt de condamnation est toutefois sans
incidence sur la question, distincte, de la détention préventive, de sorte que
le dépôt d'un recours en matière pénale ne saurait avoir pour conséquence
l'élargissement du condamné déjà détenu à titre préventif. Tel est le sens de
l'ordonnance présidentielle du 15 janvier 2009, et la Cour cantonale a relevé,
avec raison, que le mandat d'arrêt du 23 janvier 2008 continuait à déployer ses
effets jusqu'à l'entrée en force d'un jugement sur le fond. La détention du
recourant est donc toujours fondée sur les dispositions cantonales relatives à
la détention préventive, et repose dès lors sur une base légale suffisante.

2.3 Le recourant conteste également en vain la compétence du Président selon
l'art. 343 al. 4 CPP/VD. En effet, le Président de la Cour de droit pénal ayant
refusé de statuer sur la détention préventive, le recourant ne se trouve pas,
en ce qui concerne cette question, "sous l'autorité" de la juridiction
fédérale. La compétence du Président sur ce point n'a donc pas pris fin en
raison du dépôt du recours au Tribunal fédéral.
Les griefs relatifs à la base légale et à la compétence de l'autorité intimée
doivent par conséquent être écartés.

3.
Le recourant soutient que l'émolument mis à sa charge dans l'arrêt du 29
janvier 2009 serait excessif, par rapport notamment aux frais des précédentes
décisions. Le recourant se plaint d'arbitraire, mais il ne précise pas quelle
disposition du droit cantonal aurait ainsi été violée. Le montant de
l'émolument (soit 1007 fr. 60, comprenant l'indemnité de 107 fr. 60 allouée au
défenseur d'office) n'est d'ailleurs pas manifestement disproportionné, par
rapport notamment aux frais fixés dans l'arrêt du 17 septembre 2008 (845 fr.
20); la différence paraît justifiée par le fait que l'arrêt attaqué traite de
questions procédurales supplémentaires. Rien ne permet par conséquent
d'affirmer, comme le fait le recourant, que la cour cantonale aurait voulu
récupérer les dépens qui lui ont été alloués dans l'arrêt du Tribunal fédéral
du 23 décembre 2008.

4.
Sur le fond et à titre subsidiaire, le recourant estime que la possibilité d'un
sursis partiel devrait être prise en compte à ce stade, de même que la
libération conditionnelle. Il invoque le principe de la proportionnalité et
relève qu'il ne lui reste que trois mois de détention à exécuter. Il conteste
les risques de fuite et de réitération retenus dans l'arrêt attaqué.

4.1 Le refus de prendre en compte la possibilité d'un sursis, dans l'examen de
la détention préventive, est conforme à la jurisprudence (ATF 133 I 270 consid.
3.4.2 p. 282; 125 I 60 consid. 3d p. 64 et les arrêts cités); le fait que la
question du sursis fasse l'objet du recours sur le fond n'y change rien. Quant
à la libération conditionnelle, elle a fait l'objet d'une décision formelle
séparée et n'a dès lors pas non plus à être examinée dans le présent cadre.

4.2 S'agissant du risque de fuite, le recourant est de nationalité étrangère et
n'a aucune attache familiale ou professionnelle avec la Suisse. Sa demande
d'asile a été rejetée, de sorte que plus rien ne saurait le dissuader de se
soustraire, en cas de libération, à l'exécution du solde de peine, quelle qu'en
soit la durée. Ces considérations, émises par la Cour de céans dans l'arrêt du
4 novembre 2008, conservent leur pertinence et conduisent au rejet du recours.
La question du risque de récidive n'a ainsi pas à être examinée.

5.
Le recours doit par conséquent être rejeté. La demande d'assistance judiciaire
est admise; Me Gruber est désignée comme avocate d'office du recourant et une
indemnité lui est allouée, à titre d'honoraires. Il n'est pas perçu de frais
judiciaires.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours dirigé contre l'arrêt du 29 janvier 2009 est rejeté dans la mesure
où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Kathrin Gruber est désignée
comme avocate d'office du recourant et une indemnité de 1000 fr. lui est
allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral; il
n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Procureur
général et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale.

Lausanne, le 10 mars 2009
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Kurz