Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.8/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_8/2008

Arrêt du 25 novembre 2008
Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Widmer et Frésard.
Greffier: M. Métral.

Parties
M.________,
recourant, représenté par Me Michel De Palma, avocat, avenue de Tourbillon 3,
1950 Sion,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, 6004
Lucerne,
intimée.

Objet
Assurance-accidents,

recours contre le jugement du Tribunal des assurances du canton du Valais du 15
novembre 2007.

Faits:

A.
M.________ a travaillé comme manoeuvre sur différents chantiers en Suisse dès
1987, notamment pour des activités de coffrage dans des tunnels. Il était
assuré contre les accidents et maladies professionnelles par la Caisse
nationale suisse d'assurance en cas d'accident (CNA).

Le 23 décembre 2003, cette dernière a été informée de l'hospitalisation de
M.________ en raison d'une maladie des voies respiratoires, du 15 au 20
décembre 2003. Il a subi une biopsie à ciel ouvert, avec thoracotomie latérale
droite, le 16 décembre 2003. Les diagnostics de fibrose interstitielle non
spécifique et hémosidérose du parenchyme du poumon droit, ainsi que de plaque
fibreuse de la plèvre pariétale droite ont été posés (rapport du 24 décembre
2003 de l'Institut central des hôpitaux valaisans). Le 22 juillet 2004, la CNA
l'a déclaré inapte à tous les travaux de construction souterrains avec
exposition aux poussières de quartz.

M.________ a été à nouveau hospitalisé du 19 au 22 décembre 2004, à l'Hôpital
Y.________. Les docteurs R.________, U.________ et A.________, médecins à
l'Hôpital Y.________, y ont constaté une lésion nodulaire spiculée du lobe
supérieure gauche et, à titre secondaire, notamment, un status après
thoracotomie droite et syndrome douloureux chronique au niveau de l'hémithorax
droit (rapport du 27 décembre 2004). Une expertise médicale a été confiée aux
docteurs L.________ et E.________, médecins au Centre hospitalier X.________.
Dans un rapport du 12 décembre 2005, ces derniers ont notamment posé les
diagnostics de silicose pulmonaire et ganglionnaire médiastinale, plaque
pleurale de nature asbestosique et artériopathie des membres inférieurs. Les
résultats des examens pratiqués suggéraient une pneumoconiose de nature
professionnelle, constituée d'une silicose et très probablement d'une asbestose
associée. Une atteinte respiratoire modérée en découlait, pouvant être comparée
à une invalidité de 50 % et permettant un travail avec des efforts physiques
légers, essentiellement en position assise. Il n'était pas nécessaire de
maintenir un traitement spécifique pour les atteintes pulmonaires, sous réserve
d'un contrôle après sevrage des bronchodilatateurs/corticoïdes prescrits
jusqu'alors.

A la suite de cette expertise, la CNA a reconnu le caractère de maladie
professionnelle des atteintes pulmonaires dont souffrait l'assuré. Elle a
alloué des prestations à ce titre, en particulier des indemnités journalières
pour une incapacité de travail de 50 % attestée par le docteur C.________,
médecin traitant de l'assuré.

Dans un rapport du 23 février 2006, le docteur H.________, spécialiste en
médecine du travail et médecine interne, de la division de médecine du travail
de la CNA, a proposé l'octroi d'une indemnité pour une atteinte à l'intégrité
de 25 %. La CNA a mis fin au versement des indemnités journalières et a alloué
une rente fondée sur un taux d'invalidité de 28 %, dès le 1er avril 2006; elle
a également alloué une indemnité pour une atteinte à l'intégrité de 25 %
(décision du 11 mai 2006 et décision sur opposition du 27 juillet 2006).

B.
L'assuré a recouru devant le Tribunal des assurances du canton du Valais, en
concluant à l'octroi d'une rente fondée sur un taux d'invalidité de 50 % au
moins et d'une indemnité pour une atteinte à l'intégrité de 55 %. En cours de
procédure, il a notamment produit un rapport du docteur C.________ daté du 5
janvier 2006 [recte: 2007] et faisant état d'une dégradation de l'état de santé
de l'assuré. Le Tribunal des assurances du canton du Valais a rejeté le recours
par jugement du 15 novembre 2007.

Parallèlement à la procédure ouverte devant la juridiction cantonale, l'assuré
a annoncé à la CNA, par lettre du 7 février 2007, qu'il était victime d'une
rechute ou de séquelles tardives. La CNA a ordonné plusieurs mesures
d'instruction, dont il ressort que le docteur C.________ a diagnostiqué, dans
un rapport du 14 mai 2007, un cancer bronchique du lobe supérieur gauche. La
CNA a reconnu l'origine professionnelle de cette atteinte maladive et a pris en
charge le traitement médical. Par décision du 15 novembre 2007, elle a modifié
le taux de la rente allouée à l'assuré, en le portant à 100 % avec effet dès le
1er février 2007.

C.
M.________ a interjeté un recours en matière de droit public contre le jugement
du 15 novembre 2007. Il en a demandé l'annulation, en concluant à l'octroi
d'une rente de l'assurance-accidents fondée sur un taux d'invalidité de 50 % au
moins pour la période du 1er avril 2006 au 31 janvier 2007, et d'une indemnité
pour une atteinte à l'intégrité de 55 %, sous suite de dépens. Il demande en
outre que les frais de procédure soient mis à la charge de l'Etat du Valais.
L'intimée a conclu au rejet du recours. Elle a précisé qu'une partie des
conclusions du recourant était devenue sans objet, au motif qu'elle avait
décidé, le 22 février 2008, de lui allouer une indemnité pour une atteinte à
l'intégrité de 55 %. Cette indemnité complétait celle qui avait déjà été
versée, de manière à prendre en considération la péjoration de l'état de santé
annoncée à titre de rechute ou de séquelle tardive. Par acte du 26 février
2008, M.________ a retiré sa conclusion relative à l'octroi d'une indemnité
pour atteinte à l'intégrité.

L'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur l'étendue du droit à une rente de l'assurance-accidents
pour la période du 1er avril 2006 au 31 janvier 2007.

2.
Le recourant demande l'édition du dossier complet de l'assurance-invalidité, à
titre de moyen de preuve. Il n'y a pas lieu d'accéder à cette demande, pour les
motifs déjà exposés par la juridiction cantonale, à laquelle la même requête
avait été adressée. Il convient, sur ce point, de renvoyer au jugement
entrepris (consid. 2).

Ce jugement expose, par ailleurs, les règles légales et la jurisprudence
pertinentes, relatives à la notion d'invalidité et à la manière de fixer le
taux d'invalidité. Il convient également d'y renvoyer sur ces points (consid.
3a).

3.
Le recourant conteste le taux d'invalidité de 28 % fixé par la juridiction
cantonale. Il rappelle que l'atteinte à la santé dont il souffre l'empêche de
travailler dans un milieu comportant des poussières. La juridiction cantonale
s'était fondée pour l'essentiel sur une évaluation de la capacité de travail
résiduelle par le docteur H.________, qui ne prenait pas en considération cette
«interdiction formelle de tout contact avec quelque poussière que ce soit». En
outre, les médecins de X.________ avaient évalué son taux d'invalidité à 50 %,
en considérant que seuls pouvaient être effectués des travaux légers
essentiellement en position assise, avec interdiction absolue du contact avec
de la poussière. Enfin, la seule évolution de la maladie, entraînant une
incapacité de travail et de gain de 100 % quelques mois après la décision
contestée, rend invraisemblable une invalidité limitée à 28 % à l'époque de la
décision sur opposition litigieuse.

4.
4.1 Le recourant oppose les constatations des docteurs L.________ et
E.________, à celles du docteur H.________. Mais en réalité, le docteur
H.________ a évalué le taux d'atteinte à l'intégrité et la capacité de travail
résiduelle de l'assuré en se fondant, pour l'essentiel, sur les résultats des
examens pratiqués par ses confrères de X.________. Ses déterminations
convergent donc largement avec celles des docteurs L.________ et E.________.
Ces médecins ont précisé que les tests respiratoires effectués démontraient une
atteinte respiratoire modérée; «ce résultat [pouvait] être comparé à une
invalidité de 50 %» et permettait un travail avec des efforts physiques légers
essentiellement en position assise. Comme l'ont souligné à juste titre les
premiers juges, l'«invalidité» de 50 % à laquelle il est fait référence dans ce
contexte correspond à la limitation de la capacité respiratoire de l'assuré; il
s'agit d'une invalidité dite «médico-théorique» qui ne correspond pas au taux
d'invalidité déterminant pour établir le droit à une rente de
l'assurance-accidents. Ce dernier dépend en revanche étroitement de la capacité
résiduelle de travail de l'assuré, à propos de laquelle les rapports des
docteurs L.________ et E.________, d'une part, et celui du docteur H.________,
d'autre part, ne divergent que sur un point : le docteur H.________ n'a pas
posé pour exigence que l'activité professionnelle soit exercée en position
essentiellement assise. Cette divergence ne revêt toutefois pas une importance
déterminante (cf. consid. 4.2 infra).

4.2 En se fondant à juste titre, compte tenu de ce qui précède, sur les
constatations des docteurs L.________, E.________ et H.________, la juridiction
cantonale a fixé le revenu que le recourant pouvait encore réaliser, malgré
l'atteinte pulmonaire dont il souffrait. Elle s'est référée, sur ce point, à
l'Enquête suisse sur la structure des salaires 2004, publiée par l'Office
fédéral de la statistique, comme l'admet la jurisprudence en pareil cas (cf.
ATF 126 V 75 consid. 3b p. 76). Après avoir notamment procédé à un abattement
de 20 % par rapport au salaire ressortant de ces données statistiques, afin de
tenir dûment compte des circonstances personnelles et professionnelles telles
que les limitations liées au handicap, à l'âge, aux années de service ou au
taux d'activité (cf. ATF 126 V 75 consid. 5 p. 78), elle a considéré que le
recourant pouvait réaliser, dans un marché du travail équilibré, un revenu
annuel de 46'932 fr.

L'abattement de 20 % pris en considération par les premiers juges accorde
suffisamment de poids aux limitations physiques du recourant, en particulier à
son inaptitude à travailler dans un milieu poussiéreux, y compris si l'on tient
compte de la nécessité de travailler en position essentiellement assise. Dans
ce contexte, on précisera que les médecins n'ont pas interdit tout contact avec
quelque poussière que ce soit, mais ont déclaré l'assuré inapte à travailler
dans un milieux poussiéreux, ce qui est tout de même moins restrictif. Il
s'ensuit que le calcul effectué par la juridiction cantonale pour établir le
revenu que pouvait réaliser le recourant, au moment de la décision sur
opposition litigieuse, malgré les atteintes pulmonaires dont il souffrait, ne
prête pas flanc à la critique. Il n'en va pas différemment des constatations
relatives au revenu de 64'080 fr. qu'il aurait pu réaliser sans invalidité,
toujours d'après les premiers juges; le recourant ne soulève d'ailleurs aucun
grief sur ce point. Un taux d'invalidité de 27 % résulte d'une comparaison
entre ces revenus, de sorte que les conclusions du recourant tendant à l'octroi
d'une rente fondée sur un taux d'invalidité supérieur à 28 %, dès le 1er avril
2006, sont mal fondées. L'évolution vers un taux d'invalidité de 100 % en
quelques mois seulement n'est pas invraisemblable, l'apparition d'un cancer
bronchique pouvant expliquer cette dégradation soudaine.

5.
5.1 Dans un premier temps, le recourant a conclu à l'octroi d'une indemnité
pour une atteinte à l'intégrité de 55 %. Il a par la suite retiré cette
conclusion, devenue sans objet par suite de la décision de l'intimée du 22
février 2008. Il convient néanmoins d'examiner sommairement quel succès le
recourant pouvait espérer lorsqu'il a pris ses conclusions initiales, ce qui
pourrait avoir une influence sur la répartition des frais et dépens (art. 71
LTF en relation avec l'art. 72 de la loi de procédure civile fédérale, du 4
décembre 1947; ATF 125 V 373 consid. 2a p. 374).
5.1.1 Le jugement entrepris expose les bases légales et la jurisprudence
relatives à l'octroi d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité, y compris la
jurisprudence relative aux tables d'indemnisation des atteintes à l'intégrité
selon la LAA, établies par la division médicale de la CNA (consid. 4). Il
convient d'y renvoyer sur ces points.
5.1.2 La table 10 d'indemnisation des atteintes à l'intégrité selon la LAA
prévoit qu'en cas de séquelles pulmonaires d'accidents ou de maladies
professionnelles, une diminution de 33, 3 % de la fonction respiratoire
correspond à une atteinte à l'intégrité de 5 %; d'après la même table, une
diminution de la fonction respiratoire de 100 % entraîne une atteinte à
l'intégrité de 80 %. Les docteurs L.________ et E.________ ont constaté une
invalidité médico-théorique de 50 %, compte tenu des tests de la fonction
respiratoire qu'ils ont fait passer à l'assuré. Pour sa part, le docteur
H.________, en prenant pour référence les résultats de ces tests, est parvenu à
des conclusions quasiment identiques, puisqu'il considère que ces résultats
correspondent à une limitation fonctionnelle de 33,5 à 50 %. Il a proposé de
retenir un taux d'atteinte à l'intégrité de 25 %, correspondant à une
limitation fonctionnelle de 50 %, en précisant que ce taux incluait déjà la
dégradation probable de l'état de santé de l'assuré.

Même si, a posteriori, le docteur H.________ semble s'être montré relativement
restrictif dans l'admission d'une telle dégradation probable, les premiers
juges se sont fondés sur des avis médicaux probants pour fixer le taux
d'atteinte à l'intégrité, de sorte que le recourant n'avait que peu de chances
d'obtenir gain de cause en contestant le jugement entrepris sur ce point. Dans
ce contexte, il convient de préciser que contrairement à l'avis du recourant,
l'intimée avait de bons motifs de tenir l'état de santé de l'assuré pour
stabilisé et de statuer sur le droit à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité
dans la décision sur opposition du 27 juillet 2006. Le médecin traitant de
l'assuré décrivait à l'époque une situation stationnaire, sur le plan
bronchopulmonaire, sans dégradation ni amélioration objective clinique et
fonctionnelle de la fonction respiratoires dans les derniers mois (rapport du
28 août 2006 du docteur C.________).

6.
Vu ce qui précède, le recourant ne peut pas prétendre de dépens à la charge de
l'intimée et supportera les frais de justice (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF;
consid. 5.1 supra).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du
canton du Valais et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 25 novembre 2008

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Ursprung Métral