Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.361/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_361/2008/ech

Arrêt du 26 septembre 2008
Ire Cour de droit civil

Composition
MM. et Mme les Juges Corboz, président, Klett et Kolly.
Greffier: M. Carruzzo.

Parties
X.________,
recourante, représentée par Me Manuel Bolivar,

contre

Y.________, Compagnie d'Assurances sur la Vie,
intimée, représentée par Me Jacques Berta.

Objet
contrat de bail; résiliation,

recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 16 juin 2008 par la Chambre
d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève.

Faits:

A.
A.a X.________ loue, depuis le 18 juin 1980, un appartement de cinq pièces au
rez-de-chaussée d'un immeuble sis à Genève, dont Y.________, Compagnie
d'Assurances sur la Vie (ci-après: Y.________) est propriétaire. Le bail, qui
liait son mari, à l'ancien propriétaire de l'immeuble dès août 1975, lui a été
transféré à la date précitée à la suite de la séparation du couple. Conclu
initialement pour une année, il se renouvelle d'année en année, sauf avis donné
trois mois avant son échéance. Le dernier loyer mensuel se montait à 1'029 fr.,
charges non comprises.
A.b En septembre 2005, X.________ s'est plainte de diverses nuisances entravant
l'usage de l'appartement et a indiqué qu'elle consignait les loyers jusqu'à ce
qu'une solution équitable pour la vie quotidienne lui soit proposée. Cependant,
le 8 février 2006, par devant la Commission de conciliation en matière de baux
et loyers du canton de Genève, elle a accepté de déconsigner la totalité des
loyers en faveur de la bailleresse tout en maintenant sa demande d'exécution
des travaux. La procédure que la locataire a introduite à cette fin est
pendante devant le Tribunal des baux et loyers. Les différents habitants de
l'immeuble qui ont été entendus dans le cadre de cette procédure ont qualifié
l'isolation de celui-ci de perfectible, bien qu'elle soit usuelle et ne génère
pas de bruits dont ils auraient à souffrir.

Le 16 janvier 2007, X.________ a sollicité la réalisation de divers travaux
(réfection du sol du hall, pose de catelles supplémentaires dans la salle de
bains, etc.) et fait état de la nécessité d'insonoriser l'appartement dans une
année. Parallèlement à la poursuite de la procédure précitée, les parties ont
entamé des discussions. Le 7 février 2007, Y.________ s'est déclarée d'accord
de faire exécuter ces travaux selon deux modalités possibles entre lesquelles
la locataire devait choisir. Cette dernière s'est déterminée le 2 mai 2007,
acceptant la réalisation des travaux en deux étapes, la première durant ladite
année, la seconde en 2008.
A.c Le 29 mars 2007, X.________ a consigné le loyer du mois d'avril 2007. Le 30
avril 2007, son avocat de l'époque lui a indiqué que la consignation opérée
n'était pas valable et pouvait entraîner la résiliation du bail. Sur quoi, le
14 mai 2007, la locataire a sollicité la déconsignation des loyers d'avril et
mai 2007 et leur versement à la bailleresse.
A.d Le 5 avril 2007, le conseil de Y.________ s'est adressé au mandataire de la
locataire pour mettre celle-ci en demeure de verser le loyer d'avril 2007,
ainsi que les charges, dans un délai de 30 jours, sous peine de résiliation du
bail en application de l'art. 257d CO. Le mandataire de la locataire a reçu cet
avis comminatoire le 10 du même mois.

Cette mise en demeure n'ayant pas eu d'effet, le conseil de Y.________ a envoyé
à celui de X.________, le 22 mai 2007, un avis de résiliation du bail pour le
30 juin 2007.

Le loyer d'avril 2007 a été versé le 14 mai 2007 sur le compte bancaire du
conseil de la bailleresse.
A.e Sa requête en exécution de travaux déposée le 28 mars 2007 ayant été
déclarée non conciliée le 5 novembre 2007, X.________ a saisi le Tribunal des
baux et loyers d'une requête en exécution de divers travaux et en réduction de
son loyer de 10% à compter du 1er novembre 2006.

B.
B.a Par requête du 22 juin 2007, X.________ a contesté le congé qui lui avait
été notifié. De son côté, Y.________ a déposé, le 9 juillet 2007, une requête
en évacuation pour défaut de paiement du loyer. Non conciliées, les causes
relatives à ces deux requêtes ont été soumises au Tribunal des baux et loyers
qui en a ordonné la jonction.

Statuant par jugement du 15 janvier 2008, le Tribunal saisi a constaté la
validité de l'avis de résiliation notifié à la locataire le 22 mai 2007 pour le
30 juin 2007 et il a condamné celle-ci à évacuer immédiatement l'appartement en
question.
B.b Par arrêt du 16 juin 2008, la Chambre d'appel en matière de baux et loyers
du canton de Genève a rejeté l'appel interjeté par X.________ contre le
jugement de première instance. Cet arrêt repose sur les motifs résumés
ci-après.

La fixation d'un délai pour la réparation du défaut et la menace écrite
préalable de consignation du loyer, si le défaut n'est pas réparé, constituent
des conditions impératives de validité de la consignation (art. 259g al. 1 CO).
En l'espèce, la bailleresse était disposée, aussi bien en mars qu'en avril
2007, à faire exécuter les travaux sollicités dans l'immédiat par la locataire,
celle-ci devant choisir entre les deux modalités possibles qui lui avaient été
proposées. Quant à l'isolation réclamée, il n'est déjà pas établi qu'elle ait
été défectueuse; de surcroît, elle n'avait été requise que pour 2008. N'ayant
pas opéré le choix qu'elle avait à faire et ne pouvant pas exiger l'exécution
immédiate d'éventuels travaux d'isolation, la locataire ne pouvait pas se
passer de la fixation d'un délai ni de l'avertissement préalable, dès lors que
l'inutilité de telles démarches n'apparaissait nullement évidente dans ces
circonstances. La consignation opérée par elle n'était ainsi pas valable, de
sorte que le loyer d'avril 2007 ne peut être réputé avoir été payé.

Les conditions formelles et matérielles d'une résiliation du bail d'habitation,
fixées à l'art. 257d CO, sont donc réalisées dans le cas concret. En effet, la
créance pour le loyer d'avril 2007 était exigible. S'agissant de la mise en
demeure, elle était conforme aux exigences de l'art. 257d CO et a été adressée
au domicile élu par la locataire, à savoir en l'étude du conseil qu'elle avait
mandaté. Le loyer en souffrance n'a été versé que quatre jours après
l'expiration du délai de grâce. Enfin, le congé donné le 22 mai 2007 pour le 30
juin 2007 ne prête pas à discussion, du point de vue tant formel que matériel.
B.c
Le 11 août 2008, X.________ a formé un recours en matière civile. A titre
principal, elle invite le Tribunal fédéral à annuler l'arrêt attaqué, puis à
constater que la résiliation de bail litigieuse est inefficace, voire à annuler
le congé.

La cour cantonale se réfère aux motifs énoncés dans son arrêt. L'intimée n'a
pas été invitée à déposer une réponse.

La recourante a requis, en outre, l'octroi de l'effet suspensif et sa mise au
bénéfice de l'assistance judiciaire.

La première de ces deux requêtes a été admise par ordonnance présidentielle du
1er septembre 2008.

Considérant en droit:

1.
L'arrêt attaqué a été rendu en matière civile dans une affaire pécuniaire. La
valeur litigieuse ne s'élève pas à 13'377 fr., comme indiqué au considérant 5
dudit arrêt, mais à 37'044 fr. (1'029 fr. x 12 x 3). En effet, lorsque le bail
bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient,
sauf exceptions, de prendre en considération la période de trois ans prévue à
l'art. 271a al. 1 let. e CO. Le montant précité est supérieur au seuil fixé à
l'art. 74 al. 1 let. a LTF pour la recevabilité du recours en matière civile.
Emanant de la partie qui a succombé dans ses conclusions au fond et dirigé
contre une décision finale rendue en dernière instance cantonale par un
tribunal supérieur (art. 90 LTF), le recours en matière civile est en principe
recevable, puisqu'il a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF),
compte tenu de la suspension du délai durant les féries d'été (art. 46 al. 1
let. b LTF), et dans les formes requises (art. 42 LTF).

Il y a lieu, partant, d'entrer en matière.

2.
2.1 Dans un premier moyen, la recourante conteste l'efficacité du congé
litigieux. Selon elle, l'avis comminatoire, reçu le 10 avril 2007 par son
conseil de l'époque, Me A.________, chargé de la représenter dans une procédure
judiciaire en suppression de défauts affectant la chose louée, ne pouvait pas
être réputé notifié à cette date en ce qui la concerne. La solution inverse,
retenue par la cour cantonale, serait contraire au droit fédéral. En effet, la
bailleresse n'aurait pas établi que le pouvoir de représentation conféré à cet
avocat comprenait une élection de domicile générale, non limitée à la
communication des actes judiciaires, qui aurait inclus la notification d'un
avis comminatoire en cas de demeure de la locataire. A titre d'argument
supplémentaire censé étayer ladite opinion, la recourante soutient que la
théorie de la réception ne peut pas trouver application dans un cas de ce
genre, car cela reviendrait à défavoriser les parties représentées par un
avocat par rapport à celles qui ne le sont pas, ces dernières disposant d'un
délai plus long que les premières pour verser le loyer en souffrance. Elle fait
également valoir, au même titre, que la bailleresse ne pouvait ignorer que
l'avis comminatoire adressé à l'avocat de la locataire et le bulletin qui y
était joint ne seraient reçus par celle-ci que quelques jours après réception
du courrier par cet avocat, soit au plus tôt le 12 avril 2007. Aussi le dernier
jour du délai de grâce tombait-il le 12 mai 2007. Ce jour étant un samedi,
l'échéance du délai était reportée au lundi 14 mai 2007, date à laquelle le
loyer d'avril 2007 a été versé sur le compte bancaire du conseil de la
bailleresse. Partant, la résiliation subséquente du bail pour cause de demeure
de la locataire serait inefficace.
2.2
2.2.1 Aux termes de l'art. 257d CO, lorsque, après réception de la chose, le
locataire a du retard pour s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires
échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui
signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail. Ce délai
sera de dix jours au moins et, pour les baux d'habitations ou de locaux
commerciaux, de trente jours au moins (al. 1). Faute de paiement dans le délai
fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux
d'habitations et de locaux commerciaux peuvent être résiliés moyennant un délai
de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois (al. 2).

L'avis comminatoire doit comprendre une invitation claire à payer; une
indication chiffrée du montant dû n'est pas nécessaire pour autant que
l'arriéré de loyer soit déterminable de manière certaine (arrêt 4A_296/2008 du
29 juillet 2008, consid. 4.1 et les arrêts cités). Le délai de grâce court dès
le lendemain de la réception de l'avis par le locataire ou dès le lendemain du
7e jour du délai postal de garde si le courrier recommandé n'est pas retiré
(arrêt 4A_250/2008 du 18 juin 2008, consid. 3.2.2 et les références).
2.2.2 La disposition citée n'exige pas que l'avis comminatoire soit remis en
mains propres au locataire. Il n'y a donc aucune objection à ce que celui-ci se
fasse représenter par une personne de son choix pour recevoir un tel avis
(passive Stellvertretung). Dans ce cas, la réception, par le représentant, de
la manifestation de volonté émanant du tiers produit les mêmes effets que si
cette manifestation était parvenue directement au représenté, pour autant que
la procuration passive délivrée au représentant autorisât ce dernier à recevoir
l'avis correspondant pour le compte du représenté (cf. Peter Gauch/Walter
Schluep/Jörg Schmid/Heinz Rey, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner
Teil, vol. I, 8e éd., n. 1359). Le tiers (en l'occurrence, la bailleresse), qui
prétend que la communication faite au représentant (in casu, l'avocat
A.________) liait le représenté (en l'espèce, la locataire), doit prouver, en
cas de contestation, que la réception de l'avis comminatoire était couverte par
la procuration donnée au mandataire (cf. Christine Chappuis, Commentaire
romand, n. 19 ad art. 32 CO). S'agissant du mandat, son étendue est déterminée,
si la convention ne l'a pas expressément fixée, par la nature de l'affaire à
laquelle il se rapporte (art. 396 al. 1 CO).

La recourante souligne à juste titre que l'étendue du pouvoir de représentation
de l'avocat A.________ ne ressort pas de l'arrêt attaqué, non plus que celle de
l'élection de domicile faite par elle en l'étude de cet avocat. On sait tout au
plus que ce dernier défendait les intérêts de la locataire dans le cadre d'une
procédure judiciaire dirigée contre l'intimée et visant à la suppression de
défauts. Il faut admettre, avec la recourante, qu'un tel mandat n'incluait pas,
a priori, la faculté de recevoir pour le compte de la mandante des
communications sans rapport avec la procédure en question, tel l'avis
comminatoire litigieux.
La situation n'est toutefois pas aussi simple dans la présente espèce. En
effet, il n'apparaît pas que la locataire ait formulé, devant les juridictions
cantonales, une allégation de fait suffisante par laquelle elle aurait
clairement mis en doute le pouvoir de l'avocat A.________ de recevoir l'avis
comminatoire en son nom. Sur ce point, la Chambre d'appel se borne à relever
que la mise en demeure "a été adressée au représentant de l'appelante, choisi
par celle-ci..." (arrêt attaqué, consid. 3, 3e §). En formulant une telle
allégation pour la première fois devant le Tribunal fédéral, la recourante
avance donc un fait nouveau et, partant, irrecevable en vertu de l'art. 99 LTF.
Force est de constater, en outre, que son argumentation sur ce point a subi de
sensibles variations depuis le moment de l'ouverture d'action jusqu'à ce jour.
Aussi bien, en première instance, la locataire avait déposé une requête en
annulation du congé, au sens des art. 271 al. 1 et 271a al. 1 CO, ce qui
supposait qu'elle ne remettait pas en cause la validité formelle de la
résiliation du bail. Devant l'instance d'appel, la recourante a ensuite soutenu
que le congé était inefficace aux motifs, d'une part, que le loyer avait été
valablement consigné et, d'autre part, que la notification de l'avis
comminatoire au seul domicile élu n'était pas suffisante, cette dernière
articulation de son argumentation impliquant derechef qu'elle ne contestait pas
le fait que l'avis comminatoire, notifié à Me A.________, l'avait été à qui de
droit. Et ce n'est finalement que dans son recours en matière civile qu'elle
soulève pour la première fois la question des pouvoirs de représentation de son
ancien mandataire. Cela étant, il n'est pas établi que l'avocat A.________
n'ait pas eu les pouvoirs nécessaires pour recevoir l'avis comminatoire en lieu
et place de sa mandante. Il faut encore souligner, à ce propos, que la
locataire n'a pas remis en cause la validité formelle du congé. Pourtant, la
formule officielle ad hoc ne lui avait pas été adressée à elle personnellement
mais à son mandataire, l'avocat A.________. L'intéressée ne saurait donc
soutenir de bonne foi que cet avocat n'était pas habilité à recevoir
valablement pour elle l'avis comminatoire, tout en admettant, dans le même
temps, que la procuration qu'elle lui avait donnée comportait le pouvoir de
recevoir la notification du congé subséquent.

Autre est la question de savoir si la théorie de la réception peut encore
trouver application lorsque l'avis comminatoire n'est pas adressé directement
au locataire. La recourante, qui la soulève sous chiffre 13 de son mémoire,
estime que l'application de cette théorie aurait pour conséquence de
défavoriser les parties représentées par un avocat par rapport à celles qui ne
le sont pas, ces dernières disposant d'un délai de paiement plus long que les
premières. La conséquence alléguée est certes exacte, mais elle découle de la
mise en oeuvre volontaire d'un tiers possédant des connaissances juridiques que
le mandant entend mettre à profit, cet avantage-ci étant censé compenser cet
inconvénient-là. De toute façon, amender la théorie de la réception dans le
sens voulu par la recourante, c'est-à-dire faire courir le délai de grâce lors
de la réception par le mandant de l'avis comminatoire transmis par le
mandataire, conduirait à une trop grande insécurité et ouvrirait la porte aux
abus. Il suffirait, en effet, dans cette hypothèse, que le mandataire et le
mandant s'entendent afin de retarder la transmission de l'avis comminatoire du
premier au second pour que le délai de grâce soit prolongé de manière
arbitraire et sans limites dans le temps. Semblable solution irait de toute
évidence à l'encontre du but de l'art. 257d CO qui est de permettre une
résiliation rapide du contrat de bail lorsque le locataire n'exécute pas ses
obligations. Aussi ne peut-elle être que rejetée. Il en va de même des
explications fournies sous chiffre 14 de l'acte de recours, quant au respect du
délai de paiement dans le cas concret, étant donné qu'elles se fondent sur la
prémisse qui vient d'être écartée.

La recourante soutient, en outre, que le mandataire de la bailleresse, en
indiquant, dans son avis comminatoire du 5 avril 2007 adressé à Me A.________,
que la cliente de ce dernier était mise en demeure de verser le loyer en
souffrance "dans un délai de 30 jours, dès réception de la présente, au moyen
du bulletin de versement ci-joint...", avait fait naître un doute sur la date
de départ du délai de grâce dans l'esprit du destinataire de cette lettre,
lequel pouvait considérer de bonne foi que le délai en question ne commencerait
à courir que lors de la réception par la débitrice du loyer de l'avis
comminatoire et du bulletin de versement. Le moyen n'est pas fondé.
L'interprétation, selon le principe de la confiance, de la manifestation de
volonté exprimée dans l'avis comminatoire adressé le 5 avril 2007 au mandataire
de la locataire doit être faite du point de vue du représentant et non de celui
de la personne représentée (Chappuis, op. cit., n. 21 ad art. 32 CO). Or, il va
de soi qu'un avocat, tel Me A.________, prenant connaissance de l'avis
comminatoire à lui adressé sous pli recommandé "en raison de son contenu", ne
pouvait pas partir de bonne foi de l'idée que l'intimée était disposée à
recevoir le montant impayé dans les 30 jours suivant la date à laquelle il
aurait transmis cet avis à sa propre cliente. L'ancien conseil de la locataire
n'a du reste pas compris ainsi l'avis en question à en juger par le contenu de
son courrier du 30 avril 2007 destiné à sa mandante, où il souligne qu'elle
s'expose à recevoir "prochainement" une résiliation de son bail.

2.3 La recourante se plaint encore d'une violation de l'art. 271 al. 1 CO.
2.3.1 La disposition citée s'applique également lorsque la résiliation du bail
a pour cause la demeure du locataire au sens de l'art. 257d CO. Le droit du
bailleur de résilier le bail s'oppose alors à celui du locataire d'être protégé
contre une résiliation abusive. Le juge ne peut annuler le congé litigieux que
si celui-ci est inadmissible au regard de la jurisprudence relative à l'abus de
droit et à la bonne foi; il faut des circonstances particulières pour que le
congé soit annulé (ATF 120 II 31 consid. 4a p. 33).
Tel sera le cas, par exemple, si le bailleur, lors de la fixation du délai
comminatoire, réclame au locataire une somme largement supérieure à celle en
souffrance, sans être certain du montant effectivement dû. Le congé sera
également tenu pour contraire aux règles de la bonne foi si le montant impayé
est insignifiant, si l'arriéré a été réglé très peu de temps après l'expiration
du délai alors que le locataire s'était jusqu'ici toujours acquitté à temps du
loyer ou si le bailleur résilie le contrat longtemps après l'expiration du
délai comminatoire (arrêt 4C.65/2003 du 23 septembre 2003, consid. 4.2 et les
références).
2.3.2
Les circonstances invoquées par la recourante ne sont pas de nature à justifier
l'annulation du congé, pareille mesure devant rester une ultima ratio dans le
cas du locataire qui ne paie pas son loyer.
Ainsi, le fait que l'avis comminatoire a été adressé, avec un bulletin de
versement, à l'ancien conseil de la locataire (Me A.________), de sorte que
celle-ci ne pouvait en prendre connaissance que quelques jours après la
réception du courrier ad hoc par l'avocat, n'est pas pertinent, comme on l'a
déjà noté plus haut (cf. consid. 2.2.2, dernier §). La recourante ne pourrait
pas non plus se plaindre de ce que l'avocat A.________ ne lui a transmis une
copie de l'avis comminatoire du 5 avril que par lettre du 30 avril 2007. Il
s'agit là, en effet, d'une circonstance intéressant les rapports entre la
mandante et son mandataire, lesquels sont une res inter alios acta pour le
tiers, en l'occurrence la bailleresse. Aussi la recourante n'est-elle pas en
droit d'opposer à l'intimée une éventuelle négligence de son ancien mandataire.
En revanche, ladite lettre revêt de l'importance, s'agissant d'apprécier le
comportement des parties, dans la mesure où elle révèle que la locataire y
était expressément rendue attentive au risque de résiliation de son bail auquel
elle s'exposait si elle ne donnait pas suite à l'avis comminatoire.

Que le bail n'ait été résilié par l'intimée qu'après réception du paiement
tardif du loyer en souffrance et alors qu'elle savait que celui-ci avait été
déconsigné en sa faveur n'est pas non plus de nature à faire apparaître le
congé litigieux comme abusif (cf. arrêt 4C.413/1996 du 27 février 1997, consid.
2, reproduit in SJ 1997 p. 538).
Il en va de même de la prétendue lenteur avec laquelle la bailleresse s'était
décidée à effectuer les travaux de réparation sollicités par la locataire et au
sujet desquels une procédure judiciaire était pendante. D'une part, il n'y a
rien d'abusif à ce que le bailleur résilie le bail d'un locataire qui ne paie
plus son loyer même s'il a - ou a eu - un litige avec ce locataire (art. 271a
al. 3 let. b CO; arrêt 4A_493/2007 du 4 février 2008, consid. 4.1). D'autre
part, la cour cantonale constate qu'en mars et avril 2007, l'intimée était
disposée à faire exécuter les travaux sollicités et qu'il ne dépendait que de
la recourante - elle devait se déterminer sur les modalités alternatives qui
lui avaient été proposées en vue de la réparation des défauts - que les travaux
requis fussent réalisés.

La recourante souligne enfin qu'elle a toujours payé les loyers sans se trouver
en demeure depuis près de trente-trois ans et qu'elle s'est acquittée du loyer
impayé, soit un peu plus de 1'000 fr., quatre jours seulement après
l'expiration du délai comminatoire. Selon la jurisprudence fédérale précitée,
un congé peut être abusif si l'arriéré a été réglé très peu de temps après
l'expiration du délai alors que le locataire s'était jusqu'ici toujours
acquitté à temps du loyer (cf. consid. 2.3.1, second §). La notion de "très peu
de temps" est indéterminée. Il est vrai que sa traduction en jours comporte une
part d'arbitraire, car elle nécessite la prise en compte de deux éléments
potentiellement antagonistes: les circonstances du cas concret, d'une part;
l'égalité de traitement entre les locataires, d'autre part. La jurisprudence
genevoise considère qu'un paiement effectué quatre jours après l'échéance du
délai de grâce ne permet plus au locataire d'obtenir l'annulation du congé au
titre de la violation des règles de la bonne foi (cf. arrêt attaqué, p. 7 in
fine). Formulée de manière aussi rigide, cette règle jurisprudentielle ne
paraît guère acceptable, car elle néglige par trop les circonstances, souvent
différentes, qui caractérisent telle ou telle cause, même si elle a le mérite
de traiter tous les locataires sur un pied d'égalité. Il est vrai cependant
qu'il faut faire preuve d'une certaine fermeté sur ce point, afin d'éviter une
justice au coup par coup et, partant, la multiplication des procédures,
d'autant que le principe même de l'octroi d'un délai de grâce après
l'expiration du délai légal de même nature n'est pas incontesté (cf. Peter
Higi, Commentaire zurichois, n. 56 ad art. 257d CO). Quoi qu'il en soit, sauf
circonstances spéciales, on peut difficilement faire entrer quatre jours dans
la notion de très peu de temps propre à la demeure du locataire. Ainsi, David
Lachat mentionne un ou deux jours seulement dans son dernier ouvrage édité par
l'association suisse des locataires (Le bail à loyer, Lausanne 2008, p. 672,
ch. 2.3.6). Le laps de temps accordé au locataire ne doit pas non plus dépendre
de la durée de la période pendant laquelle celui-ci a payé régulièrement son
loyer, puisqu'il s'agit là d'une condition cumulative, outre celle du règlement
de l'arriéré très peu de temps après l'expiration du délai comminatoire, qui
doit être réalisée pour que l'on puisse admettre l'existence d'un congé abusif.
En l'espèce, il n'y a donc pas de circonstances spéciales susceptibles de faire
apparaître comme contraire au droit fédéral le fait d'avoir écarté l'exception
d'abus de droit soulevée par la recourante pour s'opposer à son expulsion. Il
se justifie d'autant moins d'admettre l'existence de telles circonstances que
l'intéressée a été expressément rendue attentive par son propre avocat au
risque auquel elle s'exposait en ne versant pas le loyer impayé avant
l'expiration du délai de grâce.
Cela étant, le présent recours sera rejeté.

3.
La recourante a formulé une requête d'assistance judiciaire.

3.1 En vertu de l'art. 64 al. 1 LTF, l'assistance judiciaire n'est accordée
qu'à la double condition que la partie ne dispose pas de ressources suffisantes
et que ses conclusions ne paraissent pas vouées à l'échec.
Selon la jurisprudence, des conclusions paraissent vouées à l'échec lorsque les
perspectives de leur admission sont sensiblement inférieures aux risques de
leur rejet et qu'elles ne peuvent donc guère être considérées comme sérieuses,
de sorte qu'une partie raisonnable, qui disposerait des ressources financières
nécessaires, renoncerait à les soumettre au juge (ATF 128 I 225 consid. 2.5.3
p. 236 et l'arrêt cité).

3.2 Il appert des pièces annexées à la requête d'assistance judiciaire que la
recourante ne dispose que d'un montant à peine supérieur au montant de base
mensuel fixé par les normes d'insaisissabilité en vigueur dans le canton de
Genève dès le 1er janvier 2008 et que sa fortune mobilière nette est
sensiblement inférieure à la réserve de secours admise par la jurisprudence. Il
faut en conclure que la condition d'indigence est remplie en ce qui concerne la
recourante.

Par ailleurs, comme on peut le constater à la lecture du présent arrêt, les
problèmes juridiques soulevés par la recourante, en particulier celui ayant
trait à la représentation passive de la locataire, étaient assez délicats et,
pour certains, relevaient du pouvoir d'appréciation du juge. Leur solution
n'était donc pas d'emblée évidente. Aussi une partie disposant des ressources
financières nécessaires n'eût-elle sans doute pas renoncé à les soumettre à
l'examen de la juridiction suprême du pays.

Les deux conditions cumulatives auxquelles la loi subordonne l'octroi de
l'assistance judiciaire à une partie sont ainsi réalisées pour ce qui est de la
recourante. Par conséquent, celle-si sera dispensée de payer les frais
judiciaires relatifs à la procédure fédérale. Quant à son mandataire, il sera
désigné comme avocat d'office et recevra une indemnité appropriée, conformément
à l'art. 64 al. 2 LTF.

L'intimée, qui n'a pas été invitée à déposer une réponse, n'a pas droit à des
dépens.

3.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
La demande d'assistance judiciaire est admise et Me Manuel Bolivar est désigné
comme avocat d'office de la recourante.

2.
Le recours est rejeté.

3.
Il n'est pas perçu de frais ni alloué de dépens.

4.
La Caisse du Tribunal fédéral versera à Me Manuel Bolivar une indemnité de
2'000 fr. à titre d'honoraires d'avocat d'office.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre
d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève.

Lausanne, le 26 septembre 2008

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Corboz Carruzzo