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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.498/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_498/2008 /rod

Arrêt du 18 août 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Favre.
Greffier: M. Oulevey.

Parties
X.________,
recourante, représentée par Me Fabien Mingard, avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Objet
Fixation de la peine,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de
cassation pénale, du 30 janvier 2008.

Faits:

A.
Par jugement du 18 octobre 2007, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement
de Lausanne a condamné X.________, pour lésions corporelles simples qualifiées,
voies de fait qualifiées et violation du devoir d'assistance et d'éducation, à
une peine de 270 jours-amende à 30 fr. l'un, avec sursis pendant trois ans; il
a mis les frais de justice, par 17'574 fr. 20, à la charge de la condamnée.

Ce jugement repose, en substance, sur les éléments suivants.
A.a X.________ a fait subir à sa fille Y.________, née en 1997, des actes de
violence répétés entre mars 2003 et le 24 janvier 2006. Elle lui a infligé des
lésions corporelles simples qualifiées les 24 janvier et 1er février 2006;
enfin elle a violé son devoir d'assistance et d'éducation.
A.b Pour fixer la peine, le tribunal a souligné le concours d'infractions et le
fait que les actes de maltraitance avaient été commis sur une longue période,
de trois ans, et que « bien plus que les actes de violence pris pour eux-mêmes,
c'est (...) l'usage systématique de la violence physique et la disproportion
par rapport aux motifs de son exercice qui justifient le prononcé d'une
sanction sévère». À décharge, le tribunal a pris en compte les obligations
pesant sur une mère élevant seule deux enfants, exerçant un métier difficile,
ainsi que les bons renseignements fournis sur la condamnée, qui n'avait pas
cessé ses efforts pour rétablir le contact avec sa fille.

Le tribunal a fixé à 270 jours-amende la peine adéquate pour réprimer ce
comportement. Il a renoncé à prononcer une amende à titre de sanction
immédiate, sur la base de l'art. 42 al. 4 CP, « les frais de justice mis à la
charge de l'accusée [17'574 fr.20] constituant (...) une forme de « sanction »
suffisante à cet égard ». Pour le même motif, le tribunal n'a pas infligé
d'amende en répression des voies de fait, au sens de l'art. 126 al. 1 et 2 let.
a CP.

B.
Par arrêt du 30 janvier 2008, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté le recours de X.________.

Elle a estimé que, même si les voies de fait commises entre mars 2003 et le 18
octobre 2004 étaient prescrites, le recours était mal fondé. En effet, le
tribunal correctionnel avait « expressément renoncé à prononcer l'amende qui
aurait dû sanctionner cette contravention, exposant que les frais de justice
mis à la charge de l'accusée, par 17'574 fr. 20, constituaient à cet égard une
forme de « sanction » suffisante ». La peine de 270 jours-amende ne réprimait
que les délits des art. 123 ch. 1 et 2 al. 3 CP et 219 al. 1 CP. Non
arbitraire, celle-ci ne saurait être diminuée.

C.
En temps utile, X.________ dépose un recours en matière pénale. Invoquant la
violation des art. 47 et 109 CP, elle conclut à ce que l'arrêt cantonal soit
réformé en ce sens que la peine de 270 jours-amende est réduite, le montant
unitaire restant fixé à 30 fr. et l'exécution étant suspendue pendant un délai
d'épreuve de trois ans. Elle requiert l'assistance judiciaire.

Considérant en droit:

1.
Interjeté dans le délai prévu par la loi (art. 100 al. 1 LTF) par une accusée
qui a succombé dans ses conclusions (art. 81 al. 1 let. b LTF) et dirigé contre
un jugement final (art. 90 LTF) rendu en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) par
une autorité de dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF), le présent
recours, dûment motivé (art. 42 et 106 al. 2 LTF), est recevable.

2.
Le recours n'est ouvert au Tribunal fédéral que pour les violations du droit
prévues aux art. 95 et 96 LTF.

2.1 Conformément à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, le mémoire de recours doit, sous
peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), exposer succinctement en
quoi l'acte attaqué viole le droit, au sens des art. 95 et 96 LTF. Aussi le
Tribunal fédéral n'examine-t-il en règle générale que les griefs soulevés par
le recourant; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de
première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, si celles-ci
ne sont plus discutées devant lui.

En l'espèce, la recourante ne conteste pas les infractions retenues à sa
charge. Elle ne remet en cause que la prescription partielle d'une
contravention et la fixation de la peine.

2.2 Dans le cadre du litige ainsi défini et sous réserve de la violation des
droits constitutionnels et des questions relevant du droit cantonal ou
intercantonal, qu'il ne peut examiner que si le grief a été invoqué et motivé
de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF), le Tribunal
fédéral examine d'office l'application du droit (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est
limité ni par les arguments soulevés dans le mémoire de recours ni par le
raisonnement de l'autorité précédente; il peut admettre le recours pour
d'autres motifs que ceux avancés par le recourant ou, au contraire, le rejeter
par substitution de motifs (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140). Il conduit
son raisonnement sur la base des faits retenus par l'autorité précédente (art.
105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été établis en
violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de façon manifestement inexacte
(art. 105 al. 2 LTF), c'est-à-dire arbitraire (ATF 134 IV 36 consid. 1.4.1 p.
39). Le recourant qui entend s'écarter des faits constatés par l'autorité
précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions
d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient remplies; à défaut de
ces précisions, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui
diverge de celui de la décision attaquée (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4 p.
140).

3.
La recourante reproche à la cour de cassation cantonale de n'avoir pas réduit
la peine de 270 jours-amende à 30 fr. l'un, alors qu'elle avait constaté que
les contraventions de voies de fait commises avant le 18 octobre 2004 étaient
prescrites.

3.1 L'art. 50 CP impose au juge d'indiquer les circonstances pertinentes pour
la fixation de la peine et leur importance. Cette disposition codifie la
jurisprudence relative à la motivation de la peine rendue en application de
l'art. 63 aCP, laquelle conserve donc son actualité (cf. Message concernant la
modification des dispositions générales du code pénal, FF 1999, p. 1869; arrêts
non publiés 6B_143/2007, du 25 juin 2007, consid. 8.2 et 6B_14/2007, du 17
avril 2007, consid. 5.3). Il en découle que le juge doit exposer dans sa
décision les éléments essentiels relatifs à l'acte et à l'auteur qu'il prend en
compte, de manière à ce que l'on puisse vérifier que tous les aspects
pertinents ont été pris en considération et comment ils ont été appréciés, que
ce soit dans un sens atténuant ou aggravant. La motivation doit justifier la
peine prononcée, en permettant de suivre le raisonnement adopté, mais le juge
n'est nullement tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentages l'importance
qu'il accorde à chacun des éléments qu'il cite (ATF 127 IV 101 consid. 2c p.
105 et les arrêts cités).
La fixation de la peine est régie par l'art. 47 CP, qui correspond à l'art. 63
aCP et à la jurisprudence y relative. Cette disposition pose le principe que la
peine doit être fixée d'après la culpabilité de l'auteur et, à cette fin,
énumère, de manière non limitative, une série de critères, qui n'étaient pas
formellement prévus à l'art. 63 aCP mais dont la jurisprudence rendue en
application de cette norme exigeait qu'ils fussent pris en compte (cf. ATF 129
IV 6 consid. 6.1 p. 21; 128 IV 73 consid. 4 p. 79; 127 IV 97 consid. 3 p. 101,
101 consid. 2a p. 103; 121 IV 97 consid. 2c p. 101; 119 IV 125 consid. 3b p.
126; 118 IV 337 consid. 2c p. 340, 342 consid. 2f p. 349/350; cf. aussi arrêts
6B_264/ 2007 consid. 4.5 et 6B_14/2007 consid. 5.2). Cette jurisprudence garde
donc sa valeur.

3.2 Dans le cas particulier, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
Lausanne a condamné la recourante à une peine pécuniaire de 270 jours-amende à
30 fr. l'un, « sanction adéquate pour réprimer le comportement fautif de
l'accusée ». Il a ensuite ajouté qu'une « amende devrait en théorie être
prononcée en raison de la contravention commise » [les voies de fait], mais il
y a renoncé parce que les frais de justice, de 17'574 fr.20 constituaient « une
forme de « sanction » suffisante ».

Certes, le tribunal d'arrondissement, dont le jugement a été intégralement
confirmé par la cour cantonale, a tout d'abord renoncé à infliger une amende à
la recourante en application de l'art. 42 al. 4 CP, à titre de sanction
immédiate, en considérant que le paiement des très importants frais de justice
tenaient lieu de sanction immédiatement applicable, de sorte qu'il n'était pas
nécessaire d'adjoindre à la peine pécuniaire une amende selon l'art. 106 CP.

Si ce raisonnement ne souffre aucune critique sous l'angle de la sanction des
délits de lésions corporelles simples qualifiées et de violation du devoir
d'assistance ou d'éducation, ce procédé est hautement critiquable au regard de
l'art. 126 al. 2 let. a CP. En effet, si le juge dispose d'un certain pouvoir
d'appréciation sous l'angle de l'art. 42 al. 4 CP, c'est pour infliger une
sanction immédiatement sensible lorsque la peine pécuniaire destinée à réprimer
un délit est assortie du sursis (ATF 134 IV 1, consid. 4.5.1, p. 8 et les
références). Par contre, lorsqu'il s'agit d'imposer à l'auteur de voies de fait
la peine légale prévue par l'art. 126 al. 1 CP, c'est-à-dire l'amende, qui est
toujours ferme, le juge ne peut y renoncer que si les conditions relativement
restrictives de l'art. 52 CP sont réalisées. Il faut donc que la culpabilité de
l'auteur et les conséquences de son acte soient peu importantes, ce qui n'est
manifestement pas le cas en l'espèce. L'exemption de peine ne peut être
envisagée que si la poursuite pénale, respectivement le prononcé d'une peine,
se révèlent inappropriées à tous les points de vue imaginables, notamment quant
à la prévention spéciale et générale (ATF 117 IV 245 consid. 2a p. 248).

En assimilant le raisonnement fondé sur l'art. 42 al. 4 CP à celui qu'il aurait
dû tenir sur la base de l'art. 52 CP, le tribunal correctionnel a rendu une
décision arbitraire dans sa motivation, et également dans son résultat (ATF 134
I 140 consid. 5.4 et les références, p. 148), puisqu'une infraction, dont la
lourde culpabilité de l'auteur a été reconnue, ne donne lieu à aucune peine, au
mépris de la loi, singulièrement des art. 52 et 126 CP.

3.3 Malgré ces circonstances, le jugement du Tribunal correctionnel de
l'arrondissement de Lausanne n'a pas été remis en cause sur ce point, ni devant
la cour de cassation cantonale, ni devant le tribunal de céans. Comme les
instances cantonales ont renoncé -à tort- à punir la recourante pour la
violation de l'art. 126 al. 2 let. a CP (voies de fait), il importe peu de
savoir que les voies de fait perpétrées entre mars 2003 et le 18 octobre 2004
sont prescrites, puisque l'application de l'art. 47 CP ne concerne que la
répression des lésions corporelles simples qualifiées (art. 123 ch. 1 et 2 al.
3 CP) et de la violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219 al. 1
CP). Or, s'agissant de ces deux délits, qui peuvent entrer en concours au sens
de l'art. 49 al. 1 CP (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. 1, Berne
2002, n. 25 ad art. 219 CP p. 864), malgré les hésitations de la jurisprudence
et de la doctrine (Corboz, op. cit., n. 21 ad art. 219 CP p. 863), la
recourante n'a développé aucun moyen. Elle s'est bornée à rappeler la
prescription d'une partie des contraventions de voies de fait, qui n'ont jamais
été sanctionnées, et qui est par conséquent sans incidence sur la quotité de la
peine retenue pour les deux délits susmentionnés, par les instances cantonales
successives. Cette constatation commande donc le rejet du recours.

En conséquence, le recours doit être rejeté.

4.
Vu l'issue du litige, et du fait que le recours était dénué de chance de
succès, la demande d'assistance judiciaire doit également être écartée.

Pour tenir compte de la situation pécuniaire difficile de la recourante, seul
un émolument réduit de 800 fr. sera mis à sa charge.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de cassation pénale.

Lausanne, le 18 août 2008

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Schneider Oulevey