Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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I. Sozialrechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 8C.1045/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
8C_1045/2008

Arrêt du 4 juin 2009
Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Frésard et Niquille.
Greffière: Mme von Zwehl.

Parties
Caisse Cantonale Genevoise de Chômage,
rue de Montbrillant 40, 1201 Genève,
recourante,

contre

S.________,
intimée.

Objet
Assurance-chômage,

recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la
République et canton de Genève du 10 novembre 2008.

Faits:

A.
S.________, étudiante, née en 1982, s'est inscrite au chômage le 16 janvier
2008. Elle s'est rendue à l'Office cantonal genevois de l'emploi (ci-après :
l'office) le 7 février suivant pour y déposer plusieurs documents. Par lettre
du 11 février 2008, l'office l'a invitée à lui faire parvenir trois documents
pour que son dossier soit "tout à fait complet". L'assurée s'est exécutée
quelques jours plus tard, le 21 février. Entre-temps, elle a trouvé un emploi.

Par décision du 19 mai 2008, confirmée sur opposition le 16 juin 2008, la
Caisse cantonale genevoise d'assurance-chômage (ci-après : la caisse) a refusé
d'indemniser l'assurée pour le mois de janvier 2008 au motif que celle-ci ne
lui avait pas remis la formule "Indications de la personne assurée" [IPA] dans
le délai de trois mois suivant la fin janvier 2008.

B.
L'intéressée a déféré la décision sur opposition (du 16 juin 2008) au Tribunal
cantonal genevois des assurances sociales.

Après avoir entendu l'assurée, le tribunal a admis le recours, annulé la
décision litigieuse et renvoyé la cause à la caisse pour nouvelle décision au
sens des considérants (jugement du 10 novembre 2008).

C.
La caisse interjette un recours en matière de droit public. Elle conclut à
l'annulation du jugement cantonal et à la confirmation de sa décision sur
opposition. A titre préalable, elle requiert que l'effet suspensif soit
attribué à son recours.

S.________ conclut au rejet du recours. Le Secrétariat d'Etat à l'économie a
renoncé à se déterminer.

Considérant en droit:

1.
La décision attaquée est une décision de renvoi qui doit être assimilée à une
décision finale et qui peut, à ce titre, faire l'objet d'un recours en matière
de droit public (cf. ATF 134 II 124 consid. 1.3 p. 127).

2.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour
violation du droit tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le
Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente
(art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte
ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).

3.
3.1 Selon l'art. 20 al. 3, première phrase, LACI, le droit à l'indemnité de
chômage s'éteint s'il n'est pas exercé dans les trois mois suivant la fin de la
période de contrôle à laquelle il se rapporte, notamment par la remise des
documents énumérés à l'art. 29 OACI. Ce délai de trois mois est un délai de
péremption dont l'inobservation entraîne l'extinction du droit à l'indemnité
pour une période de contrôle d'un mois. Il ne peut être ni prolongé ni
interrompu, mais il peut faire l'objet d'une restitution s'il existe une excuse
valable pour justifier le retard (ATF 114 V 123; DTA 2000 n° 6 p. 31 consid.
2a).

3.2 D'après l'art. 29 al. 1 OACI, pour la première période de contrôle pendant
le délai-cadre, l'assuré doit présenter à la caisse : a. sa demande d'indemnité
dûment remplie; b. le double de la demande d'emploi (formule officielle); c.
les attestations de travail concernant les deux dernières années; d. l'extrait
du fichier "Données de contrôle" ou la formule "Indications de la personne
assurée"; e. tous les autres documents que la caisse exige pour juger de son
droit aux indemnités. Au besoin, la caisse impartit à l'assuré un délai
convenable pour compléter les documents et le rend attentif aux conséquences
d'une négligence (art. 29 al. 3 OACI).

4.
4.1 Devant les premiers juges, S.________ a déclaré qu'elle était sûre d'avoir
déposé le formulaire IPA avec le reste de son dossier au guichet de l'office le
7 février 2008. Elle s'en rappelait bien car ce formulaire avait la couleur
jaune. Comme elle avait fait l'objet d'une décision de suspension par cet
office - contre laquelle elle s'était opposée -, elle ne s'était plus
préoccupée de son indemnisation avant d'avoir reçu la décision sur opposition
annulant cette suspension. Elle avait ensuite pris contact avec la caisse.
Apprenant par celle-ci que le formulaire IPA manquait dans son dossier, elle
avait immédiatement renvoyé ce document le 16 mai 2008. Enfin, elle précisait
savoir par d'autres personnes qu'il arrivait à l'administration de perdre des
documents qui lui avaient été remis par les assurés.

4.2 La juridiction cantonale a considéré que les explications de S.________ au
sujet de la remise, au guichet de l'office, du formulaire IPA étaient
convaincantes, quand bien même la prénommée n'avait pas été en mesure d'en
apporter la preuve. Les circonstances invoquées justifiaient qu'il ne soit pas
fait application des conséquences négatives découlant de l'art. 20 al. 3 LACI
en relation avec l'art. 29 OACI. Au surplus, en l'absence dudit document, la
caisse aurait dû accorder à l'assurée un délai convenable pour compléter son
dossier en vertu de l'art. 29 al. 3 OACI.

4.3 Pour la recourante, les premiers juges ont méconnu tant la portée de l'art.
29 al. 3 OACI que celle de la règle de la vraisemblance prépondérante
applicable à l'établissement des faits en matière d'assurance sociale. Prenant
appui sur la jurisprudence, d'après laquelle un délai supplémentaire ne doit
être accordé que pour compléter les premiers documents et non pour pallier leur
absence, elle estime qu'elle n'avait pas à avertir l'assurée du fait que le
formulaire IPA ne figurait pas parmi les documents déposés. Il fallait
également dissocier les démarches que l'administration était tenue d'effectuer
pour constituer le dossier du demandeur de prestations, de ce qu'il incombait à
celui-ci de faire pour exercer son droit au chômage (notamment déposer le
formulaire IPA) et qui relevait de sa seule responsabilité.

5.
En l'occurrence, il n'y a pas lieu de s'écarter de la solution des premiers
juges. Les assureurs ont un devoir de conseil à l'égard des assurés qui font
valoir leurs droits auprès d'eux (art. 27 al. 2 LPGA). Le but visé à l'art. 27
al. 2 LPGA est de permettre à la personne intéressée d'adopter un comportement
dont les effets juridiques cadrent avec les exigences posées par le législateur
pour que se réalise le droit à la prestation (SVR 2007 EL n° 7 p. 15, P 44/06,
consid. 5.2.1). L'assureur doit ainsi rendre la personne assurée attentive au
fait que son comportement pourrait mettre en péril la réalisation de l'une des
conditions du droit aux prestations (ATF 131 V 472). Or, dans le cas
particulier, il ressort sans ambiguïté des termes de la lettre de l'office
adressée à S.________ le 11 février 2008, qu'il manquait seulement trois
documents pour compléter "tout à fait" son dossier de chômage (à savoir
l'attestation d'études, le diplôme obtenu ainsi qu'une copie de
l'ex-matriculation de l'Université). Aussi bien, de deux choses l'une : soit
l'assurée avait bel et bien remis le formulaire IPA au guichet de l'office le 7
février 2008 et ce document a été perdu par l'administration ensuite; soit ce
formulaire ne figurait pas au dossier. Dans ce cas, l'office ne pouvait se
contenter de requérir la production des trois autres documents manquants sans
être tenu, conformément aux règles de la bonne foi et à son devoir de conseil,
de rendre également attentive l'assurée sur l'absence du formulaire IPA. En
toute hypothèse, la recourante n'est pas fondée à opposer à l'intimée les
conséquences négatives de l'échéance du délai de trois mois prévu par l'art. 20
al. 3 LACI. On ajoutera encore qu'il apparaît douteux que la jurisprudence
citée par la recourante (DTA 1998 no 48 p. 241, consid. 1b) trouve application
dans les cas - comme en l'espèce - où l'on peut déduire du comportement de la
personne assurée que celle-ci a l'intention de poursuivre les démarches
nécessaires à l'exercice du droit à l'indemnité malgré l'omission de produire
un des documents énumérés à l'art. 29 al. 1 OACI (voir par exemple DTA 2005 p.
135, C 7/03, et l'arrêt C 240/04 du 1er décembre 2005). Il n'est toutefois pas
nécessaire d'examiner ce point plus avant, dès lors que la question du délai
convenable supplémentaire de l'art. 29 al. 3 OACI n'a pas de pertinence ici.
Le recours est mal fondé.

6.
Vu l'issue du litige, la requête d'effet suspensif n'a plus d'objet. La
recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal genevois des
assurances sociales et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 4 juin 2009
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Ursprung von Zwehl