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II. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 9C 170/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
9C_170/2008

Arrêt du 7 novembre 2008
IIe Cour de droit social

Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffier: M. Wagner.

Parties
N.________,
recourante, représentée par Me Basile Schwab,
avocat, Espacité 2/Place Le Corbusier,
2300 La Chaux-de-Fonds,

contre

Office AI du canton de Neuchâtel, Espacité 4-5, 2300 La Chaux-de-Fonds,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal administratif du canton de Neuchâtel du
25 janvier 2008.

Faits:

A.
A.a N.________, née en 1975, a présenté le 15 mars 2000 une demande de
prestations de l'assurance-invalidité.
Dans un projet d'acceptation de rente du 26 septembre 2001, l'Office de
l'assurance-invalidité du canton de Neuchâtel, se fondant sur une appréciation
du médecin de l'office AI du 5 septembre 2001, l'a avisée qu'elle avait droit à
une demi-rente pour une invalidité de 50 % depuis le 1er juillet 2000, taux que
l'assurée a contesté (lettre du docteur L.________ du 16 novembre 2001). Par
décision du 5 mars 2002, il lui a alloué une demi-rente d'invalidité à partir
du 1er juillet 2000.
Le 12 avril 2002, N.________ a formé recours contre cette décision devant le
Tribunal administratif de la République et canton de Neuchâtel. L'office AI a
chargé le docteur M.________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie,
de procéder à une expertise. Dans un rapport du 5 août 2002, ce médecin a posé
le diagnostic de personnalité émotionnellement labile, type borderline
(F60.31), d'épisode dépressif léger, sans syndrome somatique (F32.00) et de
dysthymie (F.34.1). Elle indiquait que le degré de la capacité de travail était
de 80 % depuis novembre 1998. Dans ses observations du 13 mars 2003, l'office
AI a conclu à l'annulation de la décision du 5 mars 2002. Le 29 mars 2003,
l'assurée a retiré le recours. Par arrêt du 10 juin 2003, le Tribunal
administratif a ordonné le classement de l'affaire.
A.b Dès le 13 septembre 2005, l'office AI a procédé à la révision du droit de
N.________ à une demi-rente d'invalidité. Dans un questionnaire du 14 septembre
2005, elle a indiqué qu'elle était en traitement auprès du docteur G.________,
médecin à Y.________. Celui-ci a déposé ses conclusions dans un rapport du 30
septembre 2005.
Sur proposition de la doctoresse T.________ (avis médical SMR du 26 octobre
2005), une nouvelle expertise psychiatrique a été confiée au docteur
M.________. Dans un rapport du 8 janvier 2006, celle-ci n'a retenu aucun
diagnostic ayant une répercussion sur la capacité de travail; ainsi, l'absence
de trouble thymique et affectif ne permettait plus de retenir le diagnostic de
dysthymie ni celui d'épisode dépressif léger relevés en 2002. Elle indiquait
que la capacité de travail était entière depuis le début de 2004, conclusion
qui a été reprise par le docteur C.________ dans un avis SMR du 20 mars 2006.
Par décision du 9 juin 2006, l'office AI a informé N.________ que son état de
santé s'était amélioré de manière à influencer son droit à une demi-rente
d'invalidité, qui serait supprimé dès le premier jour du deuxième mois suivant
la notification de celle-ci.
Lors d'un entretien du 21 juin 2006, l'assurée a formé opposition contre cette
décision. Elle déclarait qu'elle avait consulté à nouveau le Centre X.________.
Par décision du 11 juillet 2007, l'office AI a rejeté l'opposition.

B.
N.________ a formé recours contre cette décision devant le Tribunal
administratif de la République et canton de Neuchâtel, en concluant, sous suite
de dépens, à l'annulation de celle-ci. Elle requérait l'avis du docteur
L.________.
Le 30 octobre 2007, la juridiction cantonale l'a avisée qu'elle entendait
confirmer la décision de révision du droit à une demi-rente pour le motif
substitué que la décision de rente initiale était sans nul doute erronée et que
sa rectification revêtait une importance notable. Dans ses observations du 12
novembre 2007, l'assurée s'est exprimée sur la décision de rente initiale, dont
elle avait la conviction qu'elle était pleinement fondée.
Par jugement du 25 janvier 2008, le Tribunal administratif a rejeté le recours.

C.
N.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement,
en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de celui-ci, la
cause étant renvoyée à l'autorité judiciaire de première instance, voire à
l'office AI, pour instruction complémentaire et nouvelle décision.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 s. LTF) peut être formé pour
violation du droit selon l'art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral statue sur la
base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) et peut
rectifier ou compléter d'office les constatations de celle-ci si les faits ont
été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), pour autant que la correction du vice soit
susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). La partie
recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit
expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception
prévue à l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, sinon un état de fait divergent
ne peut être pris en considération.

2.
Les premiers juges ont considéré que les conditions pour l'octroi d'une rente
d'invalidité n'avaient jamais été remplies et que la décision de suppression du
droit à une demi-rente par voie de révision devait être confirmée pour le motif
substitué que la décision de rente initiale était manifestement erronée.

2.1 En vertu de l'art. 17 LPGA, si le taux d'invalidité du bénéficiaire de la
rente subit une modification notable, la rente est, d'office ou sur demande,
révisée pour l'avenir à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore
supprimée.
Cependant, le principe selon lequel l'administration peut en tout temps revenir
d'office sur une décision formellement passée en force et sur laquelle une
autorité judiciaire ne s'est pas prononcée sous l'angle matériel, à condition
qu'elle soit manifestement erronée et que sa rectification revête une
importance notable (art. 53 alt. 2 LPGA), l'emporte sur la réglementation de la
révision au sens de l'art. 17 LPGA. A ces conditions, l'administration peut
aussi modifier une décision de rente si les exigences de l'art. 17 LPGA pour
une révision ne sont pas remplies. Lorsque c'est le juge qui, le premier,
constate le caractère sans nul doute erroné de la décision de rente initiale,
il peut confirmer, en invoquant ce motif, la décision de révision prise par
l'administration en application de l'art. 17 LPGA (ATF 125 V 368 consid. 2 p.
369 et les arrêts cités).

2.2 Pour juger s'il est admissible de reconsidérer une décision pour le motif
qu'elle est sans nul doute erronée, il faut se fonder sur les faits et la
situation juridique existant au moment où cette décision a été rendue, compte
tenu de la pratique en vigueur à l'époque (ATF 125 V 383 consid. 3 p. 389 et
les références). Par le biais de la reconsidération, on corrigera une
application initiale erronée du droit, de même qu'une constatation erronée
résultant de l'appréciation des faits. Un changement de pratique ou de
jurisprudence ne saurait en principe justifier une reconsidération (ATF 117 V 8
consid. 2c p. 17, 115 V 308 consid. 4a/cc p. 314). Pour des motifs de sécurité
juridique, l'irrégularité doit être manifeste, de manière à éviter que la
reconsidération devienne un instrument autorisant sans autre limitation un
nouvel examen des conditions à la base des prestations de longue durée. En
particulier, les organes d'application ne sauraient procéder en tout temps à
une nouvelle appréciation de la situation après un examen plus approfondi des
faits. Ainsi, une inexactitude manifeste ne saurait être admise lorsque
l'octroi de la prestation dépend de conditions matérielles dont l'examen
suppose un pouvoir d'appréciation, quant à certains de leurs aspects ou de
leurs éléments, et que la décision initiale paraît admissible compte tenu de la
situation antérieure de fait ou de droit. S'il subsiste des doutes raisonnables
sur le caractère erroné de la décision initiale, les conditions de la
reconsidération ne sont pas remplies (par exemple arrêts 9C_71/2008 du 14 mars
2008 consid. 2, 9C_575/2007 du 18 octobre 2007 consid. 2.2).

3.
3.1 Les premiers juges ont retenu qu'il résultait du rapport du docteur
M.________ du 5 août 2002 que la recourante présentait une dysthymie depuis
novembre 1998 et des épisodes dépressifs légers surajoutés, mais que ces
troubles interféraient peu sur sa capacité de travail, qui était de 80 % depuis
novembre 1998 jusqu'au jour de l'expertise. Ce médecin avait précisé que la
capacité de travail à attendre par la suite de mesures médicales, soit d'un
traitement antidépresseur, était de 100 %. Cette expertise, qui avait pleine
valeur probante, devait à l'évidence l'emporter sur l'avis du docteur
G.________, médecin traitant de l'assurée. Dès lors, les éléments au dossier en
2002 ne justifiaient aucunement de fixer à 50 % le degré d'invalidité et la
décision de rente initiale du 5 mars 2002 était manifestement erronée.

3.2 Ce point de vue ne peut être suivi. Même en admettant, au regard du
contentieux qui avait suivi la décision initiale, que les premiers juges
étaient en droit de retenir l'expertise du docteur M.________ du 5 août 2002 au
titre des éléments ayant amené l'office à reconnaître à la recourante une
invalidité de 50 % par la décision de rente du 5 mars 2002, la confrontation de
ce rapport aux autres pièces du dossier ne permet pas de considérer que la
décision initiale était manifestement erronée. Ainsi, et il convient sur ce
point (art. 105 al. 2 LTF) de compléter les constatations des premiers juges,
le docteur L.________, chef de clinique du Centre X.________, posait-il dans un
rapport du 8 avril 2001 le diagnostic d'épisode dépressif moyen avec syndrome
somatique ([CIM-10] F32.11) et indiquait que la patiente avait présenté une
incapacité de travail de 100 % du 12 juillet au 31 août 1999 et de 50 % du 1er
septembre au 31 décembre 1999. Dans une appréciation du 21 mars 2001, le
médecin de l'office AI proposait de statuer sur le droit à une rente entière
sans autre mesure d'instruction et dans un avis du 5 septembre 2001, il
indiquait avoir pris contact avec le docteur L.________, qui confirmait que
l'assurée passait par des hauts et des bas mais qu'on pouvait s'en tenir à une
incapacité de travail durable de 50 % dès le 1er septembre 1999. Au vu de ces
pièces et de l'avis du docteur G.________ déjà mentionné, la décision initiale
ne peut être qualifiée de manifestement erronée. En outre, on ne peut
considérer que l'instruction ayant amené l'intimé à accorder à la recourante
une demi-rente d'invalidité ou à ne pas modifier cette décision dans les suites
de l'expertise du docteur M.________ se révèle lacunaire à un point tel que la
décision de rente initiale du 5 mars 2002 prise sur cette base apparaisse
manifestement erronée (arrêt 9C_575/2007 du 18 octobre 2007 consid. 3.3). Sur
ce point, le jugement attaqué est erroné.

4.
Les premiers juges, examinant la situation de la recourante dès 2005, ont
retenu qu'elle ne présentait pas d'invalidité donnant droit à une rente. Ils se
sont fondés sur les conclusions du docteur M.________ du 8 janvier 2006, selon
lesquelles la capacité de travail était entière depuis début 2004 au moins,
sans qu'il y ait de diminution de rendement.

4.1 La recourante reproche à l'administration et à la juridiction cantonale de
n'avoir pas demandé l'avis du docteur L.________ dans le cadre de la procédure
de révision de son droit à une demi-rente d'invalidité.
Ce grief a déjà été réfuté par les premiers juges. Ainsi qu'ils l'ont relevé,
l'assurée n'a pas indiqué qu'elle était suivie par le docteur L.________ dans
le questionnaire du 14 septembre 2005. Aux dires du docteur G.________, elle ne
voyait plus de psychiatre depuis plusieurs mois (expertise du docteur
M.________ du 8 janvier 2006, page 5). Dans son opposition du 21 juin 2006,
elle a déclaré qu'elle avait arrêté de consulter le successeur du docteur
L.________.
La juridiction cantonale a également indiqué pourquoi elle ne donnait pas suite
à la requête de la recourante. Même dans l'hypothèse où le docteur L.________
aurait été invité à s'exprimer et où ses conclusions seraient contraires à
celles du docteur M.________ du 8 janvier 2006, l'opinion du docteur L.________
ne saurait être prise en considération, celui-ci ayant suivi l'assurée pendant
plusieurs mois et ayant dès lors qualité de médecin traitant. Cette
appréciation anticipée des preuves n'est pas arbitraire (ATF 130 II 425 consid.
2.1 p. 429). Il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la
jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I
170 consid. 4 p. 175; arrêt [du Tribunal fédéral] I 514/06 du 25 mai 2007
consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause
une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de
nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont
une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins
traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans
le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en
cause les conclusions de l'expert.
Dès lors il n'est pas déterminant que, comme le déclare la recourante, le
docteur L.________ l'a suivie durant un certain temps et qu'il puisse se faire
une idée plus exhaustive que le docteur M.________. Dans son expertise du 8
janvier 2006, ce médecin a indiqué que la recourante avait cessé tout suivi au
Centre X.________ dès le début de 2004. Il n'y a pas d'élément objectif
susceptible de remettre en cause le bien-fondé des conclusions du docteur
M.________ du 8 janvier 2006 en ce qui concerne la capacité de travail au plan
psychiatrique depuis début 2004.

4.2 Il s'ensuit que dès 2004, la capacité de travail exigible était de 100 %
dans l'activité exercée jusque-là (rapport du docteur M.________ du 8 janvier
2006; avis médical du docteur C.________ du 20 mars 2006).
S'agissant de l'incidence de ce changement sur le taux d'invalidité, on pouvait
raisonnablement attendre de la recourante lors de la décision sur opposition du
11 juillet 2007 qu'elle reprenne l'activité d'aide de cuisine (expertise
ci-dessus du 8 janvier 2006) avec une capacité de travail exigible de 100 %, ce
qui revient à nier toute invalidité (comparaison en pour-cent; ATF 114 V 310
consid. 3a p. 313, 104 V 135 consid. 2b p. 136 s.).
Les conditions d'une révision du droit à une demi-rente d'invalidité étaient
ainsi réunies pour supprimer dès le premier jour du deuxième mois suivant la
notification de la décision du 9 juin 2006 le droit de la recourante à la rente
(art. 17 LPGA; art. 88a al. 1 RAI).

5.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires doivent être mis à la charge de la
recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Elle ne saurait prétendre une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 68 al. 1 LTF).
L'assistance judiciaire gratuite (art. 64 al. 1 et 2 LTF) lui est accordée, de
sorte qu'elle sera dispensée des frais judiciaires et que les honoraires de son
avocat seront pris en charge par la caisse du Tribunal fédéral. L'attention de
la recourante est attirée sur le fait qu'elle devra rembourser la caisse du
Tribunal fédéral si elle devient en mesure de le faire ultérieurement (art. 64
al. 4 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
L'assistance judiciaire est accordée à la recourante.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la
recourante. Ils sont toutefois supportés provisoirement par la caisse du
Tribunal.

4.
Les honoraires de Me Schwab sont fixés à 2'000 fr. (y compris la taxe sur la
valeur ajoutée). Ils sont supportés provisoirement par la caisse du Tribunal.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal administratif de la
République et canton de Neuchâtel, à l'Office fédéral des assurances sociales
et à la Caisse cantonale neuchâteloise de compensation.

Lucerne, le 7 novembre 2008

Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Meyer Wagner