Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.234/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_234/2008

Arrêt du 31 mars 2009
Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Frésard et Niquille.
Greffière: Mme von Zwehl.

Parties
G.________,
recourant, représenté par Me Sven Marguth, avocat,

contre

Helsana Assurances SA, Droit des assurances Suisse romande, Chemin de la
Colline 12, 1007 Lausanne,
intimée.

Objet
Assurance-accidents,

recours contre le jugement du Tribunal administratif du canton de Neuchâtel du
21 février 2008.

Faits:

A.
Le 15 août 1998, G.________ a ressenti une forte douleur au genou gauche alors
qu'il jouait au golf. Par décision du 18 février 1999, Helsana Assurances SA
(ci-après : Helsana), auprès de laquelle le prénommé était assuré, a refusé de
prendre en charge cet événement au motif qu'il ne s'agissait ni d'un accident
ni d'une lésion assimilée à un accident. Le rapport radiologique produit par
l'assuré faisait état d'une gonarthrose, ce qui relevait d'une maladie. La
décision n'a pas été attaquée.

Le 5 janvier 2005, G.________ s'est à nouveau adressé à Helsana en indiquant
avoir été victime d'une erreur médicale, qu'il estimait constitutive d'un
accident, dans le cadre du traitement de son genou gauche. Il avait subi
diverses interventions chirurgicales entre janvier 1999 et juin 2000 et se
plaignait d'importantes douleurs à ce genou, d'hypersensibilité et de
dysesthésie au pied, ainsi que d'une massive atrophie musculaire de la cuisse.
A l'appui de sa déclaration d'accident, il a versé un rapport d'expertise
extrajudiciaire (du 11 mai 2001) et un rapport complémentaire (du 23 octobre
2003) des docteurs L.________ et H.________.

Après avoir posé deux questions supplémentaires au docteur L.________
(questionnaire du 8 février 2005) et avoir entendu l'assuré, Helsana a rendu le
29 septembre 2005 une décision de refus de prestations. Elle a retenu que les
actes médicaux pratiqués sur l'assuré ne s'étaient pas considérablement écartés
de la pratique médicale courante, si bien que le caractère extraordinaire de la
notion d'accident faisait défaut. Saisi d'une opposition, l'assureur-accidents
l'a rejeté dans une nouvelle décision du 13 novembre 2006.

B.
L'intéressé a déféré cette décision au Tribunal administratif du canton de
Neuchâtel, qui l'a débouté par jugement du 21 février 2008.

C.
G.________ interjette un recours en matière de droit public dans lequel il
conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation du jugement cantonal et
à la condamnation de Helsana au versement des prestations légales en cas
d'accident.

Helsana conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la santé publique a
renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
Dans la procédure de recours concernant l'octroi ou le refus de prestations en
espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'état
de fait constaté par la juridiction précédente (art. 97 al. 2 LTF).

2.
Les premiers juges ont considéré à juste titre que le présent cas est régi par
l'art. 9 al. 1 OLAA (dans sa teneur originelle en vigueur jusqu'au 31 décembre
2002) eu égard au principe de droit intertemporel selon lequel les dispositions
légales applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement
déterminants se sont produits (ATF 130 V 445 et les références; cf. aussi ATF
130 V 329).

3.
3.1 Selon l'art. 9 al. 1 OLAA, on entend par accident toute atteinte
dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause
extérieure extraordinaire. Selon la jurisprudence (ATF 129 V 402 consid. 2.1 p.
404 et les références; 122 V 230 consid. 1 p. 232 sv.), la notion d'accident se
décompose en cinq éléments ou conditions, qui doivent être cumulativement
réalisés : une atteinte dommageable; le caractère soudain de l'atteinte; le
caractère involontaire de l'atteinte; le facteur extérieur de l'atteinte;
enfin, le caractère extraordinaire du facteur extérieur. Il suffit que l'un
d'entre eux fasse défaut pour que l'événement ne puisse pas être qualifié
d'accident.

Il résulte de la définition même de l'accident que le caractère extraordinaire
de l'atteinte ne concerne pas les effets du facteur extérieur, mais seulement
ce facteur lui-même. Dès lors, il importe peu que le facteur extérieur ait
entraîné, le cas échéant, des conséquences graves ou inattendues. Le facteur
extérieur est considéré comme extraordinaire lorsqu'il excède, dans le cas
particulier, le cadre des événements et des situations que l'on peut,
objectivement, qualifier de quotidiens ou d'habituels (ATF 129 V 402 consid.
2.1 p. 404; 122 V 230 consid. 1 p. 231; 121 V 35 consid. 1a p. 38; 118 V 59
consid. 2b p. 61).

3.2 Le point de savoir si un acte médical est comme tel un facteur extérieur
extraordinaire doit être tranché sur la base de critères médicaux objectifs. Le
caractère extraordinaire d'une telle mesure est une exigence dont la
réalisation ne saurait être admise que de manière sévère. Il faut que, compte
tenu des circonstances du cas concret, l'acte médical s'écarte considérablement
de la pratique courante en médecine et qu'il implique de ce fait objectivement
de gros risques (ATF 121 V 35 consid. 1b p. 38; 118 V 283 consid. 2b p. 284).
Le traitement d'une maladie en soi ne donne pas droit au versement de
prestations de l'assureur-accidents, mais une erreur de traitement peut, à
titre exceptionnel, être constitutive d'un accident, dès lors qu'il s'agit de
confusions ou de maladresses grossières et extraordinaires, voire d'un
préjudice intentionnel, avec lesquels personne ne comptait ni ne devait
compter. La notion d'erreur médicale ne saurait en effet être étendue à toute
faute du médecin, au risque de faire jouer à l'assurance-accidents le rôle
d'une assurance de la responsabilité civile des fournisseurs de prestations
médicales (RAMA 2000 n° U 407 p. 404, arrêt U 225/99 du 22 septembre 2000). Et
la question de l'existence d'un accident sera tranchée indépendamment du point
de savoir si l'infraction aux règles de l'art dont répond le médecin entraîne
une responsabilité (civile ou de droit public). Il en va de même à l'égard d'un
jugement pénal éventuel sanctionnant le comportement du médecin (ATF 121 V 35
consid. 1b p. 38 et les références). Enfin, on précisera que l'indication d'une
intervention chirurgicale n'est pas un critère juridiquement pertinent pour
juger si un acte médical répond à la définition légale de l'accident (ATF 118 V
283).

3.3 Conformément à ces principes, la jurisprudence admet par exemple
l'existence d'un accident, imputable à une cause extérieure extraordinaire,
dans le cas d'une confusion en matière de groupes sanguins (ATFA 1961 p. 201
consid. 2a p. 206), dans le cas d'une accumulation d'erreurs à l'occasion d'une
angiographie (consid. 4 et 5 non publiés de l'arrêt ATF 118 V 283, mais
partiellement reproduits dans le Courrier suisse des assurances, 1994, 1 p.
31), lors de l'injection trop rapide par voie intraveineuse d'une dose
excessive de produits anesthésiques (RAMA 1993 n° U 176 p. 204, arrêt U 124/92
du 17 mai 1993), ainsi que lors de l'oubli d'un cathéter dans la vessie d'un
patient (RAMA 2003 n° U 492 p. 371, arrêt U 56/01 du 18 juillet 2003) ou dans
le cas d'une lésion du nerf médian à l'occasion d'une prise de sang (arrêt
8C_526/2007 du 29 avril 2008). Elle l'a niée, en revanche, à propos d'une
perforation de l'intestin lors d'une rectoscopie suivie d'un lavement baryté
(arrêt U 5/82 du 5 août 1983), lors du choix - hautement discutable - d'une
technique opératoire (RAMA 1988 n° U 36 p. 42, arrêt U 15/87 du 14 octobre
1987), dans le cas d'une perforation par erreur de la sclérotique à l'occasion
d'une injection subcorticale parabulbaire au celeston (Extr. CNA 1990 n° 1), ou
pour une lésion de nerfs de la main survenue au cours d'une opération
spécialement difficile et délicate sur un terrain cicatriciel dont l'anatomie
était modifiée par de multiples opérations antérieures (ATF 121 V 39 consid.
1c), à l'occasion de la section accidentelle de la veine épigastrique au cours
de l'opération d'une hernie inguinale (SJ 1998 p. 430), lors de la perforation
de l'oesophage survenue au cours de l'extraction d'un morceau de viande (RAMA
2000 n° U 368 p. 99, arrêt U 335/98 du 16 novembre 1999), dans le cas de gestes
médicaux inappropriés associés à de multiples complications ayant entraîné le
décès d'une femme sur le point d'accoucher (RAMA 2000 n° U 407 p. 404, arrêt U
225/99 du 22 septembre 2000), lors d'une lésion du nerf alvéolaire provoquée
par l'extraction d'une dent de sagesse sans qu'un diagnostic préopératoire
n'ait été posé (RDAT 2002 II n° 90 p. 336, arrêt U 284/01 du 24 janvier 2002),
lors de complications imprévisibles et rarissimes liées à un étirement
préopératoire du plexus brachial en l'absence d'erreur de traitement (arrêt U
62/03 du 21 octobre 2003), dans le cas où l'inhalation d'un aérosol
d'antibiotique a causé une réaction totalement inhabituelle et imprévisible
sous la forme d'un choc anaphylactique (arrêt 5C_295/2005 du 12 avril 2006) et
enfin dans celui où l'administration d'une combinaison de médicaments à
l'occasion d'un accouchement s'est révélée présenter a posteriori certains
risques pour la patiente (arrêt U 135/06 du 15 décembre 2006).

4.
4.1 G.________ a consulté le docteur I.________, chirurgien-orthopédiste, pour
la première fois le 12 novembre 1998 en raison de fortes douleurs au genou
gauche. Le diagnostic retenu à l'issue des examens de radiographie était celui
de gonarthrose latérale avec chondromalacie avancée et fissure complexe du
ménisque extérieur (déjà opéré une première fois 20 ans auparavant), ainsi
qu'un signal altéré au niveau du ligament croisé antérieur avec une discrète
chondromalacie rétropatellaire.

4.2 Le 11 janvier 1999, le docteur I.________ a pratiqué une arthroscopie en
vue de réaliser une plastie du ligament croisé antérieur ainsi qu'une
transplantation de cartilage. Il a renoncé à ces deux actes en cours
d'opération, ayant constaté que le ligament était encore en bon état et le
cartilage trop endommagé. Il a procédé à une résection partielle du ménisque
latéral avec curage de l'articulation ("Arthroskopie links, partielle Resektion
Restmeniskus lateral, Gelenktoilette"). L'évolution n'a pas été bonne.
G.________ a exprimé des douleurs insupportables, ce qui a conduit le docteur
I.________ à lui proposer une nouvelle intervention. Le 15 mars 1999,
l'intéressé a subi une ostéotomie supra-condylienne fémorale de varisation
montée par plaque selon Puddu et combinée avec une transplantation de périoste
("aufklappende supracondyläre Varisationsosteotomie mit dem
Spezialinstrumentarium nach Puddu und Periostpatch der Trochlea links"). La
phase postopératoire n'a pas évolué favorablement. L'assuré s'est plaint d'une
paralysie au pied gauche et de douleurs de plus en plus aiguës lors de la
physiothérapie. Le 29 mars 1999, un jour avant la sortie de l'intéressé de
l'hôpital, une radiographie a été réalisée qui a révélé une fracture dans la
région de l'ostéotomie. Le docteur I.________ a alors décidé le 3 avril 1999 de
procéder à une stabilisation de l'ostéotomie avec un fixateur externe
(Stabilisierung mit fixateur externe, Mobilisation des Kniegelenks"). Le 17 mai
suivant, il a exécuté une mobilisation de l'articulation du genou sous
anesthésie (Mobilisation des Kniegelenks in Spinalanästhesie"), ce qui a
provoqué une nouvelle fracture de l'ostéotomie (constatée trois jours plus
tard). Celle-ci a été repositionnée le 21 mai 1999. La suite des opérations a
été assurée par un autre médecin, le docteur D.________, qui a effectué encore
deux interventions, en mai 1999 et en juin 2000. Le but du traitement prodigué
par le docteur I.________, qui était une correction du varus et une
régénération du cartilage, n'a pas été atteint. Il en est résulté une raideur
douloureuse de l'articulation du genou et une faiblesse du membre inférieur
gauche, soit un état nettement plus mauvais qu'avant le traitement entrepris
(cf. rapport d'expertise du 11 mai 2001).

4.3 A la question, posée par Helsana le 8 février 2005, de savoir s'il y avait
eu dans le cas de G.________ des confusions ou des maladresses grossières et
extraordinaires, voire un préjudice intentionnel de la part du chirurgien
opérateur, l'expert L.________ a répondu négativement (réponse du 18 avril
2005).

5.
5.1 Tout en reconnaissant, à la lumière du rapport d'expertise principal (du 11
mai 2001), que les actes chirurgicaux prodigués à l'assuré présentaient des
risques accrus de complications - qui s'étaient réalisés en l'espèce - la
juridiction cantonale a nié que ceux-ci se fussent écartés considérablement de
la pratique courante en médecine. Elle a donc estimé, à l'instar de l'intimée,
qu'il n'y avait pas eu d'événement accidentel.

5.2 Le recourant ne remet pas en cause la valeur probante de l'expertise. Il
soutient en revanche que les premiers juges ont méconnu la notion juridique
d'accident en s'appuyant sur la seule réponse du docteur L.________ au
questionnaire de Helsana. Dans le rapport d'expertise (du 11 mai 2001) et son
complément (du 23 octobre 2003), les experts avaient en effet relevé plusieurs
erreurs médicales dont l'accumulation permettait d'attribuer un caractère
extraordinaire à l'ensemble du traitement entrepris. A tout le moins, le
dernier acte médical du docteur I.________ du 17 mai 1999 présentait toutes les
caractéristiques d'un événement accidentel.

6.
L'atteinte au genou dont souffre G.________ est le résultat de plusieurs actes
médicaux différents et espacés dans le temps s'inscrivant dans le cadre d'un
traitement d'une affection maladive qui a duré en tout une année et demie
(janvier 1999 à juin 2000). Pour que la condition du caractère soudain de
l'atteinte soit remplie, celle-ci doit se produire pendant un laps de temps
relativement court et pouvoir être rattachée à un événement unique; la
soudaineté doit se rapporter au facteur extérieur qui est à l'origine de
l'atteinte (JEAN-MAURICE FRÉSARD/MARGIT MOSER-SZELESS, L'assurance-accidents
obligatoire, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 2ème éd. 2007, p. 857 no 59;
également ALFRED BÜHLER, Der Unfallbegriff, in Haftpflicht- und
Versicherungsrechtstagung, 1995, p. 207 ss et ALFRED MAURER, Schweizerisches
Unfallversicherungsrecht, 1985, p. 170 ss.). En matière d'accidents médicaux,
le fait accidentel soudain réside, comme cela ressort des exemples tirés de la
jurisprudence (voir le consid. 3.3. supra), dans la survenance d'une atteinte à
l'occasion d'un acte médical bien déterminé et circonscrit dans le temps (une
transfusion sanguine, une anesthésie, une intervention chirurgicale précise
formant une unité, un accouchement etc.). Considéré dans son ensemble, le
traitement subi par G.________ ne présente pas cet élément de soudaineté dès
lors qu'il n'a pas consisté en un acte médical unique et isolé dans le temps
mais en une succession d'actes sur une certaine période qui ont concouru à
causer l'atteinte à la santé. Contrairement à ce que voudrait le recourant, ce
traitement ne saurait donc constituer un événement accidentel en soi. Il faut
bien plutôt examiner, séparément pour chaque acte médical concerné, si celui-ci
revêt pour lui-même la qualité d'un accident.

7.
7.1 L'arthroscopie du 11 janvier 1999. D'après les docteurs L.________ et
H.________, celle-ci a été correctement planifiée et s'est déroulée dans des
conditions normales. Il n'y a pas eu d'erreur de traitement.

7.2 L'opération du 15 mars 1999. Elle comportait, selon ces mêmes experts, un
risque élevé de complications liées au choix du type d'intervention
(ostéotomie-périostéoplastie) et de la technique opératoire pratiqués
("aufklappende Osteotomie"; "quere supracondyläre Osteotomie am Uebergang zum
spröderen Knochen der Corticalis"), ainsi qu'à la faiblesse du matériel
d'ostéosynthèse utilisé. En particulier, la périostéoplastie (transplantation
de périoste) dans le traitement de l'arthrose du genou ("Periostlappenplastik
des Knorpeldefekts in der Trochlea") était une méthode nouvelle et
controversée. Elle exigeait la mise en oeuvre d'une mobilisation passive
quotidienne sur un appareil kinetec du membre opéré durant plusieurs semaines.
Lorsque cette méthode était combinée avec une ostéotomie, il était alors
indispensable de choisir un matériel d'ostéosynthèse suffisamment solide afin
d'éviter une instabilité pouvant compromettre le déroulement du traitement
post-opératoire. Chez l'assuré, la fixation de l'ostéotomie (au niveau du
fémur) avait été réalisée avec une plaque à deux trous développée par le
professeur Puddu. D'après le mode d'emploi du fabriquant, cette plaque avait
été conçue pour le tibia et il n'existait pas de publications scientifiques
reconnaissant l'application de celle-ci au fémur, os qui requérait généralement
la pose d'un matériel d'ostéosynthèse plus solide. Bien que le docteur
I.________ se fût référé à une pratique de quelques autres confrères, les
experts ont estimé qu'une telle fixation n'offrait pas une stabilité suffisante
eu égard au risque - inhérent à une ostéotomie d'ouverture - d'une fracture de
la corticale opposée ("Fraktur der Gegencorticalis") pendant l'opération ou le
traitement subséquent. L'utilisation de la plaque à deux trous avait également
eu pour conséquence d'affecter la suite du traitement, en rendant plus
difficile le processus de guérison de la fracture survenue chez l'assuré. Son
genou s'était raidi et l'ostéotomie présentait une instabilité au moment où le
recours à une nouvelle intervention était devenu inévitable. Le comportement de
l'assuré, même s'il s'était révélé critiquable à certains égards, n'avait pas
eu une influence significative sur la survenance de cette lésion.

Sur le vu de ces explications, on peut dire que l'indication de la
"Periostklappenplastik" était un choix discutable dans le cas de l'assuré dès
lors qu'il ne s'agissait pas d'une méthode thérapeutique éprouvée et reconnue
par la chirurgie orthopédique générale. Rien dans les déclarations des experts
ne laisse cependant supposer que le fait même de l'exécuter irait nettement
au-delà de la pratique médicale admissible. On doit également retenir que le
matériel d'ostéosynthèse et la technique de pose de celui-ci étaient
inappropriés à la nature et au but recherchés par l'intervention combinée de
l'ostéotomie-périostéoplastie, ce qui a contribué à en augmenter sensiblement
les risques de complications existants. Si l'on peut indubitablement reprocher
au chirurgien une erreur dans l'appréciation des facteurs de risques liés à son
acte chirurgical, en particulier à l'utilisation d'une plaque à deux trous pour
une ostéotomie fémorale dans le cadre d'une transplantation de périoste,
celle-ci n'a toutefois pas atteint en l'espèce un degré de gravité tel qu'on
puisse considérer la première fracture survenue chez l'assuré comme résultant
d'une maladresse grossière et extraordinaire.

7.3 La stabilisation du 3 avril 1999. Pour les experts, le docteur I.________
aurait dû modifier sa stratégie opératoire à ce stade du traitement au plus
tard. Deux possibilités thérapeutiques étaient envisageables : stabiliser
l'ostéotomie avec une plaque interne plus solide (ce qui eût permis de
mobiliser ensuite l'articulation du genou sans trop de restriction), ou poser
un matériel de fixation moins stable et attendre la guérison de l'ostéotomie
pour procéder dans un second temps à une mobilisation du genou à ciel ouvert.
Le docteur I.________ avait opté pour une stabilisation avec un fixateur
externe, ce qui était une méthode classique pour stabiliser une ostéotomie de
fermeture mais ne pouvait que difficilement résoudre la problématique chez
l'assuré dès lors que la surface de fixation était plus faible dans une
ostéotomie d'ouverture.

Ces considérations, suffisamment explicites, permettent de nier l'existence
d'un accident en ce qui concerne cet acte médical.

7.4 La mobilisation sous anesthésie du 17 mai 1999. Ici, les experts concluent
clairement à une action hautement risquée de la part du chirurgien ("Die
Durchführung der Kniemobilisation bei extrem hartem Stop [...] war
ausgesprochen riskant"). Sur la radiographie que ce dernier avait fait
réaliser, il existait une formation de cal osseux au niveau de la corticale
médiale, mais il en manquait dans la région de la fente de l'ostéotomie. Le
docteur I.________ avait manifestement surestimé la stabilité de celle-ci. Mais
même au regard des connaissances médicales en orthopédie, il ne pouvait
raisonnablement s'attendre à une consolidation de l'ostéotomie cinq semaines et
demie seulement après l'opération de correction. Par ailleurs, le genou de
l'assuré s'était déjà fortement raidi, si bien qu'une manipulation sous narcose
et à l'aveugle comme il l'avait accomplie était, selon les experts,
complètement vouée à l'échec. La situation imposait d'attendre la guérison de
l'ostéotomie encore 4 à 6 semaines et d'exécuter une mobilisation ouverte du
genou seulement après ce laps de temps, ce qui aurait présenté des risques
nettement moins élevés pour l'assuré. Cette fracture de l'ostéotomie aurait pu
être évitée.

Avec le recourant, on doit admettre que ce dernier acte médical réunit les
caractéristiques d'un événement accidentel. La survenance d'une seconde
fracture a constitué une atteinte soudaine avec laquelle le recourant, qui
avait déjà subi une première opération de correction, ne pouvait, ni ne devait
compter. L'expertise établit en effet que la décision d'une mobilisation du
genou prise par le docteur I.________ le 17 mai 1999 était manifestement
contraire à l'expérience et à la pratique médicales et totalement
contre-indiquée au regard du déroulement antérieur du traitement et des
complications qui s'en étaient déjà suivies. Ce geste a ainsi objectivement
impliqué de gros risques pour l'assuré. On doit donc admettre qu'il revêt un
caractère extraordinaire au sens de la jurisprudence (consid. 3 supra).

8.
Il convient par conséquent de renvoyer la cause à l'intimée pour qu'elle
examine si les autres conditions du droit aux prestations sont réalisées, au
besoin après avoir interpellé les experts sur les conséquences qui se trouvent
en lien de causalité naturelle et adéquate avec l'acte médical accidentel du 17
mai 1999, puis rende une nouvelle décision.

9.
Dès lors que le recourant obtient gain de cause, les frais et les dépens de la
présente instance seront mis à la charge de l'intimée (art. 66 al. 1 et 68 al.
1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement du 21 février 2008 du Tribunal
administratif du canton de Neuchâtel ainsi que la décision sur opposition du 13
novembre 2006 de Helsana sont annulés. La cause est renvoyée à
l'assureur-accidents pour qu'il rende une nouvelle décision sur le droit aux
prestations du recourant conformément aux motifs.

2.
Les frais de justice, arrêtés à 750 fr., sont mis à la charge de Helsana.

3.
Helsana versera au recourant un montant de 2'800 fr. (y compris la taxe à la
valeur ajoutée) à titre de dépens pour la procédure fédérale.

4.
La cause est renvoyée au Tribunal administratif du canton de Neuchâtel pour
nouvelle décision sur les dépens de la procédure antérieure.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal administratif du
canton de Neuchâtel et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 31 mars 2009

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Ursprung von Zwehl