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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.240/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_240/2008/bri

Arrêt du 16 juin 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Mathys.
Greffière: Mme Kistler Vianin.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Nicola Meier, avocat,

contre

Procureur général du canton de Genève, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.

Objet
Infraction à la LStup,

recours contre l'arrêt du 26 février 2008 de la Cour de cassation du canton de
Genève.

Faits:

A.
Par arrêt du 27 septembre 2007, la cour correctionnelle de Genève, statuant
sans jury, a condamné X.________ à une peine privative de liberté de sept ans,
sous déduction de la détention préventive, pour infractions à l'art. 19 ch. 1
et 2 let. a et b de la loi fédérale sur les stupéfiants.

Par arrêt du 26 février 2008, la cour de cassation du canton de Genève a rejeté
le pourvoi formé par X.________.

B.
En résumé, la condamnation de X.________ repose sur les faits suivants:
B.a X.________ était affilié à une bande pour se livrer au trafic de
stupéfiants. Il a joué le rôle d'organisateur, alors que A.________, B.________
et C.________ étaient des « mules » chargées de transporter la drogue.
B.b Le 3 mai 2006, la police genevoise a appris que B.________, qui se trouvait
en transit à l'aéroport de Londres, en provenance de Sainte-Lucie et à
destination de Genève, transportait de la cocaïne dans ses bagages. B.________
a été interpellée le jour même à son arrivée à Genève. Le démontage des parois
de ses deux valises a permis la découverte de huit sachets de cocaïne d'un
poids total de 1 kg 242 et d'une pureté de 70 %. Interrogée par la police, elle
a mis en cause A.________ et X.________, qu'elle avait pour mission de
retrouver à Zurich. A.________, qu'elle savait se livrer au trafic de drogue,
l'avait recrutée à la demande de X.________ et lui avait donné les informations
et instructions nécessaires à son voyage et à la remise de la drogue à l'hôtel
G.________, à Zurich. Un dénommé D.________ et un tiers resté inconnu lui
avaient remis les deux valises et son billet d'avion à Sainte-Lucie.
B.c Le 4 mai 2006, A.________ et X.________ ont été interpellés par la police
zurichoise alors qu'ils se rendaient à l'hôtel G.________, où X.________
logeait depuis le 2 mai 2006. La police a découvert sur lui des tournevis et,
dans sa chambre, outre 36'000 francs en diverses coupures, des sachets de
cocaïne, d'un poids total brut de 750 grammes et d'une pureté de 70 %,
dissimulés dans les parois d'une valise, de la même manière qu'ils l'avaient
été dans les valises de B.________.

A.________ a admis que, le 26 avril 2006, en provenance de Sainte-Lucie, elle
était arrivée à Genève avec deux valises que lui avait remises D.________ à
Sainte-Lucie et qui contenaient chacune plusieurs centaines de grammes de
cocaïne. Elle avait retrouvé X.________ le 3 mai 2006 à Zurich et lui avait
livré la première valise à l'hôtel H.________. Il avait vendu son contenu de
cocaïne, à un tiers resté inconnu, pour 36'000 francs. Avant son départ de la
Jamaïque, X.________ l'avait appelée pour lui faire savoir que B.________
allait également effectuer un transport de drogue à destination de la Suisse.
X.________ était le destinataire des quatre valises que toutes deux devaient
lui livrer en Suisse.

A.________ a également avoué qu'elle avait précédemment effectué, début juin
2005, au départ des Bahamas, un transport de 83 boulettes de cocaïne. Elle
avait livré la marchandise à un nommé Coddy, à Zurich, sur instructions que
X.________ lui avait données en Jamaïque avant son départ.
B.d Le 6 mai 2006, C.________ a été appréhendée à l'aéroport de Genève en
provenance de la Jamaïque. La police a découvert huit sachets de cocaïne, d'un
poids total brut de 1 kg 055, dissimulés dans les renforts de ses valises. Elle
a indiqué à la police avoir été recrutée en Jamaïque par E.________, surnommé
Tufy, et y avoir reçu les deux valises d'un inconnu surnommé Magga. De Genève,
elle devait prendre le train pour Zurich où E.________ devait la réceptionner.

F.________ a admis s'être rendu à la gare de Zurich pour y réceptionner une
Jamaïcaine et s'être douté qu'elle pouvait transporter quelque chose d'illégal.
Il avait accepté de rendre ce service à un Jamaïcain nommé E.________, dont il
ne savait rien, en échange de 1000 francs. Il a déclaré ne pas connaître
X.________.
B.e X.________ a reconnu avoir organisé, avec D.________, E.________ et
F.________, les transports de drogue effectués par A.________ le 26 avril 2006
et B.________ le 3 mai 2006. En revanche, il conteste avoir participé au
transport de 83 boulettes de cocaïne, en juin 2005, par A.________ et de 1 kg
055 de cocaïne, le 6 mai 2006, par C.________.

C.
Contre l'arrêt cantonal du 26 février 2008, X.________ dépose un recours en
matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il se plaint d'arbitraire dans
l'établissement des faits en relation avec les transports de juin 2005 et du 6
mai 2006 qui lui sont imputés. Il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et
au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement. En outre, il
sollicite l'assistance judiciaire.

D.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
1.1 Le recours en matière pénale peut être interjeté pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les
arguments soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité
précédente. Il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont
été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation
différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4
p. 140). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et
2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal
fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de
traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les
questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées
devant lui. Il ne peut pas entrer en matière sur la violation d'un droit
constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal
si le grief n'a pas été invoqué et motivé de manière précise par la partie
recourante (art. 106 al. 2 LTF).

1.2 Saisi d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral ne réexamine
l'établissement des faits - sous réserve de l'allégation d'une violation du
droit au sens de l'art. 95 LTF - que lorsqu'il est entaché d'inexactitude
manifeste (art. 97 al. 1 LTF), à savoir d'arbitraire (ATF 134 IV 36 consid.
1.4.1). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature
appellatoire (ATF 133 III 393 consid. 6 p. 397).

Une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable,
méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou
encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. A
cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si
celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation
effective, adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. Il
n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution paraît également
concevable, voire même préférable (ATF 133 I 149 consid. 3.1 p. 153 et les
arrêts cités).

En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a
arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison
sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se
trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se
fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations
insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9). Lorsque l'autorité cantonale a
forgé sa conviction quant aux faits sur la base d'un ensemble d'éléments ou
d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même
chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant; l'appréciation des
preuves doit être examinée dans son ensemble. Il n'y a pas arbitraire si l'état
de fait retenu pouvait être déduit de manière soutenable du rapprochement de
divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'un
ou plusieurs arguments corroboratifs sont fragiles, si la solution retenue peut
être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à
emporter la conviction.

2.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire en
retenant qu'il avait participé au transport de 83 boulettes de cocaïne en juin
2005, sur la base des déclarations fluctuantes de A.________. Il met l'accent
sur les tentatives de manipulation et les mensonges de sa coaccusée, qui aurait
tenté de faire pression sur la « mule » B.________ pour le charger et s'attirer
ainsi les faveurs du magistrat.

Conformément au principe de la libre appréciation des preuves, il appartient au
juge d'apprécier souverainement la valeur des dépositions des co-prévenus. En
l'espèce, lors de l'interrogatoire de police du 4 mai 2006, A.________ a admis
avoir transporté de la drogue en Suisse en juin 2005, et avoir ingéré vingt
boulettes (pièces 20'011 et 20'012). Devant le juge d'instruction, le 16 mai
2006, elle a reconnu avoir transporté de la drogue en Suisse en juin 2005 pour
le compte du recourant. Elle a dit avoir ingéré 83 boulettes (pièces 50'007).
Lors de l'audience de jugement du 27 septembre 2007, elle a confirmé avoir
transporté de la drogue. Elle a déclaré avoir ingéré 33 boulettes sur 83 et a
mis en cause le recourant (arrêt de la cour correctionnelle, p. 6 et 7).

Si les déclarations de A.________ fluctuent sur la quantité de drogue avalée,
elles n'ont pas varié sur deux points essentiels pendant les quatorze mois qu'a
duré l'instruction: elle a été mandatée pour transporter environ 80 boulettes
de cocaïne et elle a agi pour le compte du recourant. A cela s'ajoute le fait
qu'elle a avoué spontanément le transport de juin 2005, celui-ci s'étant
produit une année avant son arrestation. Dans ces conditions, la cour cantonale
n'est pas tombée dans l'arbitraire en retenant, sur la base des déclarations de
A.________, que le recourant avait participé, au titre d'organisateur, au
transport de 83 boulettes de cocaïne de la Jamaïque en Suisse en juin 2005.

Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté.

3.
Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir établi les faits de manière
arbitraire en retenant qu'il avait participé le 6 mai 2006, en tant
qu'organisateur, au transport de 1,055 kg de cocaïne par C.________.

3.1 La cour cantonale fonde la participation du recourant à ce transport
principalement sur trois éléments. A son arrestation à Genève, C.________ a
spontanément informé les policiers genevois qu'elle avait effectué, depuis
2001, de nombreux transports de drogue entre la Jamaïque et Londres, auxquels
X.________, entre autres organisateurs, avait activement participé. Ensuite,
les trois mules, qui transportaient chacune deux valises dans lesquelles la
drogue était camouflée de la même manière, ont nommément cité X.________ dès
leur arrestation comme étant le destinataire, à Zurich, de leurs valises. C'est
là qu'il séjournait effectivement depuis le 2 mai 2006. Enfin, le numéro de
téléphone de F.________, qui devait réceptionner C.________, se retrouve dans
la mémoire du téléphone mobile de X.________.

Le recourant fait valoir que les deux éléments de preuve centraux, à savoir les
déclarations de la « mule » C.________ et les analyses téléphoniques, ont été
interprétés de manière insoutenable par la cour cantonale. Ainsi, il conteste
que C.________ l'ait mis en cause, celle-ci ayant au contraire indiqué tout au
long de la procédure ne l'avoir jamais vu ni jamais avoir entendu parler de lui
(pièces 50'029 et 50'015). En outre, il relève qu'aucun de ses numéros
jamaïcains, ni d'ailleurs son numéro suisse n'apparaissent dans les rétroactifs
de F.________; de même, la police n'aurait trouvé aucune trace des numéros de
A.________, B.________ et C.________ (pièce 40'233).

3.2 Il est établi, et cela n'est pas contesté, que E.________ et X.________,
impliqués dans le trafic international de cocaïne entre la Jamaïque et la
Suisse, avaient effectué ensemble le trajet en avion les amenant à Zurich le 2
mai 2006. A Zurich, ils ont retrouvé F.________ lequel demeurait dans cette
ville depuis plusieurs années. Le recourant a payé les chambres de l'hôtel pour
lui et son comparse. Par ailleurs et contrairement à ce que prétend le
recourant, c'est sans arbitraire que les premiers juges ont retenu que
F.________ et lui se connaissaient et qu'ils étaient en contact téléphonique,
ce qui ressort aussi bien de leurs déclarations en procédure que des contrôles
de leurs téléphones portables. La première des mules est arrivée à Genève le 26
avril 2006 avant de poursuivre en direction de Zurich. Le 3 mai, elle y a
rencontré le recourant et lui a livré les deux valises contenant de la cocaïne.
La deuxième est arrivée à Genève le 3 mai 2006 et aurait continué en direction
de Zurich pour rencontrer X.________ ou un intermédiaire délégué par lui et
livrer les deux valises en principe également à l'hôtel G.________. Quant à
C.________ qui tenait la marchandise de E.________, elle a été interceptée à
son arrivée à Genève, le 6 mai 2006. Elle devait continuer sur Zurich pour
livrer ses valises où elle était attendue finalement à la gare par F.________,
envoyé par E.________. A l'intérieur de toutes ces valises, la marchandise
était conditionnée et dissimulée de manière identique. Au vu de tous ces faits
établis, et même si C.________ s'est exprimée avec retenue sur les faits de la
procédure, il n'était pas arbitraire de retenir que le recourant avait aussi
participé, en tant qu'organisateur, au transport de la cocaïne par C.________.

Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté.

4.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.

Comme ses conclusions étaient d'emblée vouées à l'échec, le recourant doit être
débouté de sa demande d'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 et 2 LTF) et
supporter les frais de justice (art. 65 et 66 al. 1 LTF), réduits à 800 fr.
compte tenu de sa situation financière actuelle.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de cassation du canton
de Genève.
Lausanne, le 16 juin 2008
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Kistler Vianin