Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.348/2009
Zurück zum Index I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2009
Retour à l'indice I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 2009


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_348/2009

Arrêt du 14 décembre 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Raselli et Fonjallaz.
Greffier: M. Rittener.

Parties
A.________, représenté par Me Philippe Degoumois, avocat,
recourant,

contre

Ministère public I du Jura bernois-Seeland,
Procureur 3, 2740 Moutier.

Objet
détention préventive,

recours contre la décision du Juge de l'arrestation 3 de l'Arrondissement
judiciaire II Bienne-Nidau, du 5 novembre 2009.

Faits:

A.
A.________ et B.________ ont été arrêtés le 11 mars 2009 par la police
fribourgeoise, pour tentative de vol par effraction, vol d'usage et vol de
plaques d'immatriculation. Une procédure pénale ayant été ouverte précédemment
dans le canton de Berne, le dossier a été transmis au Juge d'instruction 6 du
Service des Juges d'instruction I du Jura bernois - Seeland (ci-après: le juge
d'instruction). L'action publique a été étendue à la prévention de vols en
bande et par métier. Le 13 juin 2009, A.________ a requis sa mise en liberté.
Le Juge de l'arrestation 3 de l'Arrondissement judiciaire II Bienne - Nidau
(ci-après: le juge de l'arrestation) a rejeté cette requête par décision du 20
mai 2009. Il a considéré qu'il existait des soupçons sérieux à l'encontre du
prévenu et que son maintien en détention était motivé par les risques de fuite
et de collusion, la durée de la détention respectant en outre le principe de la
proportionnalité.
Le 17 août 2009, le juge d'instruction a proposé au Procureur 3 du Ministère
public I du Jura bernois-Seeland de renvoyer A.________ et B.________ au
Tribunal d'arrondissement I pour vols et tentative de vol commis en bande et
par métier, dommages à la propriété, violation des règles de la circulation
routière, vol d'usage, usage abusif de plaques de contrôle et infractions à la
loi fédérale sur les télécommunications. Le 19 août 2009, le procureur a donné
son accord pour le renvoi. Par décision du 2 septembre 2009, la Chambre
d'accusation de la Cour suprême du canton de Berne a accordé au tribunal
d'arrondissement une prolongation de délai au 17 février 2010 pour débuter
l'audience des débats.

B.
Le 28 octobre 2009, A.________ a présenté une nouvelle requête de mise en
liberté, que le juge de l'arrestation a rejetée par décision du 5 novembre
2009. En substance, ce magistrat a considéré qu'il existait des motifs sérieux
de soupçonner le prévenu d'avoir commis un crime ou un délit, que le danger de
collusion subsistait malgré la clôture de l'instruction et qu'un risque de
fuite concret imposait le maintien de l'intéressé en détention. La durée de la
détention préventive était en outre conforme au principe de la
proportionnalité, aucune mesure de substitution n'étant envisageable en
l'espèce.

C.
A.________ recourt contre cette décision et demande au Tribunal fédéral de
l'annuler et d'ordonner sa mise en liberté, assortie le cas échéant de mesures
de substitution, subsidiairement de renvoyer la cause à l'autorité cantonale
compétente pour organiser sa mise en liberté. Il se plaint implicitement d'une
atteinte à sa liberté personnelle et invoque une mauvaise application des
règles cantonales régissant la détention avant jugement. Il requiert en outre
l'assistance judiciaire. Le ministère public et le juge de l'arrestation ne se
sont pas déterminés.

Considérant en droit:

1.
Les décisions relatives au maintien en détention avant jugement sont des
décisions en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF (cf. ATF 133 I 270
consid. 1.1 p. 273; Message concernant la révision totale de l'organisation
judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4111). Formé en temps utile
(art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale
(art. 80 LTF) et qui touche le recourant dans ses intérêts juridiquement
protégés (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF), le recours est recevable.

2.
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté
personnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, que si elle repose
sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art
176 du code de procédure pénale bernois du 15 mars 1995 (CPP/BE; RSB 321.1).
Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de
la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270).
Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un
danger pour la sécurité ou l'ordre public, par un risque de fuite ou par les
besoins de l'instruction (cf. art. 176 al. 2 CPP/BE). La gravité de
l'infraction - et l'importance de la peine encourue - n'est, à elle seule, pas
suffisante (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70).
Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des
charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 5 par. 1
let. c CEDH; ATF 116 Ia 143 consid. 3 p. 144 ss; art. 176 al. 2 in initio CPP/
BE). S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunal
fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de
l'appréciation des preuves, revue sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF
123 I 268 consid. 2d p. 271). L'autorité cantonale dispose ainsi d'une grande
liberté dans l'appréciation des faits (ATF 114 Ia 281 consid. 3 p. 283; 112 Ia
161 consid. 3b p. 162).

3.
Le recourant mentionne en premier lieu qu'il conteste les faits qui lui sont
reprochés, sans toutefois remettre en cause explicitement l'existence de
charges suffisantes à son encontre. Cette condition de la détention préventive
apparaît au demeurant réalisée. L'autorité intimée relève en effet, sans être
contredite sur ce point, que le coaccusé du recourant le met en cause, que les
intéressés ont été interpellés en flagrant délit et que du "matériel
professionnel" destiné à faciliter des vols a été découvert en leur possession.
Il existe donc un faisceau d'indices suffisant permettant de soupçonner le
recourant d'avoir commis des infractions, étant précisé qu'il n'appartient pas
au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge
et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause
le prévenu (cf. ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; Gérard Piquerez, Traité de
procédure pénale suisse, 2e éd., 2006, p. 540 et les références).

4.
Le recourant conteste par ailleurs l'existence d'un risque de fuite.

4.1 Le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères
tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens
avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font
apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable
(ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et la jurisprudence citée). La gravité de
l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la
détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison
de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60 consid. 3a
p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70; 108 Ia 64 consid. 3 p. 67).

4.2 En l'occurrence, il n'est pas contesté que le recourant est de nationalité
française et qu'il a en France toutes ses relations familiales et sociales,
voire professionnelles. Il n'allègue d'ailleurs aucune attache particulière
avec la Suisse, de sorte qu'on ne voit pas ce qui pourrait le dissuader de
quitter le pays pour se soustraire à la justice. En cas de libération, il
indique d'ailleurs vouloir se rendre en France, ce qui rend d'autant moins
vraisemblable sa comparution à l'audience de jugement. La décision querellée
relève en outre que le tribunal d'arrondissement devant lequel le recourant est
renvoyé est compétent pour prononcer des peines privatives de liberté dépassant
une année, ce qui n'est pas sans incidence sur le risque de fuite. En
définitive, faute d'éléments permettant de remettre en cause l'appréciation de
l'autorité intimée, il y a lieu de retenir que ce risque est réalisé.

4.3 Conformément au principe de la proportionnalité, lorsque le maintien en
détention est motivé uniquement par le risque de fuite, il convient en principe
d'examiner les possibilités de mettre en oeuvre d'autres solutions moins
dommageables que la détention (règle de la nécessité; ATF 130 II 425 consid.
5.2 p. 438; 126 I 219 consid. 2c p. 222 et les arrêts cités; cf. également art.
5 par. 3, dernière phrase, CEDH). Cela étant, le juge de l'arrestation a
considéré que les mesures de substitution évoquées par le recourant n'étaient
pas de nature à pallier le risque de fuite. En particulier, l'obligation de se
présenter à intervalles réguliers auprès d'une autorité suisse n'était pas
réaliste, l'intéressé étant domicilié à 150 km de la frontière et sa
nationalité française faisant obstacle à sa remise en détention en cas de non-
respect de cette mesure. Le recourant se borne à répéter qu'il est disposé à se
présenter auprès d'un service administratif suisse à des intervalles
déterminés, sans aucunement contester l'appréciation susmentionnée. Celle-ci
n'apparaissant pas dénuée de fondement, le recourant peut y être renvoyé.

5.
Dès lors que le maintien en détention du recourant est justifié par un danger
de fuite, il n'est pas nécessaire d'examiner s'il peut aussi être motivé par un
risque de collusion, comme le retient la décision attaquée.

6.
Pour le surplus, le recourant se plaint d'une violation du principe de la
proportionnalité, en raison d'une durée excessive de la détention préventive.

6.1 En vertu des art. 31 al. 3 Cst. et 5 par. 3 CEDH, toute personne qui est
mise en détention préventive a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable
ou d'être libérée pendant la procédure pénale. Une durée excessive de la
détention constitue une limitation disproportionnée de ce droit fondamental,
qui est notamment violé lorsque la durée de la détention préventive dépasse la
durée probable de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre.
Dans l'examen de la proportionnalité de la durée de la détention, il y a lieu
de prendre en compte la gravité des infractions faisant l'objet de
l'instruction. Le juge peut maintenir la détention préventive aussi longtemps
qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à
laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation (ATF 133 I 168
consid. 4.1 p. 170; 132 I 21 consid. 4.1 p. 27; 128 I 149 consid. 2.2 p. 151;
107 Ia 256 consid. 2 et 3 p. 257 ss et les références).

6.2 En l'espèce, le recourant est en détention depuis le 11 mars 2009. Il a
donc subi à ce jour un peu plus de neuf mois de détention avant jugement. Il
lui est notamment reproché des vols et tentative de vol commis en bande et par
métier, infractions passibles d'une peine privative de liberté de dix ans au
plus. Pour ces faits, le recourant est renvoyé devant un tribunal compétent
pour prononcer des peines privatives de liberté dépassant une année. Le juge de
l'arrestation relève en outre, sans être contredit sur ce point, que les
antécédents du prévenu démontrent qu'il est un habitué en matière de vols et de
recel. Ainsi, compte tenu du nombre et de la nature des infractions en cause -
l'une d'elle portant sur le cambriolage d'une pharmacie au cours duquel plus de
2'000 articles d'une valeur totale de 100'000 fr. ont été volés - des
circonstances aggravantes du vol en bande et par métier, ainsi que des mauvais
antécédents du recourant, il y a lieu de constater que la durée de la détention
préventive déjà subie est encore compatible avec la peine privative de liberté
à laquelle l'intéressé est exposé concrètement en cas de condamnation.

7.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Dès lors que le recourant est dans
le besoin et que ses conclusions ne paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec,
l'assistance judiciaire doit lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le
recourant requiert la désignation de Me Philippe Degoumois en qualité d'avocat
d'office. Il y a lieu de faire droit à cette requête et de fixer d'office les
honoraires de l'avocat, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral
(art. 64 al. 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise.

3.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

4.
Me Philippe Degoumois, avocat à Moutier, est désigné comme avocat d'office du
recourant et ses honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral, sont
fixés à 1'500 fr.

5.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Juge de
l'arrestation 3 de l'Arrondissement judiciaire II Bienne - Nidau et au
Procureur 3 du Ministère public I du Jura bernois-Seeland.

Lausanne, le 14 décembre 2009
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Rittener