Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 4A.306/2008
Zurück zum Index I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2008
Retour à l'indice I. Zivilrechtliche Abteilung, Beschwerde in Zivilsachen 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A_306/2008/ech

Arrêt du 9 septembre 2008
Ire Cour de droit civil

Composition
MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Kolly et Kiss.
Greffière: Mme Godat Zimmermann.

Parties
X.________,
recourant,

contre

Y.________,
intimé, représenté par Me François Membrez.

Objet
contrat d'entreprise; exigibilité des prétentions de l'entrepreneur; demeure;
résiliation,

recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève du 16 mai 2008.

Faits:

A.
A.a X.________ est propriétaire d'une parcelle d'environ 1'000 m2 sise sur la
commune de .... En 2005, il a mis en soumission divers travaux afin de pouvoir
édifier des bâtiments sur ce terrain.

Y.________ exploite en raison individuelle une entreprise active dans
l'entretien de parcs et jardins, ainsi que dans des travaux de génie civil.

Par deux contrats du 18 octobre 2005, X.________ a confié à Y.________ les
travaux de démolition et d'évacuation des constructions et objets occupant la
parcelle, d'une part, et les travaux de terrassement du bien-fonds, d'autre
part. Les travaux de démolition ont été adjugés pour un montant total de 37'660
fr. alors que le prix des travaux de terrassement a été fixé à 228'407 fr.30.
Les contrats prévoyaient que l'adjudication des travaux était «notamment régie
par les normes SIA (n° 118 et celles concernant directement les travaux à
exécuter)» et que «les situations et factures définitives des travaux ser
[aient] envoyées en 3 exemplaires, au nom du maître de l'ouvrage à l'architecte
au plus tard le 15 du mois afin que ce dernier puisse établir les ordres de
paiement pour la fin du mois». Il était stipulé que le paiement des travaux
s'effectuerait à 90 % en cours de travaux, sur présentation des situations. Un
escompte de 2 % du décompte final pour paiement à trente jours a été convenu.

Y.________ a commencé les travaux de démolition le 19 octobre 2005. Le 15
novembre 2005, il a adressé à X.________ la facture finale pour ces travaux-là;
le montant total était de 41'964 fr. et le solde à payer s'élevait à 11'964 fr.
après déduction d'un acompte de 30'000 fr. Dans une facture du même jour
(«situation n° 1»), l'entrepreneur réclamait au maître de l'ouvrage un montant
de 18'362 fr.70 pour les premiers travaux de terrassement effectués.

Comme X.________ ne payait pas ces deux factures, Y.________ lui a imparti, par
télécopie du 30 novembre 2005, un délai au 2 décembre 2005 pour s'exécuter. Le
même jour, X.________ a envoyé trois télécopies à Y.________, notamment pour
l'enjoindre à effectuer rapidement les travaux de terrassement, étant donné le
retard déjà accumulé par rapport aux délais prescrits. Y.________ a contesté
toute responsabilité pour d'éventuels retards; il considérait avoir été empêché
d'accomplir normalement son travail en raison de l'absence des autorisations
communales nécessaires, notamment, pour l'occupation du domaine public et pour
l'abattage d'arbres.

Le 5 décembre 2005, X.________ a invité une nouvelle fois Y.________ à agir
immédiatement, à se conformer à ses instructions et à effectuer les travaux qui
lui avaient été attribués. Par télécopie et pli recommandé du même jour,
Y.________ a mis X.________ en demeure de lui payer la somme de 30'326 fr.70
résultant des deux factures du 15 novembre 2005 jusqu'au lendemain.

X.________ n'a pas versé le montant réclamé mais a réagi par télécopie du 6
décembre 2005, en ordonnant à Y.________ d'exécuter sans délai divers travaux
qu'il énumérait, faute de quoi il bloquerait les ordres de paiement
prétendument déjà envoyés et ferait réaliser les travaux par un tiers aux frais
de l'entrepreneur.

Le même jour, Y.________ a informé X.________ par courrier qu'en raison du
refus du maître de régler les factures précitées, il cessait immédiatement son
activité et libérerait le chantier dès le lendemain; il annonçait également
l'introduction de procédures tendant à l'inscription d'une hypothèque légale et
à une mise en faillite sans poursuite préalable. Le 6 décembre 2005 également,
Y.________ a adressé à X.________ une facture de 35'801 fr.50 («situation n°
2»), englobant le montant figurant dans la «situation n° 1» et le prix des
travaux de terrassement exécutés entre le 16 novembre et le 6 décembre 2005.

Par courrier du 7 décembre 2005, X.________ a pris acte de la décision de
Y.________; relevant les conséquences dommageables que cette décision ne
manquerait pas d'avoir, il réservait ses droits et retenait tout paiement en
l'état. Deux jours plus tard, il a adressé deux courriers à l'entrepreneur par
télécopie. Le premier, daté du 20 novembre 2005, corrigeait plusieurs points de
la facture finale du 15 novembre 2005 relative aux travaux de démolition; selon
X.________, seuls 3'258 fr.70, après déduction de l'acompte, restaient dus.
Dans le second courrier, daté du 9 décembre 2005, le maître contestait divers
postes facturés dans la «situation n° 2» et ne reconnaissait devoir qu'un
montant de 18'047 fr.30 (recte: 18'407 fr.30) pour les travaux de terrassement
effectués. Y.________ a contesté les corrections apportées par X.________.
A.b Par jugement du 10 janvier 2006, confirmé en appel, le Tribunal de première
instance du canton de Genève a rejeté la requête de faillite sans poursuite
préalable introduite par Y.________ à l'encontre de X.________.
A.c Le 2 mars 2006, sur requête de Y.________, le Tribunal de première instance
a ordonné l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et
entrepreneurs sur le bien-fonds de X.________, à concurrence de 47'765 fr.50.
Le 21 mars 2006, le tribunal a révoqué son ordonnance et déclaré la requête
sans objet, à la suite de la garantie bancaire de 60'710 fr. produite par
X.________ et acceptée par Y.________; ce dernier s'est vu impartir un délai de
trente jours pour faire valoir son droit en justice.

B.
Le 21 avril 2006, Y.________ a assigné X.________ en paiement de 47'765 fr.50
plus intérêts à 5 % dès le 1er décembre 2005. Il faisait valoir que le
défendeur n'avait payé à fin novembre 2005 ni la facture finale des travaux de
démolition, ni la «situation n° 1» et qu'il n'avait pas réagi à la mise en
demeure du 5 décembre 2005. Dans ces conditions, le demandeur s'estimait en
droit de résilier les contrats et de réclamer le paiement de l'ensemble des
travaux effectués, dans les règles de l'art et le respect des délais, jusqu'au
6 décembre 2005.

X.________ s'est opposé à la demande. Selon lui, la norme SIA 118 applicable en
l'espèce prévoyait un délai de paiement de trente jours, de sorte qu'il n'était
pas en demeure le 6 décembre 2005 pour n'avoir pas encore payé les factures du
15 novembre 2005. La résiliation des contrats était dès lors injustifiée et lui
a de surcroît causé les dommages suivants: 13'288 fr.60 pour les frais de
remise en état du chemin d'accès au chantier et les frais d'évacuation des
matériaux laissés sur place par Y.________; 8'141 fr. pour les frais
d'immobilisation des machines de l'entreprise A.________; 13'450 fr. pour les
frais de défense qu'il avait dû supporter dans le cadre des procédures de mise
en faillite sans poursuite préalable et d'inscription d'une hypothèque légale.
X.________ admettait devoir à l'entrepreneur un solde de 3'258 fr.70 pour les
travaux de démolition et de 18'407 fr. pour les travaux de terrassement; il
entendait compenser ces montants avec ses prétentions liées aux dommages
précités.

Par jugement du 13 septembre 2007, le Tribunal de première instance a condamné
X.________ à payer à Y.________ la somme de 38'463 fr.50 avec intérêts à 5 %
dès le 1er décembre 2005 et débouté les parties de toutes autres conclusions.
Statuant le 16 mai 2008 sur appel de X.________, la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève a annulé le jugement de première instance,
condamné X.________ à payer à Y.________ la somme de 37'353 fr.50 avec intérêts
à 5 % dès le 1er décembre 2005 et débouté les parties de toutes autres
conclusions. Après avoir interprété les contrats liant les parties, la cour
cantonale est arrivée à la conclusion que les factures du 15 novembre 2005
étaient devenues exigibles le 30 novembre 2005. Elle a jugé au surplus que les
autres conditions de la demeure étaient réalisées et que l'entrepreneur avait
valablement résilié les contrats de sorte qu'il avait droit au paiement des
travaux dont il s'était chargé. Admettant, avec le juge de première instance,
que les parties avaient convenu de prix fermes pour les travaux adjugés, la
cour cantonale a confirmé le montant de 39'031 fr.90 retenu dans le jugement
entrepris pour les travaux de démolition; après déduction de l'acompte de
30'000 fr., le montant encore dû à ce titre par X.________ s'élevait ainsi à
9'031 fr.90. En ce qui concerne les travaux de terrassement effectués jusqu'à
la résiliation du contrat, les juges genevois ont fixé leur prix à 28'321
fr.60, soit 1'110 fr. de moins que celui retenu en première instance. Ils ont
estimé en effet que l'entrepreneur n'avait pas prouvé que les travaux
supplémentaires donnant lieu à ce dernier poste avaient été agréés par le
maître de l'ouvrage. La prétention totale de Y.________ envers X.________ se
montait ainsi à 37'353 fr.50. Pour sa part, le maître n'avait aucune créance à
invoquer en compensation, dès lors qu'il ne pouvait prétendre ni à des
dommages-intérêts pour les conséquences dommageables d'une résiliation
intervenue à bon droit, ni au remboursement de ses frais de défense dans les
procédures de faillite et d'inscription d'une hypothèque légale.

C.
X.________ forme un recours en matière civile. Il conclut à l'annulation de
l'arrêt cantonal et au déboutement de l'intimé de ses conclusions en paiement.

Par ordonnance présidentielle du 9 juillet 2008, l'effet suspensif demandé par
le recourant a été accordé au recours.

Dans sa réponse, l'intimé propose le rejet du recours dans la mesure de sa
recevabilité.

Considérant en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions libératoires
(art. 76 al. 1 LTF), dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en
matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière
instance (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse
atteint le seuil de 30'000 fr. fixé par l'art. 74 al. 1 let. b LTF, le recours
est en principe recevable puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1
LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.

1.2 Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit,
tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. En vertu de l'exception
ancrée à l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur
la violation d'un droit de rang constitutionnel ou sur une question afférente
au droit cantonal ou intercantonal si le grief n'a pas été invoqué et motivé de
manière détaillée par la partie recourante. Pour le reste, il applique le droit
d'office (art. 106 al. 1 LTF), cela sans être limité par les moyens du recours
ni par le raisonnement de la cour cantonale, ce qui implique qu'il peut
admettre un recours pour d'autres motifs que ceux qui ont été articulés ou, à
l'inverse, rejeter un recours en substituant une nouvelle argumentation à celle
de l'autorité précédente (ATF 134 III 102 consid. 1.1 et l'arrêt cité).
Toutefois, compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1
et 2 LTF, sanctionnée par l'irrecevabilité des recours dont la motivation est
manifestement insuffisante (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral
n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est donc pas tenu de
traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les
questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées
devant lui (ATF 134 III 102 consid. 1.1 p. 105).

1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des
faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). L'auteur du
recours ne peut critiquer les faits que s'ils ont été établis de façon
manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art.
97 al. 1 LTF; cf aussi art. 105 al. 2 LTF); il faut encore que la correction du
vice soit susceptible d'influer sur le sort de la querelle (art. 97 al. 1 LTF).
La notion de «manifestement inexacte» évoquée ci-dessus correspond à celle
d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (Message du Conseil fédéral concernant la
révision totale de l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 p. 4135 ch.
4.1.4.2; ATF 133 II 384 consid. 4.2.2). La partie recourante qui entend
s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière
circonstanciée en quoi les conditions d'une exception à l'art. 105 al. 1 LTF
seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un
état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF
133 III 462 consid. 2.4; 133 II 249 consid. 1.4.3). Aucun fait nouveau ni
preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de
l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art.
107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).

2.
Le recourant conteste, sous plusieurs angles, l'exigibilité des prétentions de
l'intimé.

Il critique tout d'abord l'interprétation des contrats à laquelle la cour
cantonale s'est livrée. Ainsi, la clause contractuelle prévoyant l'envoi des
factures au plus tard le quinze du mois pour que les ordres de paiement
puissent être établis pour la fin du mois ne dérogerait pas à l'art. 190 de la
norme SIA 118, instituant un délai de paiement de trente jours.

Dans un deuxième grief, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir
constaté les faits de manière arbitraire en retenant que le maître, par son
comportement entre le 30 novembre et le 6 décembre 2005, avait admis
l'exigibilité des créances de l'entrepreneur. Invoquant plusieurs courriers et
procès-verbaux de chantier qui auraient été passés sous silence dans l'arrêt
attaqué, le recourant soutient s'être valablement opposé à l'exigibilité des
factures litigieuses en manifestant à l'intimé qu'il attendait de lui qu'il
exécute pleinement sa prestation avant de lui payer son dû. En droit, le maître
aurait ainsi soulevé l'exception d'inexécution au sens de l'art. 82 CO, ce qui
empêchait l'entrepreneur de résilier les contrats.

Dans un dernier moyen, le recourant se plaint d'une violation de l'art. 372 CO.
Se référant à l'ATF 94 II 161, il fait valoir que la retenue du prix ou d'un
solde est un moyen licite pour tenter d'obtenir la livraison d'un ouvrage
achevé et conforme au contrat. Dans le cas particulier, ni les travaux de
démolition, ni les travaux de terrassement indiqués sur la «situation n° 1»
n'auraient été terminés en novembre 2005; le maître aurait ainsi été en droit
de ne pas payer les deux factures du 15 novembre 2005, qui n'auraient pas été
exigibles, et l'entrepreneur n'aurait pas été fondé à quitter le chantier en
raison de la prétendue demeure du recourant.

3.
Les parties ont passé deux contrats d'entreprise distincts, l'un portant sur
des travaux de démolition (premier contrat), l'autre sur des travaux de
terrassement (second contrat).

Selon les constatations cantonales, les travaux de terrassement ont commencé
«simultanément à l'achèvement des travaux de démolition». Par ailleurs, le 15
novembre 2005, l'entrepreneur a établi la facture finale des travaux de
démolition. C'est dire que le premier contrat a pris fin sans qu'il soit
nécessaire d'y mettre un terme en le résiliant. Il n'y a donc pas lieu
d'examiner si l'intimé était en droit de se départir de ce contrat-là de
manière anticipée à la suite de la demeure qualifiée du maître. La question
n'est pas tant de savoir si le montant de 41'964 fr. figurant sur la facture
finale était exigible le 6 décembre 2005, lorsque l'entrepreneur a annoncé
qu'il cessait son activité, mais bien plutôt de déterminer quel est le prix des
travaux de démolition effectués par l'intimé. Le juge de première instance,
suivi par la cour cantonale, a fixé à 39'031 fr.90 la prétention de
l'entrepreneur liée au premier contrat, montant duquel il fallait déduire un
acompte de 30'000 fr. Dans son recours, le maître de l'ouvrage ne prétend nulle
part que cette appréciation des preuves serait entachée d'arbitraire. L'intimé
peut par conséquent encore prétendre à un montant de 9'031 fr.90 en rapport
avec le contrat portant sur les travaux de démolition.

4.
L'intimé s'est départi du second contrat en raison de la demeure du recourant.
Le contrat d'entreprise étant synallagmatique, il convient d'examiner si les
conditions d'une résiliation au sens des art. 107 ss CO étaient réunies en
l'espèce, comme la cour cantonale l'a admis. Il est à noter que le contrat
liant les parties se réfère à la norme SIA 118; s'agissant de la demeure du
maître et de ses conséquences, l'art. 190 norme SIA 118 reprend le système des
art. 107 ss CO.

4.1 La première condition est la demeure du débiteur (art. 107 al. 1 CO), ce
qui suppose l'exigibilité de la dette et, sauf exception, une interpellation de
la part du créancier (art. 102 al. 1 CO).
4.1.1 Aux termes de l'art. 372 al. 1 CO, le prix est exigible au moment de la
livraison de l'ouvrage. Cette règle est toutefois de nature dispositive de
sorte que les parties peuvent régler différemment l'exigibilité du prix,
notamment en adoptant le système de la norme SIA 118 (Gauch, Der Werkvertrag,
4e éd., n. 1162 et n. 1167, p. 322/323). Ainsi, lorsque les parties ont convenu
de prix fermes, les art. 144 ss norme SIA 118 édition 1977/1991 prévoient des
factures d'acomptes (Abschlagsrechnungen); ceux-ci sont exigibles à la
réception d'une demande d'acompte régulièrement établie (art. 148 norme SIA
118; Gauch, op. cit., n. 1169, p. 324). L'exigibilité marque le début du délai
de paiement (Gauch/Schumacher, Kommentar zur SIA-Norm 118, n. 1 ad art. 148, p.
556). Selon l'art. 190 al. 1 norme SIA 118, le délai de paiement est de trente
jours sauf si le contrat prévoit une autre durée. Il s'agit là d'un «pactum de
non petendo», qui permet au maître de s'opposer au paiement d'une prétention
exigible en soi (Gauch, op. cit., n. 1179, p. 326/327).

En l'espèce, il n'est pas contesté que le second contrat contient des prix
fermes et que les parties à la convention se sont référées en particulier à la
norme SIA 118. La «situation n° 1» du 15 novembre 2005 se présente ainsi comme
une facture d'acomptes, à la réception de laquelle le montant de 18'362 fr.70
est devenu exigible. Comme le recourant ne conteste pas avoir reçu cette
facture, toute discussion sur le comportement du maître, qui aurait ou non
admis l'exigibilité de la créance, se révèle ainsi sans intérêt pour la
solution du litige.

En revanche, il convient de rechercher si, comme la cour cantonale l'a admis,
les parties ont convenu d'un délai de paiement différant de celui de trente
jours prévu à l'art. 190 norme SIA 118. A cet égard, il convient de préciser
que, quoi qu'en dise la Chambre civile, celle-ci s'est livrée à une
interprétation objective, fondée sur la théorie de la confiance, en analysant
les termes de la clause contractuelle litigieuse et son rapport avec les autres
dispositions du contrat.

Pour interpréter une clause contractuelle selon la théorie de la confiance, le
juge doit rechercher comment cette clause pouvait être comprise de bonne foi en
fonction de l'ensemble des circonstances. Le principe de la confiance permet
d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son
comportement, même si celui-ci ne correspond pas à la volonté intime de
l'intéressée. Le sens d'un texte, apparemment clair, n'est pas forcément
déterminant, de sorte que l'interprétation purement littérale est prohibée.
Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît limpide à première vue, il
peut résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les parties
ou d'autres circonstances que le texte de ladite clause ne restitue pas
exactement le sens de l'accord conclu. Il n'y a cependant pas lieu de s'écarter
du sens littéral du texte adopté par les cocontractants lorsqu'il n'existe
aucune raison sérieuse de penser qu'il ne correspond pas à leur volonté (ATF
133 III 61 consid. 2.2.1 p. 67 et les arrêts cités).

En l'occurrence, la clause contractuelle litigieuse prévoit en particulier que
les «situations» seront envoyées le 15 du mois au plus tard afin que les ordres
de paiement puissent être établis pour la fin du mois. Ce texte est clair.
Certes, il n'institue pas un délai de paiement unique pour toutes les factures,
mais prescrit que le maître devra payer pour la fin du mois toute facture
envoyée jusqu'au 15 du mois en question. Le maître disposera ainsi d'un délai
de paiement plus long si une facture est envoyée le 25 du mois au lieu du 15.
Dans cette optique, un escompte de 2 % pour paiement à trente jours, également
prévu dans le contrat, n'apparaît nullement contradictoire avec la clause
litigieuse, même si le recourant soutient le contraire. En conclusion, aucune
raison sérieuse ne permet de penser que le sens littéral de la clause
litigieuse, du reste rédigée par le recourant lui-même selon les constatations
cantonales, ne reflète pas la volonté des parties.

Il s'ensuit que la créance résultant des travaux de terrassement déjà exécutés
était exigible dès réception de la «situation n° 1» envoyée le 15 novembre 2005
et que le délai de paiement est venu à échéance le 30 novembre 2005. En vertu
du «pactum de non petendo» compris dans la clause contractuelle litigieuse, le
maître n'était pas tenu de payer la dette exigible avant ce jour-là.
4.1.2 Sauf exception, la demeure suppose en outre une interpellation. En
l'espèce, l'intimé a interpellé le recourant à deux reprises, en lui réclamant
le paiement par la télécopie du 30 novembre 2005, qui fixait en outre un délai
d'exécution au 2 décembre 2005, puis en le mettant en demeure par télécopie et
pli recommandé du 5 décembre 2005 impartissant au débiteur un délai de paiement
au 6 décembre 2005. C'est dire que, en tout cas dès réception de
l'interpellation télécopiée le 5 décembre 2005 (ATF 103 II 102 consid. 1a p.
105), le maître était en demeure de payer la facture du 15 novembre 2005
relative aux travaux de terrassement.
4.1.3 Pour faire échec à la demeure, le maître peut soulever l'exception
d'inexécution, qui permet au débiteur de refuser une prestation en soi exigible
(art. 82 CO; Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p. 696;
Gauch, op. cit., n. 2381, p. 632). En particulier, le maître peut retenir le
prix en vue d'obtenir la réfection de l'ouvrage (ATF 89 II 232 consid. 4a p.
235; 94 II 161 consid. 2c p. 164).
Dans le cas présent, il ne résulte pas de l'arrêt attaqué que la partie de
l'ouvrage faisant l'objet de la «situation n° 1» était affectée de défauts. Du
reste, le recourant ne le prétend pas. Il soutient en revanche que les travaux
de terrassement n'avaient été que partiellement exécutés lors de la
transmission de la facture, que les délais établis par la direction des travaux
n'étaient pas respectés et que le poste 1.02 de la «situation n° 1» relatif aux
travaux d'excavation ne correspondait pas au travail effectivement fourni par
l'intimé le 15 novembre 2005.

Ces faits ne ressortent pas de l'arrêt entrepris; la cour cantonale ne constate
nulle part que les travaux facturés dans la «situation n° 1» n'auraient pas été
exécutés ou ne l'auraient été qu'en partie. A cet égard, le recourant ne
démontre pas, d'une manière conforme aux exigences de motivation en la matière
(cf. consid. 1.3 ci-dessus), que l'absence de constatations sur ce point
procéderait d'une appréciation arbitraire des preuves de la part de la Chambre
civile. Au demeurant, il appartenait au débiteur de soulever l'exceptio non
adimpleti contractus (ATF 123 III 16 consid. 2b p. 19; 111 II 463 consid. 3 p.
466). Or, le recourant n'a jamais, dans la procédure cantonale, invoqué
formellement une telle exception, dont aucune trace ne figure dans l'arrêt
attaqué. Au surplus, entre la première interpellation et la résiliation du
contrat, le maître s'est plaint de retards dans les travaux de terrassement,
mais n'a pas prétendu que les travaux facturés dans la «situation n° 1»
n'avaient pas été exécutés.

A ce stade, il se confirme ainsi que le maître était en demeure à partir du 5
décembre 2005 au moins.

4.2 Selon la jurisprudence, l'interpellation peut déjà contenir la fixation du
délai de grâce exigé par l'art. 107 al. 1 CO (ATF 103 II 102 consid. 1a p.
105). Par ailleurs, si le délai imparti est objectivement trop court, le juge
n'en déduira pas nécessairement que le créancier ne dispose pas des droits
accordés par l'art. 107 al. 2 CO. Dans ce cas, il appartient en effet au
débiteur de protester et de demander une prolongation à son cocontractant,
faute de quoi il est censé accepter le délai fixé (ATF 116 II 436 consid. 2a p.
440 et l'arrêt cité).

En l'occurrence, l'intimé a, dans son interpellation du 5 décembre 2005,
imparti un délai d'un jour au recourant. Ce dernier n'a alors pas remis en
cause la brièveté de ce délai, qu'il est censé avoir agréé. La seconde
condition posée par l'art. 107 al. 1 CO est dès lors réalisée.

4.3 Conformément à l'art. 107 al. 2 CO, l'intimé était en droit de se départir
du contrat pour autant qu'il en ait fait la déclaration immédiate. Tel est
manifestement le cas puisque l'entrepreneur a fait savoir au maître le 6
décembre qu'il cessait sur-le-champ son activité et libérerait le chantier dès
le lendemain. Comme l'intimé était fondé à procéder ainsi, le recourant ne
dispose à son encontre d'aucune prétention en réparation d'éventuels dommages
liés à la fin prématurée du contrat d'entreprise.

4.4 Lorsque, comme en l'espèce, l'exécution de l'ouvrage avait déjà commencé,
le contrat prend fin ex nunc, et non ex tunc comme le prévoit l'art. 109 al. 1
CO; l'entrepreneur a droit au «prix du travail fait et au remboursement des
autres dépenses non comprises dans ce prix» (cf. art. 378 al. 1 CO; Gauch, op.
cit., n. 1275, p. 355). Après les corrections apportées à la «situation n° 2»,
les juges genevois ont fixé la prétention de l'intimé en rapport avec les
travaux de terrassement à 28'321 fr.60. Le recourant ne formule aucune critique
contre ce montant, que la cour de céans peut reprendre sans autre.

Sur le vu de ce qui précède, l'arrêt cantonal doit être confirmé dans son
résultat si ce n'est dans tous ses considérants, ce qui conduit au rejet du
recours.

5.
Vu le sort réservé au recours, les frais judiciaires et les dépens de l'intimé
seront pris en charge par le recourant (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Une indemnité de 2'500 fr., à payer à l'intimé à titre de dépens, est mise à la
charge du recourant.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 9 septembre 2008

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Corboz Godat Zimmermann