Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.328/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_328/2009

Arrêt du 5 février 2010
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Eusebio.
Greffier: M. Parmelin.

Parties
A.________, représentée par Me Jacques Barillon, avocat,
recourante,

contre

Procureur général de la République et canton de Genève, place du Bourg-de-Four
1, case postale 3565, 1211 Genève 3.

Objet
procédure pénale; refus d'ordonner à l'expert l'apport de documents à la
procédure,

recours contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation de la République et
canton de Genève du 14 octobre 2009.

Considérant en fait et en droit:

1.
Le 10 octobre 2005, le Service de protection de la jeunesse de la République et
canton de Genève a dénoncé pénalement les époux A.________ et B.________ en
raison de suspicion de maltraitance envers leurs enfants X.________ et
Y.________, nés le 18 mai 2005.
Le 10 novembre 2006, le Juge d'instruction en charge de la procédure a chargé
le Dr C.________ en qualité d'expert judiciaire de déterminer l'origine et la
date des lésions subies par chacun des enfants et de faire toutes observations
utiles pour l'instruction. Ce dernier a rendu son rapport le 28 mai 2008. Il
concluait que les enfants présentaient des traumatismes infligés et non
accidentels, survenus dans un délai de trois jours à deux semaines avant leur
hospitalisation du 28 juillet 2005. L'expert a confirmé les conclusions de son
rapport lors de son audition devant le juge d'instruction le 10 octobre 2008.
Le 27 janvier 2009, les époux A.________ et B.________ ont été inculpés de
lésions corporelles simples, voire de lésions corporelles graves, sur leurs
enfants, ainsi que d'exposition et de violation du devoir d'assistance et
d'éducation.
Le 23 avril 2009, ils ont contesté le contenu et les conclusions de l'expertise
et déclaré ne pas souhaiter s'exprimer sur les faits de la procédure avant que
le Dr C.________ n'ait été entendu. L'audition de l'expert a été fixée au 14
septembre 2009.
Le 8 juillet 2009, A.________ a présenté une demande, appuyée par son mari,
tendant à l'apport à la procédure des articles médicaux cités dans la
bibliographie reproduite en annexe au rapport d'expertise du 28 mai 2008 afin
de se déterminer en connaissance de cause sur les conclusions de l'expert.
Le juge d'instruction a refusé de donner suite à cette requête au terme d'une
décision rendue le 10 juillet 2009 que la Chambre d'accusation de la République
et canton de Genève (ci-après: la Chambre d'accusation) a confirmée sur recours
de la prévenue par ordonnance du 14 octobre 2009.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler cette ordonnance et d'ordonner au Dr C.________ de
produire à la procédure pénale pendante les articles cités dans la
bibliographie jointe à son rapport d'expertise du 28 mai 2008. Elle conclut à
titre subsidiaire au renvoi de l'affaire à la Chambre d'accusation, voire au
juge d'instruction pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
La Chambre d'accusation se réfère aux considérants de sa décision. Le Procureur
général de la République et canton de Genève conclut au rejet du recours.

2.
Seule la voie du recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF est
ouverte en l'occurrence. Le refus, confirmé en dernière instance cantonale,
d'ordonner l'apport à la procédure pénale des articles et autres ouvrages
médicaux cités par l'expert dans son rapport est une décision incidente contre
laquelle le recours en matière pénale n'est recevable qu'aux conditions de
l'art. 93 al. 1 LTF. La recourante ne prétend pas à juste titre que l'admission
du recours pourrait conduire immédiatement à une décision finale qui
permettrait d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b). Elle
ne pourrait donc s'en prendre à cette décision que si elle l'exposait à un
préjudice irréparable (let. a); il doit s'agir d'un dommage de nature
juridique, qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final
ou une autre décision qui lui soit favorable (ATF 135 I 261 consid. 1.2 p.
263). Cette réglementation est fondée sur des motifs d'économie de la
procédure; en tant que cour suprême, le Tribunal fédéral doit en principe ne
s'occuper qu'une seule fois d'un procès, et cela seulement lorsqu'il est
certain que la partie recourante subit effectivement un dommage définitif (ATF
135 I 261 consid. 1.2 p. 263). Les décisions relatives à la conduite de la
procédure et à l'administration des preuves ne sont en principe pas de nature à
causer un dommage juridique irréparable (ATF 134 III 188 consid. 2.3 p. 191; 99
Ia 437 consid. 1 p. 438). La règle comporte toutefois des exceptions. Il en va
notamment ainsi lorsque le refus porte sur des moyens de preuve qui risquent de
disparaître et qui visent des faits décisifs non encore élucidés ou quand la
sauvegarde de secrets est en jeu (arrêt 4P.117/1998 du 26 octobre 1998 consid.
1b/bb/aaa in SJ 1999 I 186).
La recourante ne prétend pas se trouver dans l'une ou l'autre de ces
hypothèses. Elle voit néanmoins un préjudice irréparable dans le fait que le
refus de verser à la procédure pénale les articles et autres ouvrages médicaux
auxquels se réfère le Dr C.________ à l'appui de son expertise prétériterait de
manière définitive son droit à un procès équitable et ses droits de la défense
en la privant de la possibilité de discuter de manière objective et efficace
les conclusions du rapport d'expertise lors de l'audition de l'expert devant le
juge d'instruction. Sur les vingt-trois articles auxquels le Dr C.________ fait
référence dans son rapport, huit ne sont pas disponibles à la bibliothèque de
la Faculté de Médecine de l'Université de Genève. Il n'y a pas lieu d'examiner
s'il est possible de se procurer les articles médicaux manquants d'une autre
manière, par exemple auprès de la bibliothèque de la faculté de médecine d'une
autre université ou via internet. La recourante pourra en effet renouveler sa
requête tendant à ce que l'expert judiciaire soit entendu, après qu'elle ait pu
prendre connaissance des articles médicaux mentionnés dans le rapport
d'expertise, auprès du Président de l'autorité de jugement puis aux débats si
elle devait être renvoyée en jugement à raison des infractions pour lesquelles
elle a été inculpée et si elle estime que l'audition de l'expert intervenue
durant l'instruction n'a pas respecté les garanties déduites du droit d'être
entendue ou a violé d'une autre manière les droits de la défense parce qu'elle
n'a pas été en mesure de discuter en connaissance de cause les conclusions de
l'expert faute de disposer de la documentation sur laquelle celui-ci s'est
fondé pour étayer son rapport (cf. art. 19 et 294 al. 1 du Code de procédure
pénale genevois). Un accueil favorable à sa requête mettrait fin au préjudice
allégué. Si celle-ci devait une nouvelle fois être rejetée, la recourante
pourra dénoncer une violation du droit à un procès équitable ou des droits de
la défense à l'occasion d'un recours contre un éventuel jugement de
condamnation dans la mesure où l'expertise devait avoir eu une incidence
décisive sur celui-ci. La prolongation de la procédure qui pourrait en résulter
est un préjudice de fait, insuffisant pour admettre que le Tribunal fédéral
doive entrer en matière sur le présent recours (cf. arrêt 1B_164/2007 du 23
octobre 2007, dans lequel la cour de céans a refusé de voir un préjudice
irréparable dans l'impossibilité pour le prévenu de poser des questions à un
expert psychiatre au stade de l'instruction en raison de sa convocation tardive
à l'audience d'audition).
Cela étant, l'ordonnance de la Chambre d'accusation, qui confirme le refus du
juge d'instruction d'ordonner la production au dossier des articles médicaux
auxquels se réfère le Dr C.________ dans son rapport d'expertise, ne peut pas
faire l'objet d'un recours immédiat au Tribunal fédéral, faute d'un préjudice
irréparable.

3.
Le recours doit par conséquent être déclaré irrecevable aux frais de la
recourante qui succombe (art. 65 et 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, ainsi qu'au
Procureur général et à la Chambre d'accusation de la République et canton de
Genève.

Lausanne, le 5 février 2010
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Parmelin