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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.555/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_555/2008/bri

Arrêt du 23 septembre 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,

Wiprächtiger et Ferrari.
Greffière: Mme Gehring.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Nicolas Mattenberger, avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Objet
Internement,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de
cassation pénale, du 29 février 2008.

Faits:

A.
Par jugement du 19 décembre 2007, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement
de Lausanne a ordonné la poursuite de l'internement de X.________. Cette
décision repose en substance sur les éléments suivants.
A.a Le 9 janvier 2001, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
Lausanne a reconnu X.________ coupable de voies de fait, dommages à la
propriété, injure, menaces, vol, lésions corporelles simples, violence ou
menace contre les autorités et les fonctionnaires et contravention au Règlement
général de police. Il a prononcé à son encontre une peine d'emprisonnement de
vingt mois, sous déduction de la détention préventive, suspendu l'exécution de
cette peine et ordonné l'internement du condamné en vertu de l'art. 43 ch. 1
al. 2 aCP. Le 24 mai 2005, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de La
Broye et du Nord vaudois l'a en outre condamné pour incendie de peu
d'importance à quatre mois d'emprisonnement et suspendu l'exécution de la peine
au profit de l'internement en cours.
A.b L'internement de X.________ a été prononcé sur la base d'un rapport
d'expertise psychiatrique établi le 23 février 2000 par l'Institut
universitaire de médecine légale de Genève (IUML). En substance, il en ressort
que le prénommé souffre d'un trouble grave de la personnalité dyssociale ainsi
que d'un trouble psychotique résultant de la consommation d'une substance
psychoactive mal déterminée et nécessitant un traitement. L'internement de
l'expertisé s'avère seul approprié à son état de santé mentale qui compromet
gravement la sécurité publique, le risque de récidive demeurant important, au
regard d'un comportement caractérisé par une très faible tolérance à la
frustration et de fréquentes décharges d'agressivité et de violence.

B.
Par jugement du 29 février 2008, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois a rejeté le recours formé par le condamné à l'encontre du
jugement du 19 décembre 2007.

C.
X.________ interjette un recours en matière pénale contre le jugement cantonal,
en concluant, sous suite de frais et dépens, à la mise en oeuvre d'une nouvelle
expertise psychiatrique, puis au renvoi de la cause aux premiers juges pour
nouvelle décision. En outre, il sollicite l'octroi de l'assistance judiciaire
gratuite.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
1.1 Les autorités cantonales chargées en vertu du ch. 2 al. 2 1ère phrase des
Dispositions finales de la modification du 13 décembre 2002 (RO 2006 3459) du
réexamen de la mesure d'internement prononcée à l'encontre de X.________, ont
statué sur la base des pièces au dossier sans ordonner de nouvelle mesure
d'instruction. Invoquant une violation des art. 29 al. 2 Cst. et 64b CP, le
recourant sollicite la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise psychiatrique,
de surcroît indépendante du service pénitentiaire, afin de déterminer s'il
remplit les conditions d'une mesure thérapeutique ou d'un internement au sens
du nouveau droit. Il fait grief aux autorités cantonales de s'être fondées sur
les conclusions du rapport d'expertise établi le 23 février 2000 dont il
considère, huit années plus tard, les constatations comme étant obsolètes. En
tant qu'il était âgé de dix-huit ans lors de la commission des actes ayant
donné lieu à son internement, il ajoute que le passage du stade de jeune
adulte, voire d'adolescent, à celui d'adulte nécessite impérativement le
réexamen de sa personnalité. En outre, il conviendrait de confier cet examen à
un médecin indépendant; en effet, les observations de l'Office pénitentiaire,
de la Commission interdisciplinaire consultative concernant les délinquants
nécessitant une prise en charge psychiatrique (CIC) et de la Directrice du
centre de sociothérapie de "La Pâquerette" ne sauraient valablement se
substituer à celles d'un spécialiste. Au demeurant, le condamné conteste
l'affirmation selon laquelle il s'opposerait à tout traitement médical,
précisant consentir au suivi assuré par un spécialiste extérieur au Service de
médecine et psychiatrie pénitentiaires (SMPP).

1.2 Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend le droit
pour le justiciable d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves
pertinentes (ATF 131 I 153 consid. 3 p. 157; 127 I 54 consid. 2b p. 56; 127 III
576 consid. 2c p. 578). Le juge peut cependant renoncer à l'administration de
certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter
l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, que la preuve
résulte déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu'il parvient à la
conclusion que ces preuves ne sont pas décisives pour la solution du litige,
voire qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion. Ce refus
d'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation
anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a
ainsi procédé, est entachée d'arbitraire (cf. ATF 131 I 153 consid. 3 p. 157).
L'appréciation des preuves n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement
pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis sans raison
sérieuse de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision
attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des
déductions insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9).

Le juge peut se fonder sur une expertise qui figure déjà au dossier si celle-ci
est encore suffisamment actuelle. Dans ce contexte, il y a lieu de respecter le
principe de la proportionnalité. L'élément déterminant n'est pas le temps qui
s'est écoulé depuis le moment où l'expertise a été établie, mais plutôt
l'évolution qui s'est produite dans l'intervalle. Il est parfaitement
concevable de se fonder sur une expertise relativement ancienne si la situation
ne s'est pas modifiée entre-temps; suivant les circonstances, il est également
possible de se contenter d'un complément apporté à une expertise précédente
(ATF 128 IV 241 consid. 3.4 p. 247 s.).
1.3
1.3.1 Pour prononcer la poursuite de l'internement du recourant, l'autorité
cantonale s'est essentiellement fondée sur le rapport d'expertise psychiatrique
établi en dernier lieu, à savoir le 23 février 2000. Elle a retenu que le
condamné souffrait d'un trouble grave de la personnalité dyssociale ainsi que
d'un trouble psychotique résultant de la consommation d'une substance
psychoactive mal déterminée. Il présentait une très faible tolérance à la
frustration et des décharges fréquentes d'agressivité et de violence. Il se
révélait indifférent vis-à-vis d'autrui et n'éprouvait aucun remords à l'égard
de ses victimes. Il se montrait régulièrement insensible aux normes sociales et
intolérant aux contraintes; alors qu'il accusait volontiers autrui de mal se
comporter à son égard, lui-même ne se remettait à aucun moment en question. Son
état de santé mentale compromettait gravement la sécurité publique et
nécessitait un traitement psychothérapeutique, le risque de récidive demeurant
important.

Lors des débats tenus le 19 décembre 2007, le Tribunal correctionnel de
l'arrondissement de Lausanne a constaté que le recourant n'avait manifesté
aucune prise de conscience relative au trouble psychique dont il souffrait et à
la nécessité pour lui de se plier à un traitement psychothérapeutique. Il
n'avait exprimé aucun regret à l'égard des victimes de ses agissements. Il
avait contesté avoir fait preuve de violence, notamment envers les membres du
service pénitentiaire, alors que six sanctions disciplinaires avaient été
prononcées à son encontre entre les 4 mars 2005 et 8 janvier 2007. Le 24 mai
2005, il avait de surcroît été condamné pour incendie de peu d'importance.
Enfin, le docteur A.________ (spécialiste en psychiatrie auprès du SMPP) a
indiqué dans un courrier daté du 13 décembre que l'interné s'opposait depuis
plusieurs années à toute collaboration thérapeutique avec les membres du
service précité et que les actes de violence subsistaient à la moindre
contrariété.
1.3.2 Le recourant ne conteste pas ces constatations. Pour justifier la
nécessité d'une nouvelle expertise psychiatrique, il se prévaut de son passage
du stade de jeune adulte, voire d'adolescent, à celui d'adulte, soit d'un motif
afférent à son développement personnel. Pour autant, il n'explique pas en quoi
son état de santé ou son comportement envers autrui s'en trouveraient modifiés
depuis l'établissement du rapport d'expertise contesté. Il apparaît au
contraire de ce qui précède (consid. 1.3.1) qu'il présente toujours une
atteinte grave et durable à sa santé psychique. A défaut de suivi
thérapeutique, aucune amélioration n'a été observée et son comportement révolté
et violent persiste. Aucun indice ne laisse ainsi inférer que les circonstances
du cas d'espèce se seraient modifiées depuis l'expertise effectuée le 23
février 2000. Cette dernière n'apparaît dès lors pas comme dépassée en raison
du seul écoulement du temps. Dans le même sens, le Tribunal fédéral a du reste
récemment confirmé une décision fondée sur une expertise également établie huit
années auparavant (cf. affaire A. du 22 février 2007 [1P.770/2006]). Cela
étant, les autorités cantonales n'étaient pas tenues d'ordonner une nouvelle
expertise psychiatrique pour pouvoir se déterminer sur l'opportunité de
maintenir ou non l'internement en cours, fût-elle confiée à un expert
indépendant (voir ATF 124 IV 1) comme requis par le recourant. Sur ce dernier
point, la Cour de céans observe d'ailleurs que le rapport d'expertise établi le
23 février 2000 par l'IUML l'a précisément été par un service médical
indépendant du SMPP. Sur le vu de ce qui précède, le grief est mal fondé.

2.
Le recourant contestant implicitement son internement, il reste à examiner le
bien-fondé de cette mesure après l'entrée en vigueur de la nouvelle partie
générale du code pénal.

2.1 L'internement fondé sur l'art. 64 CP suppose d'abord que l'auteur ait
commis l'une des infractions énumérées à l'alinéa 1 de cette disposition ou une
autre infraction passible d'une peine privative de liberté de cinq ans au moins
et qu'il ait par là porté ou voulu porter gravement atteinte à l'intégrité
physique, psychique ou sexuelle d'autrui. Il faut en outre que l'une des
conditions alternatives posées à l'art. 64 al. 1 CP soit réalisée, à savoir
que, en raison des caractéristiques de la personnalité de l'auteur, des
circonstances dans lesquelles il a commis l'infraction et de son vécu, il soit
sérieusement à craindre qu'il ne commette d'autres infractions du même genre
(art. 64 al. 1 let. a CP) ou que, en raison d'un grave trouble mental chronique
ou récurrent en relation avec l'infraction, il soit sérieusement à craindre que
l'auteur ne commette d'autres infractions du même genre et que la mesure prévue
à l'art. 59 CP - soit une mesure thérapeutique institutionnelle - apparaisse
vouée à l'échec (art. 64 al. 1 let. b CP).

Il est encore exigé que la mesure prononcée respecte le principe de la
proportionnalité, c'est-à-dire que l'atteinte aux droits de la personnalité qui
en résulte pour l'auteur ne soit pas disproportionnée au regard de la
vraisemblance qu'il commette de nouvelles infractions et de leur gravité (art.
56 al. 2 CP; cf. arrêt 6B_604/2007 du 9 janvier 2008 consid. 6.2).
2.2
2.2.1 Sous l'égide de l'ancien droit, l'internement du recourant a été prononcé
notamment après qu'il eût été reconnu coupable d'incendie (cf. jugement du 24
mai 2005 du Tribunal correctionnel de l'arrondissement de La Broye et du Nord
vaudois), soit pour la commission d'une des infractions énumérées à l'art. 64
al. 1 CP.
2.2.2 En outre, selon le rapport du 23 février 2000, le mode de fonctionnement
de l'expertisé se caractérise par une très faible tolérance à la frustration
ainsi que de fréquentes décharges d'agressivité et de violence, d'autant plus
dangereuses qu'elles s'expriment à l'encontre de l'intégrité des individus. Le
recourant se montre indifférent vis-à-vis d'autrui et n'éprouve aucun remords à
l'égard de ses victimes. Il se révèle insensible aux normes sociales et
intolérant aux contraintes. Son état de santé mentale nécessite un suivi
psychothérapeutique. Cependant, la mise en oeuvre d'un traitement ambulatoire
ne permettra pas d'assurer le contrôle des troubles diagnostiqués, tandis
qu'une éventuelle hospitalisation s'avérera insuffisante sous l'angle de la
sécurité institutionnelle. L'internement de l'expertisé constitue la seule
mesure adéquate à son état de santé mentale qui compromet gravement la sécurité
publique, vu l'important risque de récidive.

Dans un avis daté du 23 décembre 2005 et confirmé en décembre 2006, la CIC
indique également que la réitération des troubles que le condamné est capable
d'occasionner à son entourage justifie sa prise en charge en quartier de
sécurité renforcée, qui constitue le seul régime de détention adapté à son état
de santé actuel. Cette commission étant composée de spécialistes en psychiatrie
(art. 15 du Règlement sur la Commission interdisciplinaire consultative
concernant les délinquants nécessitant une prise en charge psychiatrique), la
fiabilité de ses rapports ne saurait être remise en cause sans motivation
précise. Le point de vue de la CIC est en outre corroboré par le Service
pénitentiaire des Etablissements de la Plaine de l'Orbe (voir courrier du 20
novembre 2006). De surcroît, les responsables du pénitencier de Lenzbourg
observent dans une lettre datée du 8 septembre que le condamné s'est
correctement comporté dans le cadre strict de l'aile de sécurité de cet
établissement où il a séjourné du 19 mars au 19 septembre 2007.

Aux dires d'experts, le risque de récidive s'avère ainsi important. Il l'est
d'autant plus au regard des antécédents judiciaires du recourant et du fait
qu'il se rapporte à la commission d'actes graves, puisque touchant à
l'intégrité physique et psychique d'un grand nombre de personnes. En effet,
celui-ci a été condamné pour lésions corporelles qualifiées, vols en bande et
par métier, brigandage en bande avec arme, recel, violation de domicile, aide à
évasion de détenus, violation de la LCR et de la LStup. (jugements des 29 mars
1996 du Président du Tribunal des mineurs du canton de Vaud, 12 juin 1997 du
Tribunal des mineurs du canton de Vaud et 5 août 1999 du Tribunal correctionnel
de l'arrondissement de Lausanne). Par ailleurs, le condamné exprime un déni
absolu de la réalité, de même qu'il refuse totalement et de manière constante
tout traitement psychothérapeutique. En l'état actuel des choses, l'internement
constitue la seule mesure susceptible d'écarter le risque de récidive et la
dangerosité que l'intéressé représente. L'atteinte aux droits de la
personnalité en résultant n'est pas disproportionnée au regard de la
vraisemblance qu'il commette de nouvelles infractions et de leur gravité. Sur
le vu de ce qui précède, c'est à juste titre que les premiers juges, suivis en
cela par l'autorité cantonale, ont ordonné la poursuite de l'internement de
X.________ au sens de l'art. 64 CP.

3.
Le recours doit ainsi être rejeté. Comme les conclusions de celui-ci étaient
d'emblée vouées à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut pas être accordée
(art. 64 al. 1er LTF). Le recourant devra donc supporter les frais judiciaires,
dont le montant sera toutefois arrêté au regard de sa situation économique
(art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de cassation pénale.

Lausanne, le 23 septembre 2008

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Gehring