Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.368/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_368/2008

Arrêt du 14 janvier 2009
Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Leuzinger et Frésard.
Greffier: M. Beauverd.

Parties
X.________ SA,
recourante, représentée par Publex Courtage et Gestion d'Assurances SA, route
des Jeunes 9, 1227 Les Acacias,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, 6004
Lucerne,
intimée.

Objet
Assurance-accidents,

recours en matière de droit public contre le jugement du Tribunal administratif
fédéral, Cour III, du 17 mars 2008.

Faits:

A.
Depuis 1976, le groupe X.________ a ouvert plusieurs magasins en Suisse.
Initialement, ceux-ci étaient constitués chacun sous la forme d'une société
anonyme indépendante. Toutes ces sociétés avaient le même but, à savoir la
vente de meubles et de biens d'équipements divers pour l'habitation et les
loisirs.

Le 28 juin 2004, la société Y.________ SA a repris, à titre universel et sans
liquidation, les actifs et passifs des sociétés anonymes du groupe implantées
en Suisse, à savoir les sociétés A.________ SA, B.________ SA, C.________ SA,
D.________ SA, E.________ AG, F.________ AG et G.________ AG. Cette fusion n'a
engendré aucune modification des activités des magasins concernés, qui
continuent à s'exercer aux mêmes endroits géographiques. Il s'agit toutefois
désormais de succursales. La nouvelle société est devenue X.________ SA. Elle a
son siège à Z.________ et son but, selon l'inscription au registre du commerce,
est l'achat, la fabrication et la vente de meubles et de biens d'équipements
pour la maison.

Au début des années 1990, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents (CNA) a considéré qu'en raison de leurs activités, les sociétés
suisses du groupe X.________ devaient lui être affiliées. Toutefois, renonçant
à l'assujettissement obligatoire de ces sociétés, elle a conclu un accord avec
la Vaudoise Assurances afin de couvrir le risque d'accident des sociétés
suisses du groupe X.________ sous la forme d'un partage des primes perçues par
cet assureur (système dit de la co-assurance). Cet accord trouvait son origine
dans une convention conclue par la commission ad hoc CNA/AMA (Association
suisse des assureurs privés maladies et accidents; actuellement: ASA; ci-après:
la convention CNA/ASA). Ce contrat liant les sociétés X.________ à la Vaudoise
Assurances a été résilié avec effet au 31 décembre 1996 et transféré à la CSS
Assurance (ci-après: CSS), nouvel assureur-accidents à partir du 1er janvier
1997. Toutefois, la CSS n'a pas accepté de conclure un accord de co-assurance,
malgré les démarches de la CNA qui se sont poursuivies jusqu'au mois d'octobre
2002.

Le 23 janvier 2001, lors d'une visite du site de X.________ SA à Z.________, la
CNA a constaté qu'une grande partie des marchandises était entreposée sur des
palettes. Le poids d'une palette chargée dépassait 50 kg et l'ensemble
présentait une masse de plus de 20 tonnes. Le transport à l'intérieur
s'effectuait avec des machines (élévateurs à moteur).

Par décision du 16 juillet 2003, la CNA a constaté que les conditions de
l'assurance obligatoire auprès de la CNA étaient réalisées en ce qui concerne
les travailleurs du groupe X.________. En outre, elle indiquait que dans un
premier temps, elle procéderait uniquement à l'affiliation des travailleurs de
Y.________ SA.

Saisie d'une opposition, la CNA l'a rejetée par décision du 26 mars 2004.

B.
Y.________ SA a recouru contre cette décision sur opposition devant la
Commission fédérale de recours en matière d'assurance-accidents.

Par jugement du 3 février 2006, celle-ci a annulé la décision sur opposition
attaquée et a renvoyé la cause à la CNA pour qu'elle statue à nouveau sur
l'assujettissement de X.________ SA compte tenu de la fusion des sociétés
intervenue en 2004.

C.
Par décision du 15 août 2006, confirmée sur opposition le 22 décembre suivant,
la CNA a procédé à l'affiliation obligatoire des travailleurs de X.________ SA
avec effet au 1er janvier 2007.

D.
Saisi d'un recours contre cette décision sur opposition, le Tribunal
administratif fédéral l'a rejeté par jugement du 17 mars 2008.

E.
X.________ SA interjette un recours en matière de droit public contre ce
jugement, dont elle demande l'annulation, en concluant à ce qu'elle soit
soumise à la convention de co-assurance conclue les 22 février et 10 mars 1994
entre la CNA et l'Association suisse des assureurs privés maladies et accidents
(ASA). Subsidiairement, la recourante demande le renvoi de la cause au Tribunal
administratif fédéral pour qu'il se prononce sur la légalité de ladite
convention et son application à l'intéressée, le tout sous suite de frais et
dépens. La recourante demande en outre l'effet suspensif du recours.
La CNA conclut au rejet du recours, sans s'opposer à l'octroi de l'effet
suspensif. De son côté, l'Office fédéral de la santé publique a renoncé à
présenter des déterminations.

Par ordonnance du 23 juin 2008, le Juge instructeur a admis la requête d'effet
suspensif.
Considérant en droit:

1.
1.1 Le recours en matière de droit public peut être interjeté pour violation du
droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral
applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par
les arguments soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par
l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux
qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une
argumentation différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136
consid. 1.4 p. 140). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art.
42 al. 1 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le
Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, pour autant que
la violation du droit ne soit pas manifeste (ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p.
254 et les références).

1.2 Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par
l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à
l'art. 105 al. 2 LTF. Cette disposition lui donne la faculté de rectifier ou
compléter d'office l'état de fait de l'arrêt attaqué dans la mesure où des
lacunes ou erreurs dans l'établissement de celui-ci lui apparaîtraient d'emblée
comme manifestes. Quant au recourant, il ne peut critiquer la constatation de
faits importants pour le jugement de la cause que si ceux-ci ont été constatés
en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement
inexacte (art. 97 al. 1 LTF).

2.
Le litige porte sur le point de savoir si la CNA était fondée, par sa décision
sur opposition du 22 décembre 2006, à procéder à l'affiliation obligatoire des
travailleurs de X.________ SA avec effet au 1er janvier 2007.

2.1 Le jugement entrepris expose de manière exacte et complète les dispositions
légales et réglementaires concernant l'affiliation obligatoire des travailleurs
de certaines entreprises commerciales (art. 66 al. 1 let. h LAA et art. 79
OLAA), ainsi que la jurisprudence relative à la notion d'entreprise au sens de
l'art. 66 LAA et au caractère unitaire ou composite de celle-ci. Il suffit donc
d'y renvoyer.

2.2 Le Tribunal administratif fédéral a confirmé le point de vue de l'intimée,
selon lequel les travailleurs de X.________ SA devaient être assurés
obligatoirement auprès de la CNA. Il a considéré que cette société est une
entreprise unitaire répondant à la définition de l'art. 66 al. 1 let. h LAA, à
savoir une entreprise commerciale ayant en dépôt de grandes quantités de
marchandises pondéreuses et faisant usage d'installations mécaniques.

Par ailleurs, le Tribunal administratif fédéral a considéré que X.________ SA
ne peut pas invoquer une inégalité de traitement ni une violation du principe
de la protection de la bonne foi pour être dispensée de l'affiliation
obligatoire de ses travailleurs à la CNA, et, partant, de pouvoir les assurer
conformément à la convention CNA/ASA. Elle a rejeté le grief d'inégalité de
traitement, motif pris que X.________ SA ne peut se prévaloir de l'égalité dans
l'illégalité, du moment que rien ne permet de penser que la CNA entend
persévérer dans l'inobservation de la loi car la convention CNA/ASA n'est qu'un
«Gentlemen's Agreement» conclu à la suite d'un arrêt du Tribunal fédéral des
assurances, selon lequel une chaîne de grands magasins devait être considérée
comme une entreprise commerciale au sens de l'art. 66 al. 1 let. h LAA (ATF 113
V 341). Au demeurant, le Tribunal administratif fédéral conteste que X.________
SA appartienne au cercle des entreprises visées par la convention CNA/ASA, dont
elle ne peut rien déduire devant une juridiction administrative et dont la
légalité est douteuse au regard des dispositions légales claires.

Enfin, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le grief de violation du
principe de protection de la bonne foi en appliquant par analogie la
jurisprudence selon laquelle, lorsque est litigieuse une reconsidération avec
effet ex nunc et pro futuro, l'administré ne peut pas, en principe, se
prévaloir du droit à la protection de la bonne foi, puisque, justement,
l'autorité est revenue sur la décision erronée qui avait fondé la confiance de
l'intéressé (SVR 2004 IV no 23 p. 69, I 453/02 consid. 4.2.2). Au demeurant, la
CNA n'ayant pas rendu de décision ni donné par le passé des assurances
particulières qui auraient incité la recourante à croire qu'elle ne tombait pas
sous le coup de l'art. 66 al. 1 LAA, le Tribunal administratif fédéral est
d'avis que l'intéressée ne peut se prévaloir d'un droit acquis au motif qu'elle
a pu demeurer affiliée auprès d'un assureur privé durant une quinzaine
d'années.
2.3
2.3.1 La recourante ne remet pas en cause le point de vue des premiers juges,
selon lequel elle constitue une entreprise unitaire répondant à la définition
de l'art. 66 al. 1 let. h LAA, à savoir une entreprise commerciale ayant en
dépôt de grandes quantités de marchandises pondéreuses et faisant usage
d'installations mécaniques. Toutefois, elle fait valoir que la décision
d'affiliation obligatoire de ses travailleurs entraîne une violation du
principe de l'égalité de traitement. Selon la recourante, puisqu'elle admet
formellement et par actes concluants la validité de la convention CNA/ASA, la
CNA doit s'y tenir de manière générale et admettre le principe de la
co-assurance pour toutes les entreprises qui entrent dans son champ
d'application, tel qu'il est défini par ladite convention et par la circulaire
de l'ASA du 5 avril 1994, à savoir les entreprises commerciales dont l'activité
prépondérante est consacrée au commerce de détail, qui ont en dépôt des
marchandises pondéreuses et qui remplissent les conditions énoncées aux art. 66
al. 1 let. h LAA et 79 OLAA. La recourante soutient qu'elle entre dans le champ
d'application de la convention CNA/ASA, étant donné notamment que la CNA a
admis expressément le principe de la co-assurance jusqu'à la résiliation du
contrat la liant à la Vaudoise Assurances. Ni le changement d'assureur
intervenu à partir du 1er janvier 1997 ni la fusion des sociétés du groupe
X.________ ne sauraient, selon la recourante, remettre en question la qualité
d'entreprise de détail au sens de ladite convention. En conclusion, la
recourante considère comme arbitraire la décision d'affiliation qui a été
confirmée par le jugement entrepris.
2.3.2 Le principe d'égalité formulé à l'art. 8 al. 1 Cst. et la protection
contre l'arbitraire, garantie par l'art. 9 Cst. sont étroitement liés. Une
décision est arbitraire lorsqu'elle ne repose pas sur des motifs sérieux et
objectifs ou n'a ni sens ni but. Elle viole le principe de l'égalité de
traitement lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient
par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait ou lorsqu'elle
omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances,
c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique
et lorsque ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut
que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation
de fait importante. La question de savoir s'il existe un motif raisonnable pour
une distinction peut recevoir des réponses différentes suivant les époques et
les idées dominantes (ATF 133 I 249 consid. 3.3 et les arrêts cités).
L'inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière
d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de
manière semblable ou inversement (ATF 131 I 394 consid. 4.2 et les arrêts
cités).
2.3.3 En l'espèce, en prononçant l'affiliation obligatoire de X.________ SA par
sa décision sur opposition du 22 décembre 2006, la CNA a, du même coup, exclu
la société intéressée du régime de la co-assurance institué par la convention
CNA/ASA. Ce faisant, elle a opéré une distinction juridique entre la recourante
et d'autres entreprises commerciales - qui sont au nombre de sept, d'après les
constatations du Tribunal administratif fédéral -. Cela étant, pour trancher le
point de savoir si la décision d'affiliation viole le principe de l'égalité de
traitement, il n'est toutefois pas nécessaire de se prononcer - comme le
demande la recourante - sur la légalité de la convention CNA/ASA au regard de
l'art. 66 al. 1 let. h LAA. Sur le vu de la circulaire de l'ASA du 5 avril
1994, ladite convention a été conclue à la suite de l'arrêt ATF 113 V 341 rendu
le 27 novembre 1987 par le Tribunal fédéral des assurances, lequel avait
considéré une chaîne de grands magasins comme une entreprise commerciale au
sens de l'art. 66 al. 1 let. h LAA. Dès l'entrée en vigueur de la LAA, le 1er
janvier 1984, une contestation avait en effet opposé la CNA et les assureurs
visés à l'art. 68 LAA au sujet de la compétence d'assurer les travailleurs des
entreprises commerciales. La convention CNA/ASA avait pour but d'apporter une
solution satisfaisant à la fois les preneurs d'assurance et les assureurs
concernés. Cela étant, rien ne permet de considérer que la recourante peut se
prévaloir de cette convention, du moment qu'elle ne fait pas valoir qu'un
assureur-accidents est disposé à conclure un accord de co-assurance avec la CNA
pour couvrir le risque d'accident de ses travailleurs. Il apparaît, en effet,
que le contrat de co-assurance passé avec la Vaudoise Assurances a été résilié
avec effet au 31 décembre 1996 et que la CSS, qui avait accepté de reprendre la
couverture du risque d'accident dès le 1er janvier 1997, a refusé de conclure
un accord de co-assurance avec la CNA, malgré les démarches faites par celle-ci
jusqu'au mois d'octobre 2002. Pour la période postérieure, la recourante se
contente d'alléguer, sans autres précisions, qu'un nouvel accord n'a pas pu
être conclu entre la CNA et Winterthur/Axa, pour une question de répartition de
primes. Elle indique être actuellement assurée auprès d'un assureur privé, mais
n'allègue pas que celui-ci serait disposé à conclure une convention avec la
CNA. La situation de la recourante est dès lors différente de celle d'autres
entreprises commerciales pour lesquelles un assureur-accidents a accepté de
couvrir le risque d'accident des travailleurs sous le régime de la
co-assurance. Or, à cet égard, la société intéressée ne prétend pas que les
sept entreprises commerciales qui bénéficient de ce régime n'auraient pas
trouvé un assureur-accidents disposé à conclure un accord de co-assurance avec
la CNA.

Cela étant, la recourante ne justifie pas d'une situation de fait semblable à
ces sept entreprises, même si, au demeurant, elle fait partie du cercle des
entreprises visées par la convention CNA/ASA en sa qualité d'entreprise
répondant à la définition de l'art. 66 al. 1 let. h LAA. Partant, elle ne peut
se prévaloir d'une violation du principe de l'égalité de traitement.

Par ailleurs, il n'y a pas de motif de mettre en cause le rejet, par le
Tribunal administratif fédéral, du grief de violation du principe de protection
de la bonne foi. D'ailleurs, la recourante ne conteste pas sur ce point le
jugement entrepris.

Vu ce qui précède, la CNA était fondée, par sa décision sur opposition du 22
décembre 2006, à procéder à l'affiliation obligatoire des travailleurs de
X.________ SA avec effet au 1er janvier 2007. Le jugement entrepris n'est dès
lors pas critiquable et le recours se révèle mal fondé.

3.
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal administratif fédéral
et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 14 janvier 2009

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Ursprung Beauverd