Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.464/2008
Zurück zum Index I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2008
Retour à l'indice I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_464/2008/ech

Arrêt du 22 décembre 2008
Ire Cour de droit civil

Composition
MM. et Mme les Juges Corboz, président, Klett et Pagan, juge suppléant.
Greffier: M. Carruzzo.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Philippe Schweizer,

contre

Y.________,
intimé, représenté par Me Aurélie Planas.

Objet
responsabilité du mandataire,

recours en matière civile contre le jugement rendu le
16 juin 2008 par la Ie Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Faits:

A.
A.a H.Z.________, né le 4 février 1908, et F.Z.________, née le 29 août 1908,
se sont mariés le 11 juin 1937. De leur union sont issus deux fils:
A.Z.________, né le 25 mars 1938, et B.Z.________, né le 8 décembre 1942.
F.Z.________ est décédée le 8 septembre 1992.

Par déclaration du 25 novembre 1992 faite devant l'Officier d'état civil de
Neuchâtel, H.Z.________ a reconnu Y.________ comme étant son fils, ce dernier
ayant obtenu, en date du 4 novembre 1991, un jugement de désaveu de paternité à
l'encontre de celui qui était son père sur le plan juridique.

H.Z.________ est décédé le 16 septembre 1994. Le 26 septembre 1994, une copie
du testament olographe confectionné par le défunt le 13 juin 1993 a été
notifiée à Y.________.

L'une des clauses de ce testament énonce ce qui suit:

"Certains ont cherché à me soutirer de l'argent en me rendant responsable de la
naissance de Y.________. Ma paternité sur celui-ci n'a jamais été établie
scientifiquement. Y.________ ne sera pas mon héritier et ne sera pas appelé à
ma succession."

L'actif total de la succession de feu H.Z.________ se montait à 696'000 fr. et
la réserve légale de Y.________ atteignait ainsi 174'000 fr.
A.b Le 24 octobre 1994, Y.________, représenté par Me X.________, avocat à ...,
a interpellé l'exécuteur testamentaire désigné par feu H.Z.________, faisant
part de son vif souhait d'une liquidation de la succession dans des conditions
dignes et correctes. Une solution transactionnelle ne semblant pas exclue, il
en est résulté en 1995 un échange de courriers entre Me X.________ et
l'exécuteur testamentaire.

Le 15 novembre 1995, soit après la confection de l'inventaire fiscal de la
succession établi et transmis par l'Office des droits de mutation et du timbre
à l'exécuteur testamentaire, ce dernier a indiqué aux deux fils du défunt et à
Me X.________ qu'il devait leur soumettre une convention de partage, en leur
rappelant qu'il avait été également question que les deux frères Z.________
négocient avec Y.________ l'octroi à ce dernier d'une indemnité pour solde de
tout compte.

A la suite de cette communication, un échange de lettres a repris entre Me
X.________ et l'exécuteur testamentaire au sujet de la nature et de l'étendue
de la participation financière de Y.________ dans la succession de feu son
père.

Le 25 janvier 1996, l'exécuteur testamentaire a fait savoir à Me X.________, au
nom de A.Z.________, qu'une action en nullité de testament se prescrivait par
un an et qu'en l'absence d'une procédure entreprise en temps utile, Y.________
devait renoncer à tout droit dans la succession pour se conformer aux dernières
volontés du défunt.

Par courrier du 2 février 1996, Me X.________ a protesté contre cette manière
de voir, se référant à un délai de prescription de trente ans en présence d'un
défendeur de mauvaise foi.
A.c Après avoir changé d'avocat, Y.________ a intenté, le 28 mars 1996, à
l'encontre des frères Z.________ une action en annulation d'une clause
d'exhérédation.

Le 6 juillet 1998, la IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton de
Neuchâtel a rejeté la demande et condamné Y.________ à payer 6'675 fr. de frais
judiciaires et 8'000 fr. de dépens.

En substance, il a été retenu que l'action était irrecevable dans la mesure où
elle n'était dirigée que contre A.Z.________ et B.Z.________, sans englober les
filles de Y.________, devenues héritières de la part de leur père exhérédé dans
la succession de feu H.Z.________. En outre, la demande devait être rejetée
pour cause de tardiveté tant du point de vue successoral que sous l'angle d'une
responsabilité des défendeurs pour la confiance créée, une mauvaise foi de la
part des frères Z.________ ne pouvant être retenue.

Sur ce dernier plan, il a été relevé que, dès le début des pourparlers,
Y.________ s'était fait assister par un mandataire professionnel auquel le
délai de péremption d'un an de l'action en nullité ou en réduction n'aurait pas
dû échapper. Le fait que les discussions étaient menées par l'exécuteur
testamentaire n'était pas déterminant, celui-ci n'étant pas le représentant des
héritiers et conservant, par rapport à eux, une position indépendante. Ainsi,
les déclarations de l'exécuteur testamentaire ne pouvaient sans autre être
opposées aux deux frères Z.________ pour qu'il en soit déduit qu'ils auraient
soudainement fait volte face. Au contraire, Y.________, qui avait eu des
contacts directs avec les deux héritiers dans les premiers mois ayant suivi le
décès de H.Z.________, ne pouvait qu'être conscient du fait que l'un d'eux en
tout cas était plus que réticent à l'idée que son demi-frère puisse percevoir
une part d'héritage. Dans ces conditions, la simple possibilité d'entamer des
pourparlers ou de les poursuivre ne donnait aucune garantie à Y.________ que
ceux-ci aboutiraient. Ainsi, même à supposer que le principe d'un
désintéressement de l'exhérédé eût été acquis, la seule façon de sauvegarder
ses droits, au cas où un accord n'interviendrait pas quant au montant, était
d'intenter action en temps utile, ce d'autant que l'instruction de la cause
aurait pu être suspendue pendant les négociations et qu'il n'était pas
nécessaire de présenter des conclusions chiffrées. Sur le vu de cet état de
choses, le dépôt d'une action en justice ne pouvait paraître superflu.

B.
B.a Le 30 avril 2004, Y.________ a intenté une action en dommages-intérêts
contre X.________ en vue d'obtenir le paiement de 233'051 fr. 40 au titre de sa
part successorale dans la succession de feu H.Z.________, de 14'675 fr. pour
les frais et dépens encourus dans la procédure en annulation d'exhérédation et
de 15'065 fr. du chef des honoraires versés à l'avocat mandaté pour cette
procédure.

Le défendeur a conclu au rejet de la demande, faisant notamment valoir que le
demandeur avait toujours exprimé la volonté de négocier directement avec ses
demi-frères, ne lui demandant que des conseils et non pas une intervention à
titre de mandataire judiciaire. En outre, le demandeur, après le dépôt de sa
demande en annulation d'exhérédation, avait attendu plus d'une année avant de
mettre en cause la responsabilité des frères Z.________ pour l'avoir incité à
persister dans des négociations jusqu'à l'échéance du délai de péremption
institué par le Code civil dans ce domaine successoral. Enfin, il n'y avait pas
de relation de causalité entre le comportement fautif qui lui était imputé et
le dommage invoqué.

Dans ses dernières conclusions, le demandeur a réduit ses prétentions à 203'740
fr. après avoir ramené la principale d'entre elles à 174'000 fr., montant de sa
réserve légale dans la succession de feu son père.
B.b Par jugement du 16 juin 2008, la le Cour civile du Tribunal cantonal
neuchâtelois a condamné le défendeur à verser au demandeur la somme de 203'740
fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 30 avril 2004. Les frais et dépens ont été
mis à la charge du défendeur. Ledit jugement repose sur les motifs résumés
ci-après.
B.b.a Les relations juridiques nouées par les parties relèvent du mandat, de
sorte que la responsabilité du défendeur découle de l'art. 398 al. 2 CO et
résulte d'une violation du devoir de diligence du mandataire.

Pour contester la validité d'une exhérédation, l'héritier dispose de deux voies
de droit, en fonction du vice invoqué: l'action en nullité de dispositions pour
cause de mort (art. 519 CC) et l'action en réduction fondée sur l'art. 522 CC,
l'exhérédation lésant sa réserve successorale. Ces deux actions sont soumises à
un délai relatif de péremption d'un an.

En l'espèce, la responsabilité du défendeur est engagée. L'ancien mandataire du
demandeur a, en effet, confondu les délais relatif et absolu de péremption
applicables à l'action en nullité d'un testament, raison pour laquelle il n'a
pas agi dans le délai d'un an prescrit par l'art. 521 al. 1 CC, partant à tort
de l'idée qu'il disposait d'un délai de trente ans en présence d'un défendeur
de mauvaise foi. En dépit de l'existence de pourparlers entre les héritiers, il
lui incombait de procéder en justice en temps utile afin que les droits de son
client fussent préservés, ce qui n'empêchait pas une suspension de
l'instruction de la cause durant les négociations en cours. Par rapport à cette
réalité, le souhait, manifesté par son mandant, d'éviter une procédure
judiciaire était dépourvu d'incidence, car l'intéressé pensait erronément
qu'une action en justice était encore possible malgré l'écoulement d'une année.
Ainsi, le défendeur a violé son devoir de diligence en sa qualité de
mandataire, ce d'autant qu'il n'était pas nécessaire de procéder à une étude
approfondie de la question, la seule consultation du Code civil annoté par les
auteurs Scyboz et Gilliéron (édition de 1993) lui permettant de se faire une
idée exacte de la situation juridique. Dès lors, une faute imputable au
défendeur doit être admise.

Cela étant, sur le vu des faits de la cause, il n'y avait pas matière à
exhérédation, en ce sens que le demandeur n'avait pas agi par appât du gain,
mais dans le désir de mettre un terme à une crise d'identité en faisant la
lumière sur sa filiation paternelle. Aussi le demandeur aurait-il gagné son
procès s'il avait agi en temps utile contre ses deux demi-frères.
Le comportement de ces derniers n'était pas constitutif d'un abus de droit, si
bien que rien ne les empêchait d'invoquer la péremption et qu'il était exclu de
mettre une éventuelle culpa in contrahendo à leur charge.
B.b.b Il n'y a pas eu de rupture du lien de causalité entre la violation
fautive de son devoir de diligence commise par le défendeur et le dommage subi
par le demandeur à la suite de l'échec de la première procédure intentée le 28
mars 1996 par ce dernier et son nouvel avocat. En effet, ce nouveau mandataire
n'a été consulté qu'à partir du 5 février 1996, soit après l'omission fautive
du défendeur de procéder en justice à temps en vue de sauvegarder les droits du
demandeur.
B.b.c Si le défendeur avait procédé à temps, la fortune de son client aurait
été augmentée de 174'000 fr. Ainsi, son avocat lui a causé un préjudice à
concurrence de ce montant, le fait que les deux filles du demandeur se sont
substituées à lui dans la succession de feu H.Z.________ étant dépourvu
d'incidence.

Les dépens et honoraires d'avocat assumés par le demandeur à la suite du
jugement rendu le 6 juillet 1998 ne découlent pas directement de l'inaction
fautive du défendeur, mais sont dus à une procédure entreprise par le nouveau
conseil du lésé. En matière de responsabilité civile des avocats, la preuve
d'un dommage est difficile à rapporter, le client lésé devant démontrer que, si
son avocat avait agi avec diligence, il aurait obtenu gain de cause et n'aurait
pas subi de ce fait une diminution de son patrimoine par une perte éprouvée
(dépens et frais judiciaires) ou par un gain manqué. Dans le cas particulier,
le demandeur était profondément convaincu qu'une action en contestation de la
validité de l'exhérédation pouvait être intentée, nonobstant l'expiration du
délai d'une année, du fait de la mauvaise foi ou de l'abus de droit
prétendument imputable à ses deux demi-frères, ce qu'il soutenait encore devant
la IIe Cour civile en date du 18 février 1997. Malgré l'absence d'un
comportement abusif ou contraire à la bonne foi de ces deux héritiers, le
défendeur conteste l'existence d'une relation de causalité entre son propre
comportement fautif et le dommage subi par son ancien client, au motif que
l'issue défavorable de la première procédure serait due à l'oubli du nouveau
conseil du demandeur de réclamer à temps des dommages-intérêts fondés sur une
culpa in contrahendo. Dans ces conditions, il était nécessaire que le demandeur
intentât une action, même tardive, afin de contester la validité de son
exhérédation pour qu'il ne puisse pas lui être reproché qu'il lui aurait été
possible d'obtenir la reconnaissance de ses droits. Ce n'est que par cette
première procédure que l'intéressé a pu établir sans le moindre doute que la
faute de son ancien conseil était exclusivement à l'origine de la perte de ses
droits successoraux. Il y a donc bien un rapport de causalité adéquate entre la
violation fautive du devoir de diligence incombant au défendeur et les 29'740
fr. que le demandeur a dû supporter au titre des frais, dépens et honoraires au
terme du premier procès.

En conséquence, le dommage subi par le demandeur s'élève à 203'740 fr. en
capital. S'y ajoutent les intérêts réclamés à partir du dépôt de la demande.
Quant aux frais et dépens, ils seront mis à la charge du défendeur.

C.
Agissant par la voie du recours en matière civile, le défendeur invite le
Tribunal fédéral à réformer le chiffre 1 du dispositif de la décision attaquée,
en ce sens qu'il doit être reconnu débiteur du demandeur de 174'000 fr. avec
intérêts à 5 % l'an dès le 30 avril 2004, et à annuler ladite décision pour le
surplus.

L'intimé conclut au rejet du recours. Quant à la cour cantonale, elle se réfère
aux motifs énoncés dans son jugement.

Considérant en droit:

1.
Le jugement attaqué a été rendu dans une cause pécuniaire en matière civile
portant sur une valeur litigieuse - calculée d'après les conclusions restées
litigieuses devant l'autorité précédente (art. 51 al. 1 let. a LTF), i.e.
203'740 fr. - bien supérieure au seuil fixé à l'art. 74 al. 1 let. b LTF pour
la recevabilité du recours en matière civile. Emanant de la partie qui a
succombé dans ses conclusions libératoires et dirigé contre une décision finale
(art. 90 LTF) rendue par un tribunal supérieur (art. 75 LTF), le recours en
matière civile est en principe recevable, puisqu'il a été interjeté en temps
utile (art. 100 al. 1 LTF), compte tenu de la suspension du délai durant les
féries d'été (art. 46 al. 1 let. b LTF), et dans les formes requises (art. 42
LTF).

2.
2.1 Le recourant avait soutenu, devant les premiers juges, qu'un événement
dommageable peut procurer simultanément un avantage au lésé. Ainsi en allait-il
en l'espèce, selon lui, dès lors que, du fait de l'exhérédation de leur père,
les deux filles de l'intimé avaient touché le montant de sa réserve
successorale, soit 174'000 fr., montant dont les revenus pouvaient être
affectés à leur entretien, conformément à l'art. 319 CC, ce qui réduisait
d'autant la charge financière grevant le patrimoine de l'intimé. De l'avis du
recourant, la cour cantonale, tenue qu'elle était d'appliquer le droit
d'office, aurait dû examiner cette question de son propre chef. En lui imposant
des allégations et des preuves au demeurant non précisées, elle aurait violé la
disposition citée, ainsi que l'art. 95 let. a LTF et l'art. 44 CO.

2.2 Comme le présent recours ne porte pas sur l'allocation à l'intimé de la
somme de 174'000 fr., ce point n'étant plus litigieux devant le Tribunal
fédéral, le recourant n'a pas d'intérêt juridique à la modification de la
décision déférée, sa seule participation à la procédure cantonale comme partie
défenderesse n'étant ainsi pas suffisante. En effet, entrer en matière sur ce
grief reviendrait à admettre la recevabilité d'un recours portant sur les seuls
motifs, ce qui n'est pas admissible (ATF 129 III 320 consid. 5.1 p. 323 et les
arrêts cités).

3.
3.1 Le recourant reproche aux premiers juges de l'avoir condamné à payer la
somme de 29'740 fr. comprenant les dépens et honoraires d'avocat assumés par
l'intimé dans la procédure ayant opposé ce dernier à ses deux demi-frères.
Selon lui, cette procédure ne servait à rien et était d'autant plus inutile
qu'elle n'avait pas pour objet sa responsabilité. De manière évidente, elle
avait été ouverte tardivement et contre des personnes qui n'avaient pas qualité
pour défendre. En outre, l'intimé avait attendu plus d'une année avant de
convertir sa demande successorale en une action fondée sur une culpa in
contrahendo. Toutes les preuves administrées au cours de cette première
procédure inutile auraient pu l'être dans le cadre de la procédure en
responsabilité du mandataire intentée après coup.

Ce faisant, les juges précédents seraient tombés dans l'arbitraire et auraient
violé les art. 97 al. 1, 99 al. 3, 41 et 44 CO, de l'avis du recourant, pour
avoir mis à sa charge des frais inutilement engagés, qui avaient augmenté le
dommage à réparer par lui.

3.2 La cour cantonale retient, à bon droit, que la responsabilité contractuelle
du recourant, lié à l'intimé par un contrat de mandat (art. 394 ss CO), découle
de l'art. 398 CO, le mandataire ayant omis d'intenter action en temps utile
pour le compte de son client (cf. arrêt 4C.449/2004 du 9 mars 2005 consid. 2).
3.3
3.3.1 La question présentement litigieuse a trait à la causalité entre
l'omission fautive imputable au recourant et le dommage subi par l'intimé qui a
dû assumer les frais, dépens et honoraires d'une procédure introduite
tardivement par lui du fait de la violation du mandat qu'il avait confié au
recourant.

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, il y a lieu de distinguer
entre la causalité naturelle et la causalité adéquate même si la violation
d'une obligation contractuelle est imputable à une omission. Toutefois, pour
retenir une causalité naturelle en cas d'omission, il faut admettre par
hypothèse que le dommage ne serait pas survenu si l'intéressé avait agi
conformément à la loi ou au contrat. Un lien de causalité naturelle ne sera
donc pas nécessairement prouvé avec une exactitude scientifique. Le rapport de
causalité étant hypothétique, le juge se fonde sur l'expérience générale de la
vie et émet un jugement de valeur. En règle générale, lorsque le lien de
causalité hypothétique entre l'omission et le dommage est établi, il ne se
justifie pas de soumettre cette constatation à un nouvel examen sur la nature
adéquate de la causalité. Ainsi, lorsqu'il s'agit de rechercher l'existence
d'un lien de causalité entre une ou des omissions et un dommage, il convient de
s'interroger sur le cours hypothétique des événements. Dans ce cas de figure,
le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en matière civile, est lié, selon
l'art. 105 al. 1 LTF, par les constatations cantonales concernant la causalité
naturelle, dès lors qu'elles ne reposent pas exclusivement sur l'expérience de
la vie, mais sur des faits ressortant de l'appréciation des preuves. Viole, en
revanche, le droit fédéral le juge qui ignore l'exigence de la causalité
naturelle ou méconnaît cette notion juridique (arrêt précité, consid. 4.1 et
les références).
3.3.2
3.3.2.1 Le délai d'un an pour intenter une action en nullité des dispositions
pour cause de mort court dès la connaissance de la disposition incriminée et de
la cause de nullité (art. 521 al. 1 CC). Le délai d'un an applicable à l'action
en réduction s'écoule à partir du moment où l'héritier connaît la lésion de sa
réserve (art. 533 al. 1 CC). Il s'agit de délais de péremption ou de déchéance
(ATF 98 II 176 consid. 10 p. 178 à 181).

Ainsi, d'après l'état de fait du jugement attaqué, le délai pour intenter l'une
ou l'autre de ces deux actions est arrivé à échéance le 26 septembre 1995,
l'intimé ayant pris connaissance de la perte de ses droits lors de la
communication du testament de son père défunt. Il en découle que le recourant
n'a pas procédé judiciairement dans un tel laps de temps, ce qui a entraîné la
forclusion des droits de son client.

Sur le vu des constatations de l'autorité cantonale, il est établi et non
contesté que, si le recourant avait ouvert action en temps utile pour le compte
de son mandant, afin de contester la validité de la clause d'exhérédation de ce
dernier, l'intimé aurait obtenu gain de cause et n'aurait pas été privé de sa
réserve légale dans la succession de feu son père à concurrence de 174'000 fr.

Un rapport de causalité hypothétique, au sens de la jurisprudence précitée,
entre l'omission d'agir en temps utile et le préjudice est donc constant.
3.3.2.2 En revanche, sur le point encore litigieux, il faut d'abord remarquer
que les frais que l'intimé a encourus pour avoir intenté une première action
contre les deux héritiers de feu son père ne sont en rien imputables au
recourant, mais résultent exclusivement d'une décision unilatérale prise par
l'intimé et son nouveau conseil. Ceux-ci ont, de la sorte, pris de leur propre
chef le risque d'ouvrir action, nonobstant l'expiration du délai légal pour
procéder, et la décision déférée ne renferme pas de constatations permettant de
dire que le recourant y aurait été associé d'une façon ou d'une autre. Il n'est
donc pas possible d'affirmer que l'omission imputée au recourant serait dans un
rapport de causalité hypothétique avec ce poste du dommage.

En d'autres termes, comme le recourant l'a soutenu avec raison, il aurait suffi
à l'intimé d'ouvrir une seule action en responsabilité à l'encontre de son
ancien mandataire. L'instruction de celle-ci aurait alors permis d'aboutir aux
mêmes conclusions que celles auxquelles est parvenue la IIe Cour civile du
Tribunal cantonal neuchâtelois, ce d'autant qu'il était manifeste qu'une
exhérédation était dépourvue de tout fondement dans le cas particulier au
regard des motifs mêmes du testament confectionné le 13 juin 1993 par
H.Z.________, les seuls motifs qui peuvent être pris en considération selon
l'art. 479 al. 1 CC. En effet, une telle mesure n'est possible, en vertu de
l'art. 477 CC, que lorsque l'héritier réservataire a commis une infraction
pénale grave contre le défunt ou l'un de ses proches (ch. 1) ou qu'il a
gravement failli aux devoirs que la loi lui impose envers le défunt ou sa
famille (ch. 2). Or, aucune de ces deux hypothèses n'est réalisée en l'espèce
sur le vu de la clause topique du testament, en l'absence de tout comportement
fautif imputé à l'intimé, ce que le recourant ne conteste d'ailleurs pas.

Ainsi, contrairement à l'avis de l'autorité cantonale, l'intimé était
parfaitement fondé à procéder directement à l'encontre du recourant sans
actionner préalablement ses demi-frères, étant donné que le mandant lésé, qui
agit en responsabilité contre son avocat, est habilité à prouver que, si son
ancien conseil avait respecté son devoir de diligence, le dommage ne se serait
pas produit (ATF 87 II 364 consid. 2).

3.4 Il est vrai que, si, par hypothèse, l'intimé avait obtenu gain de cause
dans la procédure judiciaire intentée contre ses demi-frères, l'omission
reprochée au recourant n'aurait pas eu de conséquences dommageables aussi
importantes. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que seules sont opposables
au lésé, s'agissant du devoir d'éviter la survenance du dommage ou d'en réduire
l'importance, les mesures pouvant être raisonnablement et objectivement exigées
de lui (ATF 132 III 359 consid. 4.3 p. 368). Par conséquent, il faut examiner
si l'intimé était fondé à intenter d'abord action à ses demi-frères.

Les délais pour intenter une action en nullité d'une disposition pour cause de
mort ou une action en réduction sont des délais de péremption, soit de
déchéance (cf. consid. 3.3.2.1 ci-dessus). Savoir si l'abus de droit (art. 2
al. 2 CC) peut être opposé à celui qui se prévaut de l'expiration d'un délai de
péremption est une question controversée (ATF 108 II 233 consid. 5b p. 239).
Quoi qu'il en soit, il découle clairement des faits constatés que la première
procédure ouverte par l'intimé à l'encontre de ses demi-frères était pour le
moins aléatoire dans la mesure où le recourant n'avait été en rien dissuadé
d'intenter action en vue de sauvegarder les droits de son client. En effet, il
n'a pas été retenu que les demi-frères de l'intimé auraient détourné celui-ci
d'agir dans le délai légal ou qu'ils auraient adopté une attitude susceptible
de l'engager à ne pas procéder en temps utile. Par rapport à ces deux autres
héritiers, le recourant était le représentant ou l'auxiliaire de l'intimé en
vertu du mandat que ce dernier lui avait confié. Dès lors, l'omission du
recourant était opposable à l'intimé. Du moment que le respect des délais de
péremption et de prescription constitue une des règles élémentaires de la
profession d'avocat, le sort d'une cause dépendant au premier chef de la
question de savoir si l'action est périmée ou la créance prescrite (arrêt C.413
/1982 du 26 avril 1983 consid. 1, in SJ 1984 p. 204), on ne voit pas comment
l'inaction fautive du recourant aurait pu légitimer l'intimé à intenter action
contre ses deux demi-frères en dépit de l'expiration des délais de péremption,
alors que cet état de choses était en définitive imputable à l'exhérédé par le
fait de son conseil.

En conséquence, l'intimé ne saurait prétendre qu'il pouvait être
raisonnablement et objectivement exigé de lui qu'il intentât une action tardive
à l'encontre de ses demi-frères. Le faire ne constituait donc pas une mesure
adéquate, de nature à diminuer le dommage qu'il avait subi à la suite de
l'omission de son avocat d'ouvrir action en temps utile.

3.5 En conclusion, la somme de 29'740 fr., représentant les frais, dépens et
honoraires provoqués par la procédure que l'intimé avait conduite inutilement
contre ses demi-frères, n'aurait pas dû être mise à la charge du recourant. En
le faisant néanmoins, la cour cantonale a donc violé le droit fédéral. Le
présent recours doit donc être admis et le jugement attaqué réformé en ce sens
que la somme en question sera déduite du montant alloué à l'intimé. Pour le
surplus, il y a lieu d'annuler le dispositif de ce jugement et de renvoyer la
cause aux premiers juges afin qu'ils statuent à nouveau sur les frais et dépens
de la procédure cantonale.

4.
L'intimé, qui succombe, supportera les frais et dépens liés à la procédure
fédérale (art. 66 al. 1 et 68 al. 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis et le chiffre 1 du dispositif du jugement attaqué est
réformé en ce sens que le défendeur est condamné à verser au demandeur la somme
de 174'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 30 avril 2004.

2.
Les chiffres 2 et 3 du dispositif du jugement attaqué sont annulés et la cause
est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens
de la procédure cantonale.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.

4.
L'intimé versera au recourant une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Ie Cour
civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 22 décembre 2008

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Corboz Carruzzo