Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 575/2008
Zurück zum Index II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_575/2008

Arrêt du 29 août 2008
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,

Kernen et Seiler.
Greffier: M. Piguet.

Parties
Office cantonal de l'assurance-invalidité,
rue de Lyon 97, 1203 Genève,
recourant,

contre

M.________,
intimé, représenté par Me Daniel A. Meyer, avocat, rue Ferdinand-Hodler 7, 1207
Genève.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et canton de Genève du 28 mai 2008.

Faits:

A.
M.________, né en 1954, travaillait en qualité de concierge pour le compte de
la régie Q.________ SA. Alléguant souffrir de problèmes dorsaux et de
dépression, il a déposé le 30 septembre 2003 une demande de prestations de
l'assurance-invalidité.
Instruisant la cause, l'Office genevois de l'assurance-invalidité (ci-après:
l'office AI) a recueilli les points de vue des docteurs B.________, médecin
traitant (rapports des 7 octobre 2003 et 16 décembre 2004), et C.________,
psychiatre traitant (rapports des 14/15 octobre 2003 et 17/20 décembre 2004),
lesquels ont attesté une incapacité de travail totale pour des raisons
psychiatriques. Compte tenu des éléments rapportés, l'office AI a confié la
réalisation d'un examen clinique bidisiciplinaire à son Service médical
régional (SMR). Dans leur rapport du 5 décembre 2005, les docteurs P.________
et V.________ ont retenu les diagnostics de trouble de l'adaptation avec
réaction dépressive prolongée, de lombalgies communes, de cervicalgies communes
et de goutte; la capacité de travail exigible était totale d'un point de vue
psychiatrique et s'élevait à 80 % sur le plan somatique. Ils estimaient par
ailleurs que l'assuré devait reprendre dès que possible un travail respectant
ses limitations fonctionnelles, le travail de concierge n'étant pas exclu pour
autant qu'il soit exercé dans un autre environnement.
Par décision du 15 juin 2006, confirmée sur opposition le 14 février 2007,
l'office AI a alloué à l'assuré une rente entière d'invalidité pour une période
limitée courant du 1er mai 2004 au 31 juillet 2005. A partir de cette date, il
a considéré que l'assuré présentait une incapacité de gain de 32 %,
insuffisante pour maintenir le droit à la rente.

B.
M.________ a déféré la décision sur opposition au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève. En cours de
procédure, la juridiction cantonale a fait verser au dossier un rapport du 14
août 2007 établi par le Centre X.________ de l'Hôpital Y.________, où l'assuré
avait séjourné quelques semaines, puis confié la réalisation d'une expertise
psychiatrique au docteur Z.________. Dans son rapport du 11 mars 2008, ce
médecin a fait état de l'existence d'un trouble dépressif récurrent, épisode
actuel moyen à sévère, et d'une anxiété généralisée, et estimé la diminution de
capacité de travail qui en résultait à 50 % dans toute activité.
Par jugement du 28 mai 2008, le Tribunal cantonal des assurances sociales a
admis le recours, annulé la décision sur opposition du 14 février 2007 et
octroyé à l'assuré une rente entière d'invalidité à compter du 1er mai 2004,
fondée sur un degré d'invalidité de 70 %.

C.
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
dont il demande l'annulation. Il conclut à la confirmation de la décision sur
opposition du 14 février 2007. Il assortit son recours d'une demande d'effet
suspensif.
Le Tribunal fédéral a renoncé à procéder à un échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments de
la partie recourante ou par la motivation de l'autorité précédente. Toutefois,
eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF -
sanctionnée par l'irrecevabilité des recours dont la motivation est
manifestement insuffisante (art. 108 al. 1 let. b LTF) -, le Tribunal fédéral
n'examine en principe que les griefs invoqués. Il fonde son raisonnement sur
les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF)
sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui
entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée
en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de
fait divergent ne peut être pris en considération.

2.
2.1 Sur le plan formel, l'office recourant fait grief à la juridiction
cantonale d'avoir violé son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) en ne
procédant pas aux mesures d'instruction supplémentaires que les circonstances
imposaient et en écartant sans explication l'opinion de son médecin-conseil, la
doctoresse U.________.

2.2 La violation du droit d'être entendu (sur cette notion en corrélation avec
l'administration de preuves, cf. ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 429, 119 Ib 492
consid. 5b/bb p. 505) dans le sens invoqué en premier lieu par le recourant est
une question qui n'a pas de portée propre par rapport au grief tiré d'une
mauvaise appréciation des preuves. Le juge peut effectivement renoncer à
accomplir certains actes d'instruction sans que cela n'entraîne une violation
du droit d'être entendu (SVR 2001 IV n° 10 p. 28 consid. 4b) s'il est
convaincu, en se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves (cf.
ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352), que certains faits présentent un degré de
vraisemblance prépondérante et que d'autres mesures probatoires ne pourraient
plus modifier cette appréciation (sur l'appréciation anticipée des preuves, cf.
Ueli Kieser, Das Verwaltungsverfahren in der Sozialversicherung, p. 212 n° 450;
Kölz/Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2ème
éd., p. 39, n° 111 et p. 117, n° 320; Fritz Gygi,
Bundesverwaltungsrechtspflege, 2ème éd. p. 274).

2.3 La violation du droit d'entendu pour défaut de motivation de la décision
attaquée (sur cette notion, cf. ATF 133 III 439 consid. 3.3 p. 445 et les
références) est un grief qui n'est également pas fondé en l'espèce, dans la
mesure où la juridiction cantonale a mentionné le motif qui l'a conduite à
écarter le point de vue de la doctoresse U.________. Le recourant ne soutient
d'ailleurs pas qu'il n'aurait pas été en mesure de discerner la portée de la
décision attaquée et de l'attaquer en connaissance de cause. Sous couvert d'une
violation du droit d'être entendu, le recourant reproche en réalité à la
juridiction cantonale d'avoir ignoré certains faits et fait ainsi preuve
d'arbitraire dans la constatation des faits et l'appréciation des preuves. Il
s'agit là de griefs qu'il convient d'examiner avec le fond du litige.

3.
3.1 Sur le fond, l'office recourant reproche à la juridiction cantonale d'avoir
suivi le rapport d'expertise du docteur Z.________, alors même que les
conclusions relatives à l'incapacité de travail de l'assuré n'étaient pas
convaincantes. Les explications apportées par l'expert ne laissaient en effet
pas apparaître de manière claire les raisons pour lesquelles l'atteinte à la
santé présentée par l'assuré entraînait pour la période antérieure à la
décision litigieuse une incapacité de travail de l'ordre de celle retenue par
l'expert. C'est en outre de manière arbitraire que les premiers juges ont
écarté le point de vue de la doctoresse U.________, médecin-conseil de l'office
AI, pour le seul motif que ce médecin n'était pas psychiatre.

3.2 En substance, la juridiction cantonale a constaté que l'expertise
judiciaire ordonnée par ses soins remplissait tous les réquisits
jurisprudentiels pour lui reconnaître pleine valeur probante et estimé qu'il
n'y avait aucune raison de s'en écarter. Elle expliquait de manière
convaincante les raisons qui faisaient retenir une incapacité de travail de 50
% dans toute activité professionnelle compte tenu des seules affections
psychiques. Cette appréciation concordait par ailleurs avec les avis des autres
médecins consultés. L'avis de la doctoresse U.________ n'était pas propre à
mettre en doute les conclusions de l'expert judiciaire, ce médecin n'étant pas
psychiatre, de sorte qu'elle ne saurait être considérée comme une spécialiste
en la matière, indépendamment du fait qu'elle n'a pas examiné l'assuré.

3.3 Quoi qu'en dise l'office recourant, l'expertise établie par le docteur
Z.________ remplit toutes les conditions auxquelles la jurisprudence soumet la
valeur probante d'un tel document. Les conclusions procèdent en effet d'une
analyse complète de l'ensemble des circonstances relevantes ressortant de
l'anamnèse, du dossier médical et du status clinique. Les réponses apportées
par l'expert aux questions posées par la juridiction cantonale sont en outre
exhaustives et convaincantes. Le docteur Z.________ s'est notamment attelé,
malgré la difficulté à apprécier rétrospectivement un état psychique, à
retracer l'évolution depuis 2003 de la pathologie psychiatrique (réponse aux
questions n° 4: « Comment sa capacité de travail, sur le plan psychique,
a-t-elle évolué depuis 2003 [en pourcentage] » et n° 5: « Son état de santé
s'est-il amélioré en mai 2005 »). Les considérations tenues par l'expert à ce
propos tiennent d'ailleurs largement compte des observations rapportées par le
SMR dans son rapport du 5 décembre 2005.
En vérité, les points de vue du docteur Z.________ et du SMR ne divergent que
sur la question de l'étendue de la capacité résiduelle de travail à compter du
mois de mai 2005. L'office AI ne prétend nullement que la préférence données
par les premiers juges à l'avis de l'expert serait le résultat d'une
appréciation manifestement insoutenable des moyens de preuves en présence. A
l'appui de ses moyens, celui-ci se limite à opposer à l'expertise l'analyse
qu'en fait la doctoresse U.________. Certes convient-il de donner raison à
l'office AI, lorsqu'il affirme que le fait que ce médecin ne soit pas titulaire
d'une spécialisation en psychiatrie ne justifie pas d'écarter son avis. On ne
voit en effet pas en quoi un médecin, quelle que soit sa spécialisation, ne
serait pas en mesure d'émettre un avis circonstancié sur la cohérence d'un
rapport médical. Cela étant, au regard de leur caractère sommaire, les
remarques émises par la doctoresse U.________ ne sont pas de nature à remettre
en cause le bien-fondé de l'expertise. On soulignera en particulier que ce
médecin ne parvient nullement à démontrer l'existence de contradictions
manifestes et à expliquer en quoi les explications du docteur Z.________ ne
seraient pas plausibles.
Faute d'étayer ses critiques par des éléments objectivement vérifiables
susceptibles de semer le doute sur le bien-fondé des renseignements médicaux
sur lesquels la juridiction cantonale s'est appuyée ou sur l'appréciation que
celle-ci en a faite, le recourant ne parvient pas à démontrer que la
constatation de fait de la juridiction cantonale serait manifestement inexacte,
voire insoutenable.

3.4 L'office recourant conteste également le revenu d'invalide retenu par les
premiers juges pour fixer le degré d'invalidité. Sans entrer dans le détail des
chiffres, il suffit de constater que le recourant se contente de suggérer
l'application d'une base de calcul différente, mais n'explique pas
véritablement en quoi l'arrêt entrepris violerait le droit fédéral. Faute d'une
motivation suffisante, il n'y a pas lieu d'examiner ce point plus avant.

4.
Bien que cela n'ait pas d'incidence sur l'issue du litige, il convient de
relever que la décision administrative soumise à l'examen de la juridiction
cantonale était une décision par laquelle l'assurance-invalidité accordait une
rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoyait la
suppression de cette rente. Selon la jurisprudence, une telle décision
correspond à une décision de révision au sens de l'art. 17 LPGA (ATF 125 V 413
consid. 2d p. 417 et les références). Or, il ressort aussi bien du rapport
d'examen bidisciplinaire du SMR que du rapport d'expertise du docteur
Z.________ que l'assuré présentait une incapacité totale de travailler pour la
période courant du mois de mai 2003 au mois d'avril 2005, avant que ce dernier
médecin ne la fixe à 50 % pour la période subséquente. Le jugement cantonal a
omis de tenir compte de ces éléments dans son appréciation de la situation,
défaut qu'il convient de corriger. Quand bien même le droit à une rente entière
d'invalidité n'était pas modifié, l'état de santé de l'assuré avait subi une
amélioration notable au mois d'avril 2005 faisant porter son incapacité de
travail de 100 à 50 % et son degré d'invalidité de 100 à 70 %.

5.
Mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Vu
l'issue du litige, les frais de justice seront supportés par le recourant (art.
66 al. 1 en corrélation avec l'art. 65 al. 4 let. a LTF). Le présent arrêt rend
en outre sans objet la demande d'effet suspensif.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Dans la mesure où il est recevable, le recours est rejeté au sens des
considérants.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 29 août 2008

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Meyer Piguet