Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 1B.110/2009
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B_110/2009

Arrêt du 1er septembre 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Fonjallaz.
Greffier: M. Kurz.

Parties
A.________, représenté par Me Christophe A. Gal, avocat,
recourant,

contre

Ministère public du canton de Vaud, 1014 Lausanne,
intimé.

Objet
Confiscation pénale,

recours contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton
de Vaud du 12 mars 2009.

Faits:

A.
Par décision du 15 août 2006, le Juge d'instruction du canton de Vaud a ordonné
la confiscation pénale des valeurs déposées sur un compte au nom de B.________
et sur deux comptes au nom de C.________, auprès de la banque X.________ à
Lausanne. Le magistrat a considéré que les fonds - soit NZ$ 160'791 et £ 82'636
- provenaient de comportements relevant de la soustraction de données, de la
concurrence déloyale et de la violation du droit d'auteur, voire de
l'escroquerie. Les auteurs avaient copié sans droit des bases de données des
registres Internet de leurs concurrents et démarché auprès de leurs clients en
exploitant la confusion avec les détenteurs des bases de données. Les éventuels
lésés ou tiers devraient faire valoir leurs prétentions dans les cinq ans dès
la publication officielle de la décision.
Par acte du 12 janvier 2009, B.________, C.________ et leur ayant droit
A.________ ont formé une opposition (avec demande de restitution de délai)
contre la décision du Juge d'instruction, dont ils disaient avoir pris
connaissance le 7 janvier précédent. Ils estimaient qu'il n'y avait ni
condamnation pénale, ni constat d'infraction.

B.
Par arrêt du 12 mars 2009, le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal
vaudois a écarté l'opposition et maintenu l'ordonnance de confiscation. Les
deux sociétés titulaires des comptes bancaires avaient été mises en liquidation
le 10 mai 2005 par un tribunal australien, puis liquidées au 14 août 2007 et
radiées du Registre du commerce. Un liquidateur officiel avait été désigné et
s'était manifesté dans la procédure de confiscation. Une procédure de
réinscription était prévue en droit australien, en cas d'actifs ou de dettes
découverts après la liquidation. A.________, déclaré en faillite en octobre
2005, ne prétendait pas avoir racheté les actions des sociétés; il ne disposait
pas des pouvoirs pour agir en leur nom.

C.
Par acte du 7 mai 2009, A.________ forme un recours en matière pénale. Il
conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal, à la recevabilité de son
opposition, à l'admission de celle-ci et à l'annulation de l'ordonnance de
confiscation, subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité cantonale afin
qu'elle statue au fond.
Le Tribunal d'accusation et le Ministère public se réfèrent à l'arrêt attaqué.

Considérant en droit:

1.
Selon l'art. 78 LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours contre les
décisions rendues en matière pénale. La notion de «décisions en matière pénale»
comprend toutes les décisions qui se fondent sur le droit pénal matériel ou le
droit de procédure pénale. Tel est le cas d'une confiscation prononcée en
application de l'art. 70 CP. La décision prise à ce sujet revêt un caractère
final, et l'arrêt attaqué émane d'une autorité cantonale de dernière instance
(art. 80 LTF). Conformément à l'art. 81 al. 1 let. a LTF, le recourant, dont la
qualité pour agir a été niée par le Tribunal d'accusation, a qualité pour
contester ce prononcé.

2.
Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'appréciation des faits. Il reproche
au Tribunal d'accusation d'avoir considéré que l'une des sociétés avait un
autre créancier que lui-même car elle avait été condamnée à des frais de
justice selon un jugement du 7 décembre 2005. Le recourant relève que cette
condamnation est solidaire avec d'autres défendeurs, lesquels auraient
désintéressé le créancier. Il serait dès lors l'unique créancier des sociétés,
en tant que bénéficiaire des dividendes de liquidation. Par ailleurs, rien ne
permettrait de retenir, comme l'a fait la cour cantonale, que le recourant ne
serait plus titulaire des actions des deux sociétés.
Le recourant invoque ensuite l'art. 59 aCP, en relevant qu'il serait le seul à
pouvoir faire valoir ses prétentions sur les biens des sociétés dissoutes; le
titulaire d'un compte bancaire ayant qualité pour s'opposer à la confiscation,
il devrait en aller de même pour un créancier.

2.1 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF). Il peut
néanmoins rectifier ou compléter les faits constatés de façon manifestement
inexacte (soit arbitraire; ATF 133 III 393 consid. 7.1 p. 398) ou en violation
du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant peut
soulever de tels vices relatifs à la constatation des faits si leur correction
est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 2 LTF);
toutefois, il est tenu de se conformer aux exigences de motivation prévues à
l'art. 106 al. 2 LTF, soit d'exposer d'une manière circonstanciée ses griefs
(cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254 ss).

2.2 Les conditions de recevabilité d'un recours cantonal sont fixées en premier
lieu par le droit cantonal, dont le Tribunal fédéral examine l'application sous
l'angle de l'arbitraire. Or, le recourant omet d'indiquer quelle disposition
aurait été violée par l'arrêt d'irrecevabilité, alors que l'art. 106 al. 2 LTF
lui impose une telle démonstration. Il invoque sur le fond l'ancien art. 59 CP
relatif à la confiscation, sans toutefois prétendre que cette norme de droit
fédéral aurait une influence sur la recevabilité des moyens de droit cantonaux.
La recevabilité du recours apparaît dès lors douteuse.

2.3 En l'occurrence, la cour cantonale a essentiellement retenu que seules les
sociétés titulaires des avoirs bancaires subissaient une atteinte directe du
fait de la confiscation, et que le recourant ne pouvait prétendre agir au nom
des deux sociétés, celles-ci ayant été liquidées et radiées. Les arguments de
fait soulevés par le recourant ne sont pas propres à remettre en cause cette
appréciation. Celle-ci n'a d'ailleurs rien d'arbitraire.

2.4 On peut certes s'interroger sur le droit d'opposition de l'ayant droit
d'une société lorsque celle-ci a été dissoute et ne peut plus agir elle-même
par le biais de ses liquidateurs ou de ses repreneurs (cf. en matière
d'entraide judiciaire, arrêt 1P.631/1998 du 8 mars 1999 publié in SJ 1999 I
427; consid. 1 non publié de l'ATF 129 II 484). En l'occurrence, la question ne
se pose pas, puisque les deux sociétés existaient encore au moment où a été
prise la décision de confiscation. En effet, le liquidateur des deux sociétés
en Australie s'est manifesté auprès du Juge d'instruction au mois de juillet
2005. Le Juge d'instruction l'a informé, le 29 juillet 2005, qu'il le
considérait comme représentant des sociétés, l'invitant à mandater un avocat ou
à élire domicile dans le canton de Vaud. Aucune suite n'a été donnée à cet
avis. Au mois de janvier 2006, ayant appris la condamnation du recourant en
Australie, le Juge d'instruction a informé le liquidateur que les chances de
récupérer les fonds étaient ainsi compromises, compte tenu d'une probable
confiscation. La décision de confiscation a été publiée au mois de septembre
2006. Il résulte de ce qui précède que le liquidateur des sociétés titulaires
des comptes bancaires a été informé d'une probable confiscation; invité à
intervenir en Suisse, il y a manifestement renoncé.
Les sociétés concernées ayant eu l'occasion de s'opposer à la confiscation, le
recourant ne saurait soutenir qu'il était le seul à pouvoir faire valoir des
prétentions sur les fonds saisis. Il ne démontre pas que, dans de telles
circonstances, il serait arbitraire de dénier à l'ayant droit la qualité pour
intervenir après coup.

3.
Le recours doit par conséquent être rejeté, les frais judiciaires étant à la
charge du recourant (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public
et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 1er septembre 2009
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Kurz