Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.353/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_353/2009

Arrêt du 15 décembre 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Eusebio.
Greffière: Mme Tornay Schaller.

Parties
A.________, représenté par Me Yvan Jeanneret, avocat,
recourant,

contre

Procureur général du canton de Genève, 1211 Genève 3.

Objet
détention préventive,

recours contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation de la Cour de justice du
canton de Genève, du 20 novembre 2009.

Faits:

A.
A.________, ressortissant français, se trouve en détention préventive depuis le
15 octobre 2009, date à laquelle le Juge d'instruction du canton de Genève
(ci-après: le Juge d'instruction) l'a inculpé d'actes préparatoires délictueux
en vue de commettre un brigandage (art. 260bis CP) et d'opposition aux actes de
l'autorité (art. 286 CP). Il lui est notamment reproché d'avoir, le 13 octobre
2009, aux alentours de 7 heures, de concert avec B.________, C.________ et
D.________, tenté de cambrioler la poste de Collex-Bossy. Ce jour-là, une
course-poursuite s'est engagée entre les véhicules de la police et la voiture
conduite par B.________ et dans laquelle se trouvait A.________. Après
l'immobilisation du véhicule, A.________, bien que blessé, a tenté de fuir à
pied à travers champs.
A.________ a déjà fait l'objet de plusieurs condamnations par le Tribunal
correctionnel de Lyon en France. Il a notamment été condamné les 30 juin 2004
et 7 décembre 2006 respectivement, à six mois d'emprisonnement pour recel de
bien provenant d'un vol, à quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour vol
avec violence et à trois mois d'emprisonnement pour outrage à une personne
dépositaire de l'autorité publique.

B.
Par ordonnance du 17 novembre 2009, le Juge d'instruction a refusé la mise en
liberté provisoire que A.________ avait requise le 16 novembre 2009 en
proposant une caution de 3'800 euros. La Chambre d'accusation de la Cour de
justice du canton de Genève (ci-après: la Chambre d'accusation) a rejeté le
recours formé contre cette décision, par ordonnance du 20 novembre 2009. Elle a
considéré en substance que des charges suffisantes étaient opposables à
l'inculpé, qu'il existait des risques de réitération et que le principe de la
proportionnalité était respecté compte tenu de la peine concrètement encourue
et de la durée de la détention préventive.

C.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au
Tribunal fédéral principalement d'annuler cette ordonnance et d'ordonner sa
mise en liberté immédiate. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à
l'instance précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il
requiert en outre l'assistance judiciaire.
Invitée à se déterminer, la Chambre d'accusation se réfère aux considérants de
sa décision. Le Procureur général du canton de Genève fait siens les motifs
invoqués par la Chambre d'accusation.

Considérant en droit:

1.
La décision attaquée, qui refuse la mise en liberté provisoire du recourant,
est une décision en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF (cf. ATF 133
I 270 consid. 1.1 p. 273) et incidente causant un préjudice irréparable au sens
de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (arrêt 1B_114/2009 du 15 juin 2009 consid. 1).
Pour le surplus, formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision
prise en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF) et qui touche le
recourant dans ses intérêts juridiquement protégés (art. 81 al. 1 let. a et b
ch. 1 LTF), le recours en matière pénale est recevable.

2.
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté
personnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, que si elle repose
sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art.
34 du code de procédure pénale du canton de Genève du 29 septembre 1977 (CPP/
GE; RSG E 4 20). Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et
respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; ATF 123
I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté
doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un
danger de collusion et de réitération (cf. art. 34 let. a à c CPP/GE). La
gravité de l'infraction et l'importance de la peine encourue ne sont, à elles
seules, pas suffisantes (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p.
70). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé
des charges suffisantes (art. 5 par. 1 let. c CEDH; ATF 116 Ia 144 consid. 3;
art. 34 in initio CPP/GE). S'agissant d'une restriction grave à la liberté
personnelle, le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve
toutefois de l'appréciation des preuves, revue sous l'angle de l'arbitraire
(ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271).

3.
Dans un premier grief, le recourant conteste l'existence d'indices concrets de
sa prévention s'agissant de l'infraction d'actes préparatoires délictueux en
vue de commettre un brigandage.

3.1 Pour qu'une personne soit placée en détention préventive, il doit exister à
son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité,
c'est-à-dire des raisons plausibles de la soupçonner d'avoir commis une
infraction. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention
préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des
soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers
temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître
vraisemblable après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables
(ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; Gérard Piquerez, Traité de procédure pénale
suisse, 2e éd., 2006, p. 540 et les références).
Appelé à se prononcer sur la constitutionnalité d'une décision de maintien en
détention, le Tribunal fédéral n'a pas à procéder à une pesée complète des
éléments à charge et à décharge, ni à apprécier la crédibilité des éléments de
preuve mettant en cause le condamné. Il doit uniquement examiner s'il existe
des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure, c'est-à-dire
des raisons plausibles de soupçonner l'accusé d'avoir commis une infraction
(ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; art. 34 in initio CPP/GE).

3.2 En l'espèce, s'agissant de l'infraction d'actes préparatoires délictueux en
vue de commettre un brigandage (art. 260bis CP), le recourant prétend que le
seul élément à sa charge serait le fait que la voiture dans laquelle il se
trouvait au moment des faits est immatriculée à Lyon, tout comme le véhicule
signalé par la police comme faisant des repérages aux alentours du bureau de
poste de Collex-Bossy. Il perd cependant de vue que la Chambre d'accusation a
également retenu le fait que B.________, le conducteur du véhicule dans lequel
se trouvait l'inculpé, a clairement mis en cause celui-ci et ce, à deux
reprises, pour avoir eu l'intention de commettre avec lui le vol d'une voiture
en Suisse. S'ajoute à cela le fait que l'intéressé ne fournit aucune
explication quant à sa présence dans le village de Collex ce matin-là à 7
heures.
Par ailleurs, le recourant ne conteste pas l'existence d'indices de sa
culpabilité quant à l'infraction d'opposition aux actes de l'autorité (art. 286
CP). A cet égard, la Chambre d'accusation a relevé que l'intéressé avait
individuellement décampé à pied à travers champs, alors même que l'intervention
de la police lui était clairement, d'emblée et manifestement reconnaissable
comme un acte d'autorités auxquelles il était tenu de se soumettre.
Ces éléments constituent un faisceau d'indices suffisant de la culpabilité du
recourant, étant rappelé que c'est au juge du fond et non à celui de la
détention qu'il incombera d'apprécier notamment la valeur probante de la
déclaration de B.________.

4.
Le recourant ne conteste pas l'existence d'un risque de récidive. Il se
contente d'avancer que "les éléments retenus par la Chambre d'accusation pour
fonder le risque de réitération reposent sur des infractions pour lesquelles il
n'est pas inculpé". Il est dès lors douteux que le recours satisfasse aux
exigences de motivation posées par l'art. 42 al. 2 LTF. Peu importe au
demeurant puisque le risque de récidive ne saurait être nié pour les motifs
suivants.

4.1 Selon la jurisprudence, le maintien en détention se justifie s'il y a lieu
de présumer, avec une certaine vraisemblance, qu'il existe un danger de
récidive. Il convient de faire preuve de retenue dans l'appréciation d'un tel
risque: le maintien en détention ne peut se justifier pour ce motif que si le
pronostic est très défavorable et que les délits dont l'autorité redoute la
réitération sont graves (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62, 361 consid. 5 p. 367;
124 I 208 consid. 5 p. 213; 123 I 268 consid. 2c p. 270 et les arrêts cités).

4.2 En l'occurrence, l'intéressé a déjà fait l'objet de cinq condamnations,
notamment par le Tribunal correctionnel de Lyon, pour recel de bien provenant
d'un vol, vol avec violence et provocation directe à la rébellion. Il a déjà
subi six mois d'emprisonnement. La Chambre d'accusation a également retenu que
A.________ était recherché en Suisse pour un vol remontant à 2006 et avait été
signalé, la même année, à Genève pour s'être trouvé à bord d'un véhicule qui
comportait un important matériel pouvant servir à la commission d'infractions.
Dans ces conditions, le risque de récidive doit être considéré comme concret.

5.
Invoquant le principe de la proportionnalité, le recourant soutient en
substance que la durée de la détention est excessive au regard de la peine
encourue.

5.1 En vertu des art. 31 al. 3 Cst. et 5 par. 3 CEDH, toute personne qui est
mise en détention préventive a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable
ou d'être libérée pendant la procédure pénale. Une durée excessive de la
détention constitue une limitation disproportionnée de ce droit fondamental,
qui est notamment violé lorsque la durée de la détention préventive dépasse la
durée probable de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre.
Dans l'examen de la proportionnalité de la durée de la détention, il y a lieu
de prendre en compte la gravité des infractions faisant l'objet de
l'instruction. Le juge peut maintenir la détention préventive aussi longtemps
qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à
laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation (ATF 132 I 21
consid. 4.1 p. 27; 128 I 149 consid. 2.2 p. 151; 107 Ia 256 consid. 2 et 3 p.
257 ss et les références). Il convient d'accorder une attention particulière à
cette limite, car le juge de l'action pénale pourrait être enclin à prendre en
considération dans la fixation de la peine la durée de la détention préventive
à imputer selon l'art. 51 CP (ATF 133 I 168 consid. 4.1 p. 170 et les arrêts
cités). Selon la jurisprudence concordante du Tribunal fédéral et de la Cour
européenne des droits de l'homme, la proportionnalité de la durée de la
détention doit être examinée au regard de l'ensemble des circonstances
concrètes du cas d'espèce (ATF 133 I 168 consid. 4.1 p. 170 s; 132 I 21 consid.
4.1 p. 28; 124 I 208 consid. 6 p. 215; 123 I 268 consid. 3a p. 273 et les
références).

5.2 En l'espèce, la durée de la détention avant jugement subie par le recourant
atteignait environ trente jours au moment où la décision attaquée a été rendue.
Si le recourant est reconnu coupable d'actes préparatoires délictueux en vue de
commettre un brigandage, la peine privative de liberté encourue est de cinq ans
au plus (art. 260bis CP). Le recourant ne peut se contenter de prendre en
compte uniquement la durée maximale de la peine privative de liberté pour
l'infraction d'opposition aux actes d'autorité (art. 286 CP). Dans ces
conditions et vu notamment les antécédents de l'intéressé, il y a lieu de
considérer que la durée de la détention préventive déjà subie est encore
compatible avec la peine privative de liberté à laquelle l'inculpé est exposé
concrètement en cas de condamnation, de sorte que la Chambre d'accusation a, en
l'état, correctement nié une violation du principe de la proportionnalité. Les
autorités cantonales devront toutefois faire en sorte que le recourant soit
jugé dans les meilleurs délais, dans la mesure où l'instruction paraît toucher
à sa fin.

6.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Dès lors que le recourant est dans
le besoin et que ses conclusions ne paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec,
l'assistance judiciaire doit lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le
recourant requiert la désignation de Me Yvan Jeanneret en qualité d'avocat
d'office. Il y a lieu de faire droit à cette requête et de fixer d'office les
honoraires de l'avocat, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral
(art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires
(art. 64 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise.

3.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

4.
Me Yvan Jeanneret est désigné comme défenseur d'office du recourant et ses
honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à 1'500
francs.

5.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant ainsi qu'au
Procureur général et à la Chambre d'accusation de la Cour de justice du canton
de Genève.

Lausanne, le 15 décembre 2009
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Féraud Tornay Schaller