Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 332/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

9C_332/2008 {T 0/2}

Arrêt du 19 février 2009
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Boinay, Juge suppléant.
Greffier: M. Wagner.

Parties
O.________,
recourant, représenté par
Me Aba Neeman, avocat,

contre

Office cantonal valaisan de l'assurance-invalidité,
avenue de la Gare 15, 1950 Sion,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances du canton du
Valais du 3 mars 2008.

Faits:

A.
A.a O.________, employé auprès de C.________, a heurté une marche d'escalier
avec le pied gauche le 7 juin 1995. Le cas a été pris en charge comme accident
par la «Suisse» Assurances. Le 14 août 1995, O.________ a été bousculé par une
voiture roulant à faible vitesse, lui occasionnant des contusions au genou et
au poignet droits. Le cas a également été pris en charge par «La Suisse»
Assurances. Aucun des deux accidents n'a donné lieu à une incapacité de travail
et l'assurance a mis fin à ses prestations pour les 1er août, respectivement
1er octobre 1995 (décisions du 25 février 2003).

Le 8 mars 2002, O.________ a présenté une demande de prestations de
l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'une rente. Dans le cadre de
l'instruction du dossier, il a produit une expertise établie le 8 avril 2003
par le docteur W.________, spécialiste en chirurgie orthopédique, qui a retenu
divers diagnostics au niveau du poignet droit, du genou droit et du pied
gauche. Le docteur W.________ a estimé que la capacité de travail de O.________
était de 50% dans son occupation habituelle. Dans un rapport complémentaire du
25 avril 2003, ce médecin a précisé que la capacité de travail de O.________
dans une activité adaptée ne pouvait pas être déterminée avant que les
traitements proposés aient été appliqués et leur efficacité appréciée.

L'office cantonal AI du Valais (ci-après: l'office AI) a demandé une expertise
psychiatrique au docteur A.________, spécialiste en psychiatrie
transculturelle, psychiatre et psychothérapeute, qui a diagnostiqué, dans son
rapport du 17 juin 2003, un état de stress post-traumatique et retenu une
incapacité de travail de 50%. Sur la base de ces deux avis, le docteur
D.________, médecin-conseil de l'office AI, a estimé que les renseignements
médicaux étaient suffisants et que la capacité de travail était de 50% dans
toute activité sans possibilité d'augmentation par des mesures d'ordre
professionnel.

Dans un prononcé du 23 septembre 2003, l'office AI a retenu un degré
d'invalidité de 50% et, par décisions des 10 novembre et 15 décembre 2003, il a
octroyé à l'assuré une demi-rente dès le 1er janvier 2003.
A.b Le 2 mars 2004, l'office AI a initié une révision du droit de O.________ à
une demi-rente d'invalidité.

Dans un rapport médical du 5 avril 2004, le docteur I.________, médecin
traitant, a diagnostiqué un état de santé stationnaire. Le 10 février 2005,
O.________ a demandé à être mis au bénéfice d'une rente entière fondée sur une
incapacité de travail de 100%. Cette demande était basée sur l'avis de son
médecin traitant, le docteur I.________, retenant une incapacité de travail de
100 % depuis le 28 avril 2004, et sur un entretien avec le médecin mandaté par
son employeur, le docteur E.________.

L'office AI a demandé une expertise pluridisciplinaire au COMAI. Celle-ci a été
confiée au docteur Joliat, spécialiste en rhumatologie, et à la doctoresse
L.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie. Dans un rapport du
Centre Y.________ du 21 février 2006, ces médecins ont diagnostiqué, avec
répercussion sur la capacité de travail, une personnalité sensitive ([CIM-10]
F60.0) et, sans répercussion sur la capacité de travail, une lombalgie
chronique, un syndrome douloureux fémoro-patellaire droit, une hypermobilité du
poignet droit, un status après résection de la tête du 2ème métatarsien gauche,
pour troubles dégénératifs consécutifs à une ostéonécrose, et un syndrome
douloureux somatoforme persistant ([CIM-10] F45.4) présent depuis août 1995.
S'agissant de l'influence de l'atteinte à la santé sur la capacité de travail
dans l'activité habituelle, les experts n'ont retenu aucune limitation sur le
plan somatique et des limitations quantitatives au plan psychique et mental
entraînant une réduction de l'activité à 6 heures par jour. Pour les experts,
la capacité résiduelle de travail était d'au moins 70% depuis 1995.

Réexaminant le cas, le docteur T.________, médecin responsable du SMR à
Z.________, a fait siennes les conclusions des experts du COMAI, en se référant
également aux expertises faites par le docteur R.________ le 21 novembre 2002
pour la «Suisse» Assurances, qui étaient arrivées à la conclusion qu'en
l'absence de séquelles anatomiques imputables aux accidents des 7 juin et 14
août 1995, aucune incapacité de travail y relative n'était justifiée.

Par décision du 4 mai 2006, l'office AI a reconsidéré ses décisions des 10
novembre et 15 décembre 2003 et a supprimé la rente d'invalidité de O.________
avec effet au 30 juin 2006.

Le 2 juin 2006, celui-ci a formé opposition contre cette décision, en concluant
à l'annulation de celle-ci et au maintien de son droit à une demi-rente.

Par décision du 8 juin 2007, l'office AI a rejeté l'opposition au motif que les
décisions initiales de rente étaient manifestement fausses et que les
conditions étaient remplies pour procéder à une reconsidération.

B.
Par jugement du 3 mars 2008, le Tribunal cantonal des assurances du canton du
Valais a rejeté le recours, estimant que l'office AI était en droit de
reconsidérer ses décisions et partant de supprimer la rente. Il a également
refusé l'octroi du reclassement professionnel demandé.

C.
O.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement,
en concluant principalement à son annulation et au maintien de son droit à une
rente selon décisions des 10 novembre et 15 décembre 2003, ainsi qu'à l'octroi
d'un reclassement professionnel et, subsidiairement, à la mise sur pied d'une
expertise pluridisciplinaire, le tout sous suite des frais et dépens.

L'office AI conclut au rejet du recours et à la confirmation de sa décision sur
opposition. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 s. LTF) peut être formé pour
violation du droit selon l'art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral statue sur la
base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) et peut
rectifier ou compléter d'office les constatations de celle-ci si les faits ont
été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).

Au regard de la réglementation sur le pouvoir d'examen prévue par la LTF, il
convient d'examiner sur la base des griefs soulevés dans le recours formé
devant le Tribunal fédéral si le jugement entrepris viole (notamment) le droit
fédéral dans l'application des règles pertinentes du droit matériel et de
preuve (art. 95 let. a LTF) y compris une éventuelle constatation des faits
contraire au droit (art. 97 al. 1, art. 105 al. 2 LTF).

2.
Selon l'art. 53 al. 2 LPGA, l'assureur peut revenir sur les décisions
formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que
leur rectification revêt une importance notable.

Pour juger s'il est admissible de reconsidérer une décision pour le motif
qu'elle est sans nul doute erronée, il faut se fonder sur les faits et la
situation juridique existant au moment où cette décision a été rendue, compte
tenu de la pratique en vigueur à l'époque (ATF 125 V 383 consid. 3 p. 389 et
les références). Par le biais de la reconsidération, on corrigera une
application initiale erronée du droit, de même qu'une constatation erronée
résultant de l'appréciation des faits. Un changement de pratique ou de
jurisprudence ne saurait en principe justifier une reconsidération (ATF 117 V 8
consid. 2c p. 17, 115 V 308 consid. 4a/cc p. 314). Pour des motifs de sécurité
juridique, l'irrégularité doit être manifeste, de manière à éviter que la
reconsidération devienne un instrument autorisant sans autre limitation un
nouvel examen des conditions à la base des prestations de longue durée. En
particulier, les organes d'application ne sauraient procéder en tout temps à
une nouvelle appréciation de la situation après un examen plus approfondi des
faits. Ainsi, une inexactitude manifeste ne saurait être admise lorsque
l'octroi de la prestation dépend de conditions matérielles dont l'examen
suppose un pouvoir d'appréciation, quant à certains de leurs aspects ou de
leurs éléments, et que la décision initiale parait admissible compte tenu de la
situation antérieure de fait ou de droit. S'il subsiste des doutes raisonnables
sur le caractère erroné de la décision initiale, les conditions de la
reconsidération ne sont pas remplies (arrêts 9C_221/2008 du 14 janvier 2009
consid. 2.2, 9C_71/2008 du 14 mars 2008 consid. 2, 9C_575/2007 du 18 octobre
2007 consid. 2.2, I 907/06 du 7 mai 2007 consid. 3.2.1, I 338/06 du 30 janvier
2007 consid. 3).

3.
3.1 Selon le jugement cantonal, l'office AI a essentiellement fondé ses
premières décisions sur l'expertise du docteur A.________, psychiatre et sur
l'avis du docteur E.________, médecin-conseil de l'employeur du recourant. Le
docteur A.________ avait diagnostiqué un état de stress post-traumatique
entraînant une incapacité de gain de 50%. Pour les juges cantonaux, ce
diagnostic était incontestablement erroné et a induit l'office AI en erreur.
Quant à l'avis du docteur E.________, l'autorité cantonale a considéré qu'il
était fondé sur des certificats médicaux et des rapports succincts du médecin
traitant, si bien qu'il n'avait pas le poids et la valeur probante des
expertises du docteur R.________. Elle a donc considéré que les décisions
initiales étaient manifestement erronées et que la rectification revêtait une
importance notable. En conséquence, elle a admis que les conditions d'une
reconsidération étaient réalisées.

3.2 Selon le recourant, les décisions de l'office AI des 10 novembre et 15
décembre 2003 ne sont pas entachées d'erreur manifeste. Il a estimé d'une part
que l'expertise du Centre Y.________, qui a nié l'existence d'un stress
post-traumatique, était tendancieuse et, d'autre part, qu'elle minimisait
l'aspect somatique des atteintes.

3.3 S'agissant d'apprécier les circonstances de fait qui ont fondé les
décisions initiales de l'office AI, il faut relever que celles-ci ont été
prises sur la base de l'avis du docteur D.________, médecin-conseil (rapport du
15 septembre 2003). Pour se prononcer, ce dernier s'est fondé sur les rapports
des docteurs W.________ et A.________, dont il a admis les conclusions et dont
il a estimé qu'ils étaient suffisants pour se déterminer. Le docteur
W.________, qui a fait son expertise sur la base de ses propres constatations
et de l'expertise du docteur R.________, était arrivé à la conclusion que le
recourant souffrait d'atteintes somatiques au poignet droit, au genou droit et
au pied gauche, entraînant des limitations fonctionnelles, en particulier
l'obligation d'éviter les marches, les escaliers et une limitation des
accroupissements, des ports de charges et des mouvements répétés. En
conclusion, le docteur W.________ avait retenu que le recourant pouvait exercer
son activité habituelle à mi-temps et qu'aucune autre activité n'était
exigible. Enfin, il avait proposé une approche psychiatrique du cas. Sur la
base de cette suggestion, l'office AI avait demandé une expertise au docteur
A.________, qui, dans son rapport du 17 juin 2003, a diagnostiqué un état de
stress post-traumatique et a retenu une incapacité de travail à 50% dans
l'activité habituelle. Puis, à la question de savoir si «les singularités
psychiques constatées limitent la capacité de travail de façon permanente ou de
longue durée», le docteur A.________ répond négativement pour autant que l'on
puisse combiner un soutien par des traitements psychiques et un suivi en
psychothérapie.

Il ressort de l'expertise psychiatrique que l'incapacité de travail retenue par
le docteur A.________ est de nature essentiellement physique et qu'elle
recouvre celle déjà relevée par le docteur W.________. Cette appréciation est
partagée par l'«Unité aspects médicaux» de l'Office fédéral des assurances
sociales (note du 18 janvier 2006) dans laquelle il est précisé que
l'incapacité de travail est de 50% dans la profession actuelle sur la base des
atteintes orthopédiques. Quant à l'expertise du docteur R.________, le même
service a estimé que «l'expertise du docteur W.________ ainsi que son
complément démontre avec brio les atteintes dont l'assuré souffre. Le docteur
W.________ explique et démontre qu'il existe des atteintes objectives
invalidantes contrairement au docteur R.________ qui passe à côté de certains
diagnostics».

Au vu de ces éléments, il y a lieu de retenir que, contrairement à ce qu'ont
admis les juges cantonaux, les décisions de l'office AI prenaient en compte des
atteintes physiques qui s'étaient révélées invalidantes aux yeux de plusieurs
médecins et que l'état de stress post-traumatique diagnostiqué par le docteur
A.________ n'a pas eu une influence déterminante pour calculer le taux
d'invalidité.

Même en admettant que les premiers juges étaient en droit de retenir
l'expertise du Centre Y.________ du 21 février 2006 au titre des éléments ayant
amené l'office AI à reconnaître au recourant une invalidité de 50 % par
décisions des 10 novembre et 15 décembre 2003, la confrontation de ce rapport
aux autres pièces du dossier ne permet pas de considérer que les décisions
initiales de rente étaient manifestement erronées. En effet, les conclusions de
l'expertise sur le plan psychiatrique - à savoir l'absence d'état de stress
post-traumatique mais une diminution de la capacité de travail d'environ 30% en
raison de limitations quantitatives sur le plan psychique et mental -,
n'excluent pas toute incapacité de travail. De plus, sur le plan physique, les
experts retiennent les mêmes atteintes que celles ayant conduit à l'octroi
d'une demi-rente mais nient toute influence sur la capacité de travail. Il
s'agit d'une appréciation médicale différente de celles des docteurs W.________
et A.________ que les experts du Centre Y.________ n'ont par ailleurs pas
justifiée.
Enfin, même si la fixation du taux d'invalidité sur une simple évaluation
médico-théorique de la capacité de travail n'est pas conforme à la loi (ATF 114
V 281 consid. 1c p. 283 et 310 consid. 3c p. 314), cela ne permet pas encore de
qualifier les décisions initiales de manifestement erronées (arrêt 9C_575/2007
du 18 octobre 2007 consid. 3.3).
Le caractère manifestement erroné des décisions de rente des 10 novembre et 15
décembre 2003 n'étant pas donné, l'office AI n'avait pas la possibilité de
procéder à leur reconsidération. Le jugement attaqué et la décision sur
opposition du 8 juin 2007 sont dès lors erronés.

4.
Le litige a pour objet la suppression du droit à la rente sous le seul angle de
la reconsidération des décisions initiales des 10 novembre et 15 décembre 2003.
La question d'une éventuelle révision au sens de l'art. 17 LPGA, au regard des
éléments de fait retenus par la juridiction cantonale, appartient cependant à
l'administration.

5.
Le recourant obtient gain de cause. Les frais judiciaires sont mis à la charge
de l'intimé (art. 66 al. 1 LTF). Le recourant a droit à une indemnité de dépens
pour l'instance fédérale à la charge de l'intimé (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal cantonal des assurances du
canton du Valais du 3 mars 2008 et la décision de l'Office cantonal AI du
Valais du 8 juin 2007 sont annulés.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
L'intimé versera au recourant la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour la
dernière instance.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances du canton du Valais et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 19 février 2009

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Meyer Wagner