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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.46/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_46/2008 /rod

Arrêt du 14 avril 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Favre.
Greffière: Mme Angéloz.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Mauro Poggia, avocat,

contre

Procureur général du canton de Genève,
case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.

Objet
Ordonnance de classement (abus de confiance, escroquerie),

recours contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation du canton de Genève
du 12 décembre 2007.

Faits:

A.
Le 20 septembre 2006, X.________ a déposé plainte pénale auprès du Procureur
général du canton de Genève contre Y.________, pour escroquerie, éventuellement
abus de confiance ou vol. Disant être actif dans le négoce des pierres
précieuses et des bijoux, il alléguait que la dénoncée, une richissime
ressortissante de Taïwan qui était sa cliente depuis 1999, lui avait fait
savoir, au début 2006, qu'elle était à la recherche d'une parure
exceptionnelle. Il lui en avait remise une, composée de 7 pièces, d'une valeur
de CHF 38'850'000. En août 2006, la dénoncée l'avait informé qu'une expertise
de la parure avait révélé que sa valeur n'excédait pas ? 17'000'000. Par fax du
3 septembre 2006, elle s'était engagée à lui payer cette somme dès que
possible. Depuis cette date, il avait vainement tenté d'obtenir le paiement ou
la restitution de la parure.

Le 18 mai 2007, X.________ a déposé une nouvelle plainte pénale contre
Y.________, pour infraction à l'art. 179ter CP.

B.
Dans le cadre des investigations menées, le juge d'instruction a, notamment,
entendu, séparément, X.________ et, en qualité de témoin, Y.________, lesquels
ont fait des déclarations contradictoires. Au terme de l'enquête, il a transmis
le dossier au Procureur général, sans inculpation.

C.
Par ordonnance du 21 août 2007, le Procureur général a classé les plaintes de
X.________, celle du 20 septembre 2006 faute de prévention suffisante et celle
du 18 mai 2007 pour des motifs d'opportunité.

D.
Contre cette décision, X.________ a recouru à la Chambre d'accusation
genevoise.

Lors de l'audience du 26 septembre 2007, la Chambre d'accusation a écarté une
demande de report de l'audience, formulée le 24 septembre 2007 par le nouveau
conseil de X.________, au motif que la convocation mentionnait expressément que
l'audience serait consacrée à l'appel de la cause et aux éventuelles
plaidoiries et que le recourant devait assumer les conséquences de sa décision
de changer de conseil. La cause a ensuite été gardée à juger.
Par ordonnance du 12 décembre 2007, la Chambre d'accusation a rejeté le
recours. Elle a écarté le grief par lequel le recourant se plaignait de n'avoir
pas été autorisé par le juge d'instruction à prendre connaissance de la
déposition de l'intimée et de diverses autres pièces du dossier. Pour le
surplus, elle a confirmé le classement des plaintes.

E.
X.________ forme un recours en matière pénale et un recours constitutionnel
subsidiaire au Tribunal fédéral, pour violation de son droit d'être entendu et
arbitraire dans l'appréciation des preuves. Il conclut à l'annulation de la
décision attaquée et à la réouverture de la procédure pénale en vue de sa
confrontation avec la dénoncée. Des déterminations n'ont pas été requises.

Considérant en droit:

1.
La décision attaquée, qui est finale (art. 90 LTF), a été rendue en matière
pénale (art. 78 al. 1 LTF), par une autorité cantonale de dernière instance
(art. 80 al. 1 LTF). Elle peut donc faire l'objet d'un recours en matière
pénale (art. 78 ss LTF), de sorte que le recours constitutionnel subsidiaire
est exclu (cf. art. 113 al. 1 LTF).

2.
Le recourant n'est manifestement pas un accusateur privé au sens de l'art. 81
al. 1 let. b ch. 4 LTF. Au vu des infractions qu'il a dénoncées, il n'est pas
non plus une victime au sens de l'art. 2 LAVI et ne peut donc fonder sa qualité
pour recourir sur l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF. Il n'est pas plus habilité
à recourir sur la base de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF, dès lors qu'il ne
conteste plus le classement de sa plainte pour infraction à l'art. 179ter CP et
que les autres infractions qu'il a dénoncées se poursuivent d'office. Le
recourant revêt ainsi la qualité de simple lésé.

Selon la jurisprudence, le simple lésé n'a en principe pas qualité pour former
un recours en matière pénale. L'action pénale, soit le droit de poursuivre et
de punir les infractions, appartient en effet exclusivement à l'Etat. Elle ne
profite qu'indirectement au simple lésé, qui n'a en principe qu'un intérêt de
fait à sa mise en oeuvre. Celui-ci n'a d'intérêt juridique à obtenir
l'annulation d'une décision relative à la conduite de l'action pénale que si
cette décision porte atteinte aux droits procéduraux, dont la violation
équivaut à un déni de justice formel, qui lui sont reconnus par le droit
cantonal ou qui découlent directement du droit constitutionnel. Il n'est donc
habilité à recourir que pour se plaindre de la violation de tels droits,
notamment de son droit d'être entendu. Il ne peut remettre en cause, même de
façon indirecte, la décision sur le fond, par exemple contester l'application
de la loi matérielle ou se plaindre d'arbitraire dans l'appréciation des
preuves (ATF 133 IV 228 consid. 2 p. 229 ss).

3.
Au vu de la jurisprudence précitée, le grief du recourant pris d'une
appréciation arbitraire des preuves est irrecevable.

4.
Le recourant se plaint à divers égards d'une violation de son droit d'être
entendu.

4.1 Il fait d'abord valoir que, par le refus de renvoyer l'audience, la Chambre
d'accusation cantonale l'a privé de son droit de plaider devant elle, en
violation de l'art. 29 al. 2 Cst.

De jurisprudence constante, le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2
Cst. n'implique pas que l'intéressé ait pu s'exprimer oralement devant
l'autorité appelée à statuer; il suffit qu'il ait pu le faire par écrit (ATF
130 II 425 consid. 2.1 p. 428 et les arrêts cités). Or, le recourant a pu faire
valoir ses moyens dans le recours qu'il a adressé à la Chambre d'accusation
cantonale. Le grief est dès lors infondé.

4.2 Le recourant voit ensuite une violation de son droit d'être entendu dans le
fait que le juge d'instruction n'a pas inculpé la dénoncée, ne l'entendant que
comme témoin. Il fonde ce grief sur l'art. 134 CPP/GE, en tant qu'il prescrit
que "dès que l'enquête révèle des charges suffisantes, le juge d'instruction
inculpe la personne faisant l'objet de son instruction".

Le grief ainsi formulé revient en réalité à invoquer une violation de l'art.
134 CPP/GE, au motif que les conditions d'une inculpation, à savoir l'existence
de charges suffisantes, seraient réalisées. L'existence de telles charges
constitue toutefois l'objet de la cause au fond, que le recourant n'est pas
habilité, fût-ce indirectement, à remettre en cause (cf. supra, consid. 2).
Partant, le grief est irrecevable.

4.3 Le recourant se plaint encore d'avoir été privé de la possibilité d'être
confronté à la dénoncée. Ce faisant, il se borne à tirer les conséquences d'une
absence d'inculpation, avant laquelle l'instruction est non-contradictoire
(art. 138 CPP/GE), de sorte que le grief n'est en définitive pas distinct du
précédent.

4.4 Dans le cadre de son grief d'arbitraire, le recourant reproche à la Chambre
d'accusation cantonale d'avoir ignoré sa requête de consulter la teneur des
enregistrements téléphoniques et de se déterminer sur ceux-ci.

On peut s'étonner d'un tel grief, dès lors que le recourant, à titre préalable,
indique expressément que le présent recours ne porte pas sur le classement de
sa plainte pour infraction à l'art. 179ter CP. Quoiqu'il en soit, le recourant
n'établit aucunement avoir présenté la requête invoquée devant la Chambre
d'accusation cantonale. Dans la mesure où il entendrait en réalité se plaindre
de ce que l'autorité cantonale n'ait pas examiné son grief pris de ce qu'il n'a
pas eu accès à certaines pièces du dossier, notamment aux enregistrements
téléphoniques, sa critique serait dépourvue de tout fondement, comme cela
ressort du considérant 3 de la décision attaquée.

5.
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable.

Le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre d'accusation du
canton de Genève.
Lausanne, le 14 avril 2008
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Angéloz