Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.856/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_856/2008 /rod

Arrêt du 5 janvier 2009
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Zünd.
Greffière: Mme Kistler Vianin.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Philippe Neyroud, avocat,

contre

Procureur général du canton de Genève, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.

Objet
Infraction à la LStup,

recours contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton de Genève du 3
septembre 2008.

Faits:

A.
Par arrêt du 13 décembre 2007, la Cour correctionnelle genevoise siégeant sans
le concours du jury a reconnu X.________ coupable d'infraction à l'art. 19 ch.
2 let. a de la loi fédérale sur les stupéfiants (LStup) et de faux dans les
certificats (art. 252 et 255 CP). X.________ a été condamné à une peine
privative de liberté de six ans. Les sursis prononcés le 27 janvier 2004 et le
12 janvier 2005 ont été révoqués. La Cour a ordonné la confiscation et la
destruction de la drogue, du faux passeport et des téléphones portables saisis,
ainsi que la confiscation et la dévolution à l'Etat de l'argent saisi.

B.
Statuant le 3 septembre 2008, la Cour de cassation genevoise a rejeté le
pourvoi formé par X.________. Cet arrêt retient pour l'essentiel les faits
suivants:
B.a Le 6 novembre 2006, X.________ a été arrêté à l'office postal de Balexert,
alors qu'il prenait livraison d'un colis en provenance de Sao Paulo, au Brésil;
ce colis était adressé à un nommé A.________ et contenait 1,938 kg de cocaïne.
X.________ avait présenté une pièce d'identité au nom de B.________ et avait
indiqué avoir à plusieurs reprises récupéré des colis pour le compte de
A.________.

La suite de l'enquête pénale a permis d'établir que B.________, identité
utilisée par X.________, était le destinataire désigné de trois autres paquets
expédiés à Genève, à savoir:
- un paquet provenant de Chine, d'un poids d'env. 1 kg, censé contenir des
fermetures éclair et réceptionné le 13 septembre 2006,
- un colis provenant du Nigéria et reçu le 12 octobre 2006,
- un paquet provenant de Trinidad et Tobago, contenant 500 grammes de cocaïne
dissimulée dans des amortisseurs de voiture.

Par ailleurs, une dame F.________ était l'expéditrice mentionnée sur un paquet
à destination de Bienne, contenant un kilo de cocaïne, ainsi que sur un paquet
à destination de la République Tchèque contenant 1,4 kg de cocaïne dissimulée
dans des pieds de lampe. Le numéro usuel du téléphone portable de X.________
était inscrit sur le premier paquet expédié à Bienne. Le numéro de référence du
second colis était mentionné dans un message SMS relevé sur le téléphone
portable en possession de X.________ lors de son arrestation.
B.b Le 18 janvier 2007, le Juge d'instruction genevois a ordonné une commission
rogatoire, confiée aux inspecteurs de police C.________ et D.________, à mener
à Trinidad et Tobago. Dans sa commission rogatoire, le juge d'instruction
exposait les divers éléments recueillis au sujet d'un envoi de Trinidad et
Tobago adressé à B.________ à Genève, expédié par E.________ et finalement
réceptionné par G.________, dans le canton des Grisons. Cette dernière avait
été arrêtée et elle était détenue.

La commission rogatoire s'est déroulée du 9 au 26 mars 2007. Les renseignements
recueillis sur place à l'occasion d'une investigation secrète ont été retirés
du dossier au motif qu'ils l'avaient été en violation de la loi fédérale sur
l'investigation secrète (LFIS) et de la loi sur l'entraide internationale en
matière pénale (EIMP).

C.
Contre l'arrêt cantonal, X.________ dépose un recours en matière pénale devant
le Tribunal fédéral. Il dénonce la violation de l'art. 18 al. 5 LFIS; il se
plaint de la violation du droit à un procès équitable, du principe de l'égalité
des armes et du droit à une défense effective (art. 29 et 32 Cst.; art. 6 CEDH)
et s'en prend à la peine qui lui a été infligée (art. 47 CP). Il conclut à ce
que la Tribunal fédéral renvoie le dossier à l'autorité cantonale et dise qu'il
doit être jugé à nouveau pour les faits qui lui sont reprochés et être assisté
d'un avocat inscrit à un registre cantonal. En outre, il sollicite l'assistance
judiciaire.

Considérant en droit:

1.
Le recourant soutient que les éléments de preuve résultant de l'investigation
secrète menée par un agent de la police genevoise à Trinidad et Tobago sont
illicites. Il en conclut que la Cour cantonale ne pouvait pas s'appuyer sur
ceux-ci pour motiver la culpabilité et la peine.

Ce grief est dénué de tout fondement dès lors que la Cour cantonale avait déjà
considéré que les éléments recueillis lors de l'investigation secrète étaient
illicites et, en conséquence, écarté ces preuves du dossier. Elle a cependant
refusé de renvoyer la cause au premier juge pour nouveau jugement au motif que
ces éléments de preuves n'avaient pas joué un rôle central ou décisif dans la
condamnation et que la procédure dans son ensemble était équitable. Dans la
mesure où ces preuves n'ont pas été utilisées, ce refus n'est pas critiquable.

2.
En réalité, la culpabilité du recourant repose essentiellement sur les faits
suivants, retenus indépendamment de l'opération d'enquête menée à Trinidad et
Tobago. Le 6 novembre 2006, il a été arrêté, alors qu'il prenait livraison d'un
paquet contenant près de 2 kg de cocaïne expédié du Brésil. Sa participation à
d'autres livraisons de paquets contenant de la cocaïne a été établie sur la
base, d'une part, de l'utilisation de l'identité de B.________, citoyen sud
africain, et, d'autre part, en raison du SMS relevé sur le téléphone portable
trouvé en sa possession lors de son arrestation. Plus généralement, l'analyse
des correspondances téléphoniques extrêmement nombreuses entre le recourant et
différentes personnes, en Suisse et hors de Suisse, impliquées dans le trafic
de cocaïne a permis de retenir le rôle joué par le recourant dans ce trafic.
Dans ces conditions, les éléments recueillis lors de l'investigation secrète,
qui sont, d'une part, l'identité du trafiquant qui s'est trouvé en
correspondance étroite avec le recourant et, d'autre part, le fait qu'il
s'agissait de son frère, n'étaient pas centraux ou décisifs dans
l'établissement des faits qui ont conduit à la condamnation du recourant. On ne
saurait donc reprocher à la Cour cantonale d'avoir confirmé la condamnation du
recourant, tout en écartant du dossier les preuves résultant de l'investigation
secrète menée à Trinidad et Tobago.

3.
Le recourant reproche aux autorités cantonales d'avoir violé l'art. 6 § 3 let.
c CEDH, en acceptant qu'il soit assisté d'un avocat stagiaire comme avocat
d'office. Selon lui, il n'aurait de la sorte pas bénéficié d'une défense
effective.

La nomination d'un avocat stagiaire comme défenseur d'office ne viole pas en
soi les garanties déduites de l'art. 6 § 3 let. c CEDH (ATF 126 I 194 consid.
3b p. 196). Au demeurant, le recourant ne formule pas de critiques concrètes
quant à l'activité des stagiaires qui l'ont assisté. L'art. 127 al. 5 du futur
code de procédure pénale suisse, invoqué par le recourant, n'est pour le
surplus pas encore applicable, puisqu'il n'est pas entré en vigueur. Mal fondé,
le grief soulevé par le recourant doit être rejeté.

4.
Le recourant se plaint de la sévérité de la peine qui lui a été infligée. Il
soutient qu'expurgé des preuves illicites, le dossier ne permettait pas de lui
infliger une peine aussi sévère. Selon lui, sa participation à un trafic
d'envergure internationale, qui justifierait pour la Cour cantonale la sévérité
de la peine, reposerait sur les éléments résultant de l'investigation secrète.

4.1 Le critère essentiel pour fixer la peine selon l'art. 47 CP est la faute de
l'auteur. Selon l'alinéa 2 de cet article, le juge devra prende en compte la
gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, ainsi
que le caractère répréhensible de l'acte. Sur le plan subjectif, le texte légal
cite la motivation et les buts de l'auteur et la mesure dans laquelle l'auteur
aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, qui se réfère au libre choix
de l'auteur entre licéité et illicéité.

En matière de stupéfiants, le critère de la quantité de drogue, sur laquelle
porte le trafic, ne joue pas un rôle fondamental dans l'appréciation de la
gravité de la faute; ce critère perd en outre de son importance au fur et à
mesure que l'on s'éloigne de la limite à partir de laquelle le cas doit être
considéré comme grave au sens de l'art. 19 ch. 2 let. a LStup. L'appréciation
est également différente selon que l'auteur ait agi de manière autonome ou
comme membre d'une organisation. Si l'auteur agit au sein d'une organisation,
il faut déterminer la nature de sa participation et sa position au sein de
l'organisation: la faute d'un simple passeur est moins grave que celle de celui
qui joue un rôle décisif dans la mise sur pied des opérations et qui participe
de manière importante au bénéfice illicite. L'étendue du trafic entrera
également en considération. Enfin, le nombre d'opérations constitue un indice
pour mesurer l'intensité du comportement délictueux (arrêt du Tribunal fédéral
6S.21/2002 du 17 avril 2002 consid. 2c).

4.2 En l'espèce, la Cour cantonale a retenu que le recourant était mêlé à un
trafic de cocaïne d'envergure internationale, bien organisé et usant d'une
routine sophistiquée pour acheminer la drogue sur le marché européen, la drogue
étant expédiée par voie postale habilement dissimulée à l'intérieur d'objets
d'apparence inoffensifs. La Cour cantonale a relevé que la quantité de drogue
était importante et que les mobiles du recourant relevaient de l'appât du gain.
Elle a ajouté que ses antécédents étaient mauvais.

Comme vu au considérant 2, la participation du recourant à cet important trafic
international et le rôle important qu'il a joué au sein de l'organisation
reposent, pour l'essentiel, sur l'utilisation du nom d'emprunt de B.________,
l'inscription du numéro de son téléphone portable sur un des paquets, le
message SMS relevé sur son téléphone portable ainsi que sur l'analyse de ses
appels téléphoniques.

Au vu des éléments qui précèdent, la faute du recourant apparaît lourde, de
sorte qu'une peine privative de liberté de six ans n'apparaît pas sèvère à un
point tel qu'il faille conclure à un abus du large pouvoir d'appréciation
accordé à la Cour cantonale. Cette peine résulte au surplus d'une évaluation
complète de l'ensemble des circonstances et de la situation personnelle du
recourant. Mal fondé, le grief tiré de la violation de l'art. 47 CP doit être
rejeté.

5.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.
Comme ses conclusions étaient d'emblée vouées à l'échec, le recourant doit être
débouté de sa demande d'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 et 2 LTF) et
supporter les frais de justice (art. 65 et 66 al. 1 LTF), réduits à 800 fr.
compte tenu de sa situation financière actuelle.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 francs, sont mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de cassation du canton
de Genève.

Lausanne, le 5 janvier 2009

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Kistler Vianin