Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.936/2008
Zurück zum Index I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_936/2008

Arrêt du 7 juillet 2009
Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Leuzinger et Frésard.
Greffière: Mme von Zwehl.

Parties
B.________,
recourant,

contre

Office AI Berne,Chutzenstrasse 10, 3007 Berne,
intimé.

Objet
Assurance-invalidité,

recours contre le jugement du Tribunal administratif du canton de Berne, Cour
des affaires de langue française, du 27 août 2008.

Faits:

A.
B.________ travaillait comme conducteur de machines au service de l'entreprise
X.________ & Cie SA. A titre accessoire, il exerçait une activité de nettoyeur
pour le compte de la société Y.________ SA. Il est marié avec deux enfants.

Le 8 septembre 2000, alors qu'il se trouvait sur une pelleteuse à une hauteur
de 1,6 mètres du sol pour en nettoyer les vitres, le prénommé a glissé et est
tombé en se réceptionnant sur les pieds; dans sa chute, il a heurté sa tête
(côté gauche) contre un poteau métallique et s'est cassé les lunettes. Il s'est
plaint de maux de tête, d'une vision altérée ainsi que de cervicalgies, mais a
continué à travailler. Quelque temps plus tard, il a ressenti des douleurs
lombaires avec irradiation dans les jambes qui ont donné lieu à un traitement
médical. Un cliché radiologique (du 29 novembre 2000) a révélé une légère
ostéochondrose au niveau L5-S1 avec une petite hernie susceptible de causer une
irritation de la racine S1, une protrusion minime en L4-L5 ainsi que des
spondylarthroses lombaires légères. A partir de janvier 2001, B.________ a
présenté des périodes d'incapacité de travail variables; dès le 14 janvier
2002, il n'a plus travaillé. Le 12 septembre 2002, il a subi un nouvel accident
: une chute dans les escaliers. Il est sous traitement psychiatrique depuis
l'été 2003.

Après avoir dans un premier temps refusé d'intervenir, la Caisse nationale
suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) - auprès de laquelle l'intéressé
était assuré - a pris en charge le cas. Au vu de l'évolution défavorable de la
situation (apparition progressive de troubles cognitifs), la CNA a ordonné
plusieurs expertises médicales : ophtalmologique (rapport du 22 décembre 2003
des docteurs F.________ et O.________, de l'Hôpital Z.________), psychiatrique
(rapport du 20 avril 2004 des docteurs L.________ et M.________, de l'Hôpital
Z.________), orthopédique (rapport du 17 février 2005 du docteur R.________, de
l'Hôpital Z.________) et, enfin, neurologique (rapport du 27 février 2006 du
docteur B.________). Sur la base de ces expertises, l'assureur-accidents a
supprimé ses prestations au 31 août 2006, motif pris qu'il ne subsistait plus
de séquelles en relation avec l'accident du 8 septembre 2000 (décision du 15
août 2006, confirmée sur opposition le 5 janvier 2007). Par jugement du 27 août
2008, le Tribunal administratif du canton de Berne a rejeté le recours formé
par l'assuré contre la décision sur opposition de la CNA (cause 200.2007.
6278.LAA).
Entre-temps, le 26 juin 2002, B.________ a présenté une demande de prestations
à l'assurance-invalidité. Après avoir recueilli divers documents médicaux dont
notamment le dossier CNA, l'Office AI du canton de Berne (ci-après : l'office
AI) a organisé un stage d'observation professionnelle qui a été rapidement
interrompu par l'assuré. Une expertise pluridisciplinaire a été confiée au
Centre W.________. Dans leur rapport du 27 juin 2007, les médecins de
W.________ ont posé les diagnostics de dégénérescence des disques
intervertébraux au niveau L5-S1 sans compression radiculaire [M51.3], de
syndrome d'impingement des deux hanches vraisemblablement congénitale [Q65.9]
et de simulation [Z76.5]; ils sont arrivés à la conclusion que depuis janvier
2002, il aurait été exigible de l'assuré qu'il exerce à 100 % une activité
adaptée et légère n'exigeant pas une position fixe ou courbée.

Le 3 août 2007, l'office AI a informé B.________ qu'il entendait rejeter sa
demande de prestations attendu qu'il présentait un degré d'invalidité de 38 %,
soit un taux inférieur au seuil donnant droit à une rente d'invalidité. Par
décision du 5 octobre 2007, il a maintenu cette prise de position.

Parallèlement, Helsana Assurances SA, en sa qualité d'assureur perte de gain en
cas de maladie, a versé des indemnités journalières. A la demande de cet
assureur, le degré de capacité de travail de B.________ a fait l'objet de deux
expertises (rapports du Centre V.________ et de l'Institut U.________, établis
respectivement les 3 et 15 avril 2007). Par décision du 30 avril 2007,
confirmée sur opposition le 9 août 2007, Helsana Assurances SA a mis un terme
au versement de ses prestations. L'assuré a déféré la décision sur opposition
au Tribunal administratif du canton de Berne, qui a partiellement admis son
recours (jugement du 27 août 2008; cause 200. 2007.6362.CM).

B.
Saisi d'un recours de B.________ contre la décision de l'office AI (du 5
octobre 2007), le Tribunal administratif du canton de Berne, après avoir
ordonné l'apport des procédures en matière d'accidents et de maladie, l'a
rejeté par jugement du 27 août 2008.

C.
Le prénommé interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement
dont il requiert l'annulation. Il conclut à l'allocation d'une rente
d'invalidité entière, "éventuellement du 13 janvier 2001 au 5 octobre 2007"; à
titre subsidiaire, au renvoi de la cause à l'office AI pour investigations
complémentaires et nouvelle décision.

L'office AI conclut au rejet du recours. De son côté, l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit selon l'art. 95 sv. LTF. Le Tribunal fédéral applique le
droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments de la
partie recourante ou par la motivation de l'autorité précédente. Eu égard à
l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine que
les griefs invoqués, pour autant que les vices ne soient pas évidents. Il n'est
pas tenu de traiter toutes les questions juridiques qui se posent, comme le
ferait une autorité de première instance, lorsque celles-ci ne sont pas ou plus
abordées devant lui. Le Tribunal fédéral statue par ailleurs sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été
établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de
l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit
expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2
LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut être pris en
considération.

2.
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et la
jurisprudence sur la notion d'invalidité et son évaluation ainsi que les
principes jurisprudentiels relatifs à la valeur probante des rapports médicaux.
Il suffit donc d'y renvoyer.

3.
La juridiction cantonale a considéré que l'assuré était capable d'exercer, à
plein temps et sans limitation de rendement, une activité adaptée légère. Elle
s'est fondée pour cela sur le rapport d'expertise réalisé par W.________. Les
premiers juges ont en effet estimé que ce rapport avait pleine valeur probante
dès lors que les conclusions médicales retenues reposaient sur des examens
cliniques approfondis, tenaient compte de l'ensemble des éléments médicaux à
disposition, et prenaient appui sur des considérations claires et
convaincantes. S'agissant des conséquences, sur la capacité de travail, des
troubles somatiques de l'assuré, les diverses expertises effectuées étaient
concordantes pour dire que les limitations constatées ne constituaient pas un
obstacle à l'exercice d'une activité légère. Quant à l'aspect psychique de son
état de santé, toujours selon les premiers juges, il se justifiait de s'écarter
de l'expertise psychiatrique de l'Hôpital Z.________ selon laquelle B.________
présentait un trouble de l'adaptation avec une réaction dépressive entraînant
une incapacité de travail de 50 %. D'une part, cette expertise était antérieure
de trois ans à celle de W.________. D'autre part, elle accordait une large
place à des facteurs étrangers à l'invalidité tels que le manque d'intégration
sociale et la durée de l'incapacité de travail. D'ailleurs, l'absence d'une
pathologie psychiatrique atteignant le seuil diagnostic se trouvait confirmée
par l'expertise récente de V.________. Contrairement au docteur E.________,
médecin traitant psychiatre, l'existence d'un trouble somatoforme douloureux ne
pouvait pas davantage être retenu. Au sujet du manque de coopération et de
l'attitude d'exagération de l'assuré mis en exergue par les médecins de
W.________ (surtout à l'occasion des examens neurologiques et
neuro-psychologiques auxquels celui-ci avait été soumis), la juridiction
cantonale a relevé qu'il ne s'agissait pas là d'une observation isolée mais
d'une tendance qui se retrouvait dans de nombreux documents médicaux même si le
comportement de B.________ avait pu changer d'un examinateur à l'autre.
Finalement, bien que l'office AI se fût fondé à tort sur l'année 2006 pour
procéder à la comparaison des revenus déterminants (au lieu de l'année 2003),
le résultat auquel il avait abouti n'était pas critiquable.

4.
Le recourant se plaint d'une constatation manifestement inexacte des faits
consécutive à une mauvaise appréciation des expertises au dossier. Il reproche
aux premiers juges de s'être écartés de l'expertise psychiatrique de l'Hôpital
Z.________ alors que rien ne permettait d'admettre que son état de santé
s'était amélioré depuis lors. Au contraire, dans un rapport du 17 septembre
2008, le docteur E.________, qui le traitait depuis octobre 2003, avait
diagnostiqué un syndrome psycho-organique avec divers déficits cognitifs qui
s'était aggravé au fil des années. En outre, sa coopération avait été jugée
bonne par la plupart des médecins; seuls les docteurs I.________ et S.________
de W.________ avaient qualifié son comportement de simulation. Il était donc
indispensable qu'il soit réexaminé au plan neurologique et neuro-psychologique.

5.
5.1 Lorsque le pouvoir d'examen est limité, le recourant ne peut critiquer les
constatations de faits que si ceux-ci ont été établis de manière manifestement
inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF, en particulier en violation de l'interdiction
constitutionnelle de l'arbitraire. L'appréciation des preuves est arbitraire
lorsqu'elle est manifestement insoutenable, en contradiction avec le dossier ou
contraire au sens de la justice et de l'équité ou encore lorsque le juge a
interprété les pièces du dossier de manière insoutenable, a méconnu des preuves
pertinentes ou s'est fondé exclusivement sur une partie des moyens de preuve
(ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62, 120 Ia 31 consid. 4b p. 40, 118 Ia 28 consid.
1b p. 30).

5.2 Il convient d'ajouter qu'aux termes de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait
nouveau, ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la
décision de l'autorité précédente. Il n'y a donc pas lieu de prendre en
considération le rapport du docteur E.________ (du 17 septembre 2008) produit à
l'appui du recours.

6.
En l'occurrence, c'est en vain que le recourant se réfère à l'avis émis par les
psychiatres de l'Hôpital Z.________ pour contester l'évaluation, par les
médecins de W.________, de son état de santé à la date d'établissement de leur
expertise. Ces médecins ont en effet constaté, à l'instar de ce que le docteur
E.________, avait déjà indiqué dans un rapport du mois de juin 2006 à
l'intention de la CNA, que l'assuré ne présentait plus de signes dépressifs et
que ses plaintes portaient principalement sur des difficultés de nature
cognitive (perte de la mémoire, troubles de la concentration). Cela étant, les
divers rapports du médecin traitant au dossier ne sont pas susceptibles de
faire douter du bien-fondé de l'appréciation des experts de W.________ sur
l'absence de fondement médical aux troubles neuro-psychologiques décrits par
l'assuré et dont la gravité a d'ailleurs conduit lesdits experts à évoquer une
part de simulation. L'explication qu'ils ont donnée à cet égard - à savoir que
les résultats des tests réalisés étaient incompatibles avec l'inexistence
avérée de lésions cérébrales chez B.________ - est convaincante. On notera que
le neurologue mandaté par la CNA était également d'avis qu'il n'y avait aucune
limitation de la capacité de travail sous l'angle neurologique, les problèmes
de concentration et de mémoire devant être rapportés à une réaction
psychologique négative d'une personnalité frustre et mal intégrée en Suisse
(voir le rapport du docteur B.________ du 27 février 2006). Au surplus, au vu
de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique
et un mandat d'expertise (ATF 124 V 170 consid. 4 p. 175; arrêt 9C_94/2009 du
29 avril 2009 consid. 3.3 et les arrêts cités), on ne saurait remettre en cause
une expertise ordonnée par l'administration ou un juge et procéder à de
nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont
une opinion contradictoire. En ce qui concerne, enfin, la situation médicale de
l'assuré prévalant antérieurement à l'expertise de W.________, le recours ne
contient aucune motivation exposant en quoi le refus par les premiers juges de
reconnaître l'existence d'une incapacité de travail invalidante violerait le
droit ou serait arbitraire. On se limitera à constater que les psychiatres de
l'Hôpital Z.________ ont mis un accent particulier sur les problèmes
d'intégration rencontrés par l'assuré, de sorte qu'il ne paraît en tout cas pas
insoutenable d'avoir considéré que des facteurs étrangers à l'invalidité
contribuaient de manière prépondérante à l'incapacité de travail (sur la portée
des facteurs psycho-sociaux et sociaux-culturels lors de l'examen du caractère
invalidant d'un trouble psychique voir ATF 127 V 294 consid. 5a p. 299).

Il s'ensuit qu'en niant le droit de B.________ à une rente d'invalidité, la
juridiction cantonale n'a pas violé le droit fédéral, étant précisé que le
prénommé n'a adressé aucune critique sur les autres aspects du jugement
entrepris, notamment l'appréciation de ses limitations physiques et
l'évaluation proprement dite de son invalidité.

7.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant
(art. 66 al. 1 LTF), qui ne peut prétendre de dépens (art. 68 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal administratif du
canton de Berne, Cour des affaires de langue française, et à l'Office fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 7 juillet 2009

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Ursprung von Zwehl