Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.321/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_321/2009

Arrêt du 2 décembre 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Eusebio.
Greffière: Mme Tornay Schaller.

Parties
A.________, représenté par Me Josiane Stickel-Cicurel, avocate,
recourant,

contre

Ministère public du canton de Genève, 1204 Genève.

Objet
refus de mise en liberté provisoire,

recours contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation de la Cour de justice du
canton de Genève, du 9 octobre 2009.

Faits:

A.
A.________, ressortissant péruvien, est en détention préventive depuis le 16
août 2005, date à laquelle le Juge d'instruction du canton de Genève (ci-après:
le Juge d'instruction) l'a inculpé de lésions corporelles graves (art. 122 CP),
de lésions corporelles simples (art. 123 CP), de menaces (art. 180 CP), d'actes
d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 CP) et de viols (art. 190 CP). Il lui
est notamment reproché d'avoir abusé sexuellement de B.________, née en 1989 et
alors âgée de 13 ans. Ces atteintes à l'intégrité sexuelle ont été commises
pendant de nombreuses années et ont conduit à des grossesses, une fille étant
par ailleurs née de ces relations en mai 2004.
Les inculpations complémentaires de séquestration et d'enlèvement (art. 183 et
184 CP), puis de contrainte sexuelle (art. 189 CP), de viol (art. 190 CP), de
séquestration et d'enlèvement aggravé (art. 183 et 184 CP) furent prononcées à
l'encontre de A.________, respectivement le 27 septembre 2007 et le 8 février
2008.
Le 8 octobre 2008, A.________ fut inculpé d'assassinat (art. 112 CP),
subsidiairement de meurtre (art. 111 CP). Le samedi 6 février 1999 entre 16
heures et 18 heures, il aurait tué C.________, portée disparue depuis ce jour.
La prénommée était son amie intime avec laquelle il a eu une fille née en 1998.
La détention préventive de A.________ a été régulièrement prolongée et ses
différentes demandes de mise en liberté provisoire rejetées.

B.
Le 8 octobre 2009, A.________ a formé une nouvelle demande de mise en liberté
provisoire en proposant une caution de 30'000 francs, le dépôt du passeport et
la présentation régulière à un poste de police, voire toutes autres mesures que
la Chambre d'accusation de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la
Chambre d'accusation) jugerait utiles. Par ordonnance du 9 octobre 2009, la
Chambre d'accusation a rejeté cette demande. Elle a considéré en substance que
les présomptions de culpabilité étaient suffisantes, qu'il existait des risques
de collusion et de fuite, et que la prolongation de la détention provisoire
pour une durée de trois mois, nécessaire pour mener à terme une quatrième
expertise psychiatrique, était encore compatible avec le principe de la
proportionnalité.

C.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande
principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'ordonnance du 9 octobre 2009 et
d'ordonner sa mise en liberté moyennant une caution de 30'000 francs, le dépôt
de son passeport et toute autre mesure apte à garantir sa représentation aux
actes judiciaires. Il requiert en outre l'assistance judiciaire.
Dans ses observations, le Procureur général du canton de Genève conclut au
rejet du recours et fait référence à un courrier du Juge d'instruction du 12
novembre 2009, dans lequel il est mentionné que celui-ci entend clôturer la
procédure "si possible avant la fin de l'année". La Chambre d'accusation se
réfère aux considérants de sa décision. Dans ses déterminations
complémentaires, le recourant persiste dans ses conclusions.

Considérant en droit:

1.
Les décisions relatives au maintien en détention préventive sont des décisions
en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF (cf. ATF 133 I 270 consid. 1.1
p. 273).
Faute de se rapporter à l'objet de la contestation, lequel consiste en l'espèce
dans le refus de la mise en liberté provisoire du recourant, le grief relatif à
la violation de la loi fédérale du 20 juin 2003 sur l'investigation secrète
(LFIS; RS 312.8) est irrecevable.
Pour le surplus, formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision
prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et qui touche le recourant
dans ses intérêts juridiquement protégés (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF),
le recours en matière pénale est recevable.

2.
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté
personnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, que si elle repose
sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art.
34 du code de procédure pénale du canton de Genève du 29 septembre 1977 (CPP/
GE; RSG E 4 20). Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et
respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; ATF 123
I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté
doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un
danger de collusion et de réitération (cf. art. 34 let. a à c CPP/GE). La
gravité de l'infraction et l'importance de la peine encourue ne sont, à elles
seules, pas suffisantes (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p.
70). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé
des charges suffisantes (art. 5 par. 1 let. c CEDH; ATF 116 Ia 144 consid. 3;
art. 34 in initio CPP/GE). S'agissant d'une restriction grave à la liberté
personnelle, le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve
toutefois de l'appréciation des preuves, revue sous l'angle de l'arbitraire
(ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271).

3.
En l'espèce, le recourant conteste l'existence d'indices concrets de sa
culpabilité, s'agissant de la disparition de C.________.

3.1 Pour qu'une personne soit placée en détention préventive, il doit exister à
son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité,
c'est-à-dire des raisons plausibles de la soupçonner d'avoir commis une
infraction. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention
préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des
soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers
temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître
vraisemblable après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables
(ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; Gérard Piquerez, Traité de procédure pénale
suisse, 2e éd., 2006, p. 540 et les références).
Appelé à se prononcer sur la constitutionnalité d'une décision de maintien en
détention, le Tribunal fédéral n'a pas à procéder à une pesée complète des
éléments à charge et à décharge, ni à apprécier la crédibilité des éléments de
preuve mettant en cause le condamné. Il doit uniquement examiner s'il existe
des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure, c'est-à-dire
des raisons plausibles de soupçonner l'accusé d'avoir commis une infraction
(ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; art. 34 in initio CPP/GE).

3.2 En l'occurrence, le recourant ne conteste pas l'existence d'indices de sa
culpabilité quant aux infractions de lésions corporelles graves, de lésions
corporelles simples, de menaces, d'actes d'ordre sexuel avec des enfants, de
viols, de contrainte sexuelle, de séquestration et d'enlèvement aggravé. Ces
soupçons concrets de culpabilité, fondés notamment sur des expertises
d'analyses ADN, suffisent pourtant à justifier le maintien en détention
préventive du prénommé, étant rappelé que c'est au juge du fond et non à celui
de la détention qu'il incombera d'apprécier sa culpabilité. Dans ces
conditions, le fait que le recourant conteste l'infraction d'assassinat ne
suffit pas à affaiblir les sérieux soupçons de culpabilité qui reposent sur
lui. Ce grief tombe donc à faux.

4.
Le recourant conteste également l'existence d'un risque de récidive. Or, dans
la décision attaquée, la Chambre d'accusation n'a ni examiné ce risque, ni même
énoncé les faits à la base de celui-ci. Dès lors, faute de se rapporter à
l'objet de la contestation, ce grief paraît irrecevable. Peu importe cependant,
car le recours est de toute façon mal fondé sur ce point:

4.1 Selon la jurisprudence, le maintien en détention se justifie s'il y a lieu
de présumer, avec une certaine vraisemblance, qu'il existe un danger de
récidive. Il convient de faire preuve de retenue dans l'appréciation d'un tel
risque: le maintien en détention ne peut se justifier pour ce motif que si le
pronostic est très défavorable et que les délits dont l'autorité redoute la
réitération sont graves (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62, 361 consid. 5 p. 367;
124 I 208 consid. 5 p. 213; 123 I 268 consid. 2c p. 270 et les arrêts cités).
La jurisprudence se montre toutefois moins stricte dans l'exigence de
vraisemblance lorsqu'il s'agit de délits de violence graves ou de délits
sexuels, car le risque à faire courir aux victimes potentielles est alors
considéré comme trop important; en pareil cas, il convient de tenir compte de
l'état psychique du prévenu, de son imprévisibilité ou de son agressivité (ATF
123 I 268 consid. 2e p. 271).

4.2 En l'occurrence, les actes reprochés au recourant sont particulièrement
graves, s'agissant notamment d'abus sexuels, de viols commis sur une fille
alors âgée de treize ans. Commises pendant de nombreuses années, ces atteintes
à l'intégrité sexuelle ont conduit à des grossesses. De plus, les trois experts
psychiatres ont tous retenu une responsabilité entière de l'inculpé. Ils ont
tous conclu à un risque de réitération important et à un danger pour la
sécurité publique, en raison du déni de l'inculpé par rapport aux actes qui lui
sont reprochés, de son absence de remise en question et de sa propension à
considérer les femmes comme des objets destinés uniquement à satisfaire ses
désirs sexuels.
Dans ces circonstances et vu la gravité des actes reprochés au recourant, le
fait que l'actuelle épouse du prévenu déclare qu'elle lui fait confiance et
qu'elle est disposée à continuer la vie commune avec lui, n'est pas suffisant
pour pallier le risque de récidive. C'est également en vain que le recourant se
prévaut de l'absence d'antécédents relatifs aux infractions faisant l'objet du
présent procès. De même, l'argument selon lequel "jusqu'au jour du jugement il
aura une épée de Damoclès sur sa tête sachant que la moindre de ses incartades
risquera de mettre à néant toute son argumentation le jour du jugement", tombe
à faux, en raison du risque de fuite (cf. consid. 5 ci-dessous). Par
conséquent, l'existence d'un risque de réitération est établie avec
suffisamment de vraisemblance.

5.
Le recourant soutient encore que son maintien en détention ne peut pas se
fonder sur l'existence d'un risque de fuite. Il allègue de surcroît que ledit
risque aurait pu être contenu par des mesures moins incisives que la détention,
à savoir la saisie de son passeport, l'obligation de se présenter régulièrement
à un poste de police ou une libération sous caution.
Dès lors que le maintien en détention du recourant est justifié par un danger
de récidive, il n'est en principe pas nécessaire d'examiner s'il peut aussi
être motivé par un risque de fuite. Quoi qu'il en soit, l'existence de ce
risque ne saurait être niée, pour les motifs suivants.

5.1 Le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères
tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens
avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font
apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable
(ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et la jurisprudence citée). La gravité de
l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la
détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison
de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60 consid. 3a
p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70, 108 Ia 64 consid. 3 p. 67).
Selon l'art. 155 CPP/GE, la mise en liberté du prévenu peut être accordée
moyennant des sûretés ou obligations. Cette disposition correspond à l'art. 5 §
3 dernière phrase CEDH, selon lequel le prévenu a le droit d'être libéré s'il
lui est possible de fournir des sûretés propres à garantir sa présence aux
débats et, le cas échéant, sa soumission au jugement, lorsque l'incarcération
n'a plus d'autre justification que le danger de fuite. La libération moyennant
sûretés implique un examen approfondi, qui demande une certaine collaboration
de la part du prévenu, dès lors que le caractère approprié de la garantie doit
être apprécié notamment au regard des ressources du prévenu, de ses liens avec
des personnes pouvant lui servir de caution, de la confiance qu'on peut avoir
que la perspective de perdre le montant agira comme un frein suffisamment
puissant pour écarter toute velléité de fuite (ATF 105 Ia 186 consid. 4a p.
187, citant l'arrêt Cour européenne des droits de l'homme Neumeister contre
Autriche, du 27 juin 1968, série A, vol. 7, par. 14; cf. arrêt 1P.165/2006 du
19 avril 2006 consid. 3.2.1, in SJ 2006 I p. 395).
Le détenu à titre préventif n'a pas un droit inconditionnel fondé sur l'art. 5
§ 3 CEDH à être libéré moyennant le versement de sûretés lorsque seul le risque
de fuite motive le maintien en détention; le juge de la détention peut aussi,
en pareil cas, renoncer à ordonner une telle mesure lorsqu'il a la conviction
qu'elle ne suffira pas à garantir la présence de l'inculpé aux débats et, le
cas échéant, sa soumission au jugement (cf. Sylva Fisnar, Ersatzanordnungen für
Untersuchungshaft und Sicherheitshaft in zürcherischen Strafprozess, thèse
Zurich 1997, p. 75 et les références citées). Pour apprécier la force
dissuasive d'un dépôt de sûretés sur les velléités de fuite de la personne
concernée, le juge de la détention jouit d'un certain pouvoir d'appréciation,
eu égard à sa maîtrise complète du dossier (arrêt 1B_126/2008 du 2 juin 2008
consid. 3.1).

5.2 En l'espèce, il est vrai que le recourant peut se prévaloir de liens avec
la Suisse: il réside dans ce pays depuis plus de vingt ans, il est titulaire
d'un permis C, son épouse actuelle et ses dix enfants - dont sept habitent
encore avec son ex-épouse - vivent à Genève. Cela étant, l'intéressé a
également des liens avec l'étranger, puisqu'il est de nationalité péruvienne,
que sa mère vit au Pérou et qu'il a voyagé à plusieurs reprises en Amérique
latine, alors même qu'il était sans travail depuis 2003. De plus, il a envoyé
au Honduras B.________, alors âgée de quinze ans, pour l'y faire accoucher. Les
liens du recourant avec la Suisse doivent en outre être mis en balance avec la
gravité des actes reprochés et la peine privative de liberté importante qu'il
encourt et qui pourrait l'inciter à faire certains sacrifices pour y échapper.
Au demeurant, la somme de 30'000 francs, offerte comme sûretés, est faible au
regard de la gravité des infractions en cause et de la peine encourue en cas de
condamnation. S'ajoute à cela le fait que les indications données par le
recourant sur l'origine des fonds et sur la situation financière de ses soeurs
- qui fourniraient le tiers de la caution - sont lacunaires et ne permettent
pas d'admettre que la perspective de perdre cette somme d'argent agira comme un
frein suffisamment puissant pour écarter toute velléité de fuite.
Quant aux autres mesures évoquées par l'intéressé, elles apparaissent
clairement insuffisantes au regard de l'intensité du risque de fuite. En effet,
la saisie des papiers d'identité et l'obligation de se présenter régulièrement
à un poste de police n'empêchent pas une personne dans la situation du
recourant de s'enfuir à l'étranger.
Ainsi, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la Chambre d'accusation peut
être suivie lorsqu'elle considère que le maintien en détention est justifié par
un risque de fuite qui demeure concret, l'offre d'une caution de 30'000 francs
ainsi que le dépôt des documents d'identité n'étant manifestement pas propres à
limiter ce risque de façon déterminante.

6.
Le maintien de la détention préventive étant justifié par des risques de
récidive et de fuite, il n'y a pas lieu d'examiner si cette mesure s'impose
également en raison d'un risque de collusion, comme l'a retenu la Chambre
d'accusation.

7.
Le recourant se plaint ensuite d'une violation du principe de la
proportionnalité, au motif que la durée de la détention serait excessive au
regard de la peine qu'il encourt. Il prétend que seule sera retenue à sa charge
l'infraction d'actes d'ordre sexuel avec les enfants (art. 187 CP), laquelle
est sanctionnée par une peine privative de liberté de cinq ans au plus.

7.1 En vertu des art. 31 al. 3 Cst. et 5 par. 3 CEDH, toute personne qui est
mise en détention préventive a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable
ou d'être libérée pendant la procédure pénale. Une durée excessive de la
détention constitue une limitation disproportionnée de ce droit fondamental,
qui est notamment violé lorsque la durée de la détention préventive dépasse la
durée probable de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre.
Dans l'examen de la proportionnalité de la durée de la détention, il y a lieu
de prendre en compte la gravité des infractions faisant l'objet de
l'instruction. Le juge peut maintenir la détention préventive aussi longtemps
qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à
laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation (ATF 132 I 21
consid. 4.1 p. 27; 128 I 149 consid. 2.2 p. 151; 107 Ia 256 consid. 2 et 3 p.
257 ss et les références). Il convient d'accorder une attention particulière à
cette limite, car le juge de l'action pénale pourrait être enclin à prendre en
considération dans la fixation de la peine la durée de la détention préventive
à imputer selon l'art. 51 CP (ATF 133 I 168 consid. 4.1 p. 170 et les arrêts
cités). Selon la jurisprudence concordante du Tribunal fédéral et de la Cour
européenne des droits de l'homme, la proportionnalité de la durée de la
détention doit être examinée au regard de l'ensemble des circonstances
concrètes du cas d'espèce (ATF 133 I 168 consid. 4.1 p. 170 s; 132 I 21 consid.
4.1 p. 28; 124 I 208 consid. 6 p. 215; 123 I 268 consid. 3a p. 273 et les
références).

7.2 En l'espèce, le recourant a été inculpé de lésions corporelles graves, de
lésions corporelles simples, de menaces, d'actes d'ordre sexuel avec des
enfants, de viols, de contraintes sexuelles, de séquestrations et d'enlèvements
aggravés. Si le recourant est reconnu coupable de ces chefs d'accusation et
dans la mesure où ces infractions peuvent entrer en concours, la peine
privative de liberté pouvant lui être infligée peut atteindre au maximum la
moitié en sus de la peine encourue pour l'infraction la plus grave, soit quinze
ans. Le prénommé a de surcroît été inculpé d'assassinat, subsidiairement de
meurtre. Il est détenu préventivement depuis un peu plus d'un an suite à cette
inculpation complémentaire.
Dans ces conditions, la durée de la détention préventive déjà subie, de quatre
ans et un peu plus de trois mois, est certes importante, mais elle reste encore
compatible avec la peine privative de liberté à laquelle l'inculpé est exposé
concrètement en cas de condamnation, de sorte que la Chambre d'accusation a, en
l'état, correctement nié une violation du principe de la proportionnalité. Ce
d'autant plus qu'il n'apparaît pas que cette détention préventive doive se
prolonger au-delà de la durée admissible, dans la mesure où il ressort du
courrier du Juge d'instruction du 12 novembre 2009 que l'enquête devrait être
close, "si possible avant la fin de l'année".

8.
Le recourant invoque également une violation du principe de la célérité. Il
critique à cet égard le fait qu'il n'a pas été entendu par le Juge
d'instruction depuis le 24 juillet 2009.

8.1 L'incarcération peut être disproportionnée en cas de retard injustifié dans
le cours de la procédure pénale (ATF 128 I 149 consid. 2.2.1 p. 151; 123 I 268
consid. 3a p. 273 et les arrêts cités). Il doit toutefois s'agir d'un
manquement particulièrement grave, faisant au surplus apparaître que l'autorité
de poursuite n'est plus en mesure de conduire la procédure à chef dans un délai
raisonnable (ATF 128 I 149 consid. 2.2.1 p. 151 s.). Le caractère raisonnable
de la durée d'une procédure pénale s'apprécie selon les circonstances
particulières de la cause, eu égard en particulier à la complexité de
l'affaire, au comportement du requérant et à celui des autorités compétentes,
ainsi qu'à l'enjeu du litige pour l'intéressé (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2 p.
281 et les arrêts cités). La célérité particulière à laquelle un détenu a droit
dans l'examen de son cas ne doit pas nuire aux efforts des magistrats pour
accomplir leur tâche avec un soin voulu (arrêts de la Cour européenne des
droits de l'homme du 5 novembre 2009, Shabani contre Suisse, n° 29044 § 65; du
11 décembre 2007, Pêcheur contre Luxembourg, n° 16308/02 § 62).

8.2 En l'occurrence, comme le relève à juste titre la Chambre d'accusation, le
recourant a lui-même requis l'instruction d'actes supplémentaires, notamment
une nouvelle expertise psychiatrique. Il a en outre sollicité que les
entretiens entre l'inculpé et le nouvel expert soient enregistrés, ce que
celui-ci a refusé. Ces éléments ont pour conséquence de différer objectivement
la communication du dossier au Ministère public. Cette situation ne saurait
être constitutive d'un manquement à l'obligation de célérité, dès lors que
c'est l'inculpé qui a ajouté une condition inusuelle à l'investigation qu'il a
requise.
Pour le surplus, même si l'instruction n'a peut-être pas toujours suivi un
rythme particulièrement soutenu, elle n'a pas non plus connu de période
d'inactivité susceptible de contrevenir au principe de célérité. Le Juge
d'instruction a régulièrement fait progresser le dossier en ordonnant notamment
des expertises psychiatriques et des expertises d'analyse ADN, en procédant à
des transports sur place et à de nombreuses audiences des témoins, des
plaignantes, en particulier de B.________. Par ailleurs, des faits nouveaux
étant apparus en cours d'instruction en relation avec la disparition de
C.________, l'instruction a alors porté sur les nouveaux chefs d'accusation
d'assassinat et subsidiairement de meurtre.
Enfin, comme relevé ci-dessus, dans un courrier du 12 novembre 2009, le Juge
d'instruction mentionne que l'instruction se trouve dans sa phase finale et
devrait être terminée "si possible avant la fin de l'année". A ce stade et dans
ces conditions, il peut être admis que le principe de célérité est encore
respecté. En l'état actuel du dossier, les autorités cantonales devront
toutefois faire en sorte que le recourant soit jugé dans les meilleurs délais.

9.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.
Dès lors que le recourant est dans le besoin et que ses conclusions ne
paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec, l'assistance judiciaire doit lui
être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant requiert la désignation de Me
Josiane Stickel-Cicurel en qualité d'avocat d'office. Il y a lieu de faire
droit à cette requête et de fixer d'office les honoraires de l'avocate, qui
seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le
recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Josiane Stickel-Cicurel est
désignée comme défenseur d'office du recourant et ses honoraires, supportés par
la caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à 1'500 francs.

3.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

4.
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant ainsi qu'au
Procureur général et à la Chambre d'accusation de la Cour de justice du canton
de Genève.

Lausanne, le 2 décembre 2009
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Féraud Tornay Schaller