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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.960/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_960/2008 /hum

Arrêt du 22 janvier 2009
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Favre, Président,
Ferrari et Mathys.
Greffière: Mme Angéloz.

Parties
X.________,
recourant,

contre

Ministère public du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Objet
Rémunération de l'avocat d'office,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de
cassation pénale, du 2 juin 2008.

Faits:

A.
Par jugement du 21 février 2008, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement
de l'Est vaudois a libéré A.________ de l'accusation de viol et l'a condamné,
pour contrainte sexuelle, à une peine privative de liberté de 8 mois avec
sursis pendant 2 ans, peine complémentaire à une condamnation du 27 octobre
2003. Il l'a astreint à verser à la victime une indemnité pour tort moral de
3'000 fr. et a mis une partie des frais, par 10'247,30 fr., à sa charge.

Saisie d'un recours du condamné, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois, par arrêt du 2 juin 2008, l'a partiellement admis, en ce sens
qu'elle a substitué à la peine privative de liberté une peine pécuniaire de 120
jours-amende, d'un montant de 30 fr. chacun, avec sursis pendant 2 ans, le
jugement attaqué étant maintenu pour le surplus. Elle a mis la moitié des frais
de seconde instance, y compris l'indemnité de 473,45 fr. allouée au défenseur
d'office du recourant et celle de 387,35 fr. allouée au défenseur d'office de
la victime, soit, au total, 1'145,40 fr., à la charge du recourant.

B.
X.________, avocat d'office de A.________ en instance cantonale, forme un
recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Se plaignant d'avoir été
insuffisamment rémunéré pour la défense d'office qu'il a assumée dans la
procédure de recours cantonale, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué
sur ce point.
Le Ministère public et l'autorité cantonale se réfèrent à l'arrêt attaqué.

Considérant en droit:

1.
Le recourant invoque une application arbitraire des art. 28 ss du Tarif vaudois
des frais judiciaires pénaux du 7 octobre 2003 (TFJP; RSV 312.03.1). Il
soutient que l'indemnité qui lui a été allouée en sa qualité de défenseur
d'office pour la procédure de recours cantonale est manifestement trop basse. A
l'appui, il fait valoir que le montant octroyé, soit 440 fr. après amputation
de la TVA par 33,45 fr., équivaut, pour les 6 heures 40 de travail qu'il a
consacrées à l'affaire, à une rémunération horaire de 65,65 fr., alors qu'il
pouvait prétendre à un montant horaire de 180 fr. au tarif habituellement
appliqué dans le canton de Vaud, donc à une indemnité totale de 1200 fr. sans
la TVA.

1.1 La fixation de l'indemnité allouée à l'avocat d'office pour son activité
devant les juridictions cantonales relève en principe du droit cantonal (cf.
ATF 132 I 201 consid. 7.2 et 7.3 p. 205 et 206; 110 V 360 consid. 1b p. 362).
L'avocat d'office a cependant droit au remboursement intégral de ses débours
ainsi qu'à une indemnité s'apparentant aux honoraires perçus par le mandataire
plaidant aux frais de son client. Pour fixer cette indemnité, l'autorité doit
tenir compte de la nature et de l'importance de la cause, des difficultés
particulières que celle-ci peut présenter en fait et en droit, du temps que
l'avocat lui a consacré, de la qualité de son travail, du nombre des
conférences, audiences et instances auxquelles il a pris part, du résultat
obtenu et de la responsabilité qu'il a assumée. A condition d'être équitable,
il est admis que la rémunération de l'avocat d'office puisse être inférieure à
celle du mandataire choisi. En principe, elle devrait couvrir les frais
généraux de l'avocat, dont on estime qu'ils correspondent d'ordinaire à 40% au
moins du revenu professionnel brut, voire à la moitié de ce revenu (ATF 122 I 1
consid. 3a et 3c p. 2 et 3 et les références citées; cf. aussi ATF 122 I 322
consid. 3b p. 325).

L'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans l'application des
normes cantonales relatives à l'indemnisation de l'avocat d'office. Le Tribunal
fédéral n'intervient que si elle a abusé de son pouvoir d'appréciation ou si
elle l'a excédé; il en est ainsi lorsque la décision repose sur une
appréciation insoutenable des circonstances, qu'elle est inconciliable avec les
règles du droit et de l'équité, qu'elle omet de tenir compte de tous les
éléments de fait propres à la fonder, ou encore lorsqu'elle prend au contraire
en considération des éléments qui ne sont pas pertinents (ATF 125 V 408 consid.
3a; 122 I 1 consid. 3a p. 2 et les arrêts cités). Enfin, il ne suffit pas que
l'autorité ait apprécié de manière erronée un poste de l'état des frais ou
qu'elle se soit fondée sur un argument déraisonnable; encore faut-il que le
montant global alloué à titre d'indemnité se révèle arbitraire (ATF 109 la 107
consid. 3d p. 112), au sens défini par la jurisprudence constante (ATF 134 I
140 consid. 5.4 p. 148 et les arrêts cités).

1.2 Malgré diverses critiques doctrinales, le Tribunal fédéral a récemment
confirmé qu'il est admissible que le tarif horaire de l'avocat d'office soit
généralement inférieur à celui utilisé pour fixer la rémunération de l'avocat
mandaté par son client. Font exception à cette règle les cantons de Zoug et
d'Obwald, dans lesquels la rémunération de l'avocat commis d'office et celle du
mandataire de choix sont en principe équivalentes, parce que soumises à un
tarif identique. Toutefois, même dans cette hypothèse particulièrement
favorable, il ressort de la pratique que les honoraires payés par l'État au
défenseur désigné peuvent également être plus réduits que ceux versés à son
avocat par un client privé (ATF 132 I 201 consid. 7.3.3 p. 208).

1.3 En règle générale, la rémunération de l'avocat d'office, qui pouvait encore
récemment être limitée à 40% ou à 50% du revenu professionnel brut d'un avocat
payé par son client (ATF 122 I 1 consid. 3a p. 3 et les arrêts cités), varie
aujourd'hui de 60% à 85% de la rémunération ordinaire, privée, cette dernière
proportion étant appliquée dans les cantons de Lucerne et de Nidwald (ATF 132 I
201 consid. 7.3.1 p. 207 et les références). Pour les cantons qui pratiquent la
limitation du dédommagement versé à l'avocat désigné d'office par le biais d'un
tarif horaire réduit, le taux de 150 fr. est notamment en usage dans les
cantons de Glaris, Appenzell Rhodes extérieures et Fribourg (ATF 132 I 201
consid. 7.3.2 p. 207 s.).

1.4 En l'espèce, la cour cantonale n'a pas remis en cause le nombre d'heures de
travail que le recourant indiquait avoir consacrées à l'affaire pour la
procédure de deuxième instance. Du montant qu'elle lui a alloué, TVA déduite,
pour cette procédure, on doit déduire qu'elle a fixé la rémunération horaire du
recourant à 66 fr., ce qui est loin d'équivaloir à 60% de la rémunération
ordinaire qu'un avocat de choix tirerait de l'exercice de sa profession.
L'indemnité allouée est ainsi manifestement trop basse (en ce sens déjà, cf.
arrêt 6B_750/2007 du 14 avril 2007).

2.
Le recours doit ainsi être admis, le chiffre III du dispositif de l'arrêt
attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle
décision dans le sens des considérants.

Vu l'issue du recours, il ne sera pas perçu de frais et le canton de Vaud
versera au recourant une indemnité de dépens de 1500 fr.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis.

2.
Le chiffre III du dispositif de l'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée
à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.

3.
Il n'est pas perçu de frais.

4.
Le canton de Vaud versera au recourant une indemnité de dépens de 1500 fr.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de cassation pénale.

Lausanne, le 22 janvier 2009

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Favre Angéloz