Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 914/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_914/2008

Arrêt du 31 août 2009
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Cretton.

Parties
Caisse cantonale genevoise de compensation,
route de Chêne 54,1208 Genève,
recourante,

contre

R.________, représentée par le Centre de contact Suisses-Immigrés,
intimée.

Objet
Assurance-vieillesse et survivants (adhésion à l'assurance sociale)

recours contre le jugement du Tribunal cantonal genevois des assurances
sociales du 25 septembre 2008.

Faits:

A.
Ressortissante étrangère née en 1971, R.________ séjourne en Suisse depuis le
25 juillet 2002 mais n'est au bénéfice d'une autorisation que depuis le 15
février 2007.
Elle a requis son affiliation à l'AVS/AI/APG (en tant que personne sans
activité lucrative, pour la période comprise entre son arrivée en Suisse le 25
juillet 2002 et le jour précédant le début d'une activité lucrative le 1er
janvier 2005) auprès de la Caisse cantonale genevoise de compensation
(ci-après: la caisse) le 22 octobre 2007.
Sa requête a été rejetée dans la mesure où le défaut d'autorisation de séjour
durant la période considérée avait fait obstacle à la constitution d'un
domicile (décision du 19 novembre 2007 confirmée sur opposition le 17 janvier
2008).

B.
L'intéressée a déféré cette décision au Tribunal cantonal genevois des
assurances sociales concluant à la reconnaissance de son statut d'assurée dès
le 25 juillet 2002.
La juridiction cantonale a admis le recours. Elle a implicitement réformé la
décision litigieuse en admettant la constitution d'un domicile dès la date
d'entrée en Suisse, malgré l'absence de permis de séjour, et a retourné la
cause à l'administration pour qu'elle calcule le montant des cotisations à
percevoir en tenant compte des dispositions légales relatives à la prescription
(jugement du 25 septembre 2008).

C.
La caisse dépose un recours en matière de droit public contre ce jugement, dont
elle requiert l'annulation, concluant en substance à la confirmation de la
décision du 17 janvier 2008.
R.________ conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:

1.
Bien que le dispositif du jugement entrepris renvoie la cause à la caisse
recourante, il ne s'agit pas d'une décision incidente au sens de l'art. 93 LTF
car la juridiction cantonale a statué définitivement sur les points contestés,
le renvoi de la cause ne visant que le calcul des cotisations dues. Le recours
est dès lors recevable puisqu'il est dirigé contre un jugement final (cf. art.
90 LTF; arrêt du Tribunal fédéral 9C_684/2007 du 27 septembre 2007 consid. 1.1
in SVR 2008 IV n° 39 p. 131).

2.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit au sens des art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'examine en principe que les griefs
invoqués (art. 42 al. 2 LTF) et fonde son raisonnement sur les faits retenus
par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été
établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF auquel cas il peut les rectifier ou les compléter d'office (art.
105 al. 2 LTF).

3.
Est seul litigieux le point de savoir si l'intimée peut être affiliée
rétroactivement à l'AVS/AI/APG pour la période durant laquelle elle a séjourné
en Suisse sans titre de séjour et sans y exercer d'activité lucrative.

4.
L'art. 1a al. 1 let. a LAVS (anciennement art. 1 al. 1 let. a LAVS, dont la
teneur n'a pas été modifiée par l'entrée en vigueur de la LPGA) prévoit
l'affiliation obligatoire à l'AVS des personnes physiques qui sont domiciliées
en Suisse et qui n'y exercent pas d'activités lucratives.

5.
En l'espèce, la caisse recourante reproche aux premiers juges d'avoir admis que
le défaut d'autorisation de séjour ne faisait pas échec à la constitution d'un
domicile.

5.1 La notion de «domicile» développé en droit civil est applicable par renvoi
de l'art. 13 al. 1 LPGA (anciennement art. 95a LAVS). Il s'agit du lieu où une
personne réside avec l'intention de s'y établir (cf. art. 23 al. 1 CC), soit le
lieu où se trouve le centre de ses intérêts personnels et professionnels.
D'après la jurisprudence (cf. notamment ATF 133 V 309 consid. 3.1 p. 312 et les
références), le domicile comporte deux éléments: la résidence, soit le séjour
effectif d'une certaine durée dans un lieu donné (critère objectif) et la
volonté d'y demeurer (critère subjectif); pour savoir si une personne réside
dans un lieu avec l'intention de s'y établir, ce n'est pas la volonté interne
de cette personne qui est déterminante, mais les circonstances objectives
reconnaissables pour les tiers.

5.2 L'intimée est arrivée en Suisse le 25 juillet 2002. Elle était accompagnée
de deux de ses quatre enfants et rejoignait les deux autres qui résidaient à
Z.________ avec son partenaire depuis l'année précédente. Elle a donné
naissance à un cinquième enfant au mois de décembre 2002. Son compagnon
travaille comme peintre. Ses quatre premiers enfants sont scolarisés depuis la
rentrée 2002. Elle s'est exclusivement consacrée à l'entretien de son ménage
jusqu'au 1er janvier 2005, date où elle a débuté une activité - soumise à
cotisations - d'employée de maison. Elle a entrepris les démarches nécessaires
à la régularisation de sa situation et de celle de tous les membres de sa
famille au plus tard au mois de décembre 2003. Une autorisation de séjour (B)
leur a été délivrée au mois de juillet 2007.
Au regard de ce qui précède, il apparaît que les constatations de la
juridiction cantonale relatives à la constitution d'un domicile en Suisse ne
sont pas manifestement inexactes. Par son argumentation, l'administration ne
conteste du reste pas formellement ce point. Elle n'invoque en particulier pas
une violation du droit fédéral dans le fait d'avoir retenu le 25 juillet 2002
comme date à partir de laquelle la volonté de l'intéressée de se constituer un
domicile était reconnaissable pour des tiers. Elle soutient uniquement que la
violation des dispositions légales sur la police et le séjour des étrangers ont
empêché la concrétisation de cette volonté.

6.
6.1 L'obtention d'une autorisation de séjour ou d'établissement de la part de
la police des étrangers n'est pas un critère décisif pour déterminer si une
personne s'est valablement constitué un domicile au sens du droit civil (cf.
notamment ATF 125 III 100 consid. 3 p. 101 s., 125 V 76 consid. 2a p. 77 et les
références; voir également arrêts du Tribunal fédéral des assurances K 34/04 du
2 août 2005 consid. 3 et K 38/01 du 24 décembre 2002 consid. 6 non publié in
ATF 129 V 77). Une notion de droit civil reprise en droit des assurances
sociales peut cependant s'interpréter différemment (cf. ATF 130 V 404 consid.
5.1 p. 404 s.). A cet égard, le Tribunal fédéral a déjà certes retenu que la
condition relative à la volonté d'une personne de s'établir durablement en un
lieu n'était pas remplie lorsqu'il existait des empêchements de droit public
(cf. notamment ATF 113 V 261 consid. 2b p. 264 s., 105 V 136 consid. 2a et 2b
p. 137 s., 99 V 206 consid. 2 p. 209). Il a toutefois clairement exclu les
décisions de la police des étrangers de la liste de ces empêchements en
admettant la constitution d'un domicile - et par conséquent l'assujettissement
à l'AVS - d'une personne sans activité lucrative qui contestait son affiliation
d'office au motif qu'elle ne bénéficiait d'aucun permis de séjour (cf. arrêt du
Tribunal fédéral des assurances H 185/94 du 9 janvier 1995, publié in RDAT 1995
II n° 71 p. 197).

6.2 En l'occurrence, la situation de l'intimée durant la période considérée ne
diffère pas fondamentalement de celle mentionnée ci-dessus. En effet, les actes
de celle-ci démontraient de manière reconnaissable son intention de se
constituer un domicile à Z.________ même si elle y séjournait illégalement et
n'y exerçait aucune activité professionnelle (cf. consid. 4). L'arrêt du
Tribunal fédéral 9C_294/2007 cité par la caisse recourante ne remet pas en
question ce qui précède dès lors qu'il concernait la situation particulière
d'un travailleur saisonnier qui présentait des années manquantes de cotisations
avant 1979. L'absence d'autorisation de séjour pour la période allant du 25
juillet 2002 au 31 décembre 2004 n'a donc pas fait obstacle à la constitution
d'un domicile en Suisse. Le recours est par conséquent mal fondé.

7.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge de
l'administration (art. 66 LTF). Représentée, l'intéressé qui obtient gain de
cause a droit à une indemnité de dépens (art. 68 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la caisse
recourante.

3.
La caisse recourante versera à l'intimée une indemnité de 500 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal genevois des
assurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 31 août 2009

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Meyer Cretton