Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.200/2008
Zurück zum Index I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_200/2008

Arrêt du 15 septembre 2008
Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,

Widmer et Frésard.
Greffière: Mme Berset.

Parties
Office cantonal de l'emploi, rue des Glacis-de-Rive 6, 1207 Genève,
recourant,

contre

S.________,
intimé, représenté par Me Monique Stoller Füllemann, avocate, route de
Florissant 64, 1206 Genève.

Objet
Assurance-chômage,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et canton de Genève du 5 février 2008.

Faits:

A.
S.________ a bénéficié d'une indemnité de chômage depuis le mois de janvier
2007.

Le 1er février 2007, l'assuré a déposé sa candidature auprès du Département de
la solidarité de l'emploi de la République et canton de Genève pour un poste de
conseiller en personnel auprès de l'Office cantonal de l'emploi (OCE).

Du 12 mars au 5 avril et du 16 avril au 11 mai 2007, S.________ a suivi des
cours d'anglais pris en charge par l'assurance-chômage.

Le jeudi 19 avril 2007, A.________, cheffe de l'agence X.________, au sein de
laquelle le poste de conseiller en personnel était à repourvoir, a laissé un
message sur le répondeur téléphonique de l'assuré en lui demandant de la
rappeler le lundi suivant, semble-t-il dans la matinée. Le lundi 23 avril,
S.________ participait à un cours d'anglais et n'a pas pris contact avec la
prénommée le matin. A.________ l'a appelé à 12 heures 50 sur son téléphone
portable. L'entretien a été très bref. Son contenu a été immédiatement
retranscrit comme suit par l'intéressée dans un courriel adressé à l'OCE (à 12
heures 54).

« Bonjour, Je suis un peu 'soufflée' par votre DE! Je lui ai laissé un message
jeudi lui demandant de me rappeler ce matin (j'étais absente vendredi). Comme
il ne m'avait pas rappelée, je le recontacte il y a cinq minutes. Voilà sa
réponse: 'J'étais en cours ce matin. Votre poste ne m'intéresse plus car j'ai
changé d'orientation et je cherche qu'un poste avec de l'anglais'. Je lui ai
dit que j'allais vous informer, ce à quoi il me répond qu'il a r-v avec vous
cet a-midi. Pour ma part, je considère cela comme un refus de poste à
sanctionner. Merci et meilleurs messages ».

Entendu par l'OCE, le 9 mai 2007, l'assuré a déclaré qu'en raison des cours
d'anglais qu'il suivait alors « sa préférence était un poste où il puisse
pratiquer l'anglais ». Son idée était bien d'expliquer à A.________ que s'il
acceptait cet emploi, il risquait ensuite de donner son congé pour un autre
poste répondant à ses desiderata. Toutefois, a-t-il précisé, il n'a pas pu
expliquer clairement le fond de sa pensée, car l'entretien avec l'employeur
potentiel a été très bref.
Par décision du 25 mai 2007, confirmée sur opposition le 26 juillet 2007, l'OCE
a suspendu le droit de l'assuré à l'indemnité de chômage pour une durée de 33
jours au motif qu'il avait fait échouer une possibilité d'emploi en ne montrant
plus d'intérêt à obtenir le poste.

B.
S.________ a recouru contre la décision sur opposition de l'OCE devant le
Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève.
Il a conclu, préalablement, à la comparution des parties et, sur le fond, à
l'annulation de la décision sur opposition de l'OCE. Après avoir ordonné la
comparution personnelle des parties, la juridiction cantonale a admis le
recours en ce sens qu'elle a annulé la décision sur opposition du 26 juillet
2007 et ramené la durée de la suspension à seize jours (jugement du 5 février
2008).

C.
L'OCE interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont
il demande l'annulation, sous suite de frais.

S.________ conclut au rejet du recours, tandis que le Secrétariat d'Etat à
l'économie en propose l'admission.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le
Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente
(art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte
ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).

2.
L'obligation d'accepter un emploi convenable assigné par l'office compétent
constitue une obligation fondamentale pour qui demande l'indemnité de chômage
(art. 17 al. 3, 1ère phrase, LACI; cf. Boris Rubin, Assurance-chômage, Droit
fédéral, Survol des mesures cantonales, procédure, 2ème éd., Zurich 2006, p.
402). Son inobservation est considérée comme une faute grave à moins que
l'assuré ne puisse se prévaloir de circonstances laissant apparaître la faute
comme étant de gravité moyenne ou légère (art. 30 al. 1 let. d, 1ère partie de
la phrase, LACI en liaison avec l'art. 45 al. 3 OACI; ATF 130 V 125 et arrêt C
20/06 du 30 octobre 2006, consid. 4.2). Depuis le 1er juillet 2003, les
principes mentionnés ci-dessus sont également valables lorsque l'assuré
n'accepte pas un emploi convenable qu'il a trouvé lui-même; l'art. 30 al. 1 let
d LACI ne fait plus la différence entre le refus d'un emploi assigné et le
refus d'un emploi qui ne l'est pas. Selon la jurisprudence, il y a refus d'une
occasion de prendre un travail convenable non seulement lorsque l'assuré refuse
explicitement d'accepter un emploi, mais aussi lorsqu'il ne déclare pas
expressément, lors des pourparlers avec le futur employeur, accepter l'emploi
bien que, selon les circonstances, il eût pu faire cette déclaration (ATF 122 V
34 consid. 3b p. 38 et les références; DTA 1986 n° 5 p. 22, consid. 1a).

3.
La juridiction cantonale a constaté faits suivants en ce qui concerne la
question topique:

L'assuré a admis avoir indiqué à A.________ que sa préférence allait vers un
poste dans lequel il puisse mettre en pratique ses connaissances de la langue
anglaise. A aucun moment, il n'avait refusé cet emploi. Il n'a d'ailleurs pas
eu l'occasion de s'expliquer véritablement puisque l'entretien n'a duré que 30
secondes. Il a expliqué la situation à sa conseillère l'après-midi même, en lui
proposant de contacter à nouveau A.________ pour clarifier la situation. C'est
en définitive la conseillère de l'OCE qui s'est chargée de cette démarche, mais
celle-ci s'est soldée par un échec.

Ces constatations de fait lient le Tribunal fédéral. La juridiction cantonale
en a inféré que l'assuré n'avait pas obtenu le poste de conseiller en placement
parce qu'il avait donné à A.________ l'impression de ne pas être intéressé par
cet emploi, dans la mesure où il recherchait une occupation lui permettant de
mettre ses connaissances de l'anglais en pratique. Partant, elle a retenu que
l'assuré avait commis une faute.

Il y a lieu de confirmer cette appréciation, laquelle n'est au demeurant pas
contestée.

4.
4.1 La seule question à trancher est donc celle de la gravité de la faute. Les
premiers juges ont estimé que la faute de l'assuré était de gravité moyenne et
ont réduit en conséquence la durée de la suspension de 33 jours à 16 jours.

4.2 La durée de la suspension dans l'exercice du droit à l'indemnité est de 1 à
15 jours en cas de faute légère, 16 à 30 jours en cas de faute de gravité
moyenne et 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 2 OACI).

4.3 L'office recourant considère que le comportement de l'assuré est
assimilable à celui d'une personne qui refuse un emploi convenable, de sorte
que la faute de l'intéressé doit être qualifiée de grave.

4.4 A l'appui de leur argumentation, les premiers juges ont retenu les éléments
suivants:

L'assuré a déposé son dossier pour l'emploi de conseiller en personnel le 1er
février 2007 et il s'est écoulé deux mois et demi avant qu'il ne soit contacté
par l'employeur potentiel. Dans l'intervalle, il a été mis au bénéfice de cours
d'anglais, lesquels se déroulaient précisément au moment où le contact avec le
futur employeur (OCE) a été établi. Il est donc compréhensible qu'il ait évoqué
ses cours d'anglais et son désir de pouvoir mettre ses nouvelles connaissances
linguistiques en application. A cet égard, tant l'office recourant que le futur
employeur savaient que l'emploi en cause ne permettrait pas à l'intéressé
d'utiliser ses connaissances en anglais. Il était donc approprié de la part de
l'intimé de soulever cette question. Par ailleurs, l'entretien d'embauche s'est
déroulé dans des conditions plus que discutables. Pris de court par un appel
sur son téléphone portable à 12 h 50, l'assuré n'a pas pu se préparer à
l'entretien. Il pouvait légitimement penser que l'appel de A.________ avait
pour but de fixer la date d'un entretien, au cours duquel il aurait eu tout
loisir d'expliquer sa position. En réalité, la conversation téléphonique du
lundi 23 avril 2007 a duré moins de quatre minutes: à 12 h. 54 déjà la
prénommée adressait un courriel à la conseillère de l'OCE, si bien que l'assuré
n'a eu aucune chance de relativiser la portée de ses premières déclarations. De
surcroît, l'état d'esprit de l'employeur potentiel a joué en défaveur de
l'intimé puisque A.________ était en colère du seul fait que l'intimé ne
l'avait pas appelée le lundi matin déjà.

4.5 Les éléments retenus par la juridiction cantonale ne sont pas suffisants
pour atténuer le degré de gravité de la faute. Tout d'abord, on pouvait
attendre de l'assuré qu'il rappelle l'employeur le lundi matin (23 avril), ce
qu'il n'a pas fait. Ainsi qu'il l'a déclaré, il avait l'intention de prendre
contact avec A.________ le mardi matin, seulement, après avoir rencontré sa
conseillère de l'OCE. Son absence de réaction, le lundi 23 avril 2007, a obligé
l'employeur potentiel à le relancer. A cette occasion, l'assuré a manifesté à
A.________ son désintérêt pour le poste en cause en indiquant qu'il souhaitait
plutôt trouver un emploi dans lequel il puisse mettre à profit ses
connaissances de la langue anglaise. On doit convenir que ces deux éléments
étaient de nature à décourager un employeur, même compréhensif, de l'engager.
Quand bien même l'assuré n'a pas refusé expressément le poste, son attitude
était clairement de nature à amener l'employeur à douter de sa volonté de
prendre l'emploi proposé et à écarter sans autres formalités sa candidature.
Par son comportement inadéquat, il a contribué à l'échec de la postulation. Il
n'a par conséquent pas fait tout ce que l'on pouvait raisonnablement exiger de
lui pour obtenir ce travail. On ajoutera que l'intimé était d'autant moins
fondé à faire preuve d'un manque d'intérêt que le poste en cause était un
emploi correspondant à ses qualifications et que, pour sa part, l'employeur
avait manifesté, en prenant contact à deux reprises avec lui, qu'il était
sérieusement intéressé par sa candidature.

Quant à l'argument des premiers juges selon lequel l'assuré a été pris de court
le lundi 23 avril par l'appel de l'employeur potentiel sur son téléphone
portable, il n'est pas pertinent. En effet, l'intimé a reçu le premier appel de
A.________ le jeudi 19 avril 2007. Il avait amplement le temps de se préparer
pour une conversation téléphonique qui devait se dérouler trois jours plus
tard. L'intimé ne peut s'en prendre qu'à lui-même s'il a été quelque peu
surpris par l'appel de l'employeur au cours de la pause de midi. S'il a pu être
pris de court, c'est en raison de ses tergiversations, qui ont amené
l'employeur, resté sans nouvelles, à le rappeler.

Dans ces conditions, il y a lieu d'admettre que le comportement de l'assuré
vis-à-vis de l'employeur potentiel est assimilable à un refus d'accepter un
travail convenable.

4.6 Il y a lieu, dès lors, de qualifier de grave, la faute commise par l'assuré
(voir ATF 130 V 125). L'administration n'a pas abusé de son pouvoir
d'appréciation en fixant la durée de la suspension à 33 jours, soit à une durée
proche de la limite inférieure prévue pour ce type de faute (cf. art. 45 al. 2
let. c OACI).

Le recours se révèle dès lors bien fondé.

5.
L'intimé, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du 5 février 2008 du Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève est annulé.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances sociales de la République et canton de Genève et au Secrétariat
d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 15 septembre 2008

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Ursprung Berset