Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.332/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_332/2008/ech

Arrêt du 12 décembre 2008
Ire Cour de droit civil

Composition
MM. et Mme les juges Corboz, président, Kolly et Kiss.
Greffier: M. Thélin.

Parties
X.________,
demandeur et recourant, représenté par
Me Agrippino Renda,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
A.________ SA,
B.________ SA, représentée par
Me Philippe Grumbach,
défenderesses et intimées.

Objet
prestations d'assurance

recours contre l'arrêt rendu le 27 mai 2008 par le Tribunal cantonal des
assurances sociales du canton de Genève.

Faits:

A.
Au mois d'août 2005, X.________ s'était associé pour l'exploitation d'une
entreprise de nettoyage et il pratiquait lui-même cette activité. Des
indemnités journalières en cas d'accident professionnel ou non professionnel
étaient assurées auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents; des indemnités en cas de maladie étaient assurées auprès de
A.________ SA.
X.________ exerçait aussi l'activité d'agent de sécurité en qualité de
travailleur salarié; son employeur lui avait assuré des indemnités en cas de
maladie ou d'accident auprès de B.________ SA.

B.
Dans la nuit du 30 au 31 août 2005, alors qu'il pratiquait cette deuxième
activité, X.________ surprit trois individus agressant une femme. Il
s'interposa et reçut des coups au bas-ventre, à la poitrine et au bras.
Le 1er septembre 2005, alors qu'il entretenait des relations sexuelles avec son
épouse, il subit une déchirure du corps caverneux dans le pénis.
Par suite de cet événement, X.________ a réclamé sans succès des prestations
d'assurance, en particulier des indemnités journalières pour perte de gain, aux
trois entreprises d'assurance.
Par lettre du 11 octobre 2005, la Caisse nationale lui répondit qu'il n'avait
pas subi d'accident et qu'elle ne verserait donc pas de prestations. X.________
ayant contesté cette prise de position, la Caisse répondit encore, le 28
octobre, que l'altercation du 31 août s'était produite dans le cadre de son
activité d'agent de sécurité qui n'était pas couverte par elle; elle
considérait donc le cas comme liquidé.

C.
Le 30 août 2007, X.________ a ouvert action contre ces mêmes entreprises
d'assurance devant le Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de
Genève. Les trois défenderesses devaient être condamnées solidairement à lui
verser les sommes de 61'684 fr., à titre d'indemnités journalières pour perte
de gain, avec intérêts au taux de 5% par an dès le 1er septembre 2005, et de
7'096 fr.95 pour frais de soins.
Chacune des défenderesses a conclu à l'irrecevabilité de la demande ou au rejet
de l'action.
La Caisse nationale a soutenu que sa lettre du 28 octobre 2005 était une
décision sur opposition, destinée à clore la contestation juridique et
susceptible de recours dans un délai de trente jours dès sa notification.
Certes, la nature de cette manifestation de volonté et la voie de recours à
utiliser n'étaient pas indiquées, alors qu'elles auraient dû l'être; néanmoins,
le demandeur a pu reconnaître la portée de l'acte lorsqu'il a consulté un
avocat, soit le 11 avril 2006 au plus tôt, et le délai de recours s'est donc
écoulé dès cette date. En tant que l'action introduite à fin août 2007 pouvait
être considérée comme un recours contre la décision sur opposition, elle était
tardive.
Le Tribunal cantonal des assurances sociales a rendu un arrêt sur partie le 27
mai 2008. Conformément à l'opinion de la Caisse nationale, il a jugé que le
demandeur aurait dû agir avec plus de diligence et que, même si la voie de
recours ne lui avait pas été indiquée, il ne pouvait pas, de bonne foi, se
croire autorisé à contester la décision de refus près de deux ans plus tard.
L'arrêt déclare la demande irrecevable en tant qu'elle est dirigée contre la
Caisse nationale; il réserve la suite de la procédure en ce qui concerne les
autres défenderesses.

D.
Agissant par la voie du recours en matière civile, X.________ requiert le
Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal des assurances sociales
et de lui renvoyer la cause pour nouvelle décision.
La Caisse nationale conclut au rejet du recours, toutefois sans déposer de
mémoire.
La défenderesse B.________ SA conclut au rejet du recours, dans la mesure où
celui-ci est recevable.
La défenderesse A.________ SA ne répond pas au recours.

Considérant en droit:

1.
L'arrêt présentement attaqué est une décision partielle mettant fin à
l'instance précédente à l'égard de l'une des parties; il est donc sujet à
recours selon l'art. 91 let. b LTF. Il s'agit d'une décision rendue en matière
civile (art. 72 al. 1 LTF), dans la mesure où l'instance précédente porte sur
des indemnités journalières soumises à la loi fédérale sur le contrat
d'assurance en tant que prestations complémentaires de l'assurance-maladie ou
de l'assurance-accidents.
Pour le surplus, le recours est dirigé contre un jugement de dernière instance
cantonale (art. 75 al. 1 LTF). Il est formé par une partie à l'instance
précédente qui succombe dans certaines de ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF).
La valeur litigieuse excède le minimum légal de 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let.
b et 74 al. 1 let. b LTF). Introduit en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et
dans les formes requises (art. 42 al. 1 à 3 LTF), le recours est en principe
recevable.
Le recours peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a
LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office, hormis les droits
fondamentaux (art. 106 LTF). Il n'est pas lié par l'argumentation des parties
et il apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient
cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante
soulève conformément aux exigences légales relatives à la motivation du recours
(art. 42 al. 2 LTF; ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p. 254), et il ne se prononce
sur la violation de droits fondamentaux que s'il se trouve saisi d'un grief
invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 I 83 consid.
3.2 p. 88; 133 II 249 consid. 1.4.2). Il conduit son raisonnement juridique sur
la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF).

2.
Il est constant que la loi fédérale sur la partie générale du droit des
assurances sociales (LPGA) est applicable au rapport d'assurance existant entre
le demandeur et la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accident (art.
1 al. 1, 59 al. 1 de la loi fédérale sur l'assurance-accidents; LAA).
L'art. 49 al. 1 et 3 LPGA dispose que l'assureur doit rendre par écrit les
décisions portant sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou
avec lesquelles l'intéressé n'est pas d'accord (al. 1); les décisions doivent
indiquer les voies de droit; elles doivent être motivées si elles ne font pas
entièrement droit aux demandes des parties et, enfin, la notification
irrégulière d'une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l'intéressé
(al. 3).
L'art. 51 al. 1 et 2 LPGA prévoit que les prestations, créances et injonctions
autres que celles visées à l'art. 49 al. 1 peuvent être traitées selon une
procédure simplifiée (al. 1); l'intéressé peut exiger qu'une décision soit
rendue (al. 2).
Il est tout aussi constant que le demandeur s'adressait à la Caisse nationale
en vue d'obtenir des prestations importantes aux termes de l'art. 49 al. 1
LPGA, de sorte que la Caisse devait communiquer un éventuel refus en notifiant
une décision satisfaisant aux exigences de l'art. 49 al. 3 LPGA, et que sa
lettre du 28 octobre 2005 était insuffisante à cet égard.
En pareil cas, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'art. 51 al. 2 LPGA
s'applique par analogie et l'assuré est en droit de demander à l'assureur la
décision formelle qui ne lui a pas été adressée. En règle générale, ce droit
s'éteint une année après que l'assureur a fait connaître sa volonté de manière
simplifiée. Un délai plus long entre éventuellement en considération lorsque
l'assuré pouvait croire de bonne foi que l'assureur poursuivrait l'élucidation
de l'affaire et n'avait pas encore pris de décision définitive; cette hypothèse
concerne surtout l'assuré profane en droit et dépourvu de conseil juridique. Si
l'assuré ne respecte pas ce délai, ordinaire ou prolongé, il perd son droit de
demander une décision formelle afin de recourir contre celle-ci, et la volonté
communiquée de façon simplifiée lui est désormais opposable (ATF 134 V145).

3.
En instance cantonale, le mémoire de réponse de la Caisse nationale a été
communiqué au demandeur. Si ce dernier entendait contester qu'il eût reçu la
lettre du 28 octobre 2005, d'une part, et qu'il se fût assuré le conseil d'un
avocat dès mai 2006 d'autre part, il lui incombait de réagir à ce mémoire. Il
ne l'a pas fait et il tente vainement, devant le Tribunal fédéral, de mettre en
doute la réception de cette lettre en arguant de ce que l'envoi n'était pas
recommandé.
La Caisse nationale n'a pas prétendu, dans cette même lettre, que la solution
de l'affaire nécessiterait des investigations supplémentaires; elle a
simplement refusé ses prestations. Dès mai 2006, assisté d'un avocat, le
demandeur était en mesure de réitérer ses prétentions et de provoquer ainsi une
décision formelle contre laquelle il aurait pu recourir. Il devait donc
observer le délai de requête ordinaire d'une année qui est consacré par la
jurisprudence précitée. Ce délai est échu en octobre 2006 sans que le demandeur
l'eût mis à profit. Depuis, la lettre du 28 octobre 2005 fait autorité entre
les parties, en ce sens que la Caisse nationale ne doit rien au demandeur par
suite des événements du 31 août et du 1er septembre 2005. Il s'ensuit que,
conformément à la décision attaquée, la demande introduite devant le Tribunal
cantonal des assurances sociales est irrecevable au regard des art. 49 et 51
LPGA.

4.
Le recours se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son rejet. A titre de
partie qui succombe, son auteur doit acquitter l'émolument à percevoir par le
Tribunal fédéral et les dépens auxquels peut prétendre la défenderesse
B.________ SA, qui a pris part à l'instance fédérale avec le concours d'un
mandataire.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Le demandeur acquittera un émolument judiciaire de 3'000 francs.

3.
Le demandeur versera une indemnité de 3'500 fr. à la défenderesse B.________
SA, à titre de dépens.

4.
Il n'est pas alloué de dépens aux autres parties.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal des
assurances sociales du canton de Genève.

Lausanne, le 12 décembre 2008

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier:

Corboz Thélin