Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 601/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_601/2008

Arrêt du 6 avril 2009
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Piguet.

Parties
1. Mutuel Assurances, avenue de la Gare 20,
1950 Sion,
2. Caisse-maladie et accidents Universa, rue du Nord 5, 1920 Martigny,
3. Caisse-maladie Hermes, rue de Pradec 1, 3960 Sierre,
recourants,
tous les trois représentés par Me Michel Bergmann, avocat,

contre

1. A.________,
2. B.________,
3. C.________,
4. O.________,
5. E.________,
6. M.________,
7. I._________,
8. R.________,
9. H.________,
10. U.________,
11. N.________,
12. G.________,
13. L.________,
14. T.________,
15. Z.________,
intimés,
tous agissant par ASSUAS, Association Suisse des Assurés, elle-même représentée
par
Me Mauro Poggia, avocat,
16. P.________,
intimé.

Objet
Assurance-maladie,

recours contre le jugement du Tribunal administratif de la République et canton
de Genève du 29 mai 2008.

Faits:

A.
La Mutuelle Valaisanne Caisse Maladie et la Caisse-maladie Futura (regroupées
aujourd'hui à l'enseigne de Mutuel Assurances), la Caisse-maladie et accidents
Universa ainsi que la Caisse-maladie Hermes sont des institutions d'assurance
habilitées à pratiquer l'assurance obligatoire des soins en cas de maladie.
Elles sont membres de l'association Groupe Mutuel, dont la fonction principale
est d'assurer la gestion administrative de l'ensemble des institutions qui lui
sont affiliées.
Durant le courant de l'automne 2002, les assurances susmentionnées ont
communiqué à leurs assurés le montant des primes valables à compter du 1er
janvier 2003. La légitimité des hausses annoncées ayant été contestée par seize
d'entre eux (cités en titre), les caisses ont rendu des décisions formelles
qu'elles ont confirmées sur opposition.

B.
Les assurés concernés par ces décisions ont recouru devant le Tribunal
administratif de la République et canton de Genève. Au cours de la procédure
qui s'en est suivie, celui-ci a, notamment, ordonné l'audition de l'organe de
révision des caisses, puis celle des organes de révision du Groupe Mutuel, soit
PricewaterhouseCoopers (années 2000 à 2001) et BDO Visura (années 2002 à 2005).
Par jugement du 29 mai 2008, le Tribunal administratif a admis les recours,
annulé les décisions rendues sur opposition par les assureurs et dit que le
montant des primes dues par les assurés pour l'année 2003 devaient correspondre
à celui de l'année 2002.

C.
La Mutuel Assurances, la Caisse-maladie et accidents Universa ainsi que la
Caisse-maladie Hermes interjettent un recours commun en matière de droit public
contre ce jugement dont elles demandent l'annulation.
Les assurés concluent principalement au rejet du recours et subsidiairement au
renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour instruction complémentaire
et nouvelle décision. De son côté, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP)
propose l'admission du recours.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le point de savoir si les primes de l'assurance obligatoire
des soins pour l'année 2003 notifiées par les caisses recourantes aux assurés
intimés ont été fixées de manière conforme au droit fédéral.

2.
Selon la jurisprudence, il appartient à l'assuré d'établir, dans le cadre d'une
procédure judiciaire subséquente, la non-conformité au droit fédéral du montant
de la prime qui lui a été notifiée. En exigeant que les tarifs des primes de
l'assurance obligatoire des soins soient dûment contrôlés et approuvés par
l'OFSP (jusqu'au 31 décembre 2003: l'OFAS), le législateur fédéral a
expressément érigé une présomption d'adéquation du montant des primes qui ne
peut être renversée que si l'assuré apporte la preuve du contraire. Compte tenu
de l'autonomie dont disposent les assureurs dans la fixation des primes et du
caractère forcément conjectural de celles-ci, le juge est appelé en outre à
faire preuve d'une grande retenue lors du contrôle d'une décision prise en
application d'une clause tarifaire dans une situation concrète. La validité
d'une prime ne saurait être remise en question que si l'irrégularité constatée
présente un degré de gravité certain et laisse clairement apparaître le
non-respect des dispositions légales applicables en matière de financement et
de fixation des primes, et pour autant qu'il soit établi qu'il en résultera une
modification sensible du montant de la prime due par l'assuré (ATF 135 V 39).

3.
3.1 Le Tribunal administratif a annulé les augmentations de primes notifiées
aux assurés intimés, au motif que les caisses recourantes n'étaient pas
parvenues à les justifier. Il a constaté que les assureurs concernés versaient
des cotisations au Groupe Mutuel, recouraient à toutes sortes de services
fournis par le groupe (personnel et informatique) et lui louaient les locaux
nécessaires à leur administration. Outre le fait que le versement d'une
cotisation était, à son avis, exorbitant au but de l'assurance maladie sociale,
la juridiction cantonale a estimé que le Groupe Mutuel pratiquait un système de
prix administrés que les membres affiliés étaient tenus d'accepter. De plus,
rien ne permettait d'affirmer que le Groupe Mutuel, qu'il y avait lieu de
considérer comme étant le véritable assureur d'un point de vue économique,
fonctionnait sans but lucratif au sens de l'art. 12 al. 1 LAMal.

3.2 En substance, les caisses recourantes se plaignent d'une constatation
manifestement inexacte des faits pertinents, consécutive à une appréciation
arbitraire des preuves. Elles reprochent au Tribunal administratif d'avoir
ignoré le contenu de nombreuses pièces versées au dossier venant contredire les
considérations émises dans le jugement entrepris et d'avoir omis de procéder à
des compléments d'instruction lorsque cela s'avérait nécessaire. Elles relèvent
également que la LAMal ne leur interdirait pas de se regrouper pour confier la
gestion de certaines tâches administratives à un tiers ou à une structure
qu'elles auraient créée à cette fin.

4.
Il ne ressort pas du jugement entrepris que les caisses recourantes auraient
fixé le montant des primes pour l'année 2003 en violation des dispositions
légales en matière de financement et de fixation des primes et que, partant, il
se justifierait de revenir sur la décision d'approbation donnée en 2002 par
l'OFAS. Les considérations du Tribunal administratif consistent bien plutôt en
une critique générale - sans lien direct avec l'objet du litige - dirigée
contre la structure du Groupe Mutuel. Il n'appartient cependant pas au juge des
assurances, dans le cadre d'un litige relatif à la fixation d'une prime, de
procéder à une analyse détaillée de la structure de l'assureur et,
indirectement, de s'immiscer dans ses choix organisationnels et stratégiques.
Tout au plus le juge pourrait-il être amené à intervenir si la structure du
Groupe Mutuel engendrait de façon évidente des frais administratifs
disproportionnés, contraires au principe dit de l'économicité (art. 22 al. 1
LAMal; ATF 135 V 39 consid. 7.2 p. 46). Cela ne ressort toutefois pas du
jugement attaqué et les assurés intimés ont nullement tenté de l'établir en
cours de procédure. Qui plus est, au regard de la relative autonomie accordée à
chaque assureur, le fait de confier à un tiers, sous la forme d'une solution
interne au groupe auquel appartient l'assureur ou par externalisation, la
gestion de certaines activités n'est pas, en soi, contraire au droit fédéral
(voir la réponse du Conseil fédéral à une interpellation de la Conseillère
nationale Dormond Béguelin du 17 décembre 2003 [03.3613 - Assurance-maladie.
Respect de la loi sur la protection des données]). Il importe à cet égard peu
que l'assureur s'acquitte des frais liés à ces prestations en payant les
factures dressées par le prestataire ou en versant à celui-ci une cotisation
annuelle, dès lors que cette façon de faire n'aboutit pas à contourner la loi.
En tant qu'elle se fait à un prix conforme au marché et qu'elle n'engendre pas
pour les assureurs concernés des frais administratifs disproportionnés, la mise
à disposition par l'association Groupe Mutuel de services de nature technique
et administrative pour le compte des institutions qui lui sont affiliées n'est,
sur le principe, pas critiquable. Faute d'éléments objectifs et concrets
permettant d'établir la non-conformité au droit fédéral des primes litigieuses,
le Tribunal administratif n'était pas en droit d'annuler les augmentations de
primes notifiées aux assurés pour l'année 2003. Dans ces conditions, le recours
doit être admis et le jugement attaqué annulé.

5.
Les caisses recourantes obtiennent gain de cause. La procédure étant onéreuse,
les frais judiciaires sont à la charge des intimés qui succombent (art. 66 al.
1, première phrase, LTF en corrélation avec l'art. 65 al. 2 et 3 let. b LTF).
Les caisses recourantes, qui ont conclu à l'octroi de dépens, ne sauraient
toutefois en prétendre, aucuns dépens n'étant alloués en règle générale aux
organisations chargées de tâches de droit public (art. 68 al. 3 LTF; ATF 134 V
340 consid. 7 p. 351).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal administratif de la République
et canton de Genève du 29 mai 2008 est annulé.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge des intimés.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal administratif de la
République et canton de Genève et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 6 avril 2009

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Meyer Piguet