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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.918/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_918/2008 /rod

Arrêt du 7 janvier 2009
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Mathys.
Greffière: Mme Gehring.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Yvan Guichard, avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Objet
Demande de révision d'une ordonnance de condamnation (violation simple des
règles de la circulation routière, conduite en état d'incapacité),

recours contre l'arrêt de la Commission de révision pénale du Tribunal cantonal
vaudois du 9 octobre 2008.

Faits:

A.
Par ordonnance du 19 février 2007, le Juge d'instruction de l'arrondissement de
Lausanne a condamné X.________ pour violation simple des règles de la
circulation routière et conduite en état d'incapacité à quinze jours-amende de
100 fr. chacun avec sursis pendant deux ans et à 1000 fr. d'amende convertibles
en dix jours de peine privative de liberté en cas de non-paiement dans le délai
imparti. Il a retenu à l'encontre du condamné le fait qu'il avait circulé, peu
après la prise d'un somnifère, au volant de sa voiture dont il avait finalement
perdu la maîtrise avant de percuter un arbre en contre-bas de la chaussée. Il
n'a pas été formé d'opposition.

B.
Le 30 avril 2008, X.________ a demandé la révision de l'ordonnance de
condamnation et le renvoi de la cause au Tribunal de police de l'arrondissement
de Lausanne pour complément d'instruction et nouveau jugement. En guise de fait
nouveau, il a allégué n'avoir pas ingéré un somnifère comme retenu par le juge
d'instruction, mais plusieurs comprimés dans le but d'attenter à ses jours. Il
a précisé avoir signalé aux fonctionnaires de police qu'il s'était agi d'un
tentamen, mais ces derniers n'en avaient pas fait état dans leur rapport par
pudeur à son égard. Par jugement du 9 octobre 2008, la Commission de révision
pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté la demande considérée comme
abusive au motif que X.________ aurait dû contester l'ordonnance de
condamnation par voie d'opposition de façon à révéler ces faits dans la
procédure ordinaire.

C.
X.________ interjette un recours en matière pénale et un recours
constitutionnel subsidiaire contre ce jugement dont il requiert l'annulation en
concluant, sous suite de frais et dépens, au renvoi de la cause à la Commission
de révision pénale pour nouveau jugement.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
La demande de révision du recourant est dirigée contre une ordonnance de
condamnation en force, rendue en vertu d'une norme pénale fédérale. Une telle
décision constitue un jugement au sens de l'art. 385 CP (cf. ATF 100 IV 248
consid. 2b p. 250/251 prononcé sous l'empire de l'art. 397 aCP) et peut donc
faire l'objet d'un recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF. Le
recours constitutionnel subsidiaire étant ainsi exclu (art. 113 LTF), il sera
dès lors traité comme faisant partie intégrante du recours en matière pénale
interjeté parallèlement (cf. ATF 131 I 291 consid. 1.3 p. 296; 126 II 506
consid. 1b p. 509 et les arrêts cités).

2.
Le recours en matière pénale peut être interjeté pour violation du droit, tel
qu'il est circonscrit par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral l'applique
d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments
soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité
précédente. Il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont
été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation
différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4
p. 140). Par ailleurs, il doit conduire son raisonnement juridique sur la base
des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF). Il peut
compléter ou rectifier même d'office les constatations de fait qui se révèlent
manifestement inexactes ou établies en violation du droit (art. 105 al. 2 LTF).

3.
3.1 Aux termes de l'art. 385 CP, les cantons sont tenus de prévoir un recours
en révision en faveur du condamné contre les jugements rendus en vertu du
présent code ou d'une autre loi fédérale, quand des faits ou des moyens de
preuve sérieux et dont le juge n'avait pas eu connaissance lors du premier
procès viennent à être invoqués. Le législateur vaudois s'est plié à cette
injonction en adoptant l'art. 455 du Code de procédure pénale (CPP) aux termes
duquel la révision d'un jugement ou d'une ordonnance de condamnation, ainsi que
celle d'un arrêt de la Cour de cassation, peut être demandée quand des faits ou
des moyens de preuve sérieux et dont le juge n'avait pas eu connaissance lors
du premier procès viennent à être invoqués. Les cas d'ouverture en révision
prévus par cette norme étant identiques à ceux de l'art. 385 CP, la
jurisprudence y relative du Tribunal fédéral doit être retenue (BENOÎT BOVAY et
al., Procédure pénale vaudoise, 3e éd. 2008, art. 455 n. 1.1). Par ailleurs,
l'art. 385 CP reprenant à l'identique le texte de l'ancien art. 397 CP, la
jurisprudence développée sous l'empire de cette dernière disposition demeure
applicable.
Il en résulte notamment qu'un fait ou un moyen de preuve est nouveau au sens de
l'art. 385 CP, lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est
prononcé, c'est-à-dire lorsqu'il ne lui a pas été soumis sous quelque forme que
ce soit (ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73; 122 IV 66 consid. 2a p. 67 et les
arrêts cités), sans qu'il importe qu'il ait été connu ou non du requérant (ATF
130 IV 72 consid. 2.2 p. 74). Cette solution résulte en particulier du fait
qu'en procédure pénale, il incombe à l'accusation de prouver la culpabilité de
l'accusé. Ce n'est par conséquent qu'avec retenue qu'un abus de droit peut être
envisagé et opposé à celui qui se prévaut de l'art. 397 aCP et sollicite une
révision sur la base d'un fait qu'il connaissait déjà, mais qu'il n'a pas
soumis au juge de la première procédure. Il est néanmoins généralement admis
qu'une révision ne doit pas servir à remettre sans cesse en cause une décision
entrée en force, à détourner les dispositions légales sur les délais de recours
ou celles sur la restitution desdits délais, voire à introduire des faits non
présentés dans le premier procès en raison d'une négligence procédurale (ATF
127 I 133 consid. 6 in fine p. 138; 125 IV 298 consid. 2b in fine p. 302; cf.
aussi, NIKLAUS SCHMID, Strafprozessrecht, Zurich 2004, 4ème éd., n. 1134 ainsi
que la note de bas de page 600). L'interdiction de l'abus de droit s'étend à
l'ensemble des domaines du droit, en particulier à la procédure pénale. L'abus
de droit consiste à utiliser une institution juridique à des fins étrangères au
but même de la disposition légale qui la consacre, de telle sorte que l'écart
entre le droit exercé et l'intérêt qu'il est censé protéger soit manifeste (ATF
125 IV 79 consid. 1b p. 81). Une demande de révision dirigée contre une
ordonnance de condamnation doit ainsi être qualifiée d'abusive si elle repose
sur des faits que le condamné connaissait initialement, qu'il n'avait aucune
raison légitime de taire et qu'il aurait pu révéler dans une procédure
ordinaire mise en oeuvre par une simple opposition (ATF 130 IV 72 consid. 2 p.
74). En revanche, une révision peut entrer en considération à l'égard d'une
ordonnance de condamnation pour des faits et des moyens de preuve importants
que le condamné ne connaissait pas au moment du prononcé de l'ordonnance ou
dont il ne pouvait pas se prévaloir ou n'avait pas de raisons de se prévaloir à
cette époque (ATF 130 IV 72 consid. 2.3 p. 75).

Savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception de faits
ou de moyens de preuve nouveaux et sérieux au sens de l'art. 385 CP est une
question de droit. En revanche, savoir si un fait ou un moyen de preuve était
effectivement inconnu du juge est une question de fait qui peut être revue pour
arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves. Il en
va de même de la question de savoir si un fait nouveau ou un moyen de preuve
nouveau est propre à modifier l'état de fait retenu puisqu'elle relève de
l'appréciation des preuves, étant rappelé qu'une vraisemblance suffit au stade
du rescindant. Enfin, c'est de nouveau une question de droit de savoir si la
modification de l'état de fait est juridiquement pertinente, c'est-à-dire de
nature, en fonction des règles de droit de fond applicables, à entraîner une
décision plus favorable au condamné en ce qui concerne la culpabilité, la peine
ou les mesures (ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73 et les arrêts cités).
3.2
3.2.1 Le recourant invoque qu'à l'époque où l'ordonnance de condamnation pénale
lui a été notifiée, il souffrait de troubles dépressifs qui l'auraient empêché
de faire opposition. Il n'aurait pas disposé des ressources psychologiques
suffisantes pour exposer publiquement au Tribunal de police, ses problèmes
conjugaux et la pulsion suicidaire qui l'a submergé.
3.2.2 Ce faisant, il ne conteste pas avoir eu connaissance des faits nouveaux
au moment de la notification de l'ordonnance de condamnation. En revanche, il
fait valoir qu'il était alors psychologiquement inapte à les révéler en
procédure ordinaire et qu'il avait des raisons légitimes de les taire.
Selon les constatations cantonales, le recourant a été entendu le 31 décembre
2006 par la police intercommunale de Pully, Paudex, Belmont et Savigny. Il y a
notamment déclaré avoir pris le volant pour se rendre dans les bois de Belmont,
s'être garé sur le bas-côté de la chaussée, avoir quitté son véhicule, s'être
couché sur une couverture à proximité de ce dernier puis avoir pris un
somnifère afin de se reposer. Le 29 janvier 2007, le juge d'instruction l'a
informé de son intention de le condamner à une peine pécuniaire d'au maximum
trente jours-amende avec sursis et à une amende; en outre, il renonçait à
l'entendre, mais s'il souhaitait néanmoins comparaître devant lui, il lui
appartenait de le lui faire savoir dans un délai de dix jours. Le condamné
n'ayant pas requis son audition par le juge d'instruction, ce dernier a rendu
son ordonnance en date du 29 février 2007 aux termes de laquelle il a retenu
qu'"alors qu'il avait pris un médicament somnifère, l'inculpé, qui circulait
sur le chemin du Bois-Trepay, a perdu le contrôle de sa voiture qui est sortie
de la route sur la droite avant de terminer sa course contre un arbre dressé à
quelque 4 mètres en contre-bas de la chaussée". Le condamné n'a pas formé
opposition, étant précisé que l'ordonnance de condamnation en énonçait
expressément la possibilité. A l'appui de sa demande de révision, il a ensuite
produit quatre pièces en sus de l'ordonnance de condamnation et fait valoir
qu'il n'avait pas ingéré un somnifère comme constaté dans l'ordonnance de
condamnation, mais plusieurs comprimés d'un somnifère dans le but de mettre fin
à ses jours. Il a affirmé avoir déclaré aux fonctionnaires de police qu'il
s'était agi d'une tentative de suicide, mais ceux-ci n'en avaient pas fait
mention dans leur rapport par pudeur envers lui.
Le recourant ne conteste pas ces constatations. Or, celles-ci n'établissent pas
qu'il ait manifesté une quelconque inaptitude à déposer devant la police ou
comparaître devant le juge d'instruction pour des motifs psychologiques. Une
telle incapacité ne se déduit pas davantage des pièces, en particulier
médicales, qu'il a produites à l'appui de sa demande de révision. Il en ressort
au contraire que l'épisode dépressif moyen qu'il présentait alors, n'a pas
justifié une hospitalisation prolongée puisqu'il a été autorisé à regagner son
domicile dès le 29 décembre 2006. Aucune incapacité de travail n'a été
recommandée sur le plan médical. Le suivi psychologique préconisé, en
particulier sous forme d'une thérapie de couple, l'a été en vue de le délivrer
d'une cyberdépendance dont lui-même et son couple souffraient. Cela étant, on
ne saurait faire grief aux juges cantonaux de n'avoir pas retenu une fragilité
psychologique telle qu'elle aurait empêché le condamné - s'il n'adhérait pas à
sa condamnation au motif que d'importants faits avaient été omis - de s'opposer
à l'ordonnance dans le délai prévu à cet effet, cela d'autant plus qu'une
simple déclaration écrite suffisait (cf. art. 267 al. 1 CPP/VD). Au demeurant,
le recourant n'avait pas de raison légitime de taire les faits en question dès
lors qu'il pouvait solliciter de ses juges que les audiences se déroulent à
huis-clos.
3.2.3 Cela étant, il apparaît que le condamné connaissait initialement les
faits nouveaux à raison desquels il a demandé la révision de l'ordonnance de
condamnation prononcée à son encontre le 19 février 2007, qu'il n'avait aucune
raison légitime de les taire et qu'il aurait pu les révéler dans une procédure
ordinaire mise en oeuvre sur simple opposition de sa part, de sorte que sa
demande de révision apparaît comme un moyen de contourner la voie de droit
ordinaire. Elle doit donc être qualifiée d'abusive. Pour ce motif, il n'y avait
pas lieu d'y donner suite et le jugement attaqué n'est pas critiquable.

4.
Sur le vu de ce qui précède, le recours se révèle mal fondé. Le recourant, qui
succombe, doit supporter les frais de justice (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Commission de révision
pénale du Tribunal cantonal vaudois.

Lausanne, le 7 janvier 2009

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Gehring