Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 293/2008
Zurück zum Index II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_293/2008

Arrêt du 28 janvier 2009
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Wagner.

Parties
J.________,
recourant, représenté par Me Marc-André Nardin, avocat, avenue Léopold-Robert
31, 2301 La Chaux-de-Fonds,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan
8, 1800 Vevey,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 15
janvier 2008.

Faits:

A.
J.________ a été engagé dès le 1er janvier 2002 par X.________. Les rapports de
travail ont été résiliés par son employeur pour le 31 mars 2004.
Le 30 mars 2004, J.________ a présenté une demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Le docteur Y.________, spécialiste FMH en psychiatrie
et psychothérapie et spécialiste en médecine psychosomatique, a produit un
rapport du 28 mai 2004 (y compris un questionnaire complémentaire du 27 mai
2004).
Par lettre du 26 novembre 2004, l'Office de l'assurance-invalidité pour le
canton de Vaud a avisé l'assuré qu'il était nécessaire de procéder à une
expertise médicale et qu'elle serait confiée au docteur E.________, spécialiste
FMH en psychiatrie et psychothérapie. Dans sa réponse du 2 décembre 2004,
J.________ a déclaré qu'il ne désirait pas récuser ce médecin, pour autant
qu'il n'y ait pas de motif de le faire. Il demandait que soit examinée
l'utilité d'une expertise sur les actes de harcèlement moral ("mobbing/
bossing"), en affirmant qu'ils étaient l'unique cause des atteintes à sa santé
psychique.
Le 9 décembre 2004, l'office AI a confirmé la nécessité d'une expertise
psychiatrique, qui a été confiée le 14 décembre 2004 au docteur E.________ par
les médecins du SMR. Dans le cadre de celle-ci, J.________ a participé le 22
septembre 2005 à un entretien et à des examens paracliniques, ainsi qu'à des
tests psychométriques et leurs corrections ayant eu lieu respectivement les 24
août et 22 septembre 2005. Le docteur E.________ et la
psychologue-psychothérapeute A.________ ont déposé leurs conclusions dans un
rapport du 11 novembre 2005.
Reprochant au docteur E.________ de ne lui avoir posé lors de l'entretien
aucune question sur le "mobbing/bossing", l'assuré a invité l'office AI à
procéder à une expertise sur la réalité des actes de harcèlement dont il
déclarait avoir fait l'objet, en lui donnant la possibilité de se prononcer sur
le choix de l'expert (lettre datée du 4 août 2006). Dans une prise de position
du 16 août 2006, I.________ et L.________, respectivement gestionnaire et
juriste de l'office AI, l'ont informé qu'il n'y avait pas lieu de procéder à
une nouvelle expertise psychiatrique. Le 8 septembre 2006, J.________ a déposé
devant le Conseil de l'Office AI du canton de Vaud une requête en récusation à
l'encontre de I.________ et de L.________. Le 29 octobre 2006, il en a fait de
même à l'encontre du docteur E.________, de la psychologue-psychothérapeute
A.________ et de la doctoresse R.________.
Par décision du 15 août 2007, l'office AI, avisant J.________ qu'il était
compétent pour se prononcer sur la requête en récusation du 8 septembre 2006
dirigée contre I.________ et L.________, l'a rejetée. Dans une communication,
datée également du 15 août 2007, il l'a informé que les motifs de récusation
invoqués dans la requête du 29 octobre 2006 à l'encontre du docteur E.________
étaient de nature matérielle et qu'il n'appartenait pas à l'administration de
rendre une décision sur ce point, ces motifs pouvant être invoqués dès qu'une
décision sur le fond aurait été rendue.

B.
Dans deux mémoires séparés, datés du 14 septembre 2007, J.________ a formé
recours devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud contre la décision
du 15 août 2007 de rejet de la requête en récusation du 8 septembre 2006, d'une
part, et, d'autre part, pour déni de justice contre la communication de
l'office AI du 15 août 2007 concernant les motifs matériels de récusation
invoqués dans la requête du 29 octobre 2006 à l'encontre du docteur E.________.
Par jugement du 15 janvier 2008, le Tribunal des assurances a rejeté les
recours (ch. I du dispositif). Considérant que le recours pour déni de justice
était dirigé contre une décision non formelle rejetant la requête en récusation
du 29 octobre 2006 à l'encontre du docteur E.________, il a prononcé que la
décision non formelle de l'office AI du 15 août 2007 était confirmée (ch. II du
dispositif). La décision (formelle) du 15 août 2007 de rejet de la requête en
récusation du 8 septembre 2006 a été confirmée (ch. III du dispositif).

C.
Le 8 avril 2008, J.________ a interjeté un recours en matière de droit public
contre ce jugement, en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'annulation
de celui-ci et de la «décision non formelle» de l'office AI du 15 août 2007, la
cause étant renvoyée au Conseil de l'Office AI du canton de Vaud pour qu'il
statue sur la récusation de ce médecin, de la psychologue-psychothérapeute
A.________ et de la doctoresse R.________. A titre subsidiaire, il invitait le
Tribunal fédéral à dire que l'art. 30 al. 1 LPJA (RS-VD 173.36) est
inconstitutionnel et que le Conseil de l'Office AI du canton de Vaud a commis
un déni de justice et à annuler sa décision prise en application de l'art. 30
al. 1 LPJA.
Dans sa réponse du 24 juin 2008, l'Office de l'assurance-invalidité pour le
canton de Vaud a conclu au rejet du recours dans la mesure où il était
recevable.
Le 24 juin 2008, J.________ a informé le Tribunal fédéral que l'office AI lui
avait adressé un projet de décision (daté du 26 mai 2008) portant sur l'octroi
d'une rente entière. Il sollicitait la suspension de la procédure jusqu'au
prononcé de la décision finale de l'office AI.
Par ordonnance du 25 juillet 2008, la procédure a été suspendue jusqu'au 25
octobre 2008.
Le 31 octobre 2008, les parties ont été invitées à se prononcer sur la suite/
reprise de la procédure. Dans ses observations du 6 novembre 2008, l'office AI
était de l'avis que la cause pouvait effectivement être reprise. J.________ ne
s'est pas prononcé.
Par ordonnance du 28 novembre 2008, la procédure a été reprise.
Dans un préavis du 5 janvier 2009, l'Office fédéral des assurances sociales
s'en remet à l'appréciation du Tribunal fédéral.

Considérant en droit:

1.
Dans la mesure où les conclusions du recourant sont compréhensibles, elles
portent sur le ch. II du dispositif du jugement attaqué et sont seules
recevables devant le Tribunal fédéral.

2.
2.1 Selon l'art. 43 LPGA, l'assureur examine les demandes, prend d'office les
mesures d'instruction nécessaires et recueille les renseignements dont il a
besoin (al. 1, première phrase). L'assuré doit se soumettre à des examens
médicaux ou techniques si ceux-ci sont nécessaires à l'appréciation du cas et
qu'ils peuvent être raisonnablement exigés (al. 2). Si l'assureur doit recourir
aux services d'un expert indépendant pour élucider les faits, il donne
connaissance du nom de celui-ci aux parties. Celles-ci peuvent récuser l'expert
pour des raisons pertinentes et présenter des contre-propositions (art. 44
LPGA).

2.2 Aux termes de l'art. 36 LPGA, les personnes appelées à rendre ou à préparer
des décisions sur des droits ou des obligations doivent se récuser si elles ont
un intérêt personnel dans l'affaire ou si, pour d'autres raisons, elles
semblent prévenues (al. 1). Si la récusation est contestée, la décision est
rendue par l'autorité de surveillance (al. 2, première phrase).
En matière de récusation, il convient de distinguer entre les motifs formels et
les motifs matériels. Les motifs de récusation qui sont énoncés dans la loi
(cf. art. 10 PA et 36 al. 1 LPGA) sont de nature formelle parce qu'ils sont
propres à éveiller la méfiance à l'égard de l'impartialité de l'expert. Les
motifs de nature matérielle, qui peuvent également être dirigés contre la
personne de l'expert, ne mettent en revanche pas en cause son impartialité. De
tels motifs doivent en principe être examinés avec la décision sur le fond dans
le cadre de l'appréciation des preuves. Il en va ainsi, par exemple, d'une
prétendue incompétence de l'expert à raison de la matière laquelle ne saurait
constituer comme telle un motif de défiance quant à l'impartialité de ce
dernier. Bien au contraire, ce grief devra être examiné dans le cadre de
l'appréciation des preuves (ATF 132 V 93 consid. 6.5 p. 108 s.).

3.
Le recourant qualifie notamment de formels plusieurs motifs de récusation.

3.1 Ainsi, il fait valoir que le docteur E.________, avant d'avoir analysé les
tests passés en deux fois, dont la seconde au moment de l'entretien du 22
septembre 2005, lui a fait connaître de vive voix lors de l'entretien son
opinion sur le degré d'incapacité de travail, opinion qui n'a pas été infirmée
par la suite. De l'avis du recourant, l'expert avait à ce moment-là une opinion
déjà acquise. Il n'a pas eu besoin des tests pour déterminer son incapacité de
travail. Or, ces tests représentent plus de la moitié du rapport d'expertise.
Toutefois, il ne s'agit pas là d'un motif formel lié à l'impartialité de
l'expert. En réalité, le motif invoqué ci-dessus met en cause la crédibilité et
le caractère probant du rapport d'expertise du 11 novembre 2005 et est donc de
nature matérielle.

3.2 Le motif de récusation, selon lequel l'expert avait une idée préconçue sur
la qualité des rapports médicaux de ses médecins traitants, se fonde sur les
pages 23 et 24 du rapport d'expertise du 11 novembre 2005. Il s'agit là d'un
motif matériel de récusation. Il apparaît, en effet, que les griefs que le
recourant adresse au docteur E.________ et à la psychologue-psychothérapeute
A.________, auxquels il reproche d'avoir suivi les instructions du docteur
U.________ (médecin du SMR) dans le mandat d'expertise, d'avoir omis toute
investigation en ce qui concerne le diagnostic de syndrome de stress
post-traumatique opiniâtre suite à du «mobbing et du bossing» retenu par le
docteur Y.________ et d'avoir ainsi démontré leur totale dépendance d'esprit
vis-à-vis du SMR, ont pour fondement le rapport d'expertise (soit les pages
mentionnées ci-dessus), dont ils remettent en cause la crédibilité et le
caractère probant.

3.3 Quant au motif de récusation imputant à l'expert une violation de ses
devoirs, il se fonde sur le mandat d'expertise confié par les médecins du SMR.
Il s'agit là d'un motif matériel de récusation qui met en cause la crédibilité
et le caractère probant du rapport d'expertise du 11 novembre 2005 et non d'un
motif formel lié à l'impartialité de l'expert.

4.
En définitive, ainsi que l'a relevé le premier juge, les motifs de récusation
invoqués à l'encontre de l'expert visent le rapport d'expertise du 11 novembre
2005, sont donc de nature matérielle et relèvent du fond.
Ainsi, c'est à juste titre que l'administration n'a pas rendu de décision sur
ce point, mais que dans une communication du 15 août 2007, elle a informé
l'assuré que les motifs de récusation invoqués dans la requête du 29 octobre
2006 à l'encontre du docteur E.________ étaient de naturelle matérielle et
qu'ils pourraient être invoqués dès qu'une décision sur le fond aurait été
rendue (arrêt I 247/04 du 23 mars 2006 consid. 3).
Dès lors, c'est à tort que le premier juge est entré en matière sur l'écriture
du 14 septembre 2007 dirigée contre la communication de l'intimé du 15 août
2007. Les griefs invoqués devront en effet être examinés par l'administration,
puis l'autorité cantonale de recours et, cas échéant, le Tribunal fédéral, au
moment de se prononcer sur le fond dans le cadre de l'appréciation des preuves
(arrêt I 247/04 du 23 mars 2006 consid. 3).

5.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires doivent être mis à la charge du
recourant, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il ne saurait prétendre une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 15 janvier 2008 est
réformé en ce sens que le ch. I de son dispositif est modifié en ce sens que le
recours du 14 septembre 2007 pour déni de justice est irrecevable et que le ch.
II de son dispositif est annulé.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 28 janvier 2009

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Meyer Wagner