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Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.201/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_201/2008/bri

Arrêt du 12 juin 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Zünd.
Greffière: Mme Kistler Vianin.

Parties
X._________,
recourante, représentée par Me Nicolas Rouiller, avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Objet
Violation simple des règles de la circulation routière,

recours contre le jugement du Tribunal d'arrondissement de Lausanne, Tribunal
de police, du 1er février 2008.

Faits:

A.
Par sentence du 20 septembre 2007, la Commission de police de la ville de
Lausanne a condamné X._________, à une amende de 500 francs, convertible en
trois jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non
paiement, pour avoir contrevenu aux art. 27 al. 1 de la loi fédérale sur la
circulation routière (LCR; RS 741.01) et 68 al. 1 de l'ordonnance fédérale sur
la signalisation routière (OSR; RS 741.21).

B.
Par jugement du 1er février 2008, le Tribunal de police de l'arrondissement de
Lausanne a rejeté l'appel formé par X._________. En résumé, les faits sont les
suivants:

A Lausanne, sur l'avenue du Léman, quelques mètres après le débouché du chemin
de Bonne-Espérance, dans la direction de la montée, se trouve un passage pour
piétons, protégé par un feu doté de deux lignes d'arrêt, l'une avant, l'autre
après l'intersection d'avec le chemin de Bonne-Espérance. Au débouché de ce
chemin, une signalisation complémentaire a été mise en place à l'intention des
automobilistes préselectionnés à gauche de ce chemin. D'une part, un feu désaxé
par rapport au feu rouge principal, fixé sur le même poteau, indique à ces
automobilistes (par une phase rouge ou jaune clignotante) l'état du feu
protégeant le passage pour piétons sur l'avenue du Léman. D'autre part, un
signal ad hoc (OSR 1.27 avec une flèche complémentaire à gauche) attire
l'attention sur la proximité d'un feu.

A deux reprises, les 7 et 18 avril 2007, X._________ s'est engagée, au volant
de sa voiture, en provenance du chemin de Bonne-Espérance, sur l'avenue du
Léman, en direction de la montée, sans respecter la phase rouge de la
signalisation lumineuse.

C.
Contre ce dernier arrêt, X._________ dépose un recours en matière pénale devant
le Tribunal fédéral. Elle conclut à son acquittement.

Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
L'arrêt attaqué a été rendu par le tribunal de police de Lausanne, à savoir un
tribunal inférieur. Il convient de se demander si les décisions émanant d'un
tel tribunal peuvent être attaquées devant le Tribunal fédéral.

1.1 Selon l'art. 80 al. 1 LTF, « le recours est recevable contre les décisions
prises par les autorités cantonales de dernière instance (...) ». Cela signifie
que la décision attaquée doit mettre un terme à la procédure cantonale et
qu'elle ne doit plus pouvoir être attaquée devant une autre autorité cantonale
pouvant examiner au moins les griefs visés aux art. 95 à 98 LTF.

En l'espèce, selon l'art. 54 de la loi vaudoise du 17 novembre 1969 sur les
sentences municipales (LSM; RSV 312.15), le jugement rendu sur appel par le
tribunal de police est définitif et exécutoire. En d'autres termes, il n'y a
pas de recours cantonal contre le jugement attaqué, de sorte qu'il s'agit d'un
jugement émanant d'une autorité de dernière instance cantonale, contre lequel
le recours en matière pénale est recevable.

1.2 L'art. 80 al. 2 LTF prévoit que les cantons doivent instituer comme
autorités cantonales de dernière instance des tribunaux supérieurs, qui
statuent sur recours. Il en découle deux obligations pour les cantons:
Premièrement, leur autorité de dernière instance doit être un tribunal
supérieur. Le recours en matière pénale n'est donc pas ouvert contre les
jugements des tribunaux inférieurs, ni contre les prononcés pénaux des
autorités administratives, d'instruction ou d'accusation. Deuxièmement, ce
tribunal doit statuer sur recours. Les cantons ne sont toutefois pas obligés de
prévoir une double instance judiciaire. Le tribunal supérieur peut statuer soit
contre un jugement d'un tribunal inférieur, soit contre une décision d'une
autorité administrative (FF 2001 4115).

Selon l'art. 130 al. 1 LTF, les cantons doivent édicter les dispositions
d'exécution relatives à la compétence, à l'organisation et à la procédure des
autorités précédentes en matière pénale au sens des art. 80 al. 2 et 111 al. 3
LTF d'ici à l'entrée en vigueur d'un code de procédure pénale suisse; si un
code de procédure pénale suisse n'est pas encore entré en vigueur six ans après
l'entrée en vigueur de la LTF, le Conseil fédéral fixe, après avoir consulté
les cantons, le délai dans lequel ceux-ci doivent édicter les dispositions
d'exécution. L'obligation, pour les cantons, de mettre sur pied des tribunaux
supérieurs statuant sur recours, est donc provisoirement suspendue (arrêt du 23
juillet 2007 du Tribunal fédéral 6B_104/2007, consid. 1). Pendant cette période
transitoire, les décisions des tribunaux inférieurs qui statuent en dernière
instance cantonale peuvent donc être attaquées devant le Tribunal fédéral par
la voie du recours en matière pénale.

2.
La recourante soutient qu'elle n'a pas vu le feu clignotant passer au rouge, de
sorte qu'elle se trouvait dans une erreur sur les faits (art. 13 CP). Selon
elle, cette erreur ne pouvait être évitée; en effet, pour s'engager sur
l'avenue du Léman, le conducteur doit porter son regard à droite, vers le bas
de l'avenue du Léman, puis, à gauche, vers le haut de cette avenue; il doit en
outre regarder si des éventuels piétons traversent l'avenue du Léman ou le
chemin de Bonne-Espérance. Dans ces conditions, un conducteur attentif ne
pourrait, selon elle, percevoir le passage du feu au rouge.

Que la recourante n'ait pas perçu le feu passer au rouge ne l'exculpe pas si
elle pouvait le percevoir et si on doit lui reprocher de ne pas l'avoir perçu.
En l'espèce, deux signalisations devaient attirer son attention. D'une part,
une signalisation verticale comportant deux panneaux indique la présence, pour
le conducteur qui s'engage en direction de la montée, d'un feu à trois phases
et du fait qu'il doit céder le passage aux autres véhicules qui lui sont
prioritaires. D'autre part, le feu de signalisation muni de trois lentilles
situé de l'autre côté de la route, en face du conducteur qui entend s'engager à
gauche sur l'avenue du Léman doit inciter ce dernier à faire preuve d'une
prudence particulière.

Il ressort de l'inspection locale à laquelle a procédé le tribunal de police
que cette signalisation, quoique inhabituelle, est parfaitement compréhensible
et peut être respectée si le conducteur fait preuve de l'attention nécessaire.
En effet, pendant les quelques minutes qu'a duré l'inspection locale, le
tribunal de police a constaté qu'une dizaine de véhicules se sont engagés sur
l'avenue du Léman. Certains véhicules ont franchi le feu de signalisation alors
que celui-ci était en phase orange clignotante et d'autres se sont arrêtés sur
l'avenue du Léman devant ledit feu de signalisation respectant ainsi la phase
rouge. Au demeurant, de l'aveu même de la recourante, sa fille lui avait fait
remarquer lors de sa deuxième infraction qu'elle avait brûlé le feu rouge qui
la concernait.
En conséquence, il faut admettre que la recourante a fait preuve d'un manque
d'attention coupable, en ne vouant pas une attention suffisante aux panneaux de
signalisation verticaux situés à l'extrémité du chemin de Bonne-Espérance et
aux feux de signalisation se trouvant de l'autre côté de l'avenue du Léman. Son
erreur, consistant à ne pas avoir vu le feu passer au rouge, était donc
évitable, de sorte qu'elle doit être punie pour négligence (art. 13 al. 2 CP).
Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté.

3.
La recourante conteste la légalité de la signalisation bicolore jaune-rouge du
feu installé à l'intersection du chemin de Bonne-Espérance et de l'avenue du
Léman. Selon elle, cette signalisation ne serait pas conforme à l'art. 70 al. 4
OSR, qui prévoit que « les installations lumineuses à feux rouge et jaune, mais
dépourvues de feu vert, peuvent être utilisées seulement dans des cas
exceptionnels, notamment près des garages du service du feu, près des
chantiers, près des boucles terminales des véhicules publics en trafic de
ligne, près des aérodromes, à l'entrée et à l'intérieur des tunnels et près des
passages à niveau ». La recourante déduit de cette disposition qu'un conducteur
qui connaissait bien les règles de l'OSR ne pouvait s'attendre à voir un tel
feu à l'intersection du chemin de Bonne-Espérance et de l'avenue du Léman.

Selon l'art. 70 al. 4 OSR, la signalisation litigieuse est admise dans les cas
exceptionnels. A titre d'exemple, l'ordonnance cite les garages du service du
feu, les chantiers, les boucles terminales des véhicules publics en trafic de
ligne, etc. Contrairement à ce que soutient la recourante, l'installation d'un
feu bicolore jaune rouge est donc possible à d'autres endroits que ceux qui
sont cités à l'art. 70 al. 4 OSR, pour autant qu'il s'agisse de situations
exceptionnelles.

La cour de céans n'a toutefois pas besoin d'examiner si, en l'espèce, la
configuration des lieux justifiait l'installation d'un feu bicolore
jaune-rouge. En effet, la jurisprudence exige, dans l'intérêt de la sécurité du
trafic, que les usagers de la route respectent les signaux et les marques, même
s'ils n'ont pas été apposés de manière régulière, lorsque ceux-ci créent une
apparence digne de protection pour d'autres usagers. En effet, un usager qui
sait qu'un signal n'a pas été apposé régulièrement ne doit pas, par son
non-respect, mettre en danger les autres usagers qui se fient à l'apparence
ainsi créée (ATF 128 IV 184 consid. 4.2 p. 186; 99 IV 164 consid. 6 p. 169).
Dès lors, même si ce feu latéral devait se révéler illégal, cela ne donnerait
pas le droit à la recourante de brûler le feu de l'avenue du Léman et de mettre
ainsi en danger les autres usagers de la route, en particulier les piétons qui
traversent cette avenue.

4.
La recourante fait grief au tribunal de police d'avoir refusé de produire les
statistiques relatives au nombres d'infractions au feu litigieux. Selon elle,
ces statistiques permettraient d'établir l'irrégularité du feu.

Le droit d'être entendu permet au justiciable de participer à la procédure
probatoire en exigeant l'administration des preuves déterminantes (ATF 126 I 15
consid. 2a/aa p. 16 et les arrêts cités). Il ne s'étend toutefois qu'aux
éléments pertinents pour décider de l'issue du litige. Selon la jurisprudence,
il est loisible au juge de mettre fin à l'instruction, lorsque les preuves
administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une
manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont
opposées, il a la certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son
opinion (ATF 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p. 135, 417 consid. 7b p. 430).

La cour de céans ne voit pas en quoi une telle statistique aurait permis de
prouver l'irrégularité de la signalisation litigieuse. Tout au plus, elle
aurait pu établir que d'autres conducteurs avaient brûlé le feu litigieux et
que, partant, la signalisation était peu claire. L'inspection locale a
toutefois permis de montrer que, même si la configuration des lieux était
quelque peu délicate, un minimum d'attention permettait de respecter la
signalisation litigieuse. Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté.

5.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.

Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe (art.
66 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal d'arrondissement de
Lausanne, Tribunal de police.
Lausanne, le 12 juin 2008
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Kistler Vianin