Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.539/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_539/2008

Arrêt du 19 février 2009
Ire Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz et Kolly.
Greffier: M. Carruzzo.

Parties
X.________ SpA en liquidation,
recourante, représentée par Me Mohamed Mardam Bey,

contre

Y.________ B.V.,
intimée, représentée par Me Anne Véronique Schlaepfer.

Objet
arbitrage international,

recours en matière civile contre la sentence rendue le
8 octobre 2008 par l'arbitre unique CCI.

Faits:

A.
Par contrat du 5 mars 1992, la société de droit italien X.________ SpA
(ci-après: X.________), aujourd'hui en liquidation, et la société de droit
néerlandais Y.________ B.V. (ci-après: Y.________) ont créé un consortium
interne dont le but était l'élaboration et la présentation d'une offre en vue
de l'adjudication à Y.________, par A.________, des travaux de construction de
chaudières de récupération pour deux centrales électriques en Egypte et, si
l'offre était retenue, pour l'exécution commune des obligations découlant du
contrat à conclure par Y.________, chef de file du consortium, avec A.________.
Le marché en question a été attribué à Y.________ et a donné lieu à la
signature de deux conventions entre ladite société et A.________ en date du 25
juin 1992.

A fin 1994, un différend a surgi entre X.________ et Y.________ en rapport avec
une modification de commande faite par A.________. La société italienne a
refusé de livrer les pièces supplémentaires devant permettre d'exécuter la
commande modifiée, sauf à obtenir une garantie financière. De son côté, la
société néerlandaise a retenu le paiement d'une somme d'argent aux fins de
suppléer à la prétendue carence de sa partenaire.

Le 14 octobre 1997, Y.________ a signifié à X.________ la résiliation partielle
du contrat de consortium, motifs pris de la violation de ses obligations
contractuelles relatives à la livraison de pièces de rechange et de son entrée
en liquidation forcée.

B.
Le 17 octobre 2006, X.________ en liquidation a adressé une requête d'arbitrage
à la Cour d'arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale (CCI).

Les parties ont proposé conjointement de désigner Me ..., avocat à Genève, en
tant qu'arbitre unique. Leur choix a été entériné par la Cour d'arbitrage de la
CCI. Des règles de procédure spécifiques (Specific Procedural Rules) ont été
édictées pour cet arbitrage. Y figurent notamment les dispositions suivantes:
"1. ...
Notifications, communications and submissions between the Arbitral Tribunal and
the parties can be made by registred mail, courier service, e-mail or
telefax...
The parties shall send their modifications [recte: notifications],
communications and submissions directly to the Arbitral Tribunal and
simultaneously send a full copy to the other party and to the ICC Secretariat.

7.
Any individual, including parties and their officers, may be a witness. It
shall not be improper for a party, its officers, employees, legal advisors or
other representatives to interview witnesses or potential witnesses.

8.
Each party shall name the witnesses upon whom it intends to rely and, to the
extent possible, it shall file written witness statements of each such witness.
The Arbitral Tribunal will decide issues such as possible filing of rebuttal
witness statements or the refusal of witnesses to cooperate. If it proves
impossible for a party to obtain a written witness statement from a witness
(who is not under the control of such party), the party shall at least specify,
when it provides the name of the witness, on what issues this witness will have
to testify at the witness hearing.

10.
Where a witness should ultimately not be able to attend even for a valid
reason, the Arbitral Tribunal shall in principe not be entitled to consider his
written statement, except if extraordinary circumstances so warrant. In such
event the Arbitral Tribunal shall hear the parties and decide by taking,
however, into account all relevant circumstances, including the parties'
legitimate interests.

...

The parties shall be responsible for ensuring the presence of the witnesses at
the hearing. Upon request, the Arbitral Tribunal will assist the parties with
respect to witnesses not under their control.

...

15.
The Arbitral Tribunal shall set the time limits and extend them as necessary.

The extension of deadlines shall only be granted exceptionnaly and provided
that a request is submitted immediately after the event preventing the party
from complying with the deadline."

X.________ en liquidation a réclamé à Y.________ le paiement de 206'923 euros
et de 590'341 livres égyptiennes. La défenderesse a conclu au rejet intégral de
la demande. Par sentence finale du 8 octobre 2008, l'arbitre unique a condamné
la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 51'842,10 euros avec
intérêts à 5% l'an du 10 septembre 1997 jusqu'au prononcé de la sentence,
statué sur les frais et dépens de la procédure arbitrale et rejeté toutes
autres conclusions des parties. Selon l'arbitre unique, la défenderesse a
retenu 456'000 florins néerlandais, soit l'équivalent de 206'924 euros,
normalement dus à la demanderesse. En revanche, cette dernière n'a pas réussi à
établir l'existence d'une seconde retenue, portant sur 590'341 livres
égyptiennes, de sorte que sa prétention relative à ce montant ne peut qu'être
rejetée. Il ressort des accords liant les parties que la demanderesse avait un
devoir contractuel de livrer à la défenderesse les pièces de rechange réclamées
par cette dernière. Le droit de veto, invoqué par elle pour se soustraire à
cette obligation, n'entrait pas en ligne de compte en l'espèce, car
l'intéressée avait participé aux discussions que la défenderesse avait eues
avec A.________ au sujet des modifications apportées par cette dernière à la
commande de pièces détachées. Dès lors, la défenderesse était en droit de
retenir un montant correspondant à ce qu'elle avait dû payer pour acquérir
ailleurs les pièces détachées non livrées par la demanderesse. Le total des
dépenses que lui avait occasionnées cet achat de couverture avec les frais y
afférents se montait à 341'755 florins. Par conséquent, la défenderesse devait
verser à la demanderesse la somme de 51'842,10 euros, soit la contre-valeur de
la différence (114'245 florins) entre le montant retenu par elle (456'000
florins) et les 341'755 florins précités.

C.
Le 19 novembre 2008, la demanderesse a formé un recours en matière civile. Elle
y invite le Tribunal fédéral à annuler ladite sentence, à prononcer la
récusation de l'arbitre unique et à renvoyer la cause à la CCI pour nouvelle
décision dans le sens des considérants.

La défenderesse et intimée conclut au rejet du recours.

L'arbitre unique, qui a produit le dossier intégral de la cause, a renoncé à
déposer une réponse.

Considérant en droit:

1.
D'après l'art. 54 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une
langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée.
Lorsque cette décision est rédigée dans une autre langue (ici l'anglais), le
Tribunal fédéral utilise la langue officielle choisie par les parties. Devant
le Tribunal arbitral, celles-ci ont opté pour l'anglais, tandis que, dans les
mémoires qu'elles ont adressés au Tribunal fédéral, elles ont employé le
français. Conformément à sa pratique, le Tribunal fédéral rendra, par
conséquent, son arrêt dans cette langue.

2.
2.1 Dans le domaine de l'arbitrage international, le recours en matière civile
est recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux aux conditions
prévues par les art. 190 à 192 LDIP (art. 77 al. 1 LTF).

En l'espèce, le siège de l'arbitrage a été fixé à Genève. L'une des parties au
moins (en l'occurrence, les deux) n'avait pas son domicile en Suisse au moment
déterminant. Les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont donc applicables
(art. 176 al. 1 LDIP).

La recourante est directement touchée par la sentence attaquée, qui n'admet que
partiellement ses conclusions pécuniaires. Elle a ainsi un intérêt personnel,
actuel et juridiquement protégé à ce que cette sentence n'ait pas été rendue en
violation des garanties découlant de l'art. 190 al. 2 let. a et b LDIP, ce qui
lui confère la qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).

Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), dans la forme prévue par la loi
(art. 42 al. 1 LTF), contre une sentence finale, le recours est, en principe,
recevable. Demeure réservé l'examen de la recevabilité des moyens qui y sont
soulevés.

2.2 Le recours reste purement cassatoire (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui exclut
l'application de l'art. 107 al. 2 LTF), à moins que le litige ne porte sur la
question de la compétence d'un tribunal arbitral (ATF 127 III 279 consid. 1b;
117 II 94 consid. 4).
La recourante demande au Tribunal fédéral de prononcer la récusation de
l'arbitre unique. La question de l'admissibilité d'une telle conclusion n'a pas
été résolue à ce jour (cf. arrêt 4A_210/2008 du 29 octobre 2008 consid. 2.2 et
les arrêts cités). Elle peut demeurer indécise en l'espèce, dès lors que, pour
les motifs indiqués plus loin (cf. consid. 3), la recourante soutient à tort
que l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné.

2.3 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'arbitre
unique (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter d'office les
constatations des arbitres, même si les faits ont été établis de manière
manifestement inexacte ou en violation du droit (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui
exclut l'application de l'art. 105 al. 2 LTF).

3.
Dans un premier moyen, fondé sur l'art. 190 al. 2 let. a LDIP, la recourante se
plaint de la désignation irrégulière de l'arbitre unique qui a rendu la
sentence attaquée.

3.1 La recourante a également déposé une demande de récusation que la Cour
d'arbitrage de la CCI a rejetée par décision non motivée du 27 septembre 2007.
Emanant d'un organisme privé, cette décision, qui ne pouvait pas faire l'objet
d'un recours direct au Tribunal fédéral (ATF 118 II 359 consid. 3b), ne saurait
lier ce dernier, lequel peut donc revoir librement si les circonstances
invoquées à l'appui de la demande de récusation sont propres à fonder le grief
de désignation irrégulière de l'arbitre unique (ATF 128 III 330 consid. 2.2 p.
332).

3.2 Un arbitre unique doit, à l'instar d'un juge étatique, présenter des
garanties suffisantes d'indépendance et d'impartialité (ATF 125 I 389 consid.
4a; 119 II 271 consid. 3b et les arrêts cités). Le non-respect de cette règle
conduit à une désignation irrégulière relevant de la disposition précitée (ATF
118 II 359 consid. 3b). Pour dire si un arbitre unique présente de telles
garanties, il faut se référer aux principes constitutionnels développés au
sujet des tribunaux étatiques (ATF 125 I 389 consid. 4a; 118 II 359 consid. 3c
p. 361). Il convient, toutefois, de tenir compte des spécificités de
l'arbitrage, et singulièrement de l'arbitrage international, lors de l'examen
des circonstances du cas concret (ATF 129 III 445 consid. 3.3.3 p. 454).

Selon l'art. 30 al. 1 Cst., toute personne dont la cause doit être jugée dans
une procédure judiciaire a droit à ce que sa cause soit portée devant un
tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. Cette garantie
permet d'exiger la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement
est de nature à faire naître un doute sur son impartialité (ATF 126 I 68
consid. 3a p. 73); elle tend notamment à éviter que des circonstances
extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au
détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une
prévention effective du juge est établie, car une disposition interne de sa
part ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent
l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du
magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être
prises en considération; les impressions purement individuelles d'une des
parties au procès ne sont pas décisives (ATF 128 V 82 consid. 2a p. 84 et les
arrêts cités).

L'impartialité subjective - qui est présumée jusqu'à preuve du contraire -
assure à chacun que sa cause sera jugée sans acception de personne (ATF 129 III
445 consid. 3.3.3 p. 454; 128 V 82 consid. 2a p. 84 et les arrêts cités).

L'impartialité objective tend notamment à empêcher la participation du même
magistrat à des titres divers dans une même cause (ATF 131 I 113 consid. 3.4 p.
117) et à garantir l'indépendance du juge à l'égard de chacun des plaideurs
(arrêt 4P.187/2006 du 1er novembre 2006 consid. 3.2.2).

3.3 Il y a lieu d'examiner, à la lumière de ces principes, si les circonstances
alléguées par la recourante font apparaître que l'arbitre unique ayant rendu la
décision attaquée a été irrégulièrement désigné.
3.3.1 Selon la recourante, l'arbitre unique aurait manqué d'indépendance et
d'impartialité en accordant à l'intimée un délai supplémentaire de dix jours
pour déposer son mémoire de réponse. Il convient de rappeler les circonstances
dans lesquelles le délai supplémentaire litigieux a été octroyé à cette partie,
afin de replacer le grief en question dans son contexte et de décider s'il est
fondé ou non.
3.3.1.1 Après que les parties eurent signé l'acte de mission, adopté des règles
de procédure spécifiques et discuté du déroulement de la procédure lors d'une
séance tenue le 26 avril 2007 avec l'arbitre unique, ce dernier, par lettre du
lendemain, leur a communiqué le calendrier prévisionnel (Provisional
Timetable), conformément à l'art. 18 par. 4 du Règlement d'arbitrage de la CCI
(ci-après: le Règlement). Selon ce calendrier, la recourante se voyait accorder
un délai expirant le 15 juin 2007 pour déposer sa demande et sa requête
éventuelle en production de pièces, alors que l'intimée devait déposer son
mémoire de réponse le 17 août 2007 au plus tard.

Le 4 juillet 2007, l'arbitre unique a appelé les conseils des deux parties pour
leur demander d'accepter le report de l'audience d'enquêtes, initialement fixée
aux 11 et 12 octobre 2007, aux 19 et 20 novembre 2007. Cette demande a été
acceptée. Lors de leur entretien téléphonique, le conseil de l'intimée a requis
de l'arbitre unique l'octroi d'un délai supplémentaire de dix jours pour
produire son mémoire. De son côté, le mandataire de la recourante a suggéré à
l'arbitre unique d'ajuster les délais communs aux deux parties pour tenir
compte du report de ladite audience, ainsi qu'il le rappelle dans une lettre
qu'il lui a adressée le 13 juillet 2007 (pce C-10).

Le 6 juillet 2007, l'arbitre unique a soumis aux parties, en les invitant à lui
donner leur avis sur les modifications proposées, un nouveau calendrier
prévisionnel sur lequel les deux premiers chiffres de la date du 17 août 2007,
susmentionnée, avaient été biffés et remplacés par "27". Par courrier du 13
juillet 2007, la recourante a contesté l'octroi d'un délai supplémentaire de
dix jours à l'intimée pour déposer son mémoire de réponse. De son côté,
l'intimée a indiqué à l'arbitre unique, par courrier électronique du même jour,
qu'elle acceptait le calendrier prévisionnel modifié.
Par lettre du 20 juillet 2007, l'arbitre unique a confirmé le calendrier
prévisionnel révisé, en indiquant les raisons pour lesquelles il avait estimé
juste et raisonnable d'accepter la requête de l'intimée tendant à obtenir une
légère extension du délai de réponse et en soulignant que le délai octroyé à la
recourante pour déposer ses déclarations de témoin avait également été
prolongé.

Le 14 août 2007, la recourante a adressé à la Cour d'arbitrage de la CCI d'une
demande de récusation de l'arbitre unique. Après avoir donné l'occasion à tous
les intéressés de se déterminer sur cette demande, l'autorité saisie l'a
rejetée par décision non motivée du 27 septembre 2007, en application de l'art.
11 par. 3 du Règlement.
3.3.1.2 Se fondant sur les circonstances de fait pertinentes ainsi résumées, la
recourante reproche à l'arbitre unique d'avoir traité la demande de
prolongation de délai litigieuse à l'insu de la partie adverse et d'avoir
démontré, ce faisant, sa partialité en communiquant directement avec une partie
sans en informer l'autre partie. A son avis, les motifs énoncés par l'arbitre
unique dans sa lettre du 20 juillet 2007 étaient inexacts: en premier lieu,
contrairement à ses dires, l'arbitre unique n'avait pas fait usage de son
pouvoir discrétionnaire, puisqu'il s'était borné à répondre à une requête
spécifique présentée ex parte par l'intimée; ensuite, l'argument tiré du fait
que l'échéance du délai initial tombait durant la période estivale n'était pas
recevable, car les parties avaient déjà tenu compte de cette circonstance lors
de leur séance préliminaire du 26 avril 2007; enfin, l'inégalité imposée à la
recourante ne pouvait raisonnablement être compensée par l'octroi aux deux
parties d'une prolongation du délai qui leur avait été fixé pour déposer leurs
déclarations de témoins.

A suivre la recourante, un arbitre indépendant et impartial aurait, à tout le
moins, invoqué un malentendu résultant des conférences téléphoniques du 4
juillet 2007. Il lui aurait alors donné acte de son veto, serait revenu sur son
accord et aurait invité l'intimée à procéder selon les formes prescrites par
l'art. 15 des règles de procédure spécifiques, lequel dispose qu'une
prolongation de délai ne doit être accordée qu'exceptionnellement et à la
condition qu'une requête ad hoc soit déposée immédiatement après la survenance
de l'événement empêchant la partie requérante de respecter le délai. Au lieu
d'agir ainsi, l'arbitre unique a délibérément choisi de ne pas corriger ce vice
de procédure, malgré les protestations légitimes de la partie qui en avait été
la victime. En accordant verbalement, ex parte, un avantage personnel à l'un
des plaideurs, il aurait usé d'un procédé déloyal inadmissible, aux dires de la
recourante, et la longue liste des graves vices de procédure déplorés
ultérieurement par cette partie révélerait une connivence entre l'arbitre
unique et l'intimée, laquelle connivence, doublée d'une violation patente du
principe de la contradiction, était suffisante pour fonder une suspicion
légitime quant à l'indépendance et à l'impartialité de l'arbitre unique.
3.3.2 Contrairement à l'avis de la recourante, la décision attaquée, une fois
replacée dans son contexte procédural, n'était pas de nature à faire naître un
doute légitime sur l'impartialité subjective de l'arbitre unique.

D'abord, il appert de la relation des circonstances pertinentes que l'arbitre
unique n'a pas été approché unilatéralement par l'intimée, mais que c'est bien
plutôt lui qui a contacté les deux parties afin de leur demander si elles
acceptaient de reporter la date initialement prévue pour l'audience d'enquêtes.
C'est lorsqu'elle a été contactée par l'arbitre unique que l'intimée a profité
de l'occasion pour formuler sa requête tendant à obtenir une prolongation de
dix jours du délai de réponse. Quant à la recourante, elle aussi a profité de
l'occasion pour requérir unilatéralement de l'arbitre qu'il ajustât les délais
communs aux deux parties, eu égard au report de l'audience d'enquêtes. Que
pareille requête ou suggestion fût dans l'intérêt bien compris des deux parties
n'enlève rien au fait que la recourante l'a formulée sans consulter son adverse
partie. Aussi est-elle malvenue, sur le principe, de reprocher à cette dernière
d'avoir usé du même procédé qu'elle.

Par ailleurs, le manque de transparence que la recourante impute à l'arbitre
unique est dénué de fondement. Il ressort, au contraire, des circonstances
relatées plus haut que l'arbitre unique a communiqué aux parties le calendrier
prévisionnel révisé, sur lequel figurait clairement le report du 17 au 27 août
2007 du délai de réponse, qu'il les a invitées à prendre position au sujet des
modifications proposées et qu'il leur a ensuite exposé par écrit les raisons
qui l'avaient conduit à prendre la décision contestée. Il est évident qu'un
arbitre qui eût été prévenu à l'égard d'une partie, étant de connivence avec
l'autre partie, n'eût pas agi de la sorte.

Au demeurant, comme l'intimée le souligne à juste titre, il n'est pas établi
que les règles de procédure spécifiques aient conféré aux parties un véritable
droit de veto inconditionnel s'agissant de l'octroi de délais supplémentaires.
Aussi appartenait-il à l'arbitre unique de se prononcer sur les éventuelles
requêtes que celles-ci lui soumettraient à ce propos. C'est ce qu'il a fait, en
l'espèce, en étant amené, par la force des choses, à donner tort à l'une
d'elles. La décision motivée qu'il a prise n'était pas propre, en tant que
telle, à éveiller objectivement un soupçon de partialité dans l'esprit de la
partie qui s'était opposée en vain à l'octroi de la prolongation de délai
litigieuse. Force est, en effet, de rappeler ici que des fautes de procédure ou
une décision matériellement erronée ne suffisent pas à fonder l'apparence de
prévention d'un arbitre, sauf erreurs particulièrement graves ou répétées qui
constitueraient une violation manifeste de ses obligations (ATF 115 Ia 400
consid. 3b).

De surcroît, on voit mal, a priori, quel intérêt la recourante pouvait bien
avoir à s'opposer à l'octroi d'une prolongation de délai de dix jours seulement
à l'intimée, qui plus est durant la période estivale, alors qu'elle ne prétend
pas avoir formulé une requête du même type que l'arbitre aurait écartée.

Enfin, la simple allégation d'une "longue liste des graves vices de procédure
déplorés ultérieurement", sans autres explications, ne saurait remplacer la
démonstration du fait que tel ou tel vice, par hypothèse avéré, était
susceptible de fonder un doute objectif quant à l'impartialité de l'arbitre
unique.

D'où il suit que le grief tiré de la violation de l'art. 190 al. 2 let. a LDIP
est dénué de tout fondement.

4.
Dans un deuxième moyen, la recourante reproche à l'arbitre unique de n'avoir
pas respecté l'égalité des parties.

4.1 L'égalité des parties, garantie par les art. 182 al. 3 et 190 al. 2 let. d
LDIP, implique que la procédure soit réglée et conduite de manière à ce que
chaque partie ait les mêmes possibilités de faire valoir ses moyens. En vertu
de ce principe, qui s'applique également aux délais dans lesquels les écritures
doivent être déposées (KAUFMANN-KOHLER/RIGOZZI, Arbitrage international, 2006,
p. 196 n. 486), le tribunal arbitral doit traiter les parties de manière
semblable à toutes les étapes de la procédure (ATF 133 III 139 consid. 6.1 p.
143 in medio).
4.2
4.2.1 Selon la recourante, la prolongation du délai de réponse accordée à
l'intimée portait atteinte à l'égalité des parties pour les raisons déjà
indiquées à l'appui du grief relatif à la prévention de l'arbitre.

Il n'en est rien. A cet égard, les motifs développés pour justifier le rejet du
grief en question peuvent être repris ici, mutatis mutandis. On rappellera,
dans ce contexte, que la recourante ne soutient pas que l'arbitre unique lui
aurait refusé ce qu'il avait accordé à l'intimée, c'est-à-dire qu'elle lui
aurait demandé en vain de prolonger un délai qu'il lui avait fixé. Du reste,
comme le fait observer à juste titre l'intimée, l'octroi de délais différents
aux parties ne constitue pas forcément une inégalité de traitement (cf. MICHAEL
E. SCHNEIDER, in Commentaire bâlois, Internationales Privatrecht, 2e éd. 2007,
n°s 66 et 87 ad art. 182 LDIP).
4.2.2 Dans la seconde branche du même moyen, la recourante fait grief à
l'arbitre unique d'avoir tenu pour avérés des faits simplement allégués par
l'intimée, en méconnaissance de l'art. 8 CC, et de lui avoir réservé un
traitement exactement inverse. Ainsi, l'arbitre unique se serait basé sur la
seule déposition du dénommé U.________, organe de l'intimée, pour constater que
la recourante avait été impliquée dans les pourparlers relatifs à la nouvelle
commande de pièces de rechange. Les dires de cette personne lui auraient, en
outre, suffi pour admettre comme prouvé le prix de 37'972 florins néerlandais
porté en compte par l'intimée au titre des frais de transport et de livraison
de ces pièces de rechange. Inversement, l'arbitre unique ne se serait pas
contenté du fait que la somme de 590'341 livres égyptiennes figurait sur un
courrier adressé par elle à l'intimée et n'ayant pas suscité de réaction de la
part de cette dernière, pour admettre que cette partie avait effectivement
retenu ladite somme.

Sous le couvert du grief de violation de l'égalité des parties, la recourante
s'en prend, en réalité, à la manière dont l'arbitre unique a apprécié les
éléments de preuve à sa disposition et au résultat de cette appréciation. Or,
le Tribunal fédéral ne peut revoir l'appréciation des preuves faites dans le
cadre d'un arbitrage international, sauf sous l'angle très restreint de l'ordre
public. Dans la mesure où la recourante tente de l'y contraindre, sans invoquer
semblable exception, elle le fait en pure perte.

La méthode quasi mathématique utilisée par la recourante n'est de toute façon
pas la bonne. En effet, ce n'est pas parce qu'un arbitre considère un fait
allégué par une partie comme suffisamment prouvé, sur le vu des éléments de
preuve figurant au dossier de la cause, qu'il devrait nécessairement tirer la
même conclusion au sujet d'un fait allégué par l'autre partie, quand bien même
la preuve de ce fait n'aurait pas été rapportée à son avis.

Le moyen pris de la violation de l'égalité des parties apparaît, dès lors, tout
aussi infondé que le précédent.

5.
Dans un troisième groupe de moyens, la recourante fait grief à l'arbitre unique
d'avoir violé à maints égards son droit d'être entendue en procédure
contradictoire.

5.1 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 182 al. 3 et
190 al. 2 let. d LDIP, n'a en principe pas un contenu différent de celui
consacré en droit constitutionnel (ATF 127 III 576 consid. 2c; 119 II 386
consid. 1b; 117 II 346 consid. 1a p. 347). Ainsi, il a été admis, dans le
domaine de l'arbitrage, que chaque partie avait le droit de s'exprimer sur les
faits essentiels pour le jugement, de présenter son argumentation juridique, de
proposer ses moyens de preuve sur des faits pertinents et de prendre part aux
séances du tribunal arbitral (ATF 127 III 576 consid. 2c; 116 II 639 consid. 4c
p. 643).
S'agissant du droit de faire administrer des preuves, il faut qu'il ait été
exercé en temps utile et selon les règles de forme applicables (ATF 119 II 386
consid. 1b p. 389).

La jurisprudence a également déduit du droit d'être entendu un devoir minimum
pour l'autorité d'examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 126 I 97
consid. 2b). Ce devoir, qui a été étendu à l'arbitrage international (121 III
331 consid. 3b p. 333), est violé lorsque, par inadvertance ou malentendu, le
tribunal arbitral ne prend pas en considération des allégués, arguments,
preuves et offres de preuve présentés par l'une des parties et importants pour
la décision à rendre. Il incombe à la partie soi-disant lésée d'établir, d'une
part, que le tribunal arbitral n'a pas examiné certains éléments de fait, de
preuve ou de droit qu'elle avait régulièrement avancés à l'appui de ses
conclusions et, d'autre part, que ces éléments étaient de nature à influer sur
le sort du litige. Si elle parvient à le faire, ce sera aux arbitres ou à la
partie intimée de justifier cette omission, en démontrant que les éléments omis
n'étaient pas pertinents pour trancher le différend ou, s'ils l'étaient, que le
tribunal arbitral les a implicitement écartés. Cependant, les arbitres n'ont
pas l'obligation de discuter tous les arguments invoqués par les parties, de
sorte qu'il ne peut leur être reproché, au titre de la violation du droit
d'être entendu en procédure contradictoire, de n'avoir pas réfuté, même de
manière implicite, un moyen objectivement dénué de toute pertinence (ATF 133
III 235 consid. 5.2 et les arrêts cités).

5.2 Le premier volet du moyen considéré a trait au droit à la preuve. La
recourante soutient que l'arbitre unique a violé ce droit en rejetant la
requête qu'elle lui avait soumise aux fins d'obtenir l'audition à Milan, par
voie de commission rogatoire et en qualité de témoins, de deux de ses anciens
salariés - V.________ et W.________ - qui avaient été les responsables
principaux du projet mis en oeuvre par le consortium Y.________/X.________.
Avant d'examiner les mérites de cet argument, il y a lieu de rappeler les
circonstances dans lesquelles le rejet de ladite requête est intervenu.
5.2.1 En conformité avec le calendrier prévisionnel révisé du 6 juillet 2007,
la recourante, par courrier du 2 octobre 2007, a adressé, sans autres
explications, divers documents, dont les déclarations écrites des deux témoins
susmentionnés (witness statements) à la CCI, avec copies à l'arbitre unique et
à l'intimée. Lesdites déclarations, formulées à la première personne de
l'indicatif, couvrent trois, respectivement quatre, pages et se terminent par
cette phrase: "I confirm that the facts in this Witness Statement are true".
Suivent l'indication du lieu (Milan) et de la date (2 octobre 2007) de leur
établissement ainsi que le nom, mais pas la signature, de la personne ayant
fait la déclaration.

Par lettre du 31 octobre 2007, l'intimée a demandé à pouvoir interroger les
témoins de la partie adverse (cross-examination).

Le 8 novembre 2007, la recourante a écrit à l'arbitre unique pour lui indiquer
que, selon toute vraisemblance, ses deux témoins ne se présenteraient pas à
l'audience qui devait avoir lieu les 19/20 novembre 2007 à Genève, raison pour
laquelle elle requérait son assistance, en application de l'art. 10 des règles
de procédure spécifiques, afin que les témoins en question puissent être
entendus lors de cette audience.

Le 12 novembre 2007, l'arbitre unique a invité V.________ et W.________ à
comparaître à ladite audience. Ceux-ci lui ont répondu, le 14 du même mois,
qu'ils n'étaient pas en mesure de le faire, qu'ils avaient déjà délivré aux
représentants de la recourante une déclaration écrite et signée à laquelle
référence pouvait être faite et qu'ils se tenaient à disposition pour une
éventuelle clarification.

En date du 15 novembre 2007, l'arbitre unique a tenu une conférence
téléphonique avec les conseils des parties. A cette occasion, l'avocat de la
recourante a indiqué que les deux témoins précités n'avaient pas voulu signer
les witness statements et que l'absence de signature sur chacun de ces
documents n'était donc pas le fruit d'une inadvertance.

Dans une lettre du 16 novembre 2007, l'arbitre unique a résumé le contenu de la
discussion téléphonique de la veille, en faisant notamment état, d'une part, de
la suggestion de l'avocat de la recourante de procéder à l'audition de ses
témoins à Milan par voie de commission rogatoire et, d'autre part, de la
surprise du conseil de l'intimée d'apprendre que ceux-ci avaient refusé de
signer leurs witness statements, lequel conseil en avait déduit l'absence de
déclarations écrite émanant de V.________ et de W.________ et, partant,
l'inadmissibilité d'une audition de ces deux personnes. Après quoi, l'arbitre
unique a décidé de maintenir l'audience du 19 novembre 2007, d'y entendre les
témoins de l'intimée et de statuer ultérieurement sur l'admissibilité de
l'audition des témoins de la recourante.
Conformément à une décision prise à la fin de ladite audience, la recourante et
l'intimée se sont déterminées, respectivement, les 26 et 30 novembre 2007 sur
ce dernier point. La recourante a annexé à son écriture, entre autres pièces,
une déclaration écrite d'une page, datée du 20 septembre 2007 et portant les
signatures de V.________ et de W.________, que ceux-ci avaient établie
conjointement à son intention (pce C-119). Elle a expliqué que la forme et le
contenu de cette déclaration l'avaient dissuadée de la produire comme witness
statement et qu'il avait donc été convenu que son conseil fournirait son
assistance pour l'établissement de witness statements acceptables sur la base
des notes et mémos internes émanant de ces deux personnes et qu'elle les leur
soumettrait pour correction et approbation. La recourante ajoutait que, forte
des assurances reçues de celles-ci, lors d'un entretien téléphonique du 2
octobre 2007, quant au renvoi à bref délai des witness statements approuvés et
signés par les intéressés, elle avait conservé dans son dossier la déclaration
écrite du 20 septembre 2007 et adressé à l'arbitre unique les witness
statements non signés en date du 2 octobre 2007. Toutefois, pour une raison
inconnue et indépendante de sa volonté, les deux témoins avaient refusé de
signer ces witness statements et de participer à l'audience du 19 novembre
2007, ce qui l'avait amenée à requérir le concours de l'arbitre unique.

Le 6 décembre 2007, l'arbitre unique a rendu une ordonnance de procédure n° 2
motivée par laquelle il a rejeté la requête que la recourante lui avait soumise
le 26 novembre 2007. Selon l'arbitre unique, il n'était pas correct, de la part
de la recourante, de produire, le 2 octobre 2007, deux documents intitulés
witness statements et d'attendre le 15 novembre 2007, i.e. quatre jours avant
la tenue de la séance prévue pour l'audition des témoins, pour indiquer que
ceux-ci refusaient de signer ces documents. Ce faisant, la recourante avait
donné l'impression, erronée, que W.________ et V.________ étaient prêts à
coopérer. Elle n'avait pas fait usage de la possibilité, prévue à l'art. 8 des
règles de procédure spécifiques, de solliciter l'assistance de l'arbitre unique
en cas de refus des témoins de coopérer, de sorte qu'elle était déchue du droit
de se prévaloir de cette disposition. En l'absence de circonstances
extraordinaires, au sens de l'art. 10 des règles de procédure spécifiques, ou,
du moins, de circonstances susceptibles d'être invoquées par la recourante,
l'arbitre unique a estimé ne pas pouvoir prendre en considération les witness
statements de W.________ et V.________, dont le témoignage n'était pas
admissible. Il a enfin souligné que l'assistance de l'arbitre unique, prévue à
l'art. 10 al. 3 des règles de procédure spécifiques, pour qu'une partie puisse
faire entendre un témoin qui n'est pas sous son contrôle diffère des mesures
pouvant être prises, en vertu de l'art. 8 de ces mêmes règles, lorsqu'un témoin
refuse de coopérer. En tout état de cause, l'arbitre unique a rappelé qu'il
avait prêté son assistance à la recourante, le 12 novembre 2007, afin d'inviter
les témoins V.________ et W.________ à se présenter à l'audience, et qu'il
l'avait fait avant d'apprendre que les witness statements n'avaient pas été
approuvés par eux.
5.2.2 Pour contester le bien-fondé des motifs énoncés par l'arbitre unique dans
son ordonnance de procédure du 6 décembre 2007, la recourante soutient, en
premier lieu, en se fondant sur les art. 8 et 10 des règles de procédure
spécifiques, que le dépôt de witness statements ne revêtait qu'un caractère
facultatif et accessoire par rapport à l'audition des témoins désignés par les
parties. Dès lors, la production de déclarations non signées ne pouvait
justifier le refus de l'arbitre unique d'entendre les deux témoins italiens,
d'autant moins qu'elle l'avait fait de bonne foi et sous l'empire d'une erreur
quant à la pleine et entière collaboration de ses anciens salariés.

La recourante affirme, par ailleurs, avoir sollicité en temps utile le concours
de l'arbitre unique par l'envoi de sa lettre du 8 novembre 2007, soit onze
jours avant l'audience d'enquêtes. Elle souligne, à cet égard, que le texte
réglementaire est muet au sujet d'un éventuel délai pour requérir l'assistance
de l'arbitre sous peine de forclusion.

Si l'on en croit la recourante, l'argumentation critiquée serait, au demeurant,
contradictoire. En effet, dans son ordonnance de procédure, l'arbitre unique
constate la déchéance du droit de la recourante d'obtenir son soutien, alors
qu'il le lui avait déjà fourni sans réserve auparavant en invitant les deux
témoins à se présenter à son audience par courriers du 12 novembre 2007.

Toujours selon la recourante, il ne serait du reste pas contesté que les deux
témoins n'étaient plus sous son contrôle depuis qu'elle était entrée en
liquidation en 1997. Aussi leur refus de signer les witness statements et de se
déplacer à Genève pour y être interrogés aurait dû conduire l'arbitre unique à
recourir au juge d'appui pour qu'il décernât une commission rogatoire en vue de
l'audition des témoins en Italie.

Soulignant enfin que la pertinence de la preuve testimoniale à administrer n'a
été contestée ni par l'intimée ni par l'arbitre unique, la recourante en
conclut que son droit à la preuve a été violé et qu'il convient, dès lors,
d'annuler la sentence attaquée et de renvoyer la cause à qui de droit afin que
le nécessaire soit fait pour que les témoins puissent être entendus par un juge
milanais.
5.2.3 Quoi qu'en dise la recourante, on ne saurait admettre, dans les
circonstances tout à fait singulières qui caractérisent la présente cause,
telles qu'elles ont été résumées ci-avant, que son droit à la preuve a été
violé.

Le simple énoncé de deux dispositions des règles de procédure spécifiques -
l'art. 8 ainsi que l'art. 10 al. 1 et 3 - et l'allégation du caractère
facultatif du dépôt de witness statements ne suffisent manifestement pas à
établir la prétendue violation de ces dispositions par l'arbitre unique.

La recourante, il est vrai, ne s'appesantit pas sur le comportement qu'elle a
adopté durant cette partie de la procédure probatoire, si ce n'est pour
exclure, sans doute un peu trop vite, l'idée même d'une violation par elle du
principe de la bonne foi, lequel gouverne également le domaine de la procédure
(ATF 123 III 220 consid. 4d p. 238; 111 II 62 consid. 3, 429 consid. 2d p. 438;
107 Ia 206 consid. 3a). Pourtant, il est avéré qu'elle a reçu des témoins
W.________ et V.________ une déclaration datée du 20 septembre 2007 et signée
par eux dont elle n'a révélé l'existence à l'intimée et à l'arbitre unique que
le 26 novembre 2007. Entre-temps, non satisfaite du contenu de cette
déclaration écrite, elle avait rédigé elle-même deux déclarations détaillées,
évidemment favorables à sa thèse, qu'elle avait tenté sans succès de faire
signer par les deux personnes qui étaient censées les avoir faites. Puis elle
les a communiquées sans autres explications à l'arbitre unique et à l'intimée.
Et ce n'est que lors de l'entretien téléphonique du 15 novembre 2007 qu'elle
leur a révélé la raison pour laquelle les witness statements n'avaient pas été
signés par leurs prétendus auteurs. Dans ces conditions, la recourante ne peut
s'en prendre qu'à elle-même si l'arbitre unique a estimé que son droit de faire
entendre les deux personnes susmentionnées était périmé. Elle ne peut, en tout
cas, pas se plaindre d'une violation de son droit à la preuve, étant donné
qu'elle ne l'a pas exercé selon les formes procédurales applicables.

Pour le surplus, la prétendue contradiction relevée par la recourante dans
l'argumentation de l'arbitre unique n'est qu'apparente. En effet, si l'arbitre
unique a refusé, en définitive, de prêter son concours à la recourante, alors
qu'il avait auparavant approché les deux témoins pour les inviter à participer
à l'audience d'enquêtes, c'est parce qu'il avait appris, dans l'intervalle, que
les documents produits par cette partie sous le titre de witness statements
n'avaient pas été approuvés par les intéressés, comme il le relève lui-même au
dernier paragraphe de son ordonnance de procédure du 6 décembre 2007.
5.3
Dans le second volet du même moyen, la recourante fait grief à l'arbitre unique
de n'avoir pas respecté, sur trois points, son devoir minimum de traiter les
problèmes qui lui avaient été soumis.
5.3.1 L'arbitre unique a estimé que la recourante n'avait pas réussi à établir
l'existence d'une seconde retenue, portant sur 590'341 livres égyptiennes, de
sorte que sa prétention relative à ce montant ne pouvait qu'être rejetée. Il
s'en est expliqué aux paragraphes 163 à 169 de sa sentence. Il a souligné, en
particulier, que le montant en question ne figurait pas dans la lettre de
l'intimée du 9 avril 1997, invoquée par la recourante (par. 165) et reproduite
dans la sentence (par. 111). Puis il a indiqué la raison pour laquelle la seule
pièce mentionnant ce montant - une lettre de la recourante du 10 septembre 1997
- ne constituait pas, à ses yeux, un élément de preuve suffisant pour conclure
à l'existence de la retenue litigieuse (par. 166).

Sur le vu du passage cité de la sentence attaquée, il apparaît clairement que
l'arbitre unique a exposé la raison pour laquelle il a considéré que la
recourante n'avait pas réussi à établir que l'intimée avait retenu le montant
précité. Le reproche que lui adresse la recourante de n'avoir pas traité les
arguments qu'elle avait fait valoir au sujet de cette question tombe, dès lors,
à faux.
5.3.2 A son art. 3 let. a, le contrat de consortium accordait un droit de veto
à chaque associé, qui permettait à l'intéressé de s'opposer aux engagements
souscrits à son désavantage et sans son accord préalable par l'autre associé.
La recourante soutient avoir usé de son droit de veto par courriers des 21
novembre 1994 et 30 janvier 1995. Elle reproche à l'arbitre unique de n'avoir
pas examiné sérieusement le moyen qu'elle avait soulevé devant lui de ce chef
et de s'être contenté d'admettre en une seule ligne que le droit de veto était
devenu sans objet après avoir constaté, à la suite d'une application
discriminatoire de la répartition du fardeau de la preuve, qu'elle avait été
associée aux pourparlers conduits par l'intimée avec A.________.

L'argument tiré de la violation du principe de l'égalité des parties dans le
cadre de la répartition du fardeau de la preuve, a déjà été écarté par la Cour
de céans (cf. consid. 4.2.2 ci-dessus). La recourante revient donc en pure
perte sur cette constatation faite au paragraphe 85 de la sentence attaquée.
Sur la base du fait constaté, l'arbitre unique a admis, au paragraphe 175 de sa
sentence, que le droit de veto invoqué par la recourante n'entrait pas en ligne
de compte en l'espèce, étant donné que cette dernière avait été associée aux
négociations menées par l'intimée avec A.________ quant aux modifications
relatives aux commandes de pièces détachées. Il a donc indubitablement traité,
fût-ce de manière elliptique, la question du droit de veto et l'on comprend
sans grand effort, à la lecture du paragraphe topique, que, dans la mesure où
l'exercice de ce droit supposait que l'un des deux associés avait traité avec
un tiers sans en référer à l'autre associé, cette condition n'était pas remplie
en l'occurrence du moment que la recourante avait participé aux pourparlers
conduits par l'intimée avec le maître d'oeuvre égyptien.

Ainsi, l'arbitre unique a satisfait, sur ce point également, à son devoir
minimum de traiter les problèmes pertinents.
5.3.3 La recourante reproche encore à l'arbitre unique de n'avoir pas examiné
les effets de l'absence de signature d'un avenant exigé par le contrat de
consortium pour homologuer une modification de commande entre les parties.

Tel qu'il est présenté, le moyen n'est pas recevable, faute d'une motivation
suffisante. En effet, la recourante n'indique pas où, quand ni de quelle
manière elle a soumis à l'arbitre unique un tel argument spécifique et il
n'appartient pas au Tribunal fédéral de consulter lui-même le dossier de
l'arbitrage pour suppléer à cette omission.
5.3.4 En dernier lieu, la recourante se prévaut de l'art. 2.1 du contrat de
consortium qu'elle interprète en ce sens qu'aucune livraison additionnelle à
titre gratuit ne pouvait être mise à la charge d'un membre du consortium
lorsque celle-ci était provoquée par une information défaillante ou fautive de
l'autre associé. Elle soutient, à cet égard, avoir retranscrit dans le détail
les "aveux complets de Monsieur U.________, qui a reconnu une mauvaise
appréciation de la situation par Y.________ sur ce poste spécifique de
l'élaboration de l'offre". Or, à l'en croire, l'admission de cette négligence
fautive de l'intimée a été entièrement passée sous silence par l'arbitre
unique, qui a retenu par inadvertance l'absence d'un allégué spécifique ou
d'une preuve quelconque à ce sujet, alors qu'il s'agissait d'une circonstance
décisive pour trancher la question de savoir si la recourante devait livrer
gratuitement ou non les pièces de rechange supplémentaires.

L'argument relatif à l'information défaillante imputée à l'intimée a été
expressément écarté par l'arbitre unique au paragraphe 190 de la sentence
attaquée, que la recourante cite d'ailleurs dans son mémoire. Aussi l'arbitre
unique ne peut-il pas se voir reprocher d'avoir omis de le traiter. Qu'il l'ait
écarté de manière insoutenable, aux dires de la recourante, en raison d'une
prétendue inadvertance de sa part, est une autre question, exorbitante du grief
considéré.

5.4 Sur le vu des explications qui précèdent, le moyen pris de la violation du
droit d'être entendu ne résiste donc pas à l'examen.

6.
6.1 Dans un ultime grief, la recourante soutient que la sentence attaquée viole
l'ordre public (art. 190 al. 2 let. e LDIP) en raison des graves manquements
dans l'instruction de la cause imputables à l'arbitre unique et commis
systématiquement à son désavantage. Elle fait valoir, en outre, que la sentence
attaquée, rendue à l'issue d'un procès inéquitable, aboutit à un résultat
choquant puisqu'elle l'oblige à prendre en charge l'intégralité des frais d'une
commande supplémentaire passée unilatéralement par l'intimée au mépris de son
obligation de diligence et de fidélité et à la suite d'une négligence coupable
dans l'élaboration de l'offre correspondante.
6.2
6.2.1 Une sentence est incompatible avec l'ordre public si elle méconnaît les
valeurs essentielles et largement reconnues qui, selon les conceptions
prévalant en Suisse, devraient constituer le fondement de tout ordre juridique
(ATF 132 III 389 consid. 2.2.3). On distingue un ordre public matériel et un
ordre public procédural. Dans sa jurisprudence la plus récente, le Tribunal
fédéral a donné de cette double notion la définition rappelée ci-après (même
arrêt, consid. 2.2.1).

L'ordre public procédural garantit aux parties le droit à un jugement
indépendant sur les conclusions et l'état de fait soumis au Tribunal arbitral
d'une manière conforme au droit de procédure applicable; il y a violation de
l'ordre public procédural lorsque des principes fondamentaux et généralement
reconnus ont été violés, ce qui conduit à une contradiction insupportable avec
le sentiment de la justice, de telle sorte que la décision apparaît
incompatible avec les valeurs reconnues dans un Etat de droit.

Une sentence est contraire à l'ordre public matériel lorsqu'elle viole des
principes fondamentaux du droit de fond au point de ne plus être conciliable
avec l'ordre juridique et le système de valeurs déterminants; au nombre de ces
principes figurent, notamment, la fidélité contractuelle, le respect des règles
de la bonne foi, l'interdiction de l'abus de droit, la prohibition des mesures
discriminatoires ou spoliatrices, ainsi que la protection des personnes
civilement incapables.
6.2.2 Au regard de ces principes, le grief formulé par la recourante apparaît
sinon irrecevable, en tous les cas dénué de fondement.

Pour ce qui est de l'ordre public procédural, la recourante se contente, en
effet, de rappeler un certain nombre de principes cardinaux, tel le droit à un
procès équitable, et de soutenir qu'elle a dû déplorer leur violation à maintes
reprises. Dans ce contexte, elle n'avance aucun argument concret qui se
distinguerait de ceux qu'elle a présentés sans succès dans les précédents
chapitres de son acte de recours.

Sur le fond, enfin, la recourante ne fait que reprendre sa thèse, que l'arbitre
unique n'a pas retenue, pour en déduire que la sentence entreprise aboutit à un
résultat choquant. Il va sans dire que cette manière d'argumenter est
totalement impropre à démontrer la violation de l'ordre public matériel que la
recourante allègue implicitement.

7.
Cela étant, le présent recours ne peut qu'être rejeté dans la mesure de sa
recevabilité. Par voie de conséquence, son auteur devra payer les frais
judiciaires y afférents (art. 66 al. 1 LTF) et indemniser sa partie adverse
(art. 68 al. 2 LTF ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 8'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 9'000 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à l'arbitre
unique CCI.

Lausanne, le 19 février 2009

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:

Klett Carruzzo