Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.581/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

2C_581/2008
{T 0/2}

Arrêt du 6 novembre 2008
IIe Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Merkli, Président,
Hungerbühler et Donzallaz.
Greffier: M. Dubey.

Parties
X.________, recourant,
représenté par Me Mirko Giorgini, avocat,

contre

Service de la population du canton de Vaud, avenue de Beaulieu 19, 1014
Lausanne.

Objet
Caducité de l'autorisation d'établissement,

recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal
cantonal du canton de Vaud du 8 juillet 2008.

Faits:

A.
X.________, né en 1956, de nationalité italienne, a bénéficié en Suisse
successivement d'un permis A de 1984 à 1988, d'un permis B (autorisation de
séjour) du 14 septembre 1988 au 7 mai 1990, puis dès cette date, d'un permis C
(autorisation d'établissement) renouvelé pour la dernière fois le 6 juin 2005
jusqu'au 7 mai 2006 [recte: 2010]. Le Bureau communal des étrangers de
Z.________, qui devait lui remettre ce permis, l'a conservé et a écrit au
Service cantonal de la population du canton de Vaud qu'il avait des doutes sur
la présence réelle de l'intéressé en Suisse. Ce dernier avait en effet précisé
dans sa demande de renouvellement qu'il venait en Suisse à peu près une semaine
tous les deux à trois mois. Le Bureau communal des étrangers précisait en outre
que le loyer du studio qu'il louait à Z.________ était payé, mais que la
concierge ne connaissait pas l'intéressé. Il ajoutait que la gérance indiquait
une faible consommation d'eau chaude pour 2004 (1,6 m3 contre 30 m3 pour un
même appartement occupé).

Un courrier du Service cantonal de la population adressé à l'intéressé le 5
septembre 2005 pour obtenir des précisions sur ces faits est revenu non
réclamé.

Par décision du 27 décembre 2005, le Service cantonal de la population a
déclaré le permis d'établissement de l'intéressé caduc, ce dernier ne
séjournant qu'occasionnellement en Suisse. Cette décision n'a pas été notifiée
par voie postale. Les convocations du Bureau communal des étrangers aux fins de
notification de la décision adressées les 29 décembre 2005 et 26 janvier 2006
sont restées lettre morte. Le Service cantonal de la population a fait paraître
dans la Feuille des avis officiels du 24 février 2006 un avis indiquant à
l'intéressé qu'une décision le concernant devait être retirée auprès du Service
cantonal, cette décision devant être considérée comme notifiée au plus tard dix
jours après sa publication officielle.

B.
Par décision du 22 mars 2007, le Service cantonal de la population a considéré
une formule d'annonce d'arrivée établie le 23 octobre 2006 comme une requête de
réexamen de la décision du 27 décembre 2005 et l'a rejetée, les motifs de cette
dernière étant encore opposables à l'intéressé qui ne résidait pas
régulièrement en Suisse et n'y faisait que de brefs passages. Cette décision a
été notifiée le 17 janvier 2008 à l'intéressé par le Bureau communal des
étrangers.

Par courrier du 29 janvier 2008, l'intéressé a recouru contre la décision
rendue le 22 mars 2007 auprès de la Cour de droit administratif et public du
Tribunal cantonal du canton de Vaud. Il concluait au renouvellement de son
permis d'établissement. L'effet suspensif a été accordé le 12 février 2008. Le
Tribunal cantonal a entendu l'intéressé ainsi que A.________ à titre de témoin.
Il ressort en substance de l'instruction que l'intéressé loue un studio à
Z.________ depuis 2000 ou 2001. Il revient en Suisse tous les deux mois et demi
pour une semaine. Le reste du temps, il est en Italie. Ses enfants sont à Rome
pour études et son épouse à Lecce (I).

C.
Par arrêt du 8 juillet 2008, le Tribunal cantonal a jugé que la décision du 27
décembre 2005 n'avait pas été correctement notifiée, de sorte que le recours du
29 janvier 2008 devait être considéré comme dirigé contre celle-ci et non pas
contre la décision rejetant la demande de réexamen. Sur le fond, il a rejeté le
recours. Il a jugé que les séjours que l'intéressé s'astreignait à effectuer en
Suisse depuis 2000 ou 2001 pour éviter d'être absent durant six mois ne
suffisaient pas pour interrompre le délai de l'art. 9 al. 3 lettre c de la loi
fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE;
RS 1 113). Le permis d'établissement devait prendre fin. Il était en outre trop
tard pour en demander la prolongation conformément à l'art. 9 al. 3 lettre c in
fine LSEE.

D.
Par courrier du 15 août 2008, X.________ a demandé au Tribunal fédéral de lui
restituer son permis d'établissement. Ce courrier a été suivi d'un mémoire de
recours complémentaire qui conclut à la réforme de l'arrêt rendu le 8 juillet
2008 par le Tribunal cantonal en ce sens qu'une autorisation d'établissement
est accordée à l'intéressé, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au
Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Le Tribunal cantonal et le Service cantonal de la population ont renoncé à
déposer des observations. L'Office fédéral des migrations conclut au rejet du
recours.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur la caducité de l'autorisation d'établissement prononcée le
27 décembre 2005, soit avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de la
loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr; RS 142.20).
Conformément à l'art. 126 al. 1 LEtr, le cas est par conséquent régi par la loi
fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers.

2.
2.1 Le recourant n'indique pas par quelle voie de recours il procède auprès du
Tribunal fédéral. Toutefois, cette imprécision ne saurait lui nuire si son
recours remplit les exigences légales de la voie de droit qui lui est ouverte
(voir, sur le choix erroné d'une voie de recours, ATF 134 III 379 consid. 1.2
p. 382), soit en l'occurrence le recours en matière de droit public.

2.2 Aux termes de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit
public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers
qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit
international ne donnent droit. Le recours en matière de droit public est
toutefois ouvert contre les décisions constatant qu'une autorisation
d'établissement a pris fin (arrêt 2A.14/2004 du 4 juin 2004 consid. 1.1; ATF 99
Ib 1 consid. 2 p. 4/5; cf. aussi consid. 1 non publié in ATF 112 Ib 1 et 120 Ib
369).

2.3 Déposé en temps utile par le destinataire de l'arrêt attaqué qui a un
intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (cf. art. 89
al. 1 LTF), le recours, dirigé contre un jugement final (cf. art. 90 LTF) rendu
par une autorité cantonale de dernière instance (cf. art. 86 al. 1 lettre d
LTF), est en principe recevable.

3.
3.1 D'après l'art. 1 lettre a LSEE (dans sa version en vigueur depuis le 1er
juin 2002), la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers n'est
applicable aux ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne que
si l'accord du 21 juin 1999 entre, d'une part, la Confédération suisse et,
d'autre part, la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre
circulation des personnes n'en dispose autrement. L'accord de libre échange ne
contient pas de dispositions relatives aux autorisations d'établissement, comme
le confirme l'art. 5 de l'ordonnance sur l'introduction progressive de la libre
circulation des personnes entre, d'une part, la Confédération suisse et,
d'autre part, la Communauté européenne et ses Etats membres, ainsi qu'entre les
Etats membres de l'Association européenne de libre-échange (Ordonnance sur
l'introduction de la libre circulation des personnes, OLCP; RO 2002 1741).
Selon cette disposition, les ressortissants de la CE et de l'AELE ainsi que les
membres de leur famille reçoivent une autorisation d'établissement CE/AELE de
durée indéterminée sur la base des art. 6 LSEE et 11 du règlement d'exécution
du 1er mars 1949 de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des
étrangers (RSEE; RO 1949 p. 243) ainsi qu'en conformité avec les conventions
d'établissement conclues par la Suisse.

La Suisse et l'Italie ont conclu la Convention d'établissement et consulaire du
22 juillet 1868 (RS 0.142.114.541), qui a fait l'objet d'une Déclaration
concernant l'application de la convention italo-suisse d'établissement et
consulaire du 22 juillet 1868 du 5 mai 1934 (RS 0.142.114.541.3; entrée en
vigueur par échange de notes le 1er août 1934) portant notamment sur la fin du
droit d'établissement des italiens en Suisse .

3.2 Selon l'art. 9 al. 3 lettre c LSEE et le chiffre 3 de la Déclaration du 5
mai 1934 précitée, qui contient une réglementation similaire (arrêt 2A.464/1999
du 19 juin 2000 in RDAT 2000 II n° 63 p. 239), l'autorisation d'établissement
prend fin lorsque l'étranger annonce son départ ou qu'il a séjourné
effectivement pendant six mois à l'étranger; sur demande présentée au cours de
ce délai, celui-ci peut être prolongé jusqu'à deux ans.
Le recourant n'a pas annoncé son départ. Reste à examiner s'il a effectivement
séjourné pendant six mois à l'étranger.

4.
4.1 D'après la jurisprudence, l'autorisation d'établissement prend fin lorsque
l'étranger séjourne à l'étranger de manière ininterrompue pendant six mois
consécutifs, quels que soient les causes de cet éloignement et les motifs de
l'intéressé. Le délai de six mois n'est pas interrompu lorsque l'étranger
revient en Suisse avant l'échéance de ce délai non pas durablement, mais
uniquement pour des séjours d'affaires ou de visite (ATF 120 Ib 369 consid. 2c
et d p. 372 s.; 112 Ib 1 consid. 2a p. 2 s.). La présence en Suisse un jour par
semaine de l'étranger afin de satisfaire aux obligations de contrôle du chômage
ne suffit pas pour maintenir l'autorisation d'établissement (arrêt 2A.621/1996
du 6 mars 1997 in RDAT 1997 II n° 46 p. 153; cf. Andreas Zünd, Beendigung der
Anwesenheit, Entfernung und Fernhaltung, in Ausländerrecht 2002, p. 207 ss, p.
210 s.).

4.2 En l'espèce, le Tribunal cantonal a constaté que l'épouse et les enfants du
recourant sont partis en Italie depuis 2000 ou 2001, que celui-ci dispose
depuis cette date d'un studio à Z.________, qu'il est habituellement en Italie
et qu'il revient en Suisse tous les deux mois et demi pour la durée d'une
semaine, notamment pour consulter son médecin trois ou quatre fois l'an. Ces
constatations se fondent sur l'audition du recourant devant le Tribunal
cantonal et sont confirmées dans le mémoire de recours complémentaire. En
affirmant qu'il ne passait en Suisse une semaine que tous les deux mois et demi
par année, le recourant reconnaît qu'avant fin décembre 2005, il avait quitté
la Suisse depuis plus de six mois consécutifs. Dans ces circonstances, il n'est
pas nécessaire d'établir à partir de quelle date le délai de six mois a
commencé à courir. Les conditions de l'art. 9 al. 3 lettre c LSEE étaient de
toute façon réunies en date du 27 décembre 2005, lorsque le Service cantonal de
la population a déclaré que l'autorisation d'établissement avait pris fin. Quoi
qu'en pense le recourant, le délai de six mois de l'art. 9 al. 3 lettre c LSEE
avait commencé à courir dès que, quittant la Suisse, celui-ci est resté en
Italie, qu'il en ait eu conscience, ou non. On ne comprend au surplus pas en
quoi l'allégation du recourant selon laquelle l'autorité administrative n'a
rencontré aucune difficulté dans ses relations avec lui aurait pour effet de
modifier ces constatations.

Dans ces conditions, en jugeant que les séjours du recourant en Suisse
n'avaient pour but que l'accomplissement de démarches administratives et
bancaires, que sa vie se déroulait en Italie et que ses brefs séjours en Suisse
ne suffisaient pas à interrompre le délai de six mois prévu par l'art. 9 al. 3
lettre c LSEE, le Tribunal cantonal n'a pas violé le droit fédéral.

5.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 65 et 66
al. 1 LTF). Il n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'800 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service de la
population et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal
du canton de Vaud et à l'Office fédéral des migrations.

Lausanne, le 6 novembre 2008
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Merkli Dubey