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Strafrechtliche Abteilung, Beschwerde in Strafsachen 6B.144/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
6B_144/2008 /rod

Arrêt du 9 septembre 2008
Cour de droit pénal

Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger, Favre, Zünd et Mathys.
Greffière: Mme Bendani.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Jean Lob, avocat,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
intimé.

Objet
Internement,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de
cassation pénale, du 2 octobre 2007.

Faits:

A.
Par jugement du 23 août 2007, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de
l'Est vaudois a ordonné la poursuite de l'internement de X.________.

Cette décision repose, en bref, sur les éléments suivants.
A.a Par jugement du 20 mars 1995, confirmé ultérieurement par la Cour de
cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, le Tribunal correctionnel du
district de Vevey a condamné X.________, pour vol et tentative de vol,
notamment, à la peine de neuf mois d'emprisonnement, a suspendu l'exécution de
cette peine et ordonné l'internement de l'intéressé.

Auparavant, X.________ avait déjà été condamné à huit reprises, essentiellement
pour des infractions contre le patrimoine. En 2002 et 2005, il a encore été
condamné à deux reprises pour des infractions patrimoniales. A chaque fois, la
mesure d'internement a été confirmée.
A.b Selon l'expertise psychiatrique du 24 janvier 2007, X.________, qui souffre
de troubles mixtes de la personnalité avec un retard mental léger, présente un
risque de récidive très élevé. En outre, de nouvelles perspectives de placement
dans d'autres établissements sont difficilement envisageables, les précédentes
tentatives s'étant toutes soldées par des échecs.

Dans son rapport du 13 février 2007, la Commission interdisciplinaire
concernant les délinquants nécessitant une prise en charge psychiatrique
(ci-après: CIC) a relevé que le bilan neurologique et neuro-psychologique de
l'intéressé ne mettait en évidence aucune pathologie curable à l'exception de
troubles secondaires liés au traitement neuroleptique. Elle a ainsi estimé
qu'aucune modification n'était actuellement envisageable dans le régime de
détention de X.________.

B.
Par arrêt du 2 octobre 2007, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois a rejeté le recours de X.________ et confirmé le jugement de première
instance.

C.
X.________ dépose un recours en matière pénale au Tribunal fédéral pour
violation des art. 2 al. 2, 56, 59 CP et du chiff. 2 des dispositions finales
de la modification du 13 décembre 2002. Il conclut à la réforme de l'arrêt
cantonal en ce sens que l'internement est levé et, subsidiairement, remplacé
par un traitement institutionnel au sens de l'art. 59 CP. Il requiert également
l'assistance judiciaire.

Considérant en droit:

1.
Le recourant invoque une violation des art. 2 al. 2, 56, 59 CP et du chiff. 2
al. 2 des dispositions finales de la modification du 13 décembre 2002. Il
soutient que son internement ne peut subsister en application de l'art. 43 aCP,
cette disposition ayant été abrogée, ni se fonder sur l'art. 64 CP dont les
conditions ne sont manifestement pas réalisées. Il explique qu'aucune mesure ne
se justifie au regard de l'art. 56 CP et que seul un traitement au sens de
l'art. 59 CP pourrait, subsidiairement, entrer en ligne de compte.

1.1 Le chiff. 2 al. 2 des dispositions finales de la modification du 13
décembre 2002 précise que, dans un délai de douze mois à compter de l'entrée en
vigueur du nouveau droit, le juge examine si les personnes qui sont internées
selon les art. 42 ou 43 ch. 1 al. 2 de l'ancien droit remplissent les
conditions d'une mesure thérapeutique (art. 59 à 61 ou 63). Dans l'affirmative,
le juge ordonne cette mesure; dans le cas contraire, l'internement se poursuit
conformément au nouveau droit.
1.1.1 Dans son message du 21 septembre 1998, le Conseil fédéral avait tout
d'abord prévu que le juge devait examiner d'office si les personnes internées
en vertu des art. 42 et 43 ch. 1 al. 2 de l'ancien droit remplissaient les
conditions définies à l'art. 64 CP. Si celles-ci étaient remplies, la mesure
était maintenue conformément au nouveau droit. Dans le cas contraire, elle
était levée (FF 1999 p. 1995).

Dans son message du 29 juin 2005, le Conseil fédéral a toutefois modifié cette
disposition transitoire pour éviter qu'une personne internée sous l'égide de
l'ancien droit ne soit purement et simplement libérée après l'entrée en vigueur
de la nouvelle partie générale du CP en l'absence d'une condition permettant
l'internement selon le nouveau droit, par exemple lorsqu'elle n'a pas commis
une infraction suffisamment grave. Il a précisé que le fait de maintenir des
mesures prononcées en vertu de l'ancien droit, plus sévère, n'était pas
contraire aux principes du droit intertemporel, les nouvelles dispositions
relatives au régime de l'exécution et aux droits et obligations de la personne
détenue devant toutefois s'appliquer pour la suite de l'exécution de
l'internement (FF 2005 p. 4447 s.).

Ainsi, après l'entrée en vigueur du nouveau droit, les internements des
délinquants d'habitude prononcés en application de l'art. 42 aCP et des
délinquants anormaux au sens de l'art. 43 ch. 1 al. 2 aCP se poursuivent si
aucune des mesures prévues aux art. 59 à 61 ou 63 CP n'entrent en
considération, les conditions y relatives n'étant pas réalisées. De plus, dans
ces cas, ils se poursuivent alors même que les nouvelles conditions de
l'internement au sens de l'art. 64 CP ne sont pas réalisées.
1.1.2 Reste que, selon le chiff. 2 al. 2 in fine des dispositions finales de la
modification du 13 décembre 2002, l'internement se poursuit conformément au
nouveau droit, ce qui signifie que la mesure doit désormais être exécutée
conformément à celui-ci. Partant, les nouvelles dispositions relatives au
régime de l'exécution et aux droits et obligations de la personne détenue
s'appliquent pour la suite de l'exécution de l'internement (cf. art. 388 al. 3
CP; FF 2005 p. 4447 s.). Parmi celles-ci, figurent notamment les règles sur la
libération conditionnelle (ATF 133 IV 201 consid. 2.1 p. 202 s.; FF 1999 p.
1991). Dès lors, la libération conditionnelle d'une personne internée en
application des art. 42 et 43 ch. 1 al. 2 aCP se décide désormais d'après le
nouveau droit, soit les art. 64a CP et suivant.
1.1.2.1 Franz Riklin relève que les personnes qui ont été internées en
application des art. 42 et 43 ch. 1 al. 2 aCP peuvent, dès le 1er janvier 2007,
déposer une demande de libération conditionnelle fondée notamment sur le nouvel
art. 56 al. 6 CP, qui prévoit qu'une mesure dont les conditions ne sont plus
remplies doit être levée (cf. F. Riklin, Revision des Allgemeinen Teils des
Strafgesetzbuches: Frage des Übergangsrechts, PJA 12/2006 p. 1485). Marianne
Heer déduit de cette même disposition qu'une personne qui a été internée sous
l'ancien droit doit être libérée si elle ne remplit pas les conditions de
l'art. 64 CP, une demande de libération pouvant d'ailleurs être déposée en tout
temps (cf. M. Heer, Basler Kommentar, StGB II, 2ème éd., ch. 2 al. 2 des
dispositions finales n° 17 et Basler Kommentar, StGB I, 2ème éd., art. 64b n°
2).

Contrairement aux peines, la nécessité des mesures, et en particulier des
internements, doit être régulièrement réexaminée durant leur exécution (cf.
art. 64b CP). Dans ce cadre, se pose la question de savoir si l'auteur
représente toujours un danger pour la sécurité publique. La notion de «
dangerosité » n'est pas clairement définie et est donc sujette à
interprétation. Elle dépend notamment de la nature et de l'importance du bien
juridique menacé. En relation avec l'art. 43 ch. 1 al. 2 aCP, le Tribunal
fédéral a admis que lorsque des biens juridiques importants, tels que la vie ou
l'intégrité corporelle, sont mis en péril, il faut se montrer moins exigeant
quant à l'imminence et à la gravité du danger que lorsque des biens de moindre
valeur, tels que la propriété ou le patrimoine, sont menacés (ATF 127 IV 1
consid. 2a p. 5). Avec la révision de la partie générale du CP, le législateur
a précisé ce concept de « dangerosité ». En effet, il a décidé que
l'internement ne peut être prononcé que si l'infraction commise figure parmi
les délits les plus graves au sens de l'art. 64 al. 1 CP, ce qui exclut, en
principe, les infractions contre le patrimoine (cf. FF 2005 p. 4445 ss). Ainsi,
la « dangerosité » d'un auteur se rapporte désormais aux seules infractions
énumérées à l'art. 64 al. 1 CP (cf. M. Heer, Basler Kommentar, StGB I, 2ème
éd., art. 64 n° 18 ss et art. 64a n° 14).
1.1.2.2 S'agissant de l'internement, l'art. 56 al. 6 CP est concrétisé à l'art.
64a CP, qui précise que l'auteur est libéré conditionnellement dès qu'il est à
prévoir qu'il se conduira correctement en liberté. Le délai d'épreuve est de
deux à cinq ans. Une assistance de probation peut être ordonnée et des règles
de conduite peuvent lui être imposées pour la durée de la mise à l'épreuve (al.
1). Si, à l'expiration du délai d'épreuve, la poursuite de l'assistance de
probation ou des règles de conduite paraît nécessaire pour prévenir d'autres
infractions prévues à l'art. 64 al. 1, le juge peut prolonger le délai
d'épreuve de deux à cinq ans à chaque fois, à la requête de l'autorité
d'exécution (al. 2). S'il est sérieusement à craindre qu'en raison de son
comportement durant le délai d'épreuve, la personne libérée conditionnellement
ne commette de nouvelles infractions au sens de l'art. 64 al. 1, le juge
ordonne sa réintégration à la requête de l'autorité d'exécution (al. 3). L'art.
95 al. 3 à 5 est applicable si la personne libérée conditionnellement se
soustrait à l'assistance de probation ou viole les règles de conduite (al. 4).
La personne libérée conditionnellement est libérée définitivement si elle a
subi la mise à l'épreuve avec succès (al. 5).

Selon le sens et le but de cette norme, la condition de la prévisibilité d'une
conduite correcte en liberté, prévue à l'al. 1, doit être appréciée par rapport
aux seules infractions énumérées à l'art. 64 al. 1 CP. Les autres
comportements, qui n'entrent pas dans les prévisions de cette dernière
disposition, sont irrelevants (cf. M. Heer, Basler Kommentar, StGB II, 2ème
éd., art. 64a CP n° 14; G. Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, AT II:
Strafen und Massnahmen, § 12 n° 28). Ainsi, un auteur qui a été interné, comme
délinquant d'habitude au sens de l'art. 42 aCP ou, comme en l'espèce, comme
délinquant anormal au sens de l'art. 43 ch. 1 al. 2 CP, ce en raison
d'infractions répétées contre le patrimoine, doit être libéré
conditionnellement en application de l'art. 64a CP, s'il est à prévoir qu'il ne
commettra pas, une fois remis en liberté, des infractions, qui entrent dans le
champ d'application de l'art. 64 al. 1 CP. En revanche, le fait qu'il soit
susceptible de se rendre coupable de nouvelles infractions contre le
patrimoine, qui ne seraient pas visées par l'art. 64 al. 1 CP, n'empêche pas le
prononcé de sa libération conditionnelle, laquelle se décide désormais
conformément aux art. 64a CP et suivant.

1.2 Selon l'arrêt attaqué, le recourant a, depuis sa jeunesse, été condamné à
de nombreuses reprises pour des infractions d'ordre patrimonial, commises tant
en liberté que lors des mesures de placement antérieures.

Dans leur rapport du 24 janvier 2007, les experts ont relevé que le recourant
reproduisait toujours le même mode de fonctionnement, caractérisé par sa
fluctuation du comportement et une faible tolérance à la frustration, ainsi que
des difficultés à se remettre en question, qu'il entrait ainsi dans des phases
de colère, avec des attitudes souvent infantiles face à sa déception causée par
l'absence d'ouverture de son régime et des règles à respecter en milieu
carcéral. Les médecins ont souligné qu'une quelconque évolution semblait
difficilement envisageable et que sa situation restait très problématique. Ils
n'ont objectivé aucun élément allant dans le sens d'un changement significatif
dans son mode de fonctionnement. Ils ont constaté que le risque de récidive
restait très élevé et que les différentes tentatives de placement dans des
établissements offrant un cadre plus léger et permissif (foyers spécialisés)
s'étaient toutes soldées par des échecs. Ils ont conclu que le recourant devait
continuer de pouvoir bénéficier d'un « étayage » cadrant, structurant,
soutenant et compréhensif, tel que celui qui lui était proposé au sein des EPO
et qu'il était actuellement difficile d'envisager de nouvelles perspectives.

Dans son dernier avis du 13 février 2007 (cf. supra consid. A.b), la CIC a
constaté que l'espoir mis dans l'ouverture de nouvelles perspectives s'avérait
malheureusement sans objet dans la situation chronicisée de l'intéressé.
1.2.1 Ainsi, l'accessibilité du recourant à une mesure thérapeutique est
quasiment nulle. En effet, selon les psychiatres, une évolution dans le
comportement de l'expertisé semble difficilement envisageable, alors que le
risque de récidive reste très élevé. D'après la CIC, le bilan neurologique et
neuro-psychologique du recourant ne met en évidence aucune pathologie curable.
Enfin, la seule modification que ce dernier est capable de concevoir dans
l'exécution de sa mesure est le transfert dans un foyer. En revanche, il
n'intègre pas la nécessité de prévenir autant que faire se peut le risque de
récidive qu'il représente.

Au regard de ces éléments, une mesure thérapeutique institutionnelle au sens
des art. 59 CP ss ou un traitement ambulatoire selon l'art. 63 CP n'est pas
envisageable, le recourant n'étant pas apte à être traité et les mesures
précitées n'étant par conséquent pas susceptibles de le détourner de la
commission de nouvelles infractions patrimoniales (cf. FF 1999 p. 1883 et 1896;
M. Heer, Basler Kommentar, StGB I, 2ème éd., art. 59 n° 63 et art. 63 n° 28; G.
Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, AT II: Strafen und Massnahmen, 2ème
éd., § 9 n°s 16, 64 et 65). Dès lors, conformément au chiff. 2 al. 2 des
dispositions finales de la modification du 13 décembre 2002, l'internement du
recourant doit se poursuivre, sans que les conditions d'application de l'art.
64 CP n'aient à être examinées (cf. supra consid. 1.1.1).
1.2.2 Toutefois, conformément à ce qui est explicité sous le consid. 1.1.2, le
recourant a la possibilité de demander sa libération conditionnelle en
application des art. 64a et 64b CP auprès de l'autorité vaudoise compétente.
Une libération au sens de ces dispositions entre évidemment en ligne de compte
lorsque, comme en l'espèce pour le prononcé de la mesure au sens de l'art. 43
ch. 1 al. 2 aCP, seules des infractions patrimoniales ont été commises, à
l'exclusion de celles énumérées à l'art. 64 al. 1 CP. Dans ce cadre, il ne
s'agit plus d'examiner le bien-fondé du prononcé antérieur de l'internement. Le
législateur a en effet réglé ce problème par le biais d'une disposition
transitoire, soit le chiff. 2 al. 2 des dispositions finales de la modification
du 13 décembre 2002, et ainsi clairement exclu d'examiner si tous les
internements prononcés sous l'ancien droit étaient conformes aux nouvelles
dispositions (cf. supra consid. 1.1.1; M. Heer, Basler Kommentar, StGB II, 2ème
éd., ch. 2 al. 2 des dispositions finales, n° 15). Cependant, cette procédure
n'a rien à voir avec le fait que les mesures doivent être réexaminées à
intervalles réguliers, l'interné pouvant en tout temps demander sa libération
conditionnelle (cf. art. 64b al. 1 CP; FF 2005 p. 4445; M. Heer, Basler
Kommentar, Strafrecht I et II, chiff. 2 des dispositions finales n°s 14 et 17
et art. 64b n° 28). Or, la notion de « dangerosité » a évolué et le pronostic
quant au comportement futur de l'interné doit désormais être posé conformément
au sens et au but de la nouvelle loi et donc apprécié d'après les seules
infractions énumérées, de manière exhaustive, à l'art. 64 al. 1 CP (cf. supra
consid. 1.1.2).

2.
En conclusion, le recours est rejeté, l'intéressé pouvant toutefois demander sa
libération conditionnelle en application des art. 64a et 64b CP.

Dès lors que le recourant est dans le besoin et que ses conclusions ne
paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec, l'assistance judiciaire doit lui
être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant requiert la désignation de Me
Jean Lob en qualité d'avocat d'office. Il y a lieu d'accéder à cette requête et
de fixer d'office les honoraires de l'avocat, qui seront supportés par la
caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans le sens des considérants.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise.

3.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

4.
Me Jean Lob, avocat à Lausanne, est désigné comme avocat d'office du recourant
et ses honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à
1'500 fr.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de cassation pénale.

Lausanne, le 9 septembre 2008

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Schneider Bendani