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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.898/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_898/2008 - svc

Arrêt du 26 décembre 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Favre.
Greffière: Mme Angéloz.

Parties
X.________,
recourant,

contre

Procureur général du canton de Genève,
case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.

Objet
Lésions corporelles par négligence,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre
pénale, du 22 septembre 2008.

Faits:

A.
Par jugement du 6 mars 2008, le Tribunal de police du canton de Genève a
condamné X.________, pour lésions corporelles graves par négligence, à une
amende de 2000 fr. Sur appel du condamné, la Chambre pénale de la Cour de
justice genevoise a confirmé ce jugement par arrêt du 22 septembre 2008.

B.
Cet arrêt retient, en résumé, ce qui suit.
B.a X.________ exploite, depuis mars 1988, la discothèque A.________ à Genève.
Dans la soirée du 28 au 29 janvier 2006, vers 23 heures, il a placé des bougies
contenues dans des récipients en matière plastique rouge dans l'escalier du
club, à raison de deux bougies de chaque côté de la marche, toutes les deux ou
trois marches.
Aux environs de 2 heures, Y.________, accompagnée d'une amie, Z.________, est
entrée dans l'établissement, où elle est descendue la première dans l'escalier
pendant que son amie payait l'entrée. Lorsqu'elle s'est retournée pour voir si
celle-ci la suivait, elle a constaté que sa jupe prenait feu. Elle est alors
remontée, tentant en vain d'éteindre les flammes, puis est sortie du club, où
elle s'est roulée au sol, pendant que des personnes s'employaient à éteindre le
feu avec leurs vêtements.
Y.________ a subi des brûlures du 2ème degré sur 18 % de la surface corporelle,
situées sur la face postérieure et interne des deux jambes et des fesses. Ces
lésions ont laissé des séquelles multiples, notamment d'importantes séquelles
esthétiques et psychologiques. La victime a dû subir un traitement lourd et
douloureux (traitement dermatologique, port de vêtements compressifs,
physiothérapie).
B.b Entendu par la police, X.________ a contesté toute responsabilité dans la
survenance de l'accident. Il a expliqué qu'il avait placé les bougies dans
l'escalier suite à un problème d'électricité. Il s'agissait de bougies
contenues dans des récipients en matière plastique rouge, dont les flammes ne
dépassaient pas. Il les avait allumées à 23 heures. Lorsque Y.________ avait
pris feu, vers 2 heures, les bougies étaient déjà à moitié consumées. Il a
précisé que l'escalier était étroit (1 mètre environ). Selon lui, la victime
était alcoolisée et était restée trop près des flammes.
Y.________ a déclaré qu'elle avait consommé plusieurs bières avant de se rendre
au club. Le soir en question, elle portait une longue jupe en coton. En entrant
dans la discothèque, elle avait vu que des bougies étaient posées sur le sol et
qu'il faisait sombre dans l'escalier.
Un employé de la discothèque a confirmé que lui-même et X.________ avaient
secouru la victime. Il a précisé que ce n'était pas la première fois qu'il
avait vu des bougies dans l'escalier. Au mois de décembre 2005 il y en avait
presque toutes les nuits sur les tables et sur le bar. Le gérant du club les
plaçait pour avoir de la lumière.
B.c Lors de l'instruction, Y.________ a confirmé ses précédentes déclarations.
X.________ a admis qu'il n'avait pas le droit de placer des bougies à
l'intérieur de la discothèque. Compte tenu du fait qu'il y avait des murs en
pierre, il n'avait toutefois pas imaginé que les bougies puissent provoquer des
accidents.
B.d Il a été constaté que l'Inspection cantonale du feu, dans un courrier du 29
août 2005 adressé à la direction de la discothèque A.________, avait rendu
cette dernière attentive au fait que l'utilisation de bougies photophores ou
autres flammes était strictement interdite dans ce genre d'établissement. Par
ailleurs, selon les Services industriels de Genève (SIG) et la régie de
l'immeuble, aucune coupure d'électricité n'avait été relevée sur le réseau de
distribution ou à l'intérieur de l'immeuble de la discothèque A.________ dans
la nuit du 28 au 29 janvier 2006.
B.e A l'audience de jugement du 6 mars 2008, X.________ a maintenu pour
l'essentiel ses déclarations. Il a admis qu'il plaçait régulièrement des
bougies de ce type dans l'escalier du club depuis la fin de l'année 2004, pour
l'ambiance et pour que les marches soient plus visibles, non pas en raison d'un
problème d'électricité. Il a dit ne pas se souvenir du courrier du 29 août 2005
susmentionné. Selon lui, il était interdit de placer des bougies à l'intérieur
de la discothèque, soit dans l'espace récréatif, non pas dans l'escalier, car
il s'agissait là d'un lieu de passage. Il a redit qu'il était désolé des
conséquences de l'accident pour la victime, mais que cette dernière avait fait
preuve d'inattention en restant dans l'escalier étroit à proximité des flammes.

C.
La cour cantonale a retenu que X.________ avait violé les règles de prudence
découlant de la Directive de protection incendie émise par l'Association des
établissements cantonaux d'assurance incendie (ci-après: la Directive),
notamment son art. 4.3 al. 1, qui dispose que "les feux nus sont interdits dans
les locaux prévus pour un grand nombre d'occupants; sur les scènes, il ne sont
admis qu'avec restriction", et son art. 3.2 al. 5, selon lequel "les bougies
doivent être fixées sur des supports appropriés et incombustibles, de manière à
empêcher leur renversement, Il faut les placer à distance des matières
inflammables, de manière à empêcher toute inflammation".
Elle a relevé que les bougies utilisées, qui laissaient apparaître une flamme à
l'air libre et constituaient donc des "feux nus" au sens de l'art. 4.3 al. 1 de
la Directive, étaient strictement interdites dans les locaux du club, ce que
l'appelant ne pouvait ignorer au vu du courrier que lui avait adressé à la fin
août 2005 l'Inspection cantonale du feu. De plus, les bougies étaient
simplement posées sur le sol, en dessous du niveau de vision et dans un lieu
d'important passage. L'appelant, qui exploitait le club depuis 20 ans, ne
pouvait ignorer que le comportement reproché était susceptible de mettre en
danger la santé et l'intégrité corporelle des clients, mais avait passé outre.
La violation fautive de son devoir de prudence avait été la cause naturelle et
adéquate des graves lésions subies par la victime, dont le comportement ne
pouvait en aucun cas être considéré comme exceptionnel ou si extraordinaire que
l'on ne pouvait s'y attendre.

D.
Agissant personnellement, X.________ forme un recours en matière pénale au
Tribunal fédéral, concluant à son admission. Des déterminations n'ont pas été
requises.
Considérant en droit:

1.
Le recours peut notamment être formé pour violation du droit fédéral (art. 95
let. a LTF), y compris les droits constitutionnels. Il ne peut critiquer les
faits retenus qu'au motif qu'ils ont été établis de façon manifestement
inexacte, c'est-à-dire arbitraire, ou en violation du droit au sens de l'art.
95 LTF, et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur
le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Selon la jurisprudence, une décision
n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable où même
critiquable; il faut qu'elle soit mani-festement insoutenable, et cela non
seulement dans sa motivation mais dans son résultat (ATF 134 I 140 consid. 5.4
p. 148; 133 I 149 consid. 3.1 p. 153 et les arrêts cités).

2.
Le recours doit être motivé conformément à l'art. 42 al. 2 LTF, qui exige que
le recourant indique en quoi la décision attaquée viole le droit. Les griefs
mentionnés à l'art. 106 al. 2 LTF, notamment celui pris d'une violation des
droits fondamentaux, sont toutefois soumis à des exigences de motivation
accrues. Cela vaut en particulier pour l'interdiction de l'arbitraire, garantie
par l'art. 9 Cst. La violation de tels droits doit être démontrée par le
recourant, qui ne peut se borner à l'alléguer et à critiquer simplement la
décision attaquée. Ainsi, s'il entend se plaindre d'arbitraire, il doit non
seulement indiquer en quoi la décision attaquée, sur le point contesté, serait
manifestement insoutenable, mais en faire la démonstration, pièces à l'appui. A
ce défaut, le grief est irrecevable (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287), ce qui
signifie que le Tribunal fédéral ne peut l'examiner, parce que le droit de
procédure s'oppose à ce qu'il le fasse.

3.
Dans la partie en fait de son recours, le recourant donne une descrip-tion du
déroulement des événements, dont il fournit sa propre version. Il fait en outre
état de ses déclarations ainsi que de celles de la partie civile et des
témoins, en critiquant leur appréciation et en arguant de faux témoignages. Il
dénonce encore la manière dont l'instruction a été menée, selon lui uniquement
à charge.
Ce faisant, le recourant s'en prend aux constatations de fait de la décision
attaquée, à l'appréciation des preuves et à la conduite de l'instruction. De
tels points ne peuvent toutefois être contestés que sous l'angle de
l'arbitraire, tel qu'il a été défini ci-dessus (cf. supra, consid. 1), lequel,
à peine d'irrecevabilité, doit être démontré dans le recours d'une manière qui
satisfasse aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. supra,
consid. 2). Or, sur les points litigieux, le recourant n'invoque aucun
arbitraire, dont, à plus forte raison, il ne fait pas la démonstration. L'état
de fait qu'il présente, respectivement les critiques qu'il formule dans le
cadre de celui-ci, sont par conséquent irrecevables.

4.
En droit, le recourant conteste, sous lettres B1 et B2 de son recours, avoir
violé les art. 4.3 al. 1 et 3.2 al. 5 de la Directive. Il soutient en outre,
sous lettre B3, qu'on ne peut lui reprocher d'avoir dépassé les limites du
risque admissible. Enfin, il nie, sous lettre B4, l'existence d'un lien de
causalité naturelle et adéquate entre son comportement et le résultat
dommageable qui s'est produit.

4.1 La violation du droit fédéral s'examine sur la base des faits retenus dans
la décision attaquée, lesquels ne peuvent être remis en cause qu'aux conditions
de l'art. 97 al. 1 LTF. Si le recourant entend se plaindre d'une fausse
application du droit fédéral, il doit donc indiquer, comme le prescrit l'art.
42 al. 2 LTF, en quoi la décision attaquée, sur la base des faits qu'elle
retient, viole ce droit. Il ne peut fonder sa critique sur sa propre version
des faits, respectivement sur une rediscussion de ceux-ci.
L'arrêt attaqué constate que le recourant a placé des bougies, qui laissaient
apparaître une flamme à l'air libre et constituaient donc des "feux nus" au
sens de l'art. 4.3 al. 1 de la Directive, à l'intérieur de son établissement,
plus précisément sur les marches de l'escalier, soit sur un lieu de passage
fréquenté et, de plus, étroit. Il constate en outre que les bougies
litigieuses, intégrées à des gobelets, étaient simplement posées sur le sol,
non pas fixées sur ce dernier. C'est sur la base de ces constatations de fait
que la cour cantonale a considéré que le recourant n'avait pas respecté les
art. 4.3 al. 1 et 3.2 al. 5 de la Directive, donc qu'il avait violé les devoirs
de prudence lui incombant et, partant, commis une négligence au sens de l'art.
12 al. 3 CP, respectivement de l'art. 125 CP. S'il entendait se plaindre de ce
que la cour cantonale avait ainsi faussement appliqué le droit fédéral, le
recourant devait dès lors indiquer en quoi elle l'aurait fait sur la base des
faits qu'elle a retenus. Or, il se borne à contester ces derniers pour en
déduire qu'on ne peut lui reprocher d'avoir violé fautivement son devoir de
prudence. Le grief est par conséquent irrecevable.

4.2 Bien que le recourant dise vouloir contester l'existence d'un lien de
causalité naturelle et adéquate entre son comportement et le résultat
dommageable, son argumentation vise en réalité exclusivement à faire admettre
que l'accident serait en définitive imputable à la victime elle-même. Autrement
dit, c'est une rupture du lien causal entre son comportement et le dommage, à
raison d'un comportement prétendument répréhensible de la victime, qu'il
invoque. Tel ne pourrait toutefois être le cas que si ce dernier devait être
considéré comme tout à fait exceptionnel ou si extraordinaire que l'on ne
pouvait s'y attendre, ce qui doit être déterminé sur la base des faits retenus
dans la décision attaquée. Là encore, le recourant n'indique cependant pas en
quoi, fondée sur ces faits, la cour cantonale aurait nié à tort que le
comportement de la victime puisse être qualifié de tel, se bornant à le déduire
de sa propre version des faits. Sur ce point également, le recours est donc
irrecevable.

5.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable.
Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, le recourant, qui succombe, supportera les
frais.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est déclaré irrecevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton
de Genève, Chambre pénale.

Lausanne, le 26 décembre 2008

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Angéloz