Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.492/2008
Zurück zum Index I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_492/2008

Arrêt du 21 janvier 2009
Ire Cour de droit social

Composition
Mmes et M. les Juges Leuzinger, Juge présidant, Frésard et Niquille.
Greffier: M. Métral.

Parties
Secrétariat d'Etat à l'économie, Effingerstrasse 31, 3003 Berne,
recourant,

contre

H.________,
intimé,

Caisse Cantonale Genevoise de Chômage, 1201 Genève.

Objet
Assurance-chômage,

recours contre le jugement du Tribunal des assurances sociales du canton de
Genève du 15 mai 2008.

Faits:

A.
H.________ a travaillé pour l'entreprise X.________ Sàrl du 1er juillet 2004 au
31 mars 2007. Son épouse en est associée-gérante, avec signature individuelle,
et détient une part sociale de 19'000 fr. Sa fille est par ailleurs associée,
avec une part sociale de 1'000 fr. Le siège de la société est à l'adresse
privée du couple.

Le 19 avril 2007, H.________ s'est annoncé comme demandeur d'emploi à l'Office
de l'emploi du canton de Genève. Il a par la suite présenté une demande
d'indemnités journalières de chômage, en indiquant avoir été licencié pour des
raisons de restructuration de X.________ Sàrl; ni son épouse ni lui-même
n'avaient de participation financière dans la société. Il a produit à l'appui
de sa demande une attestation de X.________ Sàrl confirmant son activité
salariée, pour un montant de 2'000 fr. par mois, en qualité de responsable
d'une épicerie. La société a également attesté que ni l'assuré, ni son épouse,
n'avaient de participation financière à l'entreprise.

Après consultation du registre du commerce, la Caisse cantonale genevoise de
chômage (ci-après : la Caisse) a refusé l'octroi d'indemnités journalières de
chômage à H.________, au motif que la perte d'emploi n'était pas suffisamment
contrôlable, en raison de l'activité dirigeante exercée par son épouse au sein
de X.________ Sàrl (décision du 18 juin 2007). La Caisse a maintenu son refus
de prester par décision sur opposition du 22 octobre 2007, en considérant que
X.________ Sàrl pouvait reprendre à tout moment son activité dans l'un des
domaines constituant son but commercial, à savoir toute «activité dans le
domaine de l'épicerie et la vente de produits alimentaires et de boissons
alcoolisées ou autres».

B.
H.________ a recouru contre cette dernière décision, en exposant que l'épicerie
exploitée par X.________ Sàrl à la rue Y.________, à Z.________, avait
définitivement fermé le 31 mars 2007 et que le contrat de bail des locaux
commerciaux avait été résilié.

Par jugement du 15 mai 2008, le Tribunal des assurances sociales du canton de
Genève a annulé la décision sur opposition du 22 octobre 2007 et renvoyé la
cause à la Caisse pour qu'elle alloue les indemnités journalières demandées.

C.
Le Secrétariat d'Etat à l'économie interjette un recours en matière de droit
public contre ce jugement, dont il demande l'annulation. A titre préalable, il
a requis l'octroi de l'effet suspensif au recours. L'intimé a conclu au rejet
du recours. La Caisse en a proposé l'admission.

Par ordonnance du 19 septembre 2008, le Tribunal fédéral a octroyé l'effet
suspensif au recours.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le droit de l'intimé à des indemnités journalières de
chômage, plus précisément sur le point de savoir s'il faut nier ce droit en
raison de la fonction exercée par son épouse au sein de X.________ Sàrl.

2.
2.1 Les travailleurs dont la durée normale du travail est réduite ou l'activité
suspendue ont droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail
lorsqu'ils remplissent les conditions décrites aux lettres a à d de l'art. 31
al. 1 LACI. Une réduction de l'horaire de travail peut consister non seulement
en une réduction de la durée quotidienne, hebdomadaire ou mensuelle du travail,
mais aussi en une cessation d'activité pour une certaine période, sans
résiliation des rapports de travail (ATF 123 V 234 consid. 7b/bb p. 237). N'ont
pas droit à l'indemnité en question les travailleurs dont la réduction de
l'horaire de travail ne peut pas être déterminée ou dont l'horaire n'est pas
suffisamment contrôlable (art. 31 al. 3 let. a LACI), de même que les personnes
qui fixent les décisions que prend l'employeur - ou peuvent les influencer
considérablement -, en qualité d'associé, de membre d'un organe dirigeant de
l'entreprise ou encore de détenteur d'une participation financière de
l'entreprise; il en va de même des conjoints de ces personnes, qui sont occupés
dans l'entreprise (art. 31 al. 3 let. b et c LACI).

2.2 La jurisprudence considère, par ailleurs, qu'un travailleur qui jouit d'une
situation comparable à celle d'un employeur - ou son conjoint -, n'a pas droit
à l'indemnité de chômage (art. 8 ss LACI) lorsque, bien que licencié
formellement par une entreprise, il continue à fixer les décisions de
l'employeur ou à influencer celles-ci de manière déterminante. Dans le cas
contraire, en effet, on détournerait par le biais des dispositions sur
l'indemnité de chômage la réglementation en matière d'indemnité en cas de
réduction de l'horaire de travail, en particulier l'art. 31 al. 3 let. c LACI.
Dans ce sens il existe un étroit parallélisme entre le droit à l'indemnité en
cas de réduction de l'horaire de travail et le droit à l'indemnité journalière
de chômage (ATF 123 V 234 cité).

3.
3.1 En l'occurrence, l'épouse de l'intimé détient l'essentiel des parts
sociales de X.________ Sàrl, dont elle est associée-gérante. L'intimé se trouve
donc, par son intermédiaire, en position d'influencer de manière déterminante
les décisions de son dernier employeur, de sorte qu'il ne peut en principe pas
prétendre d'indemnités journalières de chômage. Les premiers juges ont
toutefois constaté que l'épicerie exploitée par X.________ Sàrl avait été
fermée et le bail commercial résilié. On pouvait donc considérer que l'assuré
avait définitivement quitté l'entreprise en raison de la fermeture de celle-ci.
Une reprise de son activité et son réengagement par X.________ Sàrl
impliquerait la constitution d'un stock et la location de locaux, ce qui
nécessiterait un certain délai. Il n'y avait donc pas, dans le cas particulier,
de difficulté à contrôler le chômage de l'assuré et le risque concret d'abus
n'était pas suffisant pour nier le droit aux prestations.

3.2 Lorsque le salarié qui se trouve dans une position assimilable à celle d'un
employeur quitte définitivement l'entreprise en raison de la fermeture de
celle-ci, il n'y a pas de risque que les conditions posées par l'art. 31 al. 3
let. c LACI soient contournées. Il en va de même si l'entreprise continue
d'exister, mais que l'assuré rompt définitivement tout lien avec elle après la
résiliation des rapports de travail. Dans un cas comme dans l'autre, il peut en
principe prétendre des indemnités journalières de chômage. Toutefois, la
jurisprudence est stricte; elle exclut de considérer qu'un assuré a
définitivement quitté son ancienne entreprise en raison de la fermeture de
celle-ci tant qu'elle n'est pas entrée en liquidation (cf. arrêts C 355/00 du
28 mars 2001, in DTA 2001 p. 218, et C 37/02 du 22 novembre 2002), voire, selon
les circonstances, pendant la durée de la procédure de liquidation (arrêts C
180/06 du 16 avril 2007 consid. 3.4, in SVR 2007 AlV no 21 p. 69, C 267/04 du 3
avril 2006, in DTA 2007 p. 115, et C 373/00 du 19 mars 2002, in DTA 2002 p.
183). En l'occurrence, X.________ Sàrl a, certes, cessé d'exploiter l'épicerie
de la rue Z.________, mais n'est pas inscrite « en liquidation » au registre du
commerce. Une reprise de ses activités dans des délais relativement brefs n'est
donc pas exclue et ne serait pas aisée à vérifier par la Caisse, malgré la
nécessité de reconstituer un stock et de trouver de nouveau locaux, ou de
reprendre une épicerie existant déjà. La jurisprudence exposée ci-avant exclut,
dans un tel cas de figure, d'assimiler l'intéressé à un assuré qui aurait
définitivement quitté l'entreprise qui l'employait, en raison de la fermeture
de celle-ci.

4.
L'intimé fait valoir que son droit à l'indemnité n'aurait pas été nié s'il
avait vécu en concubinage avec l'associée-gérante de X.________ Sàrl; il
demande à être traité de la même manière que s'il n'avait pas été marié. La
jurisprudence a toutefois déjà rejeté, dans un même contexte, le grief de
violation du droit à l'égalité de traitement (arrêt C 193/04 du 7 décembre 2004
consid. 4, in DTA 2005 p. 130). Il convient par conséquent d'y renvoyer
l'intimé.

5.
Bien qu'il obtienne gain de cause, le recourant n'a pas droit aux dépens qu'il
prétend. Il se justifie par ailleurs de renoncer à percevoir des frais
judiciaires (art. 66 al. 1, deuxième phrase, LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et la décision du Tribunal des assurances sociales du
canton de Genève du 15 mai 2008 est annulée.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal des assurances
sociales du canton de Genève.

Lucerne, le 21 janvier 2009

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant: Le Greffier:

Leuzinger Métral