Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.587/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

2C_587/2008
{T 0/2}

Arrêt du 4 décembre 2008
IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Hungerbühler et Aubry Girardin.
Greffier: M. Addy.

Parties
X.________, recourante,

contre

Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, Les
Portes-de-Fribourg, route d'Englisberg 11, 1763 Granges-Paccot.

Objet
Autorisation de séjour,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Ière Cour
administrative, du 8 juillet 2008.

Faits:

A.
A la suite d'un contrôle de police effectué le 26 novembre 2006, A.________,
ressortissant du Kosovo né en 1983, a reconnu qu'il séjournait illégalement en
Suisse depuis la mi-août 2006 chez X.________. Cette dernière, née en 1968, est
une ressortissante italienne au bénéfice d'un permis d'établissement avec
laquelle, selon ses déclarations, le prénommé projetait de se marier
prochainement.

Par décision du 28 novembre 2006, le Service de la population et des migrants
du canton de Fribourg (ci-après: le Service cantonal) a prononcé le refoulement
de A.________ pour infractions aggravées aux prescriptions de police des
étrangers. Le même jour, l'Office fédéral des migrations (ci-après: l'Office
fédéral) a interdit à l'intéressé d'entrer en Suisse pour une durée d'une
année.

B.
Le 18 décembre 2006, A.________ a quitté la Suisse à destination de son pays
d'origine. Le lendemain, il a épousé X.________ à Rahovec (Kosovo). De retour
en Suisse, cette dernière a déposé une demande d'autorisation d'entrée et de
séjour en Suisse pour son mari au titre du regroupement familial.

Les époux ont été entendus séparément le 13 juillet 2007, X.________ dans les
bureaux du Service cantonal, et A.________ dans ceux de la Représentation
suisse à Pristina.

Par décision du 26 février 2008, le Service cantonal a rejeté la demande
d'entrée et de séjour en Suisse de A.________, au motif qu'il existait
suffisamment d'indices démontrant que son mariage avait été contracté dans le
seul but d'obtenir une autorisation de séjour.

C.
X.________ a recouru contre la décision précitée.

Par arrêt du 8 juillet 2008, la Ière Cour administrative du Tribunal cantonal
du canton de Fribourg (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours et
confirmé la décision attaquée. Elle a en particulier retenu que les époux
étaient d'un âge sensiblement différents, qu'ils s'étaient mariés
précipitamment après le renvoi du futur mari, que leur période de fréquentation
avant le mariage avait été de courte durée et que leurs déclarations
contenaient des contradictions sur certains points et dénotaient qu'ils ne se
connaissaient pas bien l'un l'autre.

D.
X.________ forme un recours contre l'arrêt précité du Tribunal cantonal. Elle
requiert implicitement l'annulation de cet arrêt et l'octroi d'une autorisation
de séjour en faveur de son mari. Pour l'essentiel, elle conteste les faits
constatés par la Cour cantonale pour retenir l'existence d'un mariage fictif.

Le Tribunal fédéral n'a pas ordonné d'échange d'écritures.

Considérant en droit:

1.
Le présent cas porte sur une demande d'autorisation de séjour déposée avant
l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005
(LEtr; RS 142.20). Il est dès lors régi par la loi fédérale du 26 mars 1931 sur
le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 1 113) (cf. art. 126 al. 1
LEtr).

2.
Le jugement attaqué a été rendu dans une cause de droit public (cf. art. 82
lettre a LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (cf. art. 86 al.
1 lettre d LTF). Il convient dès lors d'examiner si la présente écriture, qui
ne précise pas la voie de droit choisie, peut faire l'objet d'un recours en
matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF.

2.1 D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public
est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui
concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit
international ne donnent droit.

En l'espèce, la recourante ne peut, en l'état de la jurisprudence, déduire
aucun droit à une autorisation de séjour en faveur de son mari de l'art. 3
annexe I ALCP, car l'intéressé, qui n'est pas ressortissant d'un Etat partie à
cet accord, ne résidait pas légalement dans un tel Etat lors du dépôt de la
demande litigieuse (cf. ATF 130 II 1 consid. 3.6, p. 9 ss, récemment confirmé à
l'ATF 134 II 10 consid. 3, p. 14 ss). Cette jurisprudence se fonde notamment
sur l'arrêt Akrich du 23 septembre 2003 (C-109/01, Rec. 2003, p. I-9607) rendu
par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE). Cette juridiction
est certes récemment revenue sur le précédent Akrich dans un arrêt Metock du 25
juillet 2008 (C-127/08, en particulier, points 58 ss). Il n'est toutefois pas
nécessaire en l'espèce d'examiner si ce revirement de jurisprudence est de
nature à justifier un réexamen de l'ATF 134 II 10 précité.

En effet, dans la mesure où la recourante est de nationalité italienne, l'art.
2 ALCP impose qu'indépendamment de l'applicabilité de l'art. 3 annexe I ALCP,
le droit au regroupement familial en faveur de l'époux soit au moins reconnu
aux mêmes conditions que celles prévues pour les ressortissants suisses mariés
avec des étrangers, soit sur la base de l'art. 7 al. 1 LSEE (cf. ATF 134 II 10
consid. 3.6 p. 21 s.). Or, l'art. 3 annexe I ALCP ne confère pas de droits plus
étendus que cette disposition du droit interne lorsque se pose, comme en
l'espèce, la question d'un mariage de complaisance (cf. ATF 130 II 113 consid.
9 p. 129 ss). Le cas peut dès lors s'examiner à la seule lumière de l'art. 7
al. 1 LSEE. Selon la jurisprudence rendue en application de cette disposition,
l'existence formelle d'un mariage suffit pour fonder la recevabilité du recours
en matière de droit public sous l'angle de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF (cf.
arrêt 2C_64/2007, consid. 2,1, in Pra 96/2007 no 134 p. 920 ss). Les époux
étant ici formellement mariés, l'écriture de la recourante échappe dès lors à
la clause d'irrecevabilité prévue par la disposition précitée, sans préjudice
de l'examen de la cause au fond.

2.2 Par ailleurs, étant empêchée de vivre avec son mari en Suisse, la
recourante, qui était partie à la procédure cantonale et a elle-même formé la
demande de regroupement familial litigieuse, est particulièrement touchée par
la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à en obtenir
l'annulation ou la modification. Elle a donc qualité pour recourir au sens de
l'art. 89 LTF (cf. arrêt 2A.240/2003 du 23 avril 2004, consid. 1.3).

2.3 Pour le surplus le recours a été déposé en temps utile (art. 100 LTF) et -
sous réserve du considérant suivant - dans les formes prescrites par la loi
(art. 42 LTF). Certes la recourante ne prend-elle pas de conclusions formelles.
On comprend toutefois aisément, à la lecture de son écriture, qu'elle souhaite
obtenir la possibilité de vivre avec son époux en Suisse et, partant, qu'elle
demande implicitement l'annulation de l'arrêt attaqué qui confirme le rejet de
sa demande de regroupement familial. Son écriture est donc en principe
recevable comme recours en matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF,
étant précisé qu'il convient de ne pas se montrer trop formaliste lorsque
qu'une partie procède sans l'aide d'un représentant qualifié.

3.
Sous réserve des droits fondamentaux qui doivent être spécialement invoqués et
motivés par le recourant (cf. art. 106 al. 2 LTF), le Tribunal fédéral applique
le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement juridique sur
la base des faits établis par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF)
qu'il ne peut rectifier ou compléter d'office que s'ils ont été constatés de
façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF
(art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend invoquer que les faits ont été
établis de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire,
pour l'essentiel, que les constatations de fait sont arbitraires au sens de
l'art. 9 Cst., doit démontrer, conformément aux exigences de l'art. 106 al. 2
LTF, par une argumentation précise en quoi consiste la violation. A défaut
d'une telle motivation, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait
qui diverge de celui retenu dans la décision attaquée (ATF 134 I 65 consid. 1.5
p. 68; 133 IV 286 consid. 6.2 p. 288).

4.
4.1 Aux termes de l'art. 7 al. 2 LSEE, le droit du conjoint étranger d'un
ressortissant suisse (ou communautaire) à l'octroi ou à la prolongation d'une
autorisation de séjour n'existe pas lorsque le mariage a été contracté dans le
but d'éluder les dispositions sur le séjour et l'établissement des étrangers
(mariage fictif). A cet égard, il suffit que l'un des conjoints (en règle
général le bénéficiaire de l'autorisation) n'ait dès le début pas l'intention
de fonder une véritable union conjugale (cf. arrêts 2C_435/2007 du 10 mars
2008, consid. 2.2; 2A.240/2003 du 23 avril 2004, consid. 3.3; 2A.250/1999 du 27
août 1999, consid. 2b). En la matière, une preuve directe fait souvent défaut
et l'autorité doit généralement se baser sur des indices (cf. ATF 122 II 289
consid. 2b p. 295; 121 II 1 consid. 2b p. 3). Ceux-ci peuvent notamment
résulter du fait que l'étranger est menacé d'un renvoi ou ne peut pas obtenir
une autorisation de séjour en Suisse autrement que par un mariage. La grande et
inhabituelle différence d'âge entre les époux, les circonstances particulières
de leur rencontre ou de leurs relations, comme une courte période de
fréquentation avant le mariage ou l'absence de vie commune sans motif
plausible, de même que le versement d'une somme d'argent au conjoint autorisé à
vivre en Suisse, peuvent également constituer des indices démontrant que les
époux n'ont pas la volonté de créer une véritable union conjugale (cf. ATF 122
II 289 consid. 2b p. 295 et les références citées).

Dès lors qu'il s'agit de sanctionner un comportement abusif, la preuve d'un
mariage fictif ne doit pas être admise trop facilement. Il faut qu'il existe
des indices clairs et concrets en ce sens (cf. ATF 128 II 145 consid. 2.2 p.
151; 127 II 49 consid. 5a p. 57 et les arrêts cités). En outre, cette preuve
doit être apportée par les autorités, sous réserve de l'obligation des parties
de collaborer à l'établissement des faits (cf. arrêt 2A.715/2005 du 13 février
2006, consid. 2.4 et 2.7.1 et les références citées). Cette obligation vaut
tout particulièrement lorsque les circonstances objectives du cas permettent
sérieusement de douter de la réelle et commune volonté des époux de former une
communauté de vie. En l'absence d'indices concrets suffisants, le mariage ne
saurait cependant être qualifié de fictif. En cas de doute, il faut considérer
que les époux voulaient fonder une véritable communauté conjugale.

4.2 Les constatations portant sur les indices peuvent concerner des
circonstances externes tout comme des éléments d'ordre psychique relevant de la
volonté interne (volonté des époux). Il s'agit dans les deux cas de
constatations de fait (ATF 128 II 145 consid. 2.3 p. 152 et les arrêts cités)
qui lient le Tribunal fédéral, sauf s'ils ont été établis de façon
manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf.
supra consid. 3). En revanche, le Tribunal fédéral examine librement si les
constatations de fait (indices) permettent de conclure à l'existence d'un
mariage fictif.

5.
Le Tribunal cantonal a constaté que, selon ses déclarations, A.________ était
en situation illégale en Suisse depuis moins d'un mois lors de sa rencontre
avec la recourante, que cette dernière est de dix-huit ans son aînée, que les
intéressés ont décidé d'habiter ensemble immédiatement après leur rencontre,
qu'ils ont par ailleurs également décidé précipitamment de se marier après deux
mois de vie commune seulement, soit après avoir pris conscience qu'à défaut
d'une telle union le mari allait être renvoyé dans son pays d'origine, que le
mariage a été célébré au Kosovo le 19 décembre 2006, soit le lendemain du
refoulement du mari et trois mois seulement après la rencontre des époux et,
enfin, qu'au vu de leurs déclarations respectives, les époux n'avaient pas l'un
de l'autre "les connaissances élémentaires usuelles concernant [leur] conjoint,
[leur] entourage et [leur] famille, malgré des contacts téléphoniques
[prétendument] quotidiens".

La recourante conteste les faits retenus dans le jugement attaqué. Elle allègue
en particulier qu'elle et son mari sont tombés amoureux l'un de l'autre, que
leurs affinités et leur caractère s'accordent, que son mari s'entend très bien
avec ses enfants (à elle) et qu'elle ne prendrait pas la peine de faire recours
s'il s'agissait seulement d'une question de papiers. De tels allégués sont
vagues et ne reposent sur aucun élément tangible. Ils sont donc purement
appellatoires et, comme tels, impropres à établir que les faits retenus dans
l'arrêt attaqué seraient manifestement inexacts ou arbitraires. Or, sur la base
des constatations cantonales, on ne peut reprocher aux premiers juges d'avoir
admis l'existence d'un mariage fictif entre les époux, soit d'une union
destinée uniquement à permettre au mari de la recourante d'obtenir la
délivrance d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial. Les
éléments permettant d'asseoir cette conclusion sont en effet nombreux, concrets
et pertinents au sens de la jurisprudence. On peut relever à ce propos la
différence d'âge relativement importante entre les époux, le fait que leur
mariage ait été célébré un jour après le refoulement du mari et trois mois
seulement après que les intéressés s'étaient rencontrés et, enfin et surtout,
le fait que ceux-ci, interrogés séparément, ont fourni des réponses démontrant
qu'ils n'avaient pas les connaissances élémentaires usuelles l'un de l'autre
que l'on peut attendre d'un couple. Dans ce contexte, l'arrêt attaqué ne viole
pas l'art. 7 al. 2 LSEE.

6.
Il suit de ce qui précède que le recours, manifestement mal fondé, doit être
rejeté selon la procédure simplifiée prévue à l'art. 109 al. 2 let. a LTF.
Succombant, la recourant doit supporter les frais judiciaires (cf. art. 65 al.
1 à 3 et 66 al. 1 LTF) et n'a pas droit à des dépens (cf. art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, au Service de la population et
au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Ière Cour administrative, ainsi
qu'à l'Office fédéral des migrations.

Lausanne, le 4 décembre 2008
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Merkli Addy