Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.5/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
2C_5/2008

Arrêt du 2 avril 2008
IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mmes les Juges Merkli, Président,
Hungerbühler, Müller, Yersin et Aubry Girardin.
Greffière: Mme Rochat.

Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Odile Pelet, avocate,

contre

Département de la santé et de l'action sociale du canton de Vaud, Bâtiment de
la Pontaise, avenue des Casernes 2, 1014 Lausanne Adm cant VD,
intimé.

Objet
Amende disciplinaire,

recours en matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de Vaud du 29 novembre 2007.

Faits:

A.
X.________, né en 1950, a exercé la profession de physiothérapeute dès 1976.
Depuis l'obtention de son diplôme de « Master en ostéopathie D.O » en 1998, il
exploite un cabinet privé au Centre médical Y.________, à Z.________.

Le 2 septembre 2005, A.________, née le 25 juin 1992, s'est rendue, avec sa
mère, au Centre médical Y.________, en raison de douleurs occasionnées par une
chute sur le coccyx lors d'un cours de gymnastique. La doctoresse B.________ a
examiné A.________ en présence de sa mère et a diagnostiqué une lésion du
coccyx. Elle a présenté à la patiente et à sa mère deux alternatives
thérapeutiques: ne faire aucun traitement ou procéder à une manipulation par
toucher rectal pour repositionner le coccyx. Elle a précisé qu'elle ne
procédait pas elle-même à cette intervention, mais qu'elle connaissait, à
Y.________, un ostéopathe qui la pratiquait.
Conformément au souhait de la mère de l'intéressée, la doctoresse a sollicité
l'intervention de X.________. Celui-ci a procédé, le jour même, une réduction
endo-rectale pour corriger la position du coccyx de A.________, en présence de
sa mère. Il a effectué une première manipulation, puis en a fait une deuxième
après avoir constaté, sur la radiographie, que la première n'avait pas eu
l'effet escompté. X.________ a lui-même admis que la patiente avait crié sans
discontinué et que, crispée en permanence, elle n'avait à aucun moment coopéré,
mais il avait considéré ce manque de collaboration comme une réaction normale
chez une jeune fille qui avait mal. Pour sa part, la patiente a déclaré qu'elle
avait supplié l'ostéopathe, pendant les deux manipulations, de cesser le
traitement, mais qu'il n'en avait pas tenu compte. A l'issue de la deuxième
manipulation, il a cependant proposé à la patiente et à sa mère de poursuivre
le traitement le lendemain, après avoir revu la situation avec la doctoresse
B.________. A.________ et sa mère ne sont toutefois pas retournées au Centre
médical Y.________.

B.
Le 6 septembre 2005, la mère de la patiente s'est plainte auprès de la Société
Vaudoise de Médecine, en critiquant la prise en charge médicale de sa fille le
2 septembre 2005.

Le 17 mars 2006, le Chef du Département de la santé et de l'action sociale
(ci-après: le Chef du Département) a ouvert une enquête envers X.________, le
Conseil de santé estimant qu'il y avait suspicion de défaut de consentement
libre et éclairé. Le Conseil de santé a entendu les parties les 6 et 30 octobre
2006, soit plus d'une année après la survenance des faits, ainsi que la
doctoresse B.________ le 8 janvier 2007. Lors d'une séance du 23 avril 2007, il
a retenu qu'au vu du caractère particulier de l'intervention, pratiquée sur une
adolescente, X.________ aurait dû pendre en compte l'avis de la patiente. Le
Conseil de la santé a ainsi conclu à ce qu'une amende disciplinaire de 1'500
fr. soit prononcée à l'encontre de l'intéressé.

Par décision du 10 mai 2007, le Chef du Département a infligé une amende de
1'500 fr. à X.________.

C.
Statuant sur le recours de X.________, le Tribunal administratif vaudois l'a
rejeté, par arrêt du 29 novembre 2007, et a confirmé la décision du 10 mai
2007. Il a estimé que la jeune patiente était capable de discernement au moment
des faits et qu'elle n'avait pas donné son consentement libre et éclairé aux
soins prodigués par le recourant. L'ostéopathe reconnaissait du reste lui-même
que sa patiente avait la capacité de discernement nécessaire, puisqu'il avait
affirmé que si la jeune fille s'était présentée seule, sans sa mère, à son
cabinet et avait crié comme elle l'avait fait, il aurait renoncé à une
intervention, mais qu'en l'espèce, sa mère l'y avait encouragé. Les premiers
juges ont ainsi admis que le recourant aurait dû respecter la volonté de la
patiente, même si elle s'opposait à celle de sa mère. Ce dernier n'avait donc
pas su apprécier la situation correctement et aurait dû interrompre le
traitement, au vu des réactions de la patiente qui refusait manifestement de
poursuivre le traitement. Par conséquent, en lui infligeant une amende
disciplinaire de 1'500 fr. l'autorité intimée n'avait ni excédé, ni abusé de
son pouvoir d'appréciation.

D.
X.________ forme un recours en matière de droit public et demande au Tribunal
fédéral, sous suite de frais et dépens, d'admettre son recours et de le mettre
au bénéfice d'un non-lieu, subsidiairement de renvoyer la cause au Chef du
Département, voire au Tribunal administratif, pour nouvelle décision dans le
sens des considérants.

Le Tribunal administratif, devenu Cour de droit administratif et de droit
public du Tribunal cantonal vaudois depuis le 1er janvier 2008, a renoncé à
déposer une réponse.

Le Chef du Département conclut implicitement au rejet du recours. Il souligne
qu'il a été établi que A.________ possédait une capacité de discernement
suffisante lorsqu'elle avait demandé avec vigueur l'arrêt du traitement
intrusif, douloureux et non nécessaire, pratiqué sans sédation appropriée. Son
refus devait donc être pris en compte par le praticien.

Considérant en droit:

1.
Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), contre un jugement
final (art. 90 LTF) rendu dans une cause de droit public (art. 82 lettre a LTF)
par l'autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 lettre d LTF).
Directement touché par la décision attaquée, le recourant a en outre un intérêt
digne de protection à son annulation (art. 89 al. 1 let. c LTF), de sorte que
le recours est en principe recevable, sous réserve de la conclusion tendant au
prononcé d'un non-lieu, qui doit être considérée comme une conclusion nouvelle
au sens de l'art. 99 al. 2 LTF, donc irrecevable. Le recourant avait en effet
uniquement conclu, devant le Tribunal administratif, à ce que la décision prise
le 10 mai 2007 soit réformée en ce sens qu'aucune sanction ne soit prononcée à
son encontre.

2.
Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a
LTF), qui comprend les droits constitutionnels (ATF 133 III 446 consid. 3.1 p.
447). Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral statue sur la base des faits
établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter
que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui
correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 384
consid. 4.2.2 p. 391, 249 consid. 1.2.2 p. 252) - ou en violation du droit au
sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du
vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).

3.
Le recourant reproche à la juridiction cantonale d'avoir constaté les faits de
manière inexacte et incomplète, question qu'il y a lieu d'examiner
préalablement au bien-fondé de la sanction disciplinaire litigieuse.

3.1 La jurisprudence reconnaît au juge un important pouvoir d'appréciation dans
la constatation des faits et leur appréciation, qui trouve sa limite dans
l'interdiction de l'arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 IV 86
consid. 2a p. 88 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'intervient en
conséquence pour violation de l'art. 9 Cst. que si le juge a abusé de ce
pouvoir, en particulier lorsqu'il admet ou nie un fait pertinent en se mettant
en contradiction évidente avec les pièces et éléments du dossier, lorsqu'il
méconnaît des preuves pertinentes ou qu'il n'en tient arbitrairement pas
compte, lorsque les constatations de fait sont manifestement fausses ou encore
lorsque l'appréciation des preuves se révèle insoutenable ou qu'elle heurte de
façon grossière le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 129 I 49 consid.
4 p. 58, 173 consid. 3.1 p. 178; 128 I 81 consid. 2 p. 86).

3.2 Le recourant se plaint tout d'abord du fait que le Tribunal administratif
aurait omis de préciser que la mère de la patiente n'avait jamais contesté
avoir accepté le traitement litigieux et que la fille A.________ s'était mise à
pleurer et à paniquer dès qu'elle avait su qu'elle ne pourrait plus pratiquer
l'équitation pendant six à huit semaines, soit bien avant qu'il ne la voie et
tente de lui fournir les explications utiles.

Il n'est pas contesté qu'en l'espèce, la doctoresse B.________ avait donné à la
patiente et à sa mère les informations sur le diagnostic et sur les deux
possibilités thérapeutiques envisageables, à savoir ne rien faire de
particulier, si ce n'est un traitement symptomatique, ou procéder à une
manipulation manuelle par un spécialiste, et qu'elle s'était également
prononcée sur le pronostic quant à la durée de la guérison. Au vu de la
situation et du fait que sa fille pleurait, la mère a demandé à la doctoresse
B.________ de faire venir l'ostéopathe pour effectuer la correction.
Contrairement à ce qu'affirme le recourant, il ressort bien de l'arrêt attaqué
que la mère a consenti à la venue de l'ostéopathe et qu'elle ne s'est ensuite
jamais opposée au traitement prodigué à sa fille. On ne voit ainsi pas en quoi
le fait que la patiente pleurait lorsque l'ostéopathe est arrivé, notamment
parce qu'elle avait appris qu'elle ne pourrait plus monter à cheval pendant six
à huit semaines, serait un élément excluant d'emblée sa capacité de
discernement et la rendant inapte à comprendre les informations relatives au
traitement proposé. Du reste, après les explications supplémentaires données
par le recourant et une attente pendant laquelle la patiente a eu le temps de
réfléchir, celle-ci a clairement manifesté son opposition au traitement en
criant: « Je ne veux pas! Je ne veux pas! » (propos admis par le recourant
lui-même, lors de son audition du 30 octobre 2006). Dans ces circonstances, le
recourant ne saurait prétendre que les faits ont été établis de façon inexacte
ou incomplète.

3.3 Le recourant reproche ensuite à la juridiction cantonale d'avoir établi les
faits et apprécié les preuves de façon arbitraire, en admettant que la patiente
se rendait compte de la portée de ses actes et avait clairement manifesté sa
volonté d'interrompre le traitement en toute connaissance de cause. A son avis,
l'état dans lequel se trouvait la patiente l'empêchait de consentir valablement
au traitement, de sorte que sa mère pouvait décider à sa place.

Les constatations relatives à la capacité d'une personne de se rendre compte
des conséquences de ses actes et d'opposer sa propre volonté aux personnes
cherchant à l'influencer relèvent de l'établissement des faits (ATF 124 III 5
consid. 4 p. 13; 117 II 231 consid. 2c p. 235), de sorte qu'elles ne peuvent
être revues que sous l'angle de l'arbitraire.

Sur ce point, les juges cantonaux se sont fondés sur les déclarations faites
par la patiente elle-même le 6 octobre 2006 au Conseil de santé. Ces
déclarations ont été protocolées et reproduites dans l'arrêt attaqué. Il en
ressort que la jeune patiente, après avoir entendu les explications de
l'ostéopathe, a eu un temps de réflexion et a accepté de prendre un calmant.
Lorsque le praticien est revenu, elle lui a dit qu'elle ne voulait pas du
traitement, ce dont celui-ci n'a pas tenu compte. Sur son insistance, elle
s'est cependant déshabillée et n'a plus osé résister, mais a crié à plusieurs
reprises "Maman, je ne veux pas". La patiente a hurlé pendant les deux
manipulations, suppliant le recourant de cesser, ce qu'il n'a pas fait.

Au vu de ces déclarations, l'appréciation des juges cantonaux, qui ont retenu
que la jeune patiente se rendait compte de la portée de ses actes et qu'elle
s'était clairement opposée au traitement, ne saurait être qualifiée
d'arbitraire. Certes, lorsqu'elle a fait ces déclarations, l'intéressée était
âgée de plus de quatorze ans et treize mois s'étaient écoulés depuis la
consultation litigieuse. L'écoulement du temps n'enlève cependant pas de
crédibilité aux propos tenus par la patiente, qui portent sur le point de
savoir si elle était ou non d'accord avec le traitement. Celle-ci a du reste
formulé des déclarations parfaitement cohérentes.

3.4 Pour sa part, le recourant présente la patiente comme une enfant et déclare
qu'il s'est fondé sur l'attitude de sa mère, toujours présente et consentante
au moment des faits, pour commencer et poursuivre le traitement. Dans le
présent recours, il fait aussi valoir que la mère, qui connaissait parfaitement
sa fille, était mieux à même que lui d'apprécier ses réactions. Il est vrai que
l'attitude de la mère, qui n'a fait aucune remarque durant le traitement, mais
a assisté passivement aux protestations de sa fille n'est pas exempte de toutes
critiques. Son comportement est d'autant plus inexplicable, qu'elle s'est
plainte, quatre jours plus tard, auprès de la Société vaudoise de médecine du
traitement prodigué à sa fille. Toutefois, l'attitude de la mère n'exclut pas
que sa fille, âgée de plus de 13 ans, ait pu se rendre compte par elle-même du
traitement et s'y opposer. En outre, le fait que la patiente a pleuré, qu'elle
s'est plainte de douleurs et qu'elle a crié pendant l'acte médical n'est pas en
contradiction avec l'appréciation de la cour cantonale quant à la capacité de
la jeune fille de saisir ce qui se passait et de refuser le traitement proposé.
D'ailleurs, le recourant admet avoir affirmé que si la jeune fille s'était
présentée seule à son cabinet et qu'elle avait crié comme elle l'avait fait, il
aurait renoncé à une intervention. Sur la base de cette affirmation, le
Tribunal administratif pouvait manifestement, sans tomber dans l'arbitraire, en
déduire qu'en l'absence de la mère, l'intéressé aurait pris en compte le
comportement de la patiente, le traduisant comme la volonté d'interrompre le
traitement.

3.5 Le recourant ne présente ainsi aucun élément de fait qui serait de nature à
faire apparaître l'appréciation des juges cantonaux comme insoutenable. C'est
donc en fonction des constatations figurant dans l'arrêt attaqué qu'il y a lieu
d'examiner le bien-fondé de la sanction disciplinaire infligée au recourant.

4.
4.1 L'exigence du consentement éclairé du patient, comme fait justificatif à
l'atteinte à l'intégrité corporelle que représente une intervention médicale,
est un principe jurisprudentiel tiré du droit à la liberté personnelle et à
l'intégrité corporelle (ATF 133 III 121 consid. 4.1.1 p. 128 et les arrêts
cités). La jurisprudence admet qu'un patient mineur peut consentir seul à un
traitement médical qui lui est proposé lorsqu'il est capable de discernement
(ATF 114 Ia 350 consid. 7a p. 360). En effet, le mineur capable de discernement
peut exercer seul les droits strictement personnels (cf. art. 19 al. 2 CC),
parmi lesquels figure la faculté de consentir à un acte médical (Olivier
Guillod, Le consentement éclairé du patient, thèse Neuchâtel 1986 p. 209; Marc
Thommen, Medizinische Eingriffe an Urteilsunfähigen und die Einwilligung der
Vertreter, in Basler Studien zur Rechtswissenschaft, 2004 vol. 15, p. 7). Cela
correspond également à ce qui est prévu en matière d'essais cliniques, où les
personnes mineures doivent donner leur consentement, s'ils sont capables de
discernement (voir art. 55 al. 1 let. c de la loi fédérale sur les médicaments
et les dispositifs médicaux du 15 décembre 2000: LPTh; RS 812.21). Cette
tendance à prendre en considération l'avis du mineur est confirmée dans les
conventions internationales. L'art. 12 al. 1 de la Convention relative aux
droits de l'enfant du 2 novembre 1989 (RS 0.107) dispose ainsi que « les Etats
parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit
d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant, les opinions
de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son
degré de maturité ». Quant à la Convention sur les Droits de l'Homme et la
Biomédecine du 4 avril 1997, non encore ratifiée par la Suisse, (FF 2002 p. 336
ss), elle prévoit aussi qu'en matière d'intervention dans le domaine de la
santé, « l'avis du mineur est pris en considération comme un facteur de plus en
plus déterminant, en fonction de son âge et de son degré de maturité », même
si, selon la loi, il n'a pas la capacité de consentir à l'intervention (art. 6
). Le mineur ne sera donc représenté par ses parents que s'il est incapable de
discernement et l'évolution du droit tend à ce que, même dans cette hypothèse,
l'on tienne compte de son avis (Thommen, op. cit. pp. 5 et 40)

4.2 Le droit cantonal s'inspire de ces principes. L'art. 23 de la loi vaudoise
sur la santé publique du 29 mai 1985 (LSP; RSV 800.01) prévoit qu'aucun soin ne
peut être donné sans le consentement libre et éclairé du patient capable de
discernement, qu'il soit majeur ou mineur (al. 1). Le consentement du patient
peut être tacite en cas de soins usuels et non invasifs. L'alinéa 3 première
phrase précise que le patient capable de discernement a le droit de refuser des
soins, d'interrompre un traitement ou de quitter un établissement. Comme relevé
par la juridiction cantonale, l'art. 23 LSP ne pose aucune limite d'âge. Les
travaux préparatoires démontrent que le législateur a voulu accorder aux
personnes mineures douées de discernement le droit strictement personnel
d'accepter ou de refuser des soins, y compris à l'insu de leurs représentants
légaux ou contre le gré de ces derniers. En revanche, pour les mineurs
incapables de discernement, les parents et représentants légaux sont compétents
(cf. Bulletin du Grand Conseil vaudois de novembre 2001 p. 5126 et 5153).
En l'espèce, il ressort du dossier que la patiente a été clairement et
suffisamment informée du traitement proposé par l'ostéopathe, de sorte que les
exigences pour qu'elle puisse donner son consentement éclairé (ATF 133 III 121
consid. 4.1.1) sont réalisées. Les faits font aussi apparaître que la jeune
fille s'est expressément opposée à ce traitement à plusieurs reprises. Le
praticien n'en a toutefois pas tenu compte, procédant à deux manipulations
successives, malgré les cris et l'opposition continue de la patiente, dès lors
que la mère de celle-ci, qui assistait au traitement, avait manifesté son
accord. Déterminer si l'ostéopathe pouvait passer outre le refus de sa patiente
mineure au motif que la mère avait accepté le traitement dépend donc
exclusivement du point de savoir si la jeune fille était ou non, au moment des
faits, capable de discernement.

4.3 Sur ce point, le recourant se plaint d'une violation de l'art. 16 CC à
titre de droit fédéral ou de droit cantonal supplétif. Il reproche au Tribunal
administratif d'avoir présumé la capacité de discernement de la patiente, âgée
de treize ans et deux mois au moment des faits, alors qu'elle n'était pas apte
à choisir entre les alternatives proposées en raison de son anxiété.
4.3.1 Comme indiqué, l'exigence du consentement éclairé du patient, qui suppose
sa capacité de discernement, découle du droit fédéral (supra consid. 4.1). On
peut se demander si le fait que l'art 21 LSP rappelle ces principes a pour
effet de conférer à l'art. 16 CC le caractère de droit cantonal supplétif, dont
l'application ne peut être revue que sous l'angle de l'arbitraire (art. 95
LTF). Cette question peut demeurer indécise dès lors que, de toute manière, on
ne discerne aucune violation de cette disposition, même examinée librement.
4.3.2 Est capable de discernement au sens du droit civil celui qui a la faculté
d'agir raisonnablement (art. 16 CC). Cette disposition comporte deux éléments,
un élément intellectuel, la capacité d'apprécier le sens, l'opportunité et les
effets d'un acte déterminé, et un élément volontaire ou caractériel, la faculté
d'agir en fonction de cette compréhension raisonnable, selon sa libre volonté
(ATF 124 III 5 consid. 1a p. 8; 117 II 231 consid. 2a p. 232 et les références
citées). La capacité de discernement est relative: elle ne doit pas être
appréciée dans l'abstrait, mais concrètement, par rapport à un acte déterminé,
en fonction de sa nature et de son importance, les facultés requises devant
exister au moment de l'acte (ATF 118 Ia 236 consid. 2b in fine p. 238).

Le code civil suisse ne fixe pas un âge déterminé à partir duquel un mineur est
censé être raisonnable. Il faut apprécier dans chaque cas si l'enfant avait un
âge suffisant pour que l'on puisse admettre que sa faculté d'agir
raisonnablement n'était pas altérée par rapport à l'acte considéré (Deschenaux/
Steinauer, Personnes physiques et tutelle, 4ème éd., Berne 2001, n. 85 p. 27;
Bigler-Eggenberger, Commentaire bâlois, art. 16 CC, n. 14 ss). En matière
médicale, la jurisprudence a souligné que la capacité de discernement d'un
patient mineur, condition indispensable pour que celui-ci puisse consentir seul
à un traitement, doit être appréciée dans chaque cas, en regard de la nature
des problèmes que pose l'intervention. Les détenteurs de l'autorité parentale
devraient être appelés à intervenir seulement s'il y a un doute que la personne
mineure puisse apprécier objectivement les tenants et aboutissants de
l'intervention proposée, mais l'intérêt thérapeutique du patient doit rester
prépondérant dans tous les cas. Demeurent réservées les hypothèses où l'urgence
d'une intervention est telle qu'il serait préjudiciable à cet intérêt
d'attendre que les personnes concernées donnent leur consentement éclairé (ATF
114 Ia 350 consid. 7a p. 360 et les références citées). La doctrine souligne
aussi la nécessité d'analyser in concreto la capacité de discernement d'un
patient mineur en fonction de son aptitude à comprendre sa maladie, à apprécier
les conséquences probables d'une décision et à communiquer son choix en toute
connaissance de cause (cf. Dominique Manaï, Les droits du patient face à la
biomédecine, Berne 2006 p. 187 ss; Guillod, op. cit., p. 210). Dans cette
analyse, qui incombe au médecin (Noémie Helle, La capacité de discernement, un
critère juridique en voie de disparition pour les patients psychiques placés à
des fins d'assistance, in Revue suisse de droit de la santé 2004 n° 3, p. 7 ss,
spéc. n. 2.2 p. 9), il faut notamment tenir compte de l'âge de l'enfant, de la
nature du traitement ou de l'intervention proposée et de sa nécessité
thérapeutique. Cette approche concrète empêche de fixer des limites d'âge
absolues pour évaluer la capacité de discernement des patients mineurs (cf. les
différents chiffres avancés par la doctrine in Guillod, op. cit., p. 212).
4.3.3 La preuve de la capacité de discernement pouvant se révéler difficile à
apporter, la pratique considère que celle-ci doit en principe être présumée,
sur la base de l'expérience générale de la vie (ATF 124 III 6 consid. 1b p. 8;
117 II 231 consid. 2b p. 234). Cette présomption n'existe toutefois que s'il
n'y a pas de raison générale de mettre en doute la capacité de discernement de
la personne concernée (Deschenaux/Steinauer, op. cit., p. 30), ce qui est le
cas des adultes qui ne sont pas atteints de maladie mentale ou de faiblesse
d'esprit. Pour ces derniers, la présomption est inversée et va dans le sens
d'une incapacité de discernement (cf. arrêts 5A_204/2007 du 16 octobre 2007
consid. 5.1 et 5C.32/2004 du 6 octobre 2004, consid. 3.2.2, non publiés). Par
analogie, on peut présumer qu'un petit enfant n'a pas la capacité de
discernement nécessaire pour choisir un traitement médical (en ce sens, Walter
Fellmann, Arzt und das Rechtsverhältnis zum Patienten, in Arztrecht in der
Praxis, 2ème éd. 2007, p. 114; Guillod, op. cit., p. 213; Eugen Bucher,
Commentaire bernois, art. 16 CC, n. 127 pp. 188 et 132), alors que la capacité
de discernement pourra être présumée pour un jeune proche de l'âge adulte (en
ce sens, Guillod, op. cit., p. 215). Dans la tranche d'âge intermédiaire,
l'expérience générale de la vie ne permet cependant pas d'admettre cette
présomption, car la capacité de discernement de l'enfant dépend de son degré de
développement. ll appartient alors à celui qui entend se prévaloir de la
capacité ou de l'incapacité de discernement de la prouver, conformément à
l'art. 8 CC (cf. Bucher, op. cit., art. 16 CC , n. 133 p. 291).
4.3.4 En l'espèce, on peut se demander si, comme le conteste le recourant, la
cour cantonale était fondée à partir du principe que, la patiente étant âgée de
13 ans et deux mois au moment des faits, sa capacité de discernement devait
être présumée. En effet, il s'agit d'un âge charnière où l'on peut hésiter à
appliquer d'emblée la présomption réservée aux adultes. Il n'y a toutefois pas
lieu d'entrer plus avant sur ce point, car le Tribunal fédéral applique le
droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est pas lié par la motivation retenue
par l'autorité précédente (arrêt 4A_516/2007 du 6 mars 2008, consid. 1.2,
destiné à la publication). Or, si les faits constatés dans l'arrêt attaqué
permettent de retenir que la recourante avait la capacité de discernement, les
règles sur le fardeau de la preuve et, partant, l'existence éventuelle de la
présomption, perdent tout objet (ATF 128 III 271 consid. 2b/aa in fine).
4.3.5 Il ressort sur ce point de l'arrêt attaqué que la patiente était une
adolescente âgée d'un peu plus de treize ans au moment des faits et qu'elle se
rendait parfaitement compte de la portée de ses actes (cf. supra consid. 3.3).
Ayant subi une lésion du coccyx, la doctoresse, puis l'ostéopathe, lui ont
proposé un traitement consistant en un toucher rectal pour remettre le coccyx
en place; il ne s'agissait pas d'un traitement indispensable, l'alternative
thérapeutique étant tout simplement de laisser faire le temps. Dans un tel
contexte, force est d'admettre que la patiente était, à son âge, apte à
comprendre les renseignements donnés successivement par chacun des deux
praticiens, à saisir la lésion dont elle souffrait, à apprécier la portée du
traitement proposé, ainsi que son alternative, et à communiquer son choix en
toute connaissance de cause. Le fait qu'elle avait mal et qu'elle pleurait ne
l'empêchait pas de saisir l'enjeu du traitement, ce d'autant que celui-ci lui a
été présenté par deux fois et qu'avant l'intervention de l'ostéopathe, la
patiente a reçu un analgésique et eu un moment de réflexion. En admettant la
capacité de discernement de cette patiente, la cour cantonale n'a donc pas
violé l'art. 16 CC.

Comme il ne s'agissait à l'évidence pas d'un traitement indispensable qui
aurait dû être imposé ou pratiqué en urgence, il n'y avait aucun intérêt
thérapeutique à poursuivre l'intervention sans l'accord et la collaboration de
la patiente. L'ostéopathe aurait donc dû respecter la volonté de la jeune
fille, qui devait être considérée comme prépondérante par rapport à celle de sa
mère, même si l'on peut comprendre que le comportement de cette dernière a pu
l'influencer dans sa décision (cf. supra consid. 3.4 et 4.1). Quant aux
arguments selon lesquels la patiente n'aurait pas manifesté une véritable
opposition, mais seulement une réaction émotionnelle due à l'anxiété, à la
douleur et à la peur, ils ne sauraient être retenus, car ils reposent sur des
faits ne ressortant pas de l'arrêt attaqué, qui constate que la patiente s'est
clairement et à plusieurs reprises opposée au traitement.

4.4 Au vu de ce qui précède, les autorités cantonales étaient en droit
d'admettre que le comportement du recourant face à sa patiente constituait une
négligence dans l'exercice de sa profession au sens de l'art. 191 LSP. Cette
disposition prévoit la possibilité d'infliger différentes sanctions
disciplinaires, dont une amende allant de 500 à 200'000 fr. Compte tenu de
l'ensemble des circonstances, l'amende de 1'500 fr. infligée au recourant reste
dans des limites raisonnables et n'apparaît pas manifestement disproportionnée.

Contrairement à ce que prétend l'intéressé, cette condamnation n'est pas non
plus arbitraire dans son résultat. Elle ne signifie en effet pas qu'un
praticien ne pourrait plus intervenir lorsqu'un enfant se met à pleurer ou à
crier dans son cabinet. Comme on l'a vu, il s'agit d'apprécier la situation de
cas en cas. Or, en l'espèce, le recourant perd de vue qu'il n'était pas en face
d'une jeune enfant, mais d'une adolescente de plus de treize ans et qu'il a
procédé en deux fois à un acte particulièrement intrusif, très douloureux, qui
n'était pas indispensable, passant outre les refus réitérés de sa patiente. On
est donc loin de la situation d'un enfant qui pleure, parce qu'il aurait peur
du pédiatre ou du dentiste.

5.
Le recourant se prévaut enfin du caractère pénal de la procédure en cause, ce
qui aurait pour conséquence l'obligation de respecter la présomption
d'innocence consacrée à l'art. 32 al. 1 Cst., le principe in dubio pro reo, et
celui du fardeau de la preuve à l'accusation.

La jurisprudence a indiqué qu'une simple amende disciplinaire (qui s'élevait en
l'occurrence à 5'000 fr.) ne constituait ni une accusation en matière pénale au
sens de l'art. 6 CEDH, ni une peine au sens de l'art. 7 CEDH (ATF 128 I 346 ss;
cf. également ATF 125 I 417 consid. 2 p. 419 ss). Dans la mesure où le
recourant entend se prévaloir de la violation de droits de rang constitutionnel
découlant du caractère pénal de la procédure disciplinaire en cause, ses griefs
sont dès lors manifestement mal fondés.

6.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité,
avec suite de frais à la charge du recourant, qui succombe entièrement (art. 65
al. 1 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 67 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., doivent être mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Département de
la santé et de l'action sociale du canton de Vaud et à la Cour de droit
administratif et de droit public du Tribunal cantonal vaudois.
Lausanne, le 2 avril 2008
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Merkli Rochat