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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.965/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_965/2008

Arrêt du 28 octobre 2009
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Favre, Président,
Schneider, Wiprächtiger, Ferrari et Mathys.
Greffier: M. Oulevey.

Parties
X.________ représenté par Me Jean-Luc Addor,
avocat,
recourant,

contre

Y.________, représenté par Me Stéphane Jordan, avocat,
Procureur général du canton du Valais, 1950 Sion 2,
intimés.

Objet
Lésions corporelles graves par négligence (art. 125
al. 2 CP),

recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour
pénale II, du 22 octobre 2008.

Faits:

A.
Par jugement du 22 octobre 2008, réformant un jugement condamnatoire du Juge
des districts de Martigny et St-Maurice du 4 juin 2007, la Cour pénale II du
Tribunal cantonal du canton du Valais a acquitté Y.________ du chef de lésions
corporelles graves par négligence.

Elle a fondé cet acquittement sur les constatations de fait suivantes:
A.a Le 26 juillet 2003, X.________, titulaire d'un brevet de plongeur trois
étoiles de la Confédération Mondiale des Activités Subaquatiques (ci-après:
CMAS), et Y.________, titulaire d'un brevet de moniteur deux étoiles de la
CMAS, participaient à une plongée en scaphandre autonome dans le lac des Vaux,
organisée par deux clubs sportifs valaisans. À l'initiative de X.________, qui
savait que Y.________ connaissait les lieux, les deux hommes ont convenu de
faire équipe. Ils n'avaient jamais plongé ensemble auparavant.

Avant de se mettre à l'eau, aucun d'eux n'a effectué un contrôle précis du
matériel de son binôme. Dès leur immersion, le moniteur Y.________ a pris
spontanément la direction de la palanquée.

En une douzaine de minutes, ils sont descendus à une profondeur d'environ
cinquante mètres. Puis, en raison d'un problème d'éclairage, ils ont commencé à
remonter. Lorsqu'ils sont arrivés à quelque quarante mètres de profondeur, l'un
des deux détendeurs de X.________ s'est givré et s'est mis à fuser,
c'est-à-dire à débiter de l'air en continu. X.________ a alors utilisé son
deuxième détendeur et tendu celui qui était défectueux en direction de
Y.________, afin que celui-ci, conformément à une procédure connue des
plongeurs, prenne le tuyau d'alimentation du détendeur défectueux entre son
pouce et son index, qu'il le suive sans le lâcher jusqu'au robinet
d'alimentation, derrière X.________, et qu'il ferme ce robinet. Y.________ a
pris le tuyau, il est passé derrière X.________, mais le tuyau, enfoncé dans
les renflements du gilet de celui-ci, s'est révélé difficile à suivre à la
main. À un certain endroit, il en croisait un autre. Y.________ l'a lâché et
s'est trompé de tuyau pour achever sa manoeuvre. Il a fermé par erreur le
robinet d'alimentation du détendeur qui fonctionnait encore.

X.________ s'est trouvé privé d'air et a avalé de l'eau. Il a alors paniqué et
entamé une ascension rapide. Y.________ n'a pas pu le retenir. Les deux hommes
sont remontés sans observer les paliers de décompression.

Arrivé à la surface, Y.________ a voulu replonger aussitôt avec X.________ pour
effectuer les paliers. Constatant que celui-ci ne le suivait pas, il a tenté de
l'aider à plonger puis, comme X.________ ne parvenait pas à s'immerger, il l'a
accompagné en direction de la rive. C'est alors que X.________ a entendu un
claquement et senti son corps se paralyser, avant de perdre connaissance.
Y.________ l'a confié à d'autres plongeurs, puis, une fois X.________ pris en
charge, il a replongé seul pour effectuer ses paliers.

Pour être remonté à la surface sans respecter les paliers de décompression,
X.________ a subi des lésions du cerveau et de la moelle épinière qui l'ont
rendu tétraplégique.
A.b L'enquête ouverte ensuite de cet événement a mis en cause Y.________, qui a
été renvoyé en jugement pour lésions corporelles graves par négligence (art.
125 al. 2 CP).

X.________ s'est constitué partie civile, en concluant à la constatation de
l'obligation de Y.________ de le dédommager du préjudice matériel et moral
résultant de ses lésions, la fixation du montant de ce dédommagement étant
renvoyée au juge civil.

B.
Déclarant agir par les voies du recours en matière pénale et, subsidiairement,
du recours constitutionnel subsidiaire, X.________ recourt au Tribunal fédéral
contre ce jugement, dont il demande principalement la réforme, en ce sens que
l'intimé Y.________ soit reconnu coupable de lésions corporelles graves par
négligence et l'action civile admise dans son principe. À titre subsidiaire, il
conclut à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à la cour
cantonale pour nouvelle décision.

Y.________ conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable.

Le Procureur général et le Tribunal cantonal du canton du Valais s'en remettent
au Tribunal fédéral.

Le recourant a présenté des observations sur les réponses des intimés et de la
cour cantonale.
Considérant en droit:

1.
Le recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF) n'est ouvert que
contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne
peuvent faire l'objet d'un recours ordinaire au Tribunal fédéral (cf. art. 113
LTF). En l'espèce, comme le jugement attaqué peut être déféré au Tribunal
fédéral par la voie du recours en matière pénale (art. 78 ss LTF), le recours
constitutionnel subsidiaire est irrecevable.

2.
En vertu de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF, la victime qui a participé à la
procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal
fédéral si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses
prétentions civiles. Cette dernière condition, reprise de l'art. 270 let. e ch.
1 aPPF (RO 2000 2719), doit être interprétée comme elle l'était pour
l'application de cette ancienne disposition légale, qui énonçait les conditions
auxquelles la victime avait qualité pour se pourvoir en nullité selon les art.
268 ss aPPF (cf. ATF 133 IV 228 consid. 2.3.3 p. 234). De jurisprudence
constante, elle n'est remplie que si la victime a exercé l'action civile, en
prenant des conclusions en réparation de tout ou partie de son dommage matériel
ou de son tort moral (ATF 131 IV 195 consid. 1.2.2 p. 198 s.; 127 IV 185
consid. 1b p. 188). La réserve de ses droits ne suffit pas (ATF 127 IV 185
consid. 1b p. 188). Toutefois, la prise de conclusions condamnatoires n'est
exceptionnellement pas exigée lorsque le dommage n'est pas encore établi ou ne
peut pas encore être chiffré. Mais il incombe alors à la victime qui recourt
d'expliquer quelles prétentions elle entend faire valoir et pourquoi elle n'a
pas agi en paiement dans le cadre de la procédure pénale (ATF 123 IV 184
consid. 1b p. 187).

En l'espèce, le recourant ne s'est pas contenté de demander qu'acte lui soit
donné de ses réserves civiles; il a pris des conclusions constatatoires, dont
le jugement devait avoir autorité au civil. En outre, il ressort de son mémoire
que le recourant veut être indemnisé pour ses frais, son incapacité de travail,
l'atteinte portée à son avenir économique et pour son tort moral. Ainsi, il est
manifeste qu'il a pris des conclusions constatatoires non chiffrées parce que
le montant de certains de ces postes devait être établi par une expertise qui,
faute de pertinence pour le jugement de l'action pénale elle-même, ne pouvait
être mise en oeuvre dans le procès pénal. Dès lors, le recourant a qualité pour
recourir.

3.
D'abord, le recourant fait valoir que la cour cantonale a établi les faits de
manière manifestement inexacte, au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF,
lorsqu'elle a retenu qu'il avait paniqué une fois privé d'air et qu'il n'avait
pas eu la présence d'esprit, à ce moment-là, de se servir du second détendeur
de l'intimé.

3.1 L'arrêt attaqué ne constate pas que le recourant ne s'est pas servi du
deuxième détendeur de l'intimé. Lorsqu'elle déclare ajouter foi aux premières
déclarations de ce dernier, la cour cantonale se prononce exclusivement sur la
cause de la remontée rapide vers la surface (cf. arrêt attaqué, ch. 3b/aa p.
17), en retenant qu'elle est due à une réaction de panique du recourant lorsque
celui-ci a avalé de l'eau. Mais la cour cantonale ne reprend pas à son compte
toutes les déclarations de l'intimé, notamment pas celles qui concernent le
détendeur utilisé par le recourant pour respirer pendant la remontée.

En aucun passage, le jugement attaqué ne laisse penser que le recourant serait
remonté vers la surface en apnée. Or, il constate expressément que le recourant
ne s'est pas servi du détendeur qui fusait. Il retient donc nécessairement que
le recourant a utilisé le détendeur de secours de l'intimé. Le grief se révèle
ainsi dépourvu de fondement.

3.2 En revanche, la cour cantonale retient bien que le recourant a paniqué
lorsqu'il a avalé de l'eau et qu'il s'est alors retourné pour s'emparer du
détendeur de secours de l'intimé et entamer sa remontée en palmant.
3.2.1 Le recourant fait valoir que cette constatation de fait est manifestement
inexacte, parce qu'elle se fonde sur les déclarations que l'intimé a faites à
la police lors de sa première audition, lors même que celui-ci est revenu sur
ces déclarations lors de ses auditions suivantes.

En vertu de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, le recourant doit, à peine
d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b et 117 LTF), motiver son recours en
exposant succinctement en quoi la décision attaquée viole le droit. Pour ce
faire, il doit en principe se fonder sur les faits retenus par le juge
précédent (cf. art. 97 LTF). Il ne peut s'en écarter que s'il explique de
manière circonstanciée en quoi ceux-ci ont été établis en violation du droit,
au sens des art. 95 et 96 LTF, ou de façon manifestement inexacte, c'est-à-dire
arbitraire (cf. arrêt 6B_178/2007 du 23 juillet 2007 consid. 1.2, non publié in
ATF 133 IV 286).

Lorsque la décision attaquée comporte plusieurs motivations indépendantes et
suffisantes à sceller le sort du grief, il incombe au recourant, sous peine
d'irrecevabilité, de démontrer que chacune d'elles est contraire au droit (ATF
133 IV 119 consid. 6.3 p. 120 s.). Si le juge du fait a motivé son appréciation
des preuves par plusieurs raisonnements indépendants, le recourant doit,
pareillement, exposer en quoi chacun d'eux est arbitraire. À ce défaut, son
grief est irrecevable.

Dans le cas présent, la cour cantonale ne retient pas la réaction de panique du
recourant au seul motif que les déclarations initiales d'un accusé sont, de
manière générale, plus probantes que les suivantes, mais encore aux motifs que
les premières déclarations de l'intimé étaient corroborées par le rapport de
l'expert du Bureau de Prévention des Accidents de Plongée du 28 février 2006,
d'une part, et que la version des faits donnée par le recourant n'explique pas
pourquoi celui-ci s'est trouvé dans l'incapacité de maîtriser sa remontée,
d'autre part (cf. arrêt attaqué, ch. 3b/aa p. 18). Or, le recourant ne soulève
aucun grief contre ces deux dernières motivations, dont chacune est, vu les
termes "de surcroît" et "au demeurant" qui les introduisent, jugée suffisante
par la cour cantonale. Le grief est dès lors irrecevable.

4.
Ensuite, le recourant soutient que la cour cantonale a violé l'art. 125 al. 2
CP, qui punit le délit de lésions corporelles graves par négligence, en
refusant d'appliquer cette disposition légale à l'intimé.

4.1 Le délit de lésions corporelles graves par négligence suppose la réunion de
trois éléments constitutifs: des lésions corporelles graves subies par la
victime, une négligence de l'auteur et un lien de causalité entre cette
négligence et ces lésions. La présence du premier élément est en l'espèce
incontestée.

4.2 La négligence est l'imprévoyance coupable commise par celui qui, ne se
rendant pas compte des conséquences de son acte, agit sans user des précautions
commandées par les circonstances et sa situation personnelle (art. 12 al. 3
CP). Pour qu'il y ait négligence, deux conditions doivent être remplies. En
premier lieu, il faut que l'auteur ait violé les règles de la prudence,
c'est-à-dire le devoir général de diligence institué par la loi pénale, qui
interdit de mettre en danger les biens d'autrui pénalement protégés contre les
atteintes involontaires (ATF 134 IV 255 consid. 4.2.3 p. 262 et la référence).
L'auteur viole les règles de la prudence s'il agit en dépassant les limites du
risque admissible alors qu'il devrait, de par ses connaissances et aptitudes
personnelles, se rendre compte du danger qu'il fait courir à autrui (ATF 134 IV
255 consid. 4.2.3 p. 262; 121 IV 10 consid. 3 p. 14) ou s'il omet, alors qu'il
occupe une position de garant (art. 11 al. 2 et 3 CP) et que le risque dont il
doit empêcher la réalisation vient à dépasser la limite de l'admissible,
d'accomplir une action dont il devrait se rendre compte, de par ses
connaissances et aptitude personnelles, qu'elle est nécessaire pour éviter un
dommage (cf. ATF 134 IV 255 consid. 4.2.2 p. 260 ss; 117 IV 130 consid. 2a p.
132 ss). Pour déterminer le contenu du devoir de prudence, il faut se demander
si une personne raisonnable dans la même situation et avec les mêmes aptitudes
que l'auteur pouvait prévoir, dans les grandes lignes, le déroulement des
événements - question qui s'examine suivant la théorie de la causalité adéquate
si l'auteur n'est pas un expert dont on pouvait attendre de meilleures
prévisions - et, le cas échéant, quelles mesures cette personne pouvait
prendre, compte tenu des connaissances qu'elle pouvait avoir au moment des
faits, pour éviter la survenance du résultat (ATF 134 IV 255 consid. 4.2.3 p.
262 et les références). En second lieu, pour qu'il y ait négligence, il faut
que la violation du devoir de prudence soit fautive, c'est-à-dire que l'on
puisse reprocher à l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, une
inattention ou un manque d'effort blâmable (ATF 134 IV 255 consid. 4.2.3 p. 262
et les références).

4.3 La causalité ne se présente pas sous le même aspect selon que l'auteur a
violé son devoir de prudence par action ou par omission.
4.3.1 Une action est l'une des causes naturelles d'un résultat dommageable si,
dans l'enchaînement des événements tels qu'ils se sont produits, elle a été, au
regard de règles d'expérience ou de lois scientifiques, une condition sine qua
non de la survenance de ce résultat - soit si, en la retranchant
intellectuellement des événements qui se sont produits en réalité, et sans rien
ajouter à ceux-ci, on arrive à la conclusion, sur la base des règles
d'expérience et des lois scientifiques reconnues, que le résultat dommageable
ne se serait très vraisemblablement pas produit (cf. ATF 115 IV 199 consid. 5b
p. 206 et les références). La série des événements à prendre en considération
pour cette opération intellectuelle commence par l'action reprochée à l'auteur,
finit par le dommage et ne comprend rien d'autre que les événements qui ont
relié ces deux extrémités de la chaîne d'après les règles d'expérience et les
lois scientifiques. La causalité naturelle ne cesse dès lors pas lorsque le
dommage résulte effectivement de l'action reprochée à l'auteur, mais serait
survenu quand même sans cette cause, à raison d'autres événements qui
l'auraient entraîné si l'auteur ne l'avait pas lui-même causé (ATF 133 IV 158
consid. 6.1 p. 167 et les références).

Par ailleurs, une action qui est l'une des causes naturelles d'un résultat
dommageable en est aussi une cause adéquate si, d'une part, elle était propre,
d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à
entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 133 IV 158
consid. 6.1 p. 168 et les références) et si, d'autre part, elle a effectivement
causé le résultat dommageable pour des raisons en rapport avec le but
protecteur de la règle de prudence violée, et non pour des raisons fortuites
(connexité du dommage et du risque; cf. ATF 133 IV 158 consid. 6.1 p. 167 s. et
les références). Il s'agit là de questions de droit que la cour de céans revoit
librement.

Il y a rupture du lien de causalité adéquate, l'enchaînement des faits perdant
sa portée juridique, si une autre cause concomitante - par exemple une force
naturelle, le comportement de la victime ou celui d'un tiers - propre au cas
d'espèce constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si
extraordinaire que l'on ne pouvait pas s'y attendre. Cependant, cette
imprévisibilité de l'acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le
rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte ait une importance
telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de
l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui
ont contribué à celui-ci, notamment le comportement de l'auteur (ATF 133 IV 158
consid. 6.1 p. 168 et les références).
4.3.2 En revanche, en cas de violation du devoir de prudence par omission, il
faut procéder par hypothèses et se demander si l'accomplissement de l'acte omis
aurait, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, évité la
survenance du résultat qui s'est produit, pour des raisons en rapport avec le
but protecteur de la règle de prudence violée; pour l'analyse des conséquences
de l'acte supposé, il faut appliquer les concepts généraux de la causalité
naturelle et de la causalité adéquate (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.1 p. 264 s.
et les références; 133 IV 158 consid. 6.1 p. 168 et les références).

4.4 Le recourant fait grief à la cour cantonale de ne pas avoir reconnu
l'intimé coupable de lésions corporelles grave par négligence en raison des
actions ou omissions suivantes.
4.4.1 En premier lieu, il soutient que l'intimé n'a pas planifié la plongée
avec le soin que l'on pouvait attendre d'un moniteur deux étoiles CMAS.
Concrètement, il lui reproche de n'avoir pas respecté la règle de sécurité n° 5
de la Fédération Suisse de Sports Subaquatiques (ci-après: FSSS), dont la
teneur est la suivante: "Contrôle ton équipement avant chaque plongée, de même
que celui de ton partenaire. Vérifie qu'il soit complet et en parfait état de
fonctionnement." Le recourant allègue que, si l'intimé avait procédé au
contrôle prescrit par cette règle, il aurait visualisé la position du robinet à
fermer, qu'il s'en serait souvenu le moment venu, qu'il aurait alors fermé le
bon robinet et que l'accident aurait ainsi été évité.

Ce grief est mal fondé. La règle de sécurité n°5 de la FSSS n'oblige pas à
mémoriser l'équipement du partenaire. Au vu de sa seconde phrase, elle ne
prescrit rien de plus, ni de moins, qu'un double contrôle du matériel. Du
reste, en cas de givrage, la procédure édictée par la FSSS prévoit que le
plongeur assistant suive le tuyau du détendeur défectueux jusqu'à la vanne afin
de la fermer, non qu'il la trouve directement pour en avoir préalablement
mémorisé l'emplacement.

D'une manière générale, il n'est pas nécessaire qu'un plongeur mémorise
l'équipement de ses compagnons de palanquée pour être en mesure de remplir son
obligation (cf. art. 11 al. 2 let. c CP) de secourir ceux d'entre eux qui
pourraient rencontrer des difficultés. Les procédures de sécurité que tout
plongeur doit connaître permettent de faire face aux incidents possibles sans
que le plongeur assistant ait besoin de savoir à l'avance où se trouvent
exactement les éléments sur lesquels il pourra être appelé à agir.

Dans ces conditions, même si l'on admettait que l'intimé se serait rappelé
l'endroit où se trouvait le robinet à fermer s'il avait procédé au contrôle
prescrit par la règle de sécurité n°5 de la FSSS avant de s'immerger, le fait
qu'il a omis ce contrôle - ce qui est une faute - n'engagerait pas sa
responsabilité pénale, car le lien de causalité hypothétique entre cette
omission et les lésions subies par le recourant serait sans rapport avec le but
de la règle protectrice violée, qui ne tend pas à ce que chaque plongeur ait
mémorisé l'équipement de son binôme, mais seulement à ce qu'il parte avec un
équipement complet et en bon état de fonctionnement. Comme l'équipement du
recourant n'était ni incomplet ni défectueux dans son fonctionnement, l'intimé
ne s'est pas rendu coupable de lésions corporelles graves par négligence pour
n'avoir pas procédé au contrôle du matériel prescrit par la règle de sécurité
n°5 de la FSSS.
4.4.2 En deuxième lieu, le recourant soutient que la cour cantonale aurait dû
reconnaître l'intimé coupable de lésions corporelles graves par négligence,
parce que celui-ci n'aurait pas respecté la procédure à suivre en cas de
givrage d'un détendeur.
4.4.2.1 Ainsi, le recourant fait grief à l'intimé de ne pas avoir tenu jusqu'au
bout le tuyau d'alimentation entre ses doigts. Certes, l'intimé a pu éprouver
de la difficulté à le faire, mais rien, d'après le recourant, ne justifiait
qu'il renonce à cette manoeuvre. Après avoir lâché le tuyau, il aurait dû
recommencer l'opération depuis le début. Compte tenu des réserves d'air de
chacun d'eux, l'intimé avait, selon le recourant, amplement le temps de le
faire.

Ce grief ne saurait être accueilli. En effet, il ne ressort pas de l'état de
fait de l'arrêt attaqué que, si l'intimé avait recommencé à suivre le tuyau
d'alimentation du détendeur qui fusait, il serait parvenu, cette fois-ci, à
passer le croisement avec l'autre tuyau sans devoir à nouveau lâcher prise. Au
contraire, le gilet du recourant aurait toujours été aussi fortement gonflé et
il aurait toujours été aussi difficile pour l'intimé de suivre le tuyau d'une
seule main - l'autre tenant la torche - et, une fois arrivé au croisement, de
sentir à travers ses gants d'où partait le bon tuyau. Dans ces circonstances,
on ne saurait retenir que l'intimé aurait dû recommencer la manoeuvre pour
réduire le risque d'erreur, ni, par conséquent, lui imputer à faute d'avoir
fermé le mauvais robinet.
4.4.2.2 Ensuite, le recourant reproche à l'intimé, d'une part, de ne pas
l'avoir tenu pendant la manoeuvre, alors qu'il aurait dû maintenir un contact
physique avec lui, et, d'autre part, d'être resté derrière lui après avoir
fermé le robinet d'alimentation, alors que les règles de sécurité prescrivent
au plongeur qui vient d'accomplir ce geste, compte tenu du risque qu'il n'ait
pas fermé la bonne vanne, de repasser devant son partenaire et de rétablir le
contact visuel avec lui, afin que celui-ci puisse lui signaler une éventuelle
erreur. Le recourant fait valoir que, si l'intimé avait respecté au moins l'une
de ces deux obligations, l'accident ne se serait pas produit.

Ces griefs ne sauraient davantage être admis. D'après ses propres déclarations,
rapportées par l'arrêt attaqué (ch. 2 b/bb p. 9), le recourant a pu se saisir
du second détendeur de l'intimé en se tournant simplement par la gauche.
L'intimé est donc resté à portée de main du recourant pendant la manoeuvre; on
ne saurait lui reprocher de s'être trop éloigné. Il est constant, en revanche,
qu'après avoir fermé le robinet, l'intimé n'est pas repassé devant le recourant
pour s'assurer que tout allait bien. Mais il ressort des constatations de fait
déterminantes de la cour cantonale (cf. supra, consid. 3.2) que l'intimé n'a
pas eu la possibilité de le faire, parce que le recourant, pris de panique dès
qu'il a avalé de l'eau, s'est retourné pour se saisir du second détendeur de
l'intimé et a entamé aussitôt sa remontée, empêchant par là-même l'intimé de
retourner derrière lui pour corriger son erreur. Aussi, le devoir d'agir
supposant la possibilité de le faire, l'intimé n'a-t-il pas violé les règles de
la prudence en ne procédant pas aux vérifications prescrites par les règles de
sécurité après avoir fermé le robinet.
4.4.3 Enfin, le recourant fait grief à l'intimé de ne pas l'avoir aidé à purger
son gilet une fois amorcée leur remontée vers la surface. Il soutient que si
l'intimé, voyant qu'il était en difficulté, avait actionné à sa place la purge
rapide de son gilet, leur position aurait été stabilisée et l'accident
vraisemblablement évité.

Comme le fait valoir l'intimé dans sa réponse, ce grief n'était pas mentionné
dans l'arrêt de renvoi du 8 septembre 2006 (cf. dossier cantonal, p. 277 s.).
Il n'a en outre pas été introduit dans la procédure par une modification de
l'accusation, au sens de l'art. 135 du code de procédure pénale valaisan
(ci-après: CPP/VS; RS/VS 312.0). Ainsi, ni le premier juge ni la cour cantonale
ne se sont prononcés sur lui (cf. art. 139 ch. 1, 191 ch. 2 et 193 ch. 2 CPP/
VS). Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale se borne à rapporter les
déclarations de l'intimé, selon lequel il ne serait pas parvenu à actionner la
purge rapide du gilet de son binôme pendant la remontée (cf. arrêt attaqué, ch.
2b/aa p. 8). Faute de se rapporter à un élément de l'accusation, le grief du
recourant est dès lors irrecevable.

Il en résulte que la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en
considérant que le recourant ne s'est pas rendu coupable, par les faits
régulièrement constatés dans l'arrêt attaqué, de lésions corporelles graves par
négligence. Le recours doit dès lors être rejeté dans la mesure où il est
recevable.

5.
Bien qu'il soit finalement rejeté, le recours n'est pas apparu d'emblée
dépourvu de toutes chances de succès. Il convient dès lors d'admettre la
demande d'assistance judiciaire du recourant, de désigner son mandataire comme
avocat d'office, d'allouer à celui-ci une indemnité à titre d'honoraires et de
rendre l'arrêt sans frais (art. 64 al. 1 LTF).

L'intimé, qui obtient gain de cause, a droit à une indemnité pour ses dépens
(art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise et Me Jean-Luc Addor est désigné
avocat d'office du recourant.

3.
La Caisse du Tribunal fédéral versera 3'000 fr. au mandataire du recourant à
titre d'honoraires.

4.
Il n'est pas prélevé de frais judiciaires.

5.
Le recourant versera 2'000 fr. de dépens à l'intimé Y.________.

6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
du Valais, Cour pénale II.

Lausanne, le 28 octobre 2009
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Favre Oulevey