Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.725/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

2C_725/2008
2C_891/2008
{T 0/2}

Arrêt du 23 février 2009
IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges Müller, Président,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffière: Mme Dupraz.

Parties
Caisse X.________, recourante,
représentée par Me Christian Buonomo, avocat,

contre

Département des constructions et des technologies de l'information du canton de
Genève, case postale 3880, 1211 Genève 3,

Objet
Refus d'une subvention (bonus conjoncturel à la rénovation),

recours contre les arrêtés du Conseil d'Etat du canton de Genève du 27 août
2008 (2C_725/2008) et du 12 novembre 2008 (2C_891/2008).

Faits:

A.
Le 20 décembre 2006, la Caisse X.________ a présenté une demande d'autorisation
de construire en procédure accélérée concernant la rénovation d'un immeuble au
boulevard Carl-Vogt, à Genève. Cette requête était accompagnée d'une demande de
bonus conjoncturel à la rénovation.

Le 26 janvier 2007, le Département des constructions et des technologies de
l'information du canton de Genève (ci-après: le Département cantonal) a
"informé" l'intéressée que le bonus à la rénovation n'était pas accordé aux
caisses publiques de pension telles que la Caisse X.________ et l'a invitée à
modifier son dossier en conséquence.

Le 26 février 2007, la Caisse X.________ a recouru auprès du Conseil d'Etat du
canton de Genève (ci-après: le Conseil d'Etat) contre le refus de bonus
conjoncturel à la rénovation. Cette procédure a été suspendue, le Département
cantonal contestant que son courrier du 26 janvier 2007 constituât une
décision.

B.
Le 28 mars 2007, la Caisse X.________ a demandé la délivrance immédiate de
l'autorisation de construire en procédure accélérée en raison de l'urgence de
la rénovation projetée.

Tout en réservant la décision définitive relative à la demande de bonus
conjoncturel à la rénovation, le Département cantonal a octroyé, le 2 mai 2007,
l'autorisation de construire requise, si bien que les travaux de rénovation ont
pu débuter le 18 juin 2007.

C.
Le 22 juin 2007, le Département cantonal a pris une décision formelle refusant
la subvention demandée par la Caisse X.________. Contre cette décision, la
Caisse X.________ a recouru, le 4 juillet 2007, auprès du Conseil d'Etat.

Par arrêté du 27 août 2008 notifié le 3 septembre 2008, le Conseil d'Etat a
ordonné la reprise de la procédure portant sur le recours du 26 février 2007
qui avait été suspendue, prononcé la jonction des deux recours, déclaré
irrecevable le premier recours et rejeté le recours du 4 juillet 2007.

Le 10 septembre 2008, la Caisse X.________ a signalé au Conseil d'Etat que
l'arrêté susmentionné contenait une erreur de calcul, dès lors que le loyer
annuel futur par pièce dans l'immeuble rénové serait de 3'573,20 fr. et non pas
de 5'231 fr., comme retenu faussement dans cet arrêté.

Le 2 octobre 2008, la Caisse X.________ a formé un recours en matière de droit
public au Tribunal fédéral contre l'arrêté du Conseil d'Etat du 27 août 2008
(cause 2C_725/2008). Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à
l'annulation de l'arrêté attaqué puis, principalement, à l'octroi du bonus à la
rénovation de 131'294 fr. sollicité dans le cadre de la demande d'autorisation
de construire en procédure accélérée précitée et, subsidiairement, au renvoi de
la cause au Conseil d'Etat pour nouvelle décision dans le sens des
considérants.

D.
Le 12 novembre 2008, soit dans le délai de détermination imparti aux autorités
genevoises par le Tribunal fédéral, le Conseil d'Etat a rendu un nouvel arrêté
par lequel il a révoqué celui du 27 août 2008. Le nouvel arrêté reprend en tous
points le dispositif de la première décision. Seule la motivation a été
modifiée pour tenir compte de l'erreur de calcul signalée par la Caisse
X.________ le 10 septembre 2008.

Le 12 décembre 2008, la Caisse X.________ a déposé un second recours en matière
de droit public au Tribunal fédéral contre l'arrêté du Conseil d'Etat du 12
novembre 2008 (cause 2C_891/2008), dont elle a demandé l'annulation en
reprenant, au surplus, les mêmes conclusions que celles formées dans son
recours du 2 octobre 2008.

E.
Le 20 novembre 2008, agissant pour le Conseil d'Etat et le Département
cantonal, la Chancellerie d'Etat genevoise a demandé au Tribunal fédéral, sous
suite de frais, de constater que le recours 2C_725/2008 était devenu sans objet
et, par conséquent, de le rayer du rôle, subsidiairement de le déclarer
irrecevable.

Invités à se déterminer sur le recours 2C_891/2008, le Conseil d'Etat s'est
référé à son arrêté du 12 novembre 2008 et le Département cantonal, qui avait
obtenu que son délai pour répondre soit prolongé jusqu'au 9 février 2009, a
sollicité une seconde prolongation par une lettre postée le 10 février 2009.

Considérant en droit:

1.
Dirigés contre des arrêtés dont les dispositifs sont identiques sous réserve de
la question de la révocation, les deux recours reposent sur le même état de
fait, se fondent sur une argumentation se recoupant et contiennent les mêmes
conclusions. Il se justifie dès lors de joindre les causes par économie de
procédure et de statuer sur les deux recours dans un seul arrêt (ATF 131 V 59
consid. 1 p. 60 s.).

2.
Conformément à l'art. 47 al. 2 LTF, les délais fixés par le juge peuvent être
prolongés pour des motifs suffisants si la demande en est faite avant leur
expiration. En l'espèce, le Département cantonal s'est vu impartir un délai
pour se déterminer sur le recours 2C_891/2008 (cf. art. 102 al. 1 LTF). Il a
demandé une première prolongation qui lui a été accordée. Dès lors qu'il a
formé une seconde requête de prolongation après l'expiration du délai déjà
prolongé, sa requête est tardive et partant irrecevable.

3.
On peut se demander si le Conseil d'Etat était en mesure de révoquer
valablement sa décision du 27 août 2008 en rendant un nouvel arrêté le 12
novembre 2008, alors qu'une procédure de recours était pendante devant le
Tribunal fédéral. Sous l'empire de l'OJ, le Tribunal fédéral a laissé ouverte
la question de savoir si l'autorité inférieure pouvait procéder à un nouvel
examen de sa décision durant la procédure de recours sur le plan fédéral (arrêt
2A.242/1998 du 13 octobre 1998 consid. 1), alors que le Tribunal fédéral des
assurances de l'époque a nié cette possibilité (arrêt M 9/99 du 9 mai 2000
consid. 1a). La question, qui n'a pas encore été tranchée en application de la
LTF, peut demeurer indécise en l'espèce, puisque tant l'arrêté du Conseil
d'Etat du 27 août 2008 que celui du 12 novembre 2008 portent sur le même objet
et ont des dispositifs identiques, sous réserve de la question de la
révocation. Or, comme on le verra, que l'on envisage l'un ou l'autre de ces
arrêtés comme décision attaquée, l'issue du litige est identique. Il est donc
inutile de déterminer laquelle, de la première ou de la seconde décision, doit
primer.

4.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF). Il
contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 134 V
138 consid. 1 p. 140 et la jurisprudence citée).

4.1 Le litige porte sur le refus d'octroyer à la recourante un bonus
conjoncturel à la rénovation. Il découle des art. 16 ss de la loi genevoise du
25 janvier 1996 sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons
d'habitation (mesure de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) (LDTR;
RSG L 5 20) que ce bonus a le caractère d'une subvention cantonale
d'investissement. Selon l'art. 83 let. k LTF, le recours en matière de droit
public est irrecevable contre les décisions en matière de subventions
auxquelles la législation ne donne pas droit. Il en résulte que la voie du
recours en matière de droit public n'est ouverte en l'occurrence que si la
législation genevoise confère un droit au bonus conjoncturel à la rénovation.

4.2 Le 11 juin 1999, le législateur genevois a notamment adopté deux
modifications législatives qui sont entrées en vigueur le 1er janvier 2000 et
qui concernent le bonus conjoncturel à la rénovation. La première porte sur
l'art. 56B de la loi genevoise du 22 novembre 1941 sur l'organisation
judiciaire (LOJ; RSG E 2 05) dont l'al. 3 let. a établit que le recours au
Tribunal administratif genevois (ci-après: le Tribunal administratif) n'est pas
recevable contre les décisions portant sur des subventions auxquelles la loi ne
confère pas un droit. Quant à la seconde, elle se rapporte à l'art. 24 LDTR qui
prévoit:
"Décision
1 Le département, sur préavis de la commission d'attribution, statue sur chaque
demande de subvention.
Voie de recours
2 Cette décision est susceptible d'un recours au Conseil d'Etat dans les 10
jours dès sa notification. La décision du Conseil d'Etat est définitive."
Il résulte de la coexistence de ces deux dispositions dans la législation
genevoise que l'on peut exclure un droit au bonus conjoncturel à la rénovation.
En effet, dès lors que l'art. 24 al. 2 LDTR prévoit expressément qu'en matière
de subventions, il n'y a pas de voie de recours au Tribunal administratif, mais
seulement au Conseil d'Etat qui statue définitivement et que, parallèlement,
l'art. 56B al. 3 LOJ souligne que le recours au Tribunal administratif n'est
pas ouvert contre les décisions portant sur des subventions auxquelles la loi
ne confère pas un droit, la position du législateur genevois est claire. Il en
découle que les présents recours, qui ont pour objet une subvention à laquelle
la recourante n'a aucun droit, sont irrecevables en tant que recours en matière
de droit public en vertu de l'art. 83 let. k LTF.

5.
Reste à examiner si la voie du recours constitutionnel subsidiaire (cf. art.
113 ss LTF) est ouverte, puisque la recourante, qui se plaint d'arbitraire,
fait valoir un moyen qui peut en principe être invoqué par cette voie de droit
(art. 116 LTF). Pour qu'un tel recours soit recevable, il faut toutefois que le
recourant ait, en vertu de l'art. 115 let. b LTF, un intérêt juridique à
l'annulation ou à la modification de la décision attaquée. Or, le principe de
l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.) ne confère pas à lui seul une
position juridiquement protégée au sens de l'art. 115 let. b LTF. En effet, un
recourant n'a qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire que si
les dispositions légales dont il dénonce l'application arbitraire lui accordent
un droit ou servent à protéger ses intérêts prétendument lésés (ATF 133 I 185
consid. 6.1 p. 197 s. et 6.3 p. 200). Tel n'est pas le cas en l'espèce, la
recourante n'ayant pas de droit à une subvention (bonus conjoncturel à la
rénovation).

Même s'il n'a pas qualité pour agir au fond, un recourant peut se plaindre, par
la voie du recours constitutionnel subsidiaire, de la violation de ses droits
de partie équivalant à un déni de justice formel (ATF 133 I 185 consid. 6.2 p.
198 s.), pour autant qu'il ne remette pas en cause, même de façon indirecte, la
décision sur le fond (ATF 129 I 217 consid. 1.4 p. 222). La recourante ne
soulève toutefois aucun grief de cet ordre.

Par conséquent, la voie du recours constitutionnel subsidiaire n'est pas non
plus ouverte en l'occurrence.

6.
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de déclarer les recours irrecevables.

Succombant, la recourante devrait en principe supporter les frais judiciaires
(art. 66 al. 1 LTF) et ne pas obtenir de dépens (art. 68 al. 1 LTF). En
l'espèce, il se justifie cependant d'appliquer la règle générale de procédure
selon laquelle les frais causés inutilement doivent être supportés par la
partie qui les a occasionnés (cf. art. 66 al. 3 LTF). La recourante a en effet
été amenée, pour sauvegarder ses droits, à interjeter deux recours au Tribunal
fédéral dans la même cause, en raison du fait que le Conseil d'Etat a rendu
successivement deux arrêtés dont les dispositifs sont identiques sur le fond,
le second tendant à rectifier une erreur de calcul commise par l'autorité. Par
conséquent, il y a lieu de mettre les frais judiciaires pour moitié à la charge
de la recourante (art. 66 al. 1 LTF) et pour moitié à la charge du canton de
Genève dont l'intérêt patrimonial est en cause (cf. art. 66 al. 4 LTF). Par
analogie (art. 68 al. 4 LTF), la recourante a droit à des dépens réduits, à la
charge du canton de Genève (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Les causes 2C_725/2008 et 2C_891/2008 sont jointes.

2.
Les recours sont irrecevables.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge pour moitié de
la recourante et pour moitié du canton de Genève.

4.
Le canton de Genève versera à la recourante une indemnité de 2'000 fr. à titre
de dépens réduits.

5.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Département
des constructions et des technologies de l'information ainsi qu'au Conseil
d'Etat du canton de Genève.

Lausanne, le 23 février 2009
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Müller Dupraz