Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.720/2008
Zurück zum Index II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

2C_720/2008
{T 0/2}

Arrêt du 14 janvier 2009
IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges Merkli, Juge présidant,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffier: M. Addy.

Parties
A.X.________, recourant,
représenté par Me Nathalie Fluri, avocate,

contre

Service de la population du canton de Vaud, avenue de Beaulieu 19, 1014
Lausanne.

Objet
Autorisation de séjour CE/AELE,

recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal
cantonal du canton de Vaud du 2 septembre 2008.

Faits:

A.
Après le rejet, en mai 1992, d'une demande d'asile déposée une année plus tôt,
A.X.________, ressortissant de Serbie-et-Monténégro né en 1972, est demeuré
illégalement en Suisse où il a oeuvré au service de différents employeurs,
notamment dans le secteur de la restauration. Le 18 mai 2004, il a épousé
Y.________, une ressortissante portugaise domiciliée à Lausanne et titulaire
d'un permis d'établissement. Il a de ce fait été mis au bénéfice, à partir du
17 août 2004, d'une autorisation de séjour CE/AELE au titre du regroupement
familial, valable jusqu'au 24 mai 2008.

A une date qui ne ressort pas du dossier, l'épouse de A.X.________ a déposé une
requête de mesures protectrices de l'union conjugale; lors d'une séance du 21
février 2006, le juge civil saisi de cette requête a autorisé les époux à vivre
séparément après avoir constaté que la date effective de leur séparation
remontait au 1er janvier 2006. Au mois de février 2007, l'épouse a informé le
Service cantonal vaudois de la population (ci-après: le Service cantonal)
qu'une procédure de divorce était en cours et qu'elle n'avait plus revu son
mari depuis une année environ.

Par décision du 5 décembre 2007, le Service cantonal a révoqué l'autorisation
de séjour CE/AELE de A.X.________, au motif que l'intéressé commettait un abus
de droit en se prévalant de son mariage pour rester en Suisse alors qu'une
reprise de la vie commune paraissait exclue.

B.
A.X.________ a recouru contre cette décision, en faisant notamment valoir qu'il
n'était pas responsable de la désunion de son couple et qu'il croyait aux
chances d'une réconciliation avec son épouse. Il soulignait également qu'il
était parfaitement intégré en Suisse où il vivait et travaillait depuis 1991 et
qu'il avait récemment créé, avec deux autres associés, une société anonyme en
vue d'exploiter un établissement public. Il produisait en cause différentes
déclarations destinées à établir sa bonne intégration en Suisse et la
responsabilité de son épouse dans ses problèmes conjugaux.

Par arrêt du 2 septembre 2008, le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de
droit administratif et public (ci-après: le Tribunal cantonal), a rejeté le
recours et confirmé la décision attaquée.

C.
A.X.________ forme un recours en matière de droit public contre l'arrêt précité
du Tribunal cantonal dont il requiert la réforme, sous suite de frais et
dépens, en demandant qu'il soit constaté qu'il est autorisé à séjourner en
Suisse. A titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au
renvoi de la cause à l'autorité judiciaire cantonale pour instruction
complémentaire et nouvelle décision. Il se plaint de la violation de la
Constitution fédérale, de l'Accord sur la libre circulation des personnes et de
la Convention européenne des droits de l'homme.

Le Service cantonal renonce à se déterminer sur le recours et renvoie à l'arrêt
attaqué. Le Tribunal cantonal et l'Office fédéral des migrations concluent au
rejet du recours.

Par ordonnance du 8 octobre 2008, le Juge présidant la IIe Cour de droit public
a admis la requête d'effet suspensif présentée par A.X.________.

Considérant en droit:

1.
1.1 D'après l'art. 83 lettre c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public
est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui
concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral, ni le droit
international, ne donnent un droit.
1.1.1 Le 1er janvier 2008 est entrée en vigueur la loi fédérale du 16 décembre
2005 sur les étrangers (LEtr; RS 142.20) qui a remplacé la loi fédérale du 26
mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 1 113).

En l'espèce, l'ancien droit était applicable lorsque le Service cantonal a
révoqué l'autorisation de séjour du recourant. Cette dernière a toutefois
expiré durant la procédure de recours cantonale. A raison, par économie de
procédure, le Tribunal cantonal a modifié - du moins implicitement - l'objet de
la contestation porté devant lui, en examinant si, compte tenu de sa situation,
A.X.________ avait droit au renouvellement de son autorisation de séjour. Dans
la mesure, cependant, où cette modification de l'objet de la contestation est
intervenue après le 1er janvier 2008, les premiers juges devaient trancher le
litige à la lumière du nouveau droit. Or, celui-ci subordonne désormais le
droit au regroupement familial du conjoint étranger d'un ressortissant suisse
ou du titulaire d'une autorisation d'établissement à la condition que les époux
fassent ménage commun (cf. art. 42 al. 1 et 43 al. 1 LEtr), sous réserve des
situations - non invoquées et ne ressortant pas des faits de l'arrêt attaqué
(art. 105 al. 1 LTF) - visées aux art. 49 et 50 al. 1 LEtr.

Dès lors que les époux X.________ vivent séparés, le recourant ne peut ainsi
tirer aucun droit à une autorisation de séjour du droit interne.
1.1.2 Pour le même motif, le recourant ne peut pas non plus exciper un tel
droit de l'art. 8 § 1 CEDH, car la jurisprudence subordonne expressément la
possibilité d'invoquer cette disposition conventionnelle à l'existence d'une
relation étroite et effective entre l'étranger qui s'en prévaut et l'époux
ayant un droit de présence en Suisse (cf. ATF 131 II 265 consid. 5 p. 269; 118
Ib 145 consid. 4b p. 152).
1.1.3 En revanche, étant formellement toujours marié avec son épouse de
nationalité portugaise établie en Suisse, le recourant a en principe droit à
l'octroi d'une autorisation de séjour en vertu des art. 7 let. d de l'Accord du
21 juin 1999 sur la libre circulation des personnes (ALCP; RS 0.142.112.681) et
3 § 1 et 2 let. a annexe I ALCP (cf. ATF 130 II 113 consid. 4.1 et 8.3 pp. 116
et 129 et les références citées). Son recours est dès lors recevable sous
l'angle de ces dispositions conventionnelles, sans préjudice de l'existence
d'un éventuel abus de droit qui concerne le fond de la cause (cf. ATF 131 II
339 consid. 1.2 p. 343 sv.).

1.2 Au surplus, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes
prescrites par la loi (art. 42 LTF) par le destinataire de la décision attaquée
qui a un intérêt digne de protection à obtenir l'annulation ou la modification
de celle-ci (art. 89 al. 1 LTF), le recours est recevable en vertu des art. 82
ss LTF.

2.
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), mais
n'examine la violation des droits fondamentaux que si ce grief est invoqué et
motivé dans le recours (art. 106 al. 2 LTF). En principe, il statue sur la base
des faits constatés par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF). Le
recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière
manifestement inexacte selon l'art. 97 al. 1 LTF, c'est-à-dire, pour
l'essentiel, arbitraire au sens de l'art. 9 Cst., doit démontrer par une
argumentation précise et circonstanciée en quoi consiste la violation,
conformément aux exigences de motivation accrues posées à l'art. 106 al. 2 LTF.
A défaut d'une telle motivation, il n'est pas possible de tenir compte d'un
état de fait qui diverge de celui retenu dans la décision attaquée (cf. ATF 134
I 65 consid. 1.5 p. 68; 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287 s.). Aucun fait nouveau
ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de
l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).

3.
3.1 Le litige porte sur le droit du recourant à obtenir une autorisation de
séjour au titre du regroupement familial, plus précisément sur le point de
savoir si l'invocation d'un tel droit revêt, ou non, un caractère abusif dans
le cas d'espèce.

3.2 Selon la jurisprudence, l'existence d'un éventuel abus de droit doit être
appréciée dans chaque cas particulier et avec retenue, seul l'abus manifeste
d'un droit devant être sanctionné (ATF 121 II 97 consid. 4a p. 103).
L'existence d'un abus de droit découlant du fait de se prévaloir d'un mariage
ne peut, en particulier, être simplement déduite de ce que les époux ne vivent
plus ensemble (cf. ATF 118 Ib 145 consid. 3 p. 149 ss). Il ne suffit pas non
plus qu'une procédure de divorce soit entamée ou que les époux vivent séparés
et n'envisagent pas le divorce. Toutefois, il y a abus de droit lorsque le
conjoint étranger d'un ressortissant suisse ou communautaire invoque un mariage
n'existant plus que formellement dans le seul but d'obtenir une autorisation de
séjour, car ce but n'est pas protégé par l'ordre juridique suisse: ni le droit
interne (nouveau droit: cf. art. 51 al. 1 et 2 let. a LEtr; ancien droit: cf.
art. 7 al. 1 LSEE et la jurisprudence s'y rapportant, notamment ATF 130 II 113
consid. 4.2 p. 117, 128 II 145 consid. 2.2 p. 151/152), ni l'Accord sur la
libre circulation des personnes (cf. ATF 130 II 113 consid. 9 p. 129 et les
arrêts cités), ni la Convention européenne des droits de l'homme ne permettent
d'invoquer le droit au regroupement familial à seule fin de contourner les
règles sur la police des étrangers. Comme on l'a vu (supra consid. 1.1.2),
l'application de l'art. 8 § 1 CEDH présuppose même l'existence d'une relation
étroite et effective entre les époux.

3.3 En l'espèce, le Tribunal cantonal a constaté que les époux étaient séparés
depuis le mois de janvier 2006, que des mesures protectrices de l'union
conjugale avaient entériné cet état de fait le 21 février 2006, que le
recourant n'avait depuis lors visiblement rien entrepris de sérieux en vue de
renouer avec son épouse et que rien ne laissait penser qu'une reprise de la vie
commune pourrait intervenir prochainement. Le recourant n'apporte aucun élément
tangible de nature à remettre en cause ces constatations cantonales. Il se
borne en effet à alléguer, d'une manière appellatoire qui ne répond pas aux
exigences de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. supra consid. 3), que les causes de la
désunion ne présentent pas un caractère irrémédiable, car il aime toujours son
épouse et "croit fermement en une réconciliation". Cela ne suffit toutefois pas
à établir que les faits auraient été retenus d'une manière manifestement
inexacte, voire arbitraire.

Cela étant, au vu des faits retenus dans l'arrêt attaqué qui lient le Tribunal
fédéral (art. 105 al. 1 LTF), le Tribunal cantonal était fondé à considérer que
le mariage du recourant était vidé de toute substance et que l'intéressé
commettait un abus de droit à s'en prévaloir pour obtenir une autorisation de
séjour. Que, comme le soutient le recourant en se référant aux déclarations
écrites versées en cause, son épouse soit responsable de la désunion ne change
rien à cette appréciation (cf. ATF 130 II 113 consid. 4.2 p. 117 et les arrêts
cités). Certes, les chances d'une reprise de la vie commune ne doivent pas,
selon la jurisprudence, se fonder sur les seules déclarations de l'époux
autorisé à séjourner en Suisse indépendamment de sa situation matrimoniale. Il
faut, en principe, que de telles déclarations soient confortées par celles de
l'autre époux ou par d'autres indices, comme l'absence de cohabitation des
conjoints pendant une période significative (cf. ATF 130 II 113 consid. 10.3 p.
136 et les arrêts cités). Tel est cependant bien le cas en l'occurrence:
contrairement à la situation de fait de l'arrêt précité, où moins d'une année
s'était écoulée entre le moment de la séparation du couple et la révocation de
l'autorisation de séjour, il est dans le cas d'espèce établi que les époux
X.________ étaient déjà séparés depuis 23 mois (de janvier 2006 à décembre
2007), soit presque deux ans, lorsque le Service de la population a rendu la
décision litigieuse. En outre, le recourant n'a, selon l'arrêt attaqué,
entrepris aucune démarche concrète en vue de renouer des liens avec son épouse,
qui a pour sa part déclaré aux autorités, toujours selon les constatations
cantonales, que l'intéressé n'avait jamais cherché à reprendre contact avec
elle depuis leur séparation. L'arrêt attaqué n'apparaît donc pas arbitraire sur
ce point. Enfin, faute d'entretenir une relation étroite et effective avec son
épouse, le recourant ne peut tout simplement pas, comme on l'a vu (cf. supra
consid. 1.1.2 et 3.2), se prévaloir du droit au respect de sa vie familiale
garanti par l'art. 8 § 1 CEDH. Les arguments liés à la prétendue violation de
cette disposition conventionnelle sont dès lors dénués de pertinence et, dans
la mesure où le recourant se plaint de motivation insuffisante (art. 29 al. 2
Cst.) de l'arrêt attaqué sur ce point, son grief tombe également à faux.

3.4 Pour le surplus, le recourant ne cherche plus, en procédure fédérale, à
déduire un droit de séjour de la durée de sa présence et de sa bonne
intégration sociale et professionnelle en Suisse. De tels motifs ne sont
admissibles devant le Tribunal fédéral que dans la limite des situations visées
à l'art. 50 al. 1 let. a et b LEtr. Or, le mariage ayant duré moins de 3 ans,
la let. a n'est pas applicable. Quant à l'existence de raisons personnelles
majeures au sens de la let. b, le recourant ne prétend nullement qu'elles
seraient réalisées, ce qui ne ressort pas d'emblée des faits retenus (art. 105
al. 1 LTF).

3.5 Il suit de ce qui précède que l'arrêt attaqué se révèle conforme au droit
et que le recours ne peut qu'être rejeté.

4.
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (cf. art. 65 al.
1 à 3 5 LTF) et n'a pas droit à des dépens (cf. art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais de justice, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Service de la
population et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal
du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations.

Lausanne, le 14 janvier 2009
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant: Le Greffier:

Merkli Addy