Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.683/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_683/2008

Arrêt du 3 août 2009
Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Frésard et Niquille.
Greffier: M. Métral.

Parties
M.________,
représenté par Me Bruno de Weck, avocat,
recourant,

contre

La Bâloise Compagnie d'Assurances, Aeschengraben 21, 4051 Bâle,
représentée par Me Jean-Marie Favre, avocat,
intimée.

Objet
Assurance-accidents (traumatisme cranio-cérébral, lien de causalité),

recours contre le jugement du Tribunal cantonal fribourgeois du 12 juin 2008.

Faits:

A.
A.a M.________, né en 1944, travaillait en qualité d'infirmier instrumentiste
au service de l'Hôpital X.________. Il était assuré contre les accidents par La
Bâloise, Compagnie d'Assurances (ci-après : la Bâloise).

Les 23 novembre et 24 décembre 2001, M.________ a été victime de deux
accidents. Le premier lui a occasionné un important traumatisme par écrasement
du gros orteil droit, une entorse bénigne du genou droit et un lumbago aigu
post-effort. Le second s'est déroulé lors d'un séjour à l'étranger : alors
qu'il sortait du domicile d'un ami, l'assuré a glissé sur des escaliers
verglacés et a chuté; sa tête a heurté le sol, ce qui a entraîné une perte de
connaissance de plusieurs heures. Les médecins du Centre médical Y.________, où
l'assuré a immédiatement été hospitalisé, ont mis en évidence une lésion
hyperextensionnelle de la colonne cervicale et de la moelle épinière, une
tétraparésie, une spondylarthrose cervicale et une discarthrose C5-C6. Rapatrié
le 9 janvier 2002 en Suisse, l'intéressé a séjourné à l'Hôpital Z.________
jusqu'au 25 janvier suivant, date de son retour à domicile. Selon le rapport de
sortie de l'hôpital (du 29 janvier 2002), il souffrait d'un status
post-traumatisme cranio-cérébral avec parésie résiduelle du membre supérieur
droit faiblement régressive, d'un état dépressif réactionnel et d'une
cervicarthrose pluriétagée à prédominance C5-C6 avec status post-contusion
cervicale. En raison d'une thymie à caractère dépressif, il a été adressé au
docteur S.________, psychiatre et psychothérapeute, qui a diagnostiqué un
épisode dépressif sévère sans symptôme psychotique (rapport du 21 mai 2002).

Dans un rapport du 13 septembre 2002, le docteur H.________, spécialiste en
neurologie mandaté comme expert par la Bâloise, a diagnostiqué un status après
chute ayant entraîné probablement un traumatisme cranio-cérébral et une
contusion médullaire s'étant traduits par un coma et une tétraparésie
transitoires, des cervico-brachialgies, des troubles sensitivomoteurs
hémicorporels droits persistants sans substrat organique démontrable, ainsi
qu'une surcharge psychogène dans le cadre d'un état anxio-dépressif. Selon
l'expert, il n'existait plus aucune lésion organique objectivable en relation
de causalité naturelle avec l'accident du 24 décembre 2001; le tableau présenté
par l'assuré était essentiellement de nature psychogène, même si une « épine
organique » sous-jacente ne pouvait être totalement exclue.

La Bâloise a ensuite confié à la doctoresse U.________, médecin à l'Hôpital
V.________, la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique. Selon le rapport
du 2 septembre 2003 établi par ce médecin, l'assuré présentait une personnalité
narcissique avec des défenses obsessionnelles ainsi que des traits hystériques
et démonstratifs. La symptomatologie présentée n'était plus en relation de
causalité avec les événements traumatiques vécus par l'assuré, mais était
exclusivement d'origine maladive.

Par décision du 14 octobre 2003, la Bâloise a constaté que les plaintes de
M.________ n'étaient plus en relation de causalité naturelle avec les accidents
des 23 novembre et 24 décembre 2001; elle a mis fin aux prestations de
l'assurance-accidents avec effet dès le 31 octobre 2003. La Bâloise a maintenu
son refus d'allouer des prestations au-delà du 31 octobre 2003 par décision sur
opposition du 15 janvier 2004.

B.
B.a Par jugement du 17 février 2005, le Tribunal administratif du canton de
Fribourg a rejeté le recours formé par l'assuré contre cette décision sur
opposition. M.________, qui a encore séjourné du 25 mai au 29 juin 2005 à la
Clinique R.________, a déféré la cause au Tribunal fédéral des assurances. Ce
dernier a annulé le jugement du 17 février 2005 et renvoyé la cause à la
juridiction cantonale pour qu'elle complète l'instruction par une nouvelle
expertise et statue à nouveau (arrêt du 21 octobre 2005).
B.b Du 2 avril au 28 avril 2007, M.________ a suivi une nouvelle cure à la
Clinique R.________. Auparavant, le Tribunal administratif du canton de
Fribourg avait confié au docteur C.________ le soin de réaliser une expertise
psychiatrique. Celui-ci a rendu son rapport le 19 juillet 2007. Il a posé les
diagnostics de syndrome dépressif anxieux d'intensité moyenne (F32.1 selon
l'ICD-10), de trouble moteur dissociatif du bras droit (F44.4), de trouble
douloureux somatoforme persistant (F45.4) et de discret syndrome
psycho-organique post-commotionnel (F07.2). Ces troubles avaient une composante
à la fois psycho-organique et psychiatrique; ils n'étaient pas présents avant
l'accident du 24 décembre 2001. L'expert a proposé d'admettre un lien de
causalité naturelle avec cet accident.
Chacune des parties s'est ensuite déterminée, la Bâloise produisant notamment
une prise de position du 25 septembre 2007 de son médecin-conseil, le docteur
K.________, à L.________. Puis le Tribunal cantonal fribourgeois a statué en
rejetant le recours de l'assuré, par jugement du 12 juin 2008. Il a tenu pour
établi un rapport de causalité naturelle entre l'accident du 24 septembre 2001
et les affections constatées par le docteur C.________, mais a nié l'existence
d'un rapport de causalité adéquate.

C.
M.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement,
dont il demande l'annulation. En substance, il conclut à la condamnation de
l'intimée au paiement d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité, ainsi qu'au
maintien du paiement d'indemnités journalières ou à l'octroi d'une rente pour
la période postérieure au 31 octobre 2003. A l'appui de son recours, il a
produit un rapport établi par le docteur F.________, médecin consultant à
l'Hôpital T.________, à P.________, faisant état de diverses atteintes
cérébrales (rapport du 4 août 2008).

L'intimée a produit une prise de position du docteur G.________ relative au
rapport du docteur F.________ et a conclu au rejet du recours, sous suite de
frais. L'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Dans l'arrêt de renvoi du 21 octobre 2005, le Tribunal fédéral des assurances a
déclaré irrecevables les conclusions du recourant relatives à une indemnité
pour atteinte à l'intégrité, faute de décision de l'intimée sur ce point
(consid. 1). De telles conclusions ne sont pas davantage recevables dans la
présente procédure, l'objet de la contestation étant resté le même (sur la
notion de décision déterminant l'objet de la contestation pouvant être déférée
en justice par voie de recours, cf. ATF 125 V 413 consid. 1a p. 414; ULRICH
MEYER/ISABEL VON ZWEHL, L'objet du litige en procédure de droit administratif
fédéral, in : Mélanges Pierre Moor, 2005 no 8 p. 439). Compte tenu de cette
irrecevabilité et des autres conclusions prises par le recourant, seul reste
litigieux le droit à des indemnités journalières ou à une rente de
l'assurance-accidents pour la période postérieure au 31 octobre 2003.

2.
Aux termes de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne
peut être présenté dans un recours au Tribunal fédéral, à moins de résulter de
la décision de l'autorité précédente. Cette règle s'applique également lorsque
la procédure porte sur des prestations en espèces de l'assurance-accidents ou
de l'assurance militaire, nonobstant le pouvoir d'examen relativement étendu
dont dispose le Tribunal fédéral dans ce type de litige (art. 105 al. 3 LTF;
ATF 135 V 194). En l'occurrence, les nouveaux documents médicaux produits par
le recourant et l'intimée ne résultent pas du jugement entrepris, au sens de
l'art. 99 al. 1 LTF, et ne peuvent donc pas être pris en considération. Dans le
même sens, la demande de complément d'instruction présentée par l'intimée, qui
ne pourrait elle aussi qu'aboutir à la production de preuves nouvelles, doit
être rejetée.

Le recourant soutient, certes, que le rapport du docteur F.________ du 14 août
2008 pourrait fonder une demande immédiate de révision de l'arrêt du Tribunal
fédéral en cas de rejet de son recours. Cela paraît douteux, compte tenu des
conditions posées pour la révision d'un arrêt du Tribunal fédéral (cf. en
particulier l'art. 125 LTF, en relation avec l'art. 61 let. i LPGA; voir
également PIERRE FERRARI, in Commentaire de la LTF, 2009, no 2 sv. p. 1215
sv.). Quoi qu'il en soit, cette question ne se pose pas en l'espèce, compte
tenu de ce qui suit.

3.
3.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas
d'accident professionnel, d'accident non professionnel ou de maladie
professionnelle. Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré
suppose notamment entre l'événement dommageable de caractère accidentel et
l'atteinte à la santé un lien de causalité naturelle. Cette condition est
remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que sans cet événement accidentel, le
dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la
même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou
immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à
d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il se
présente comme la condition sine qua non de cette atteinte. Savoir si
l'événement assuré et l'atteinte en question sont liés par un rapport de
causalité naturelle est une question de fait que l'administration ou, le cas
échéant, le juge, examine en se fondant essentiellement sur des renseignements
d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré
de la vraisemblance prépondérante (ATF 129 V 177 consid. 3.1 p. 181, 402
consid. 4.3 p. 406).

3.2 En matière de lésions du rachis cervical par accident de type « coup du
lapin », de traumatisme analogue ou de traumatisme cranio-cérébral sans preuve
d'un déficit fonctionnel organique, l'existence d'un lien de causalité
naturelle entre l'accident et l'incapacité de travail ou de gain doit en
principe être reconnue en présence d'un tableau clinique typique présentant de
multiples plaintes (maux de tête diffus, vertiges, troubles de la concentration
et de la mémoire, nausées, fatigabilité, troubles de la vue, irritabilité,
dépression, modification du caractère, etc.). Encore faut-il que l'existence
d'un tel traumatisme et de ses suites soit dûment attestée par des
renseignements médicaux fiables (ATF 119 V 335 consid. 1 p. 337 sv., 117 V 359
consid. 4b p. 360 sv.). La jurisprudence a posé récemment diverses exigences
sur les mesures d'instruction nécessaires de ce point de vue. Elle a considéré,
en particulier, qu'une expertise pluridisciplinaire est indiquée si l'état de
santé de l'assuré ne présente ou ne laisse pas espérer d'amélioration notable
relativement rapidement après l'accident, c'est-à-dire dans un délai d'environ
six mois (ATF 134 V 109 consid. 9 p. 122 ss).

4.
4.1 La juridiction cantonale a considéré que le recourant souffrait d'atteintes
à la santé psychique en relation de causalité naturelle avec l'accident assuré.
Elle s'est fondée pour l'essentiel, sur l'expertise du docteur C.________.
L'intimée en conteste la valeur probante en s'appuyant sur une prise de
position établie par son médecin-conseil et sur le rapport établi par la
doctoresse U.________ le 2 septembre 2003.

4.2 Dans l'arrêt de renvoi du 21 octobre 2005, le Tribunal fédéral des
assurances a considéré, en se fondant sur l'expertise réalisée par le docteur
H.________, que l'existence d'une atteinte organique objectivable, en
particulier d'une atteinte cérébrale, n'était pas démontrée au degré de la
vraisemblance prépondérante. Il n'y a pas lieu de revenir sur ce point. Il n'en
reste pas moins que le recourant a subi un traumatisme cranio-cérébral et qu'il
présente depuis lors de nombreux symptômes entrant dans le tableau clinique
décrit au considérant 3.2 ci-avant. Sans pouvoir mettre en évidence une
atteinte organique démontrable, le docteur H.________ n'a pas exclu l'existence
d'une « épine organique sous-jacente ». De manière plus affirmative, les
docteurs E.________ et A.________, médecins à la Clinique R.________, ont fait
état d'indices cliniques d'une atteinte cérébrale organique, qu'il était
toutefois difficile de distinguer clairement de l'évolution psycho-pathologique
du patient (rapport du 18 juillet 2005). Enfin, le docteur C.________ a
souligné qu'une atteinte organique lui paraissait vraisemblable, en renonçant
toutefois à se prononcer plus précisément sur ce point compte tenu, notamment,
de son domaine de spécialité.

Il ressort de ces différents avis médicaux que certaines indices laissent
soupçonner une atteinte organique à la santé, quand bien même celle-ci ne peut
être démontrée au degré de la vraisemblance prépondérante. Partant, on peut se
demander s'il ne faudrait pas appliquer, en l'espèce, la jurisprudence exposée
au considérant 3.2 ci-avant pour statuer sur la question du rapport de
causalité naturelle entre l'accident assuré et les affections dont souffre le
recourant. Il n'y a pas lieu de trancher la question. En effet, même en
considérant que les atteintes à la santé du recourant sont exclusivement
d'ordre psychique, il faut admettre qu'elles sont en relation de causalité
naturelle avec l'accident assuré, comme l'ont admis les premiers juges.

4.3 Le docteur C.________ disposait d'un dossier complet et a eu trois
entretiens avec l'assuré. Après un rappel des faits, il a décrit les plaintes
actuelles de l'assuré et ses propres observations cliniques, puis a procédé à
une « appréciation et discussion ». Il y a exposé de manière plus détaillée,
sur sept pages, son analyse et ses constatations relatives à l'état de santé de
l'assuré, ainsi qu'à l'origine accidentelle des atteintes à la santé mises en
évidence. Il y précise que des atteintes à la santé psychique importantes, et
distinctes d'atteintes psycho-organiques plus directement liées au traumatisme
cranio-cérébral, sont apparues rapidement après l'accident. Au moment de
l'expertise, ces atteintes à la santé psychique dominaient à ce point le
tableau clinique qu'il a renoncé à proposer de nouvelles investigations
somatiques. En substance, l'expert considère que le recourant avait toujours
été en bonne santé avant l'accident, qu'il était assidu au travail, voire
hyperactif, s'efforçant depuis son arrivée en Suisse d'afficher un comportement
exemplaire et un modèle de « réussite » professionnelle, sociale et économique.
L'expert a évoqué dans ce contexte des traits obsessionnels (perfectionnisme,
rationalisation) et narcissiques (identité peu assurée en quête de la
reconnaissance d'autrui, crainte de l'échec), avec une certaine psychorigidité.
Il a ensuite fait un lien entre les événements biographiques décrits et ces
traits de personnalité prémorbide, d'une part, et l'accident du 24 décembre
2001 d'autre part. Il a ainsi expliqué que l'accident avait entraîné un coma de
quatre à six heures, au sortir duquel l'assuré s'était trouvé confronté à une
tétraplégie, devenue progressivement tétraparésie, accompagnée de douleurs et
de troubles cognitifs cérébraux. Cet accident, et les circonstances dans
lesquelles l'assuré s'est réveillé, ont été vécus comme un cataclysme,
entraînant très rapidement un syndrome dépressif anxieux sévère dû à
l'effondrement des ressources adaptatives; il en est résulté une
désorganisation de la personnalité de l'assuré. De manière inconsciente,
celui-ci a progressivement répondu au syndrome dépressif anxieux initial par le
développement de troubles somatoformes douloureux et d'un syndrome moteur
dissociatif du bras droit. En réponse aux questions posées, l'expert a ajouté
que les troubles psychiques entraînaient une incapacité de travail totale,
probablement définitive, et qu'ils étaient en relation de causalité naturelle
avec l'accident assuré.

4.4 Compte tenu de ce qui précède, l'expertise du docteur C.________ répond en
tous points aux exigences posées par la jurisprudence en la matière. On
observera en particulier que l'expert ne s'est pas limité à un exposé
relativement abstrait de divers mécanismes psychiques, mais qu'il a pris soin
de mettre en rapport ses explications d'ordre médical avec des éléments tirés
de l'anamnèse. Contrairement à l'opinion de l'intimée et de son
médecin-conseil, l'expertise n'apparaît pas incohérente et rien ne permet
d'affirmer qu'elle ne reposerait pas sur des données scientifiques, ou que
l'expert se serait écarté d'une « evidence based medicine ». Il est vrai que le
docteur C.________ n'a pas procédé à une véritable critique du rapport établi
précédemment par la doctoresse U.________, bien qu'il s'en soit distancié. Mais
d'une part, les premiers juges n'ont formulé aucune question dans ce sens.
D'autre part, on comprend bien que le point de vue du docteur C.________
diverge de celui de sa consoeur dès lors qu'il nie, contrairement à elle,
l'existence d'un syndrome dépressif avant le 24 décembre 2001. Sur ce point, la
doctoresse U.________ s'est appuyée sur des déclarations du docteur I.________
lors d'une conversation téléphonique, déclarations dont ce dernier a par la
suite clairement exposé qu'elles avaient mal été interprétées (lettre du 6
avril 2004). Ces précisions apportées par le docteur I.________, ainsi que le
poids considérable attribué par la doctoresse U.________, dans son analyse, à
l'existence d'un syndrome dépressif avant l'événement du 24 décembre 2001,
conduisent à diminuer sérieusement la valeur probante de l'expertise établie
par ses soins. Il s'ensuit que les premiers juges s'en sont tenus à juste titre
aux constatations et conclusions du docteur C.________ relatives à l'existence
d'un rapport de causalité naturelle entre les atteintes à la santé psychique du
recourant et l'accident assuré.

5.
5.1 Le droit à des prestations d'assurance suppose également, entre l'accident
et l'atteinte à la santé, un lien de causalité adéquate. En cas d'atteinte à la
santé physique, ce lien est généralement admis sans autre examen dès lors que
le rapport de causalité naturelle est établi (cf. ATF 127 V 102 consid. 5b/bb
p. 103). En revanche, la jurisprudence a posé plusieurs critères en vue de
juger du caractère adéquat du lien de causalité entre un accident et des
troubles d'ordre psychique développés ensuite par la victime. Elle a tout
d'abord classé les accidents en trois catégories, en fonction de leur
déroulement : les accidents insignifiants ou de peu de gravité (par exemple une
chute banale), les accidents de gravité moyenne et les accidents graves. Pour
procéder à cette classification, il convient non pas de s'attacher à la manière
dont l'assuré a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se
fonder, d'un point de vue objectif, sur l'événement accidentel lui-même. En
présence d'un accident de gravité moyenne, il faut prendre en considération un
certain nombre de critères, dont les plus importants sont les suivants :
les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère
particulièrement impressionnant de l'accident;
la gravité ou la nature particulière des lésions physiques compte tenu
notamment du fait qu'elles sont propres, selon l'expérience, à entraîner des
troubles psychiques;
la durée anormalement longue du traitement médical;
les douleurs physiques persistantes;
les erreurs dans le traitement médical entraînant une aggravation notable des
séquelles de l'accident;
les difficultés apparues au cours de la guérison et des complications
importantes;
le degré et la durée de l'incapacité de travail due aux lésions physiques.
Tous ces critères ne doivent pas être réunis pour que la causalité adéquate
soit admise. Un seul d'entre eux peut être suffisant, notamment si l'on se
trouve à la limite de la catégorie des accidents graves. Inversement, en
présence d'un accident se situant à la limite des accidents de peu de gravité,
les circonstances à prendre en considération doivent se cumuler ou revêtir une
intensité particulière pour que le caractère adéquat du lien de causalité soit
admis (ATF 115 V 133 consid. 6c p. 140, 403 consid. 5c p. 409).

5.1 En cas d'atteintes à la santé sans preuve de déficit organique consécutives
à un traumatisme de type « coup du lapin » à la colonne cervicale, un
traumatisme analogue ou un traumatisme cranio-cérébral, la jurisprudence
apprécie le caractère adéquat du rapport de causalité en appliquant, par
analogie, les mêmes critères que ceux dégagés à propos des troubles d'ordre
psychique. L'examen de ces critères est toutefois effectué sans faire de
distinction entre les composantes physiques ou psychiques : les critères
relatifs à la gravité ou à la nature particulière des lésions subies, aux
douleurs persistantes ou à l'incapacité de travail sont déterminants, de
manière générale, sans référence aux seules lésions ou douleurs physiques (ATF
117 V 359 consid. 6a p. 366 sv.; voir également arrêt U 249/01 du 30 juillet
2002 consid. 4a, in RAMA 2002 no U 470 p. 531). Par ailleurs, toujours en
relation avec l'appréciation du caractère adéquat du lien de causalité entre un
accident de type « coup du lapin » ou un traumatisme cranio-cérébral et des
atteintes à la santé sans preuve de déficit organique, le Tribunal fédéral a
précisé que le critère faisant référence au traitement médical était rempli en
cas de traitement prolongé spécifique et pénible, que les douleurs prises en
considération devaient revêtir une certaine intensité et que l'incapacité de
travail devait être importante, en dépit des efforts reconnaissables de
l'assuré (ATF 134 V 109 consid. 10 p. 126).

Nonobstant ce qui précède, il convient d'appliquer la jurisprudence exposée au
consid. 5.1 ci-avant (ATF 115 V 133 et 403), en particulier en distinguant
entre atteintes d'origine psychique et atteintes organiques, même en cas de
traumatisme de type « coup du lapin », de traumatisme analogue ou de
traumatisme cranio-cérébral, lorsque les troubles psychiques apparus après
l'accident constituent clairement une atteinte à la santé distincte et
indépendante du tableau clinique consécutif à un traumatisme de ce type (arrêt
U 96/00 du 12 octobre 2000 consid. 2b, in RAMA 2001 no U 412 p. 79; cf.
également ATF 134 V 109 consid. 9.5 p. 125 sv. et arrêts 8C_957/2008 du 1er mai
2009 consid. 4, 8C_425/2007 du 9 juillet 2008 consid. 4.2 et 8C_124/2007 du 20
mai 2008 consid. 3.2).

6.
6.1 En l'espèce, la jurisprudence relative au rapport de causalité entre des
troubles psychiques et un accident assuré est applicable indépendamment du
point de savoir si le recourant souffre encore directement de séquelles du
traumatisme cranio-cérébral, sans preuve de déficit organique, ou s'il souffre
exclusivement d'affections psychiques. Quoi qu'il en soit, en effet, des
troubles psychiques importants et distincts d'affections psycho-organiques
après un traumatisme cranio-cérébral ont rapidement dominé le tableau clinique.

6.2 La juridiction cantonale a nié l'existence d'un rapport de causalité
adéquate entre l'accident assuré et les atteintes à la santé psychique dont
souffre le recourant. Elle a considéré que la chute dans un escalier, le 24
décembre 2001, était de gravité moyenne au sens de la jurisprudence. Il
convient toutefois de préciser qu'au regard de la violence du choc, qui a
provoqué un coma de quatre à six heures, cet accident se situe au moins à la
limite de la catégorie des accidents graves. Par ailleurs, le recourant s'est
réveillé, plusieurs heures après sa perte de connaissance, dans une chambre
d'hôpital, en ayant perdu l'usage et la sensibilité de ses membres. Ces
symptômes ont rapidement régressé, mais le recourant a été maintenu au lit
strict jusqu'à deux jours avant son transfert pour l'Hôpital Z.________ le 9
janvier 2002. Il a alors été mis en position assise, puis debout, ce qu'il a
difficilement supporté au départ en raison de vertiges, ainsi que d'un
sentiment d'insécurité et de forte faiblesse dans les mains et les jambes. Les
symptômes initiaux ont pu lui faire craindre qu'il perdrait l'usage de ses
quatre membres et provoquer un choc important. Ils entrent en considération,
pour l'examen du rapport de causalité adéquate, soit au titre de circonstances
particulièrement impressionnantes de l'accident, soit au titre de lésions
physiques propres à entraîner des troubles psychiques. Une durée de quatre à
six heures les sépare de l'accident, certes, mais pas dans la perception qu'a
pu en avoir l'assuré immédiatement à son réveil; par ailleurs, à ce stade, la
perte de l'usage et de la sensibilité des quatre membres ne résultait pas,
selon toute vraisemblance, d'atteintes à la santé psychique. Dans la mesure où
l'accident subi le 24 décembre 2001 est au moins à la limite d'un accident
grave, ces seules circonstances suffisent à admettre le lien de causalité
adéquate litigieux (cf. arrêt U 2/07 du 19 novembre 2007 consid. 5.3.3, in SVR
2008 UV no 8 p. 26).

7.
7.1 Il ressort de ce qui précède que les symptômes présentés par le recourant
postérieurement au 31 octobre 2003 sont en relation de causalité naturelle et
adéquate avec l'accident assuré. Le docteur C.________ atteste, de manière
probante, la persistance d'une incapacité de travail durable en raison de ces
symptômes. L'intimée n'était donc pas en droit de mettre fin à ses prestations
en espèces dès cette date. La cause lui sera retournée pour qu'elle statue sur
les prestations (indemnités journalières, rente) dues au recourant.

7.2 Le recourant voit ses conclusions admises pour l'essentiel, de sorte qu'il
peut prétendre une indemnité de dépens à la charge de l'intimée (art. 68 al. 1
LTF). Cette dernière supportera par ailleurs les frais de justice (art. 66 al.
1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. Le jugement du
Tribunal cantonal fribourgeois, du 12 juin 2008, et la décision sur opposition
de La Bâloise Compagnie d'Assurances, du 15 janvier 2004, sont annulés, la
cause étant renvoyée à l'intimée pour nouvelle décision au sens des
considérants.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 750 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

3.
L'intimée versera au recourant la somme de 2800 fr. à titre de dépens pour la
dernière instance.

4.
La cause est renvoyée au Tribunal cantonal fribourgeois pour nouvelle décision
sur les dépens de la procédure antérieure.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal fribourgeois
et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 3 août 2009

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Ursprung Métral