Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.506/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

2C_506/2008
{T 0/2}

Arrêt du 2 février 2009
IIe Cour de droit public

Composition
MM. et Mme les Juges Müller, Président,
Merkli, Zünd, Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffière: Mme Mabillard.

1. Parties
A.________ SA,
2. B.________ et C.________,
3. D.________ SA,
4. E.________ et F.________,
5. G.________,
6. H.________,
7. I.________,
8. J.________,
9. K.________,
recourants, tous représentés par Me Louis Gaillard, avocat,

contre

Conseil d'Etat du canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 2, 1204 Genève,
représenté par Me Bruno Mégevand, avocat,

Objet
Appellation d'origine contrôlée AOC,

recours en matière de droit public contre le règlement du 2 juin 2008 modifiant
le règlement du 28 juin 2000 sur les vins genevois.

Faits:

A.
Dans le canton de Genève, il incombe au Conseil d'Etat de fixer, par voie
réglementaire, les mesures nécessaires à la promotion de la qualité de la
vendange et des appellations d'origine, après avoir consulté l'Interprofession
(cf. art. 20 al. 1 de la loi genevoise du 17 mars 2000 sur la viticulture
[LVit; RS/GE M 2 50]). Le Conseil d'Etat a ainsi édicté le règlement du 28 juin
2000 sur les vins genevois (RVins; RS/GE M 2 50.04).

Selon l'art. 2 RVins, le règlement s'applique à toute production issue de
vignes à vocation vinicole commerciale, situées sur le territoire du canton et
recensées dans le cadastre viticole. Aux termes de l'art. 27 RVins, seuls les
vins issus des vignes destinées à la production vinicole commerciale et situées
dans le cadastre viticole ont droit, lorsque la limitation de rendement à
l'unité de surface et les conditions fixées dans le règlement sont respectées,
aux appellations suivantes: a) AOC Premier Cru, b) AOC communale et régionale,
c) AOC Genève. La disposition transitoire de l'art. 69 RVins règle notamment le
cas des vignes situées en zone frontalière.

Par règlement du 2 juin 2008, publié dans la Feuille d'avis officielle de la
République et canton de Genève du 9 juin suivant, le Conseil d'Etat a modifié
l'art. 69 al. 2 RVins. La nouvelle teneur de la disposition est la suivante:
" Vins issus de vignes situées en zone frontalière
2 Jusqu'au 31 décembre 2009, les vins issus des vignes situées dans la zone
frontalière, dont les propriétaires ou usufruitiers sont domiciliés en Suisse,
au sens de la loi fédérale sur les douanes, du 1er octobre 1925, peuvent :
a) bénéficier de l'appellation d'origine contrôlée Genève, pour autant qu'ils
respectent, en particulier, les exigences prévues pour cette appellation
figurant dans le titre III, chapitre I, du présent règlement, dont les autres
dispositions sont applicables pour le surplus;
b) bénéficier d'une indication de provenance (catégorie II) ou d'une
désignation vin blanc, vin rouge (catégorie III), pour autant qu'ils
respectent, en particulier, les exigences prévues dans le titre III, chapitre
II, du présent règlement, dont les autres dispositions sont applicables pour le
surplus."
Dans l'exposé des motifs relatif à cette modification, le Conseil d'Etat a
expliqué que les frontières du canton de Genève divisaient le bassin agricole
naturel de la région genevoise et que, pour remédier à ce problème et assurer
l'approvisionnement de Genève, la création d'une zone franche avait accompagné
la délimitation des frontières de 1815. Les vignes de zone, appellation non
officielle donnée aux vignes com- prises dans un périmètre de 10 km au-delà de
la frontière suisse, représentaient une surface de vignes françaises d'environ
130 hectares, dont le raisin était vinifié en Suisse. Jusqu'au 31 décembre
2007, la production issue de ces vignes pouvait prétendre à l'appellation
d'origine (AO) Genève dans la mesure où le propriétaire était domicilié en
Suisse. Une remise en cause importante de ce statut était apparue à la suite de
l'adoption en 1999 de l'Accord bilatéral entre la Suisse et la Communauté
européenne. En effet, l'annexe consacrée aux produits viti-vinicoles prévoyait
qu'un vin suisse devait résulter d'un processus de transformation réalisé sur
territoire suisse à partir de raisins récoltés sur ce même territoire. La
définition des vins français était fondée sur la même logique. En conséquence,
les vins issus des vignes de zone et vinifiés en Suisse étaient devenus des
vins apatrides, ni suisses ni français. De surcroît, le régime des AO avait été
aboli en Suisse depuis le 1er janvier 2008. Un projet de modification de
l'Accord bilatéral était en cours, qui permettrait d'étendre l'AOC Genève sur
le territoire français. Dans l'attente de son entrée en vigueur, il s'imposait
de prendre des mesures afin de préserver la viabilité économique de la
production issue des vignes de ces zones. La seule solution, qui respectait le
droit fédéral, consistait à faire bénéficier le vin en question d'une AOC.

B.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, B.________ et
C.________, E.________ et F.________, G.________, H.________, I.________,
J.________ et K.________ ainsi que les sociétés A.________ SA et D.________ SA,
demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler le
règlement du Conseil d'Etat du 8 juin 2008. Ils concluent également à ce que le
Tribunal fédéral dise, "qu'avec effet dès le 1er janvier 2008, le vin issu de
vignes sises dans les zones franches de la Haute-Savoie et du Pays de Gex ne
peut porter une indication de provenance telle que "appellation d'origine
contrôlée Genève", "appellation d'origine contrôlée (suit le nom d'une commune
genevoise)", "appellation d'origine Genève", "vin de Genève" ou toute autre
indication donnant à penser aux consommateurs qu'il est issu de vignes sises
dans le canton de Genève". Les recourants font valoir que le règlement attaqué
viole le droit fédéral, en particulier les art. 63 de la loi fédérale du 29
avril 1998 sur l'agriculture (LAgr; RS 910.1) et 21 de l'ordonnance du 14
novembre 2007 sur la viticulture et l'importation de vin (ordonnance sur le
vin; RS 916.140), ainsi que le droit international, à savoir l'Accord conclu le
21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne relatif
aux échanges de produits agricoles (ci-après: l'Accord bilatéral; RS
0.916.026.81), plus précisément les art. 5 et 6 de l'Annexe 7 dudit Accord.

Le Conseil d'Etat conclut, sous suite de frais et dépens, à l'irrecevabilité du
recours et, subsidiairement, à son rejet.

Les parties ont maintenu leurs conclusions au terme d'un échange ultérieur
d'écritures.

Invité à se prononcer sur le recours, l'Office fédéral de l'agriculture
(ci-après: l'Office fédéral) a indiqué qu'il approuvait et soutenait la
démarche genevoise qui consiste à mettre en place une AOC transfrontalière et
permet la continuité d'une pratique existant depuis plusieurs décennies.

C.
Par ordonnance du 4 septembre 2008, le Président de la IIe Cour de droit public
a rejeté les requêtes d'effet suspensif et de mesures provisionnelles contenues
dans le recours.

Considérant en droit:

1.
1.1 Le règlement attaqué constitue un acte normatif cantonal et ne peut faire
l'objet d'aucun recours dans le canton de Genève. Il est par conséquent
directement attaquable par un recours en matière de droit public (art. 82 let.
b et 87 al. 1 LTF), qui a par ailleurs été formé en temps utile (art. 101 LTF).

1.2 En vertu de l'art. 89 al. 1 LTF, peut former un recours en matière de droit
public quiconque est particulièrement atteint par l'acte normatif attaqué
(lettre b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa
modification (lettre c). Lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce,
contre un acte normatif cantonal, la qualité pour recourir appartient à toute
personne dont les intérêts sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou
pourront l'être un jour; une simple atteinte virtuelle suffit, à condition
toutefois qu'il existe un minimum de vraisemblance que le recourant puisse un
jour se voir appliquer les dispositions contestées (ATF 131 I 291 consid. 1.3
p. 296, 124 I 11 consid. 1b p. 13, 122 I 70 consid. 1b p. 73 et la
jurisprudence citée). Quant à l'intérêt digne de protection, il n'est pas
nécessaire qu'il soit de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant
(ATF 133 I 286 consid. 2.2 p. 290).

En l'espèce, tous les recourants sont des vignerons ou des
propriétaires-encaveurs, qui cultivent des vignes et produisent du vin sur le
territoire cantonal genevois. De ce fait, ils sont soumis au règlement sur les
vins genevois et leurs vins peuvent bénéficier - si les conditions fixées dans
le règlement sont respectées - des appellations AOC Premier Cru, AOC communale
et régionale ainsi qu'AOC Genève. Les intéressés sont touchés personnellement
par la modification de l'art. 69 al. 2 RVins, dès lors que celui-ci permet
également aux vins issus des vignes situées dans la zone frontalière de
bénéficier de l'appellation d'origine contrôlée Genève. En effet, outre
l'intérêt commercial des recourants à la crédibilité et à la transparence des
indications géographiques d'origine, une plus grande quantité de vins "AOC
Genève" ou autre indication de provenance tend à accroître l'offre des vins
genevois et à rendre plus difficile l'écoulement des produits sur le marché.
Partant, les recourants ont un intérêt digne de protection à contester le
règlement litigieux qui les défavorise, à tout le moins virtuellement.

1.3 Les recourants demandent au Tribunal fédéral de "dire qu'avec effet dès le
1er janvier 2008, le vin issu de vignes sises dans les zones franches de la
Haute-Savoie et du Pays de Gex ne peut porter une indication de provenance
telle que «appellation d'origine contrôlée Genève», "appellation d'origine
contrôlée (suit le nom d'une commune genevoise)", "appellation d'origine
Genève", "vin de Genève" ou toute autre indication donnant à penser aux
consommateurs qu'il est issu de vignes sises dans le canton de Genève". En tant
qu'elle porte sur la vendange 2008, cette conclusion s'apparente à une requête
d'effet suspensif ou de mesures provisionnelles. Or, le Président de la IIe
Cour de droit public a rejeté, par ordonnance du 4 septembre 2008, les requêtes
d'effet suspensif et de mesures provisionnelles des recourants. Partant, la
conclusion précitée est irrecevable.

1.4 Au surplus, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes
requises (art. 42 LTF), le recours est en principe recevable comme recours en
matière de droit public.

2.
Appelé à statuer sur un recours en matière de droit public dirigé contre un
acte normatif cantonal, le Tribunal fédéral examine librement la conformité de
cet acte au droit fédéral (art. 95 let. a LTF) et au droit international (art.
95 let. b LTF). Il n'annule toutefois les dispositions attaquées que si elles
ne se prêtent à aucune interprétation conforme au droit invoqué ou si, en
raison des circonstances, leur teneur fait craindre avec une certaine
vraisemblance qu'elles soient interprétées de façon contraire au droit
supérieur (cf. ATF 125 I 369 consid. 2; 119 Ia 321 consid. 4, 348 consid. 1d).
En effet, dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes, le Tribunal fédéral
s'impose une certaine retenue eu égard notamment au principe découlant du
fédéralisme et de la proportionnalité. Dans ce contexte, ce qui est décisif,
c'est que la norme mise en cause puisse, d'après les principes d'interprétation
reconnus, se voir attribuer un sens compatible avec les dispositions du droit
supérieur. Pour en juger, il faut notamment tenir compte de la portée de
l'atteinte aux droits en cause, de la possibilité d'obtenir ultérieurement, par
un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante, et des
circonstances concrètes dans lesquelles ladite norme sera appliquée (cf. ATF
129 I 12 consid. 3.2 p. 15; 128 I 327 consid. 3.1 p. 334 s. et les arrêts
cités).

3.
Les recourants contestent la compatibilité du règlement attaqué avec le droit
international et invoquent à l'appui de leur grief les art. 5 et 6 de l'Annexe
7 de l'Accord bilatéral. Ils font valoir que les pays parties à l'accord ont
pris des engagements réciproques de respect du principe de la territorialité.
Ainsi, l'art. 5 par. 2 de l'annexe prévoit que les dénominations protégées
d'une partie sont réservées exclusivement aux produits originaires de la partie
auxquels elles s'appliquent et ne peuvent être utilisées que sous les
conditions prévues par les lois et réglementations de cette partie. Selon
l'art. 6 de l'annexe, en relation avec l'appendice 2, sont des dénominations
protégées notamment les indications géographiques et les appellations d'origine
contrôlée. Le Conseil d'Etat est d'avis que les recourants ne peuvent se
plaindre de la violation de l'Accord bilatéral et de son annexe, dès lors que
ni l'un ni l'autre ne sont directement applicables.

3.1 La Suisse a conclu avec la Communauté européenne l'Accord bilatéral relatif
aux échanges de produits agricoles. Cet accord a pour but de renforcer les
relations de libre-échange entre les parties par une amélioration de leur accès
au marché des produits agricoles de l'autre partie (art. 1 par. 1 de l'Accord).
L'Annexe 7 prévoit notamment la reconnaissance mutuelle de l'équivalence des
législations, la protection réciproque des désignations géographiques et
mentions traditionnelles ainsi que l'assistance mutuelle entre autorités de
contrôle (cf. Message du 23 juin 1999 relatif à l'approbation des accords
sectoriels entre la Suisse et la CE, FF 1999 5440 ss, p. 5544).

En vertu de l'art. 5 al. 4 Cst., la Confédération et les cantons doivent
respecter le droit international. Ainsi, la question de savoir si les
dispositions topiques de l'Accord sont directement applicables n'est pas
déterminante en l'espèce, car il ne s'agit pas de discuter de droits ou
d'obligations que les recourants pourraient invoquer directement en justice,
mais plutôt d'examiner un règlement cantonal à la lumière de l'Accord en
question (cf. à propos des règles d'interprétation, Fabrice Filliez,
Application des accords sectoriels par les juridictions suisses: quelques
repères, in Felder/Kaddous, Accords bilatéraux Suisse - UE, p. 201 s.). Or, en
ce qui concerne l'adoption de normes nouvelles, le principe de la primauté de
droit international s'applique (cf. à ce sujet, Nicolas Michel, L'imprégnation
du droit étatique par l'ordre juridique international, in Thürer/Aubert/Müller,
Droit constitutionnel suisse, p. 69 s.). Le Tribunal fédéral peut donc vérifier
que le droit cantonal adopté postérieurement à l'Accord est conforme à ce
dernier.

3.2 L'extension d'une AOC au-delà des frontières nationales apparaît
effectivement problématique au regard de l'Accord bilatéral, lequel circonscrit
clairement les AOC à l'intérieur des limites des territoires nationaux des
parties (principe de la territorialité). En effet, en vertu de l'art. 3 let. a
de l'annexe 7 dudit accord, on entend par "produit viti-vinicole originaire
de", suivi du nom de l'une des parties, un produit élaboré sur le territoire de
ladite partie à partir de raisins entièrement récoltés sur ce même territoire.
Selon cette définition dont le texte est clair, au sens des art. 31 ss de la
Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (RS 0.111), les
vins issus des vignes situées en France et vinifiés en Suisse ne peuvent pas
être considérés comme du vin originaire de suisse et ne sauraient par
conséquent bénéficier de l'AOC d'un canton suisse.

Depuis l'entrée en vigueur de l'Accord bilatéral, le 1er juin 2002, il existe
un vide juridique à l'égard de ces "vins de zone" qui étaient considérés comme
des vins genevois depuis plusieurs générations. Consciente de ce problème et de
l'incompatibilité de la situation actuelle avec le droit international général
(cf. consid. 3.3 ci-après) et conventionnel, la Suisse a entrepris des
démarches, dès 2005, en vue de faire modifier l'Accord bilatéral, à savoir de
compléter les définitions contenues dans l'Accord par une disposition pour les
zones transfrontalières, ce qui permettrait d'adapter la réglementation
genevoise des AOC en conformité avec le droit supérieur. La compétence de
conclure des conventions internationales dans le domaine agricole appartient en
principe au Conseil fédéral (art. 177a al. 1 LAgr; cf. art. 54 al. 1 Cst.);
l'Office fédéral de l'agriculture peut, d'entente avec les autres offices et
services fédéraux concernés, conclure avec des autorités agricoles étrangères,
des instituts de recherches de droit public ou des organisations
internationales, des conventions de nature technique portant notamment sur la
reconnaissance d'appellations d'origine dans le domaine agricole (art. 177a al.
2 let. e LAgr). Il n'appartient dès lors pas aux cantons de conclure des
traités avec l'étranger dans le domaine de la viti-viniculture et des AOC (art.
56 al. 1 Cst. a contrario) et encore moins de réglementer, dans leur
législation interne, une question d'ordre international en relation avec ce
domaine, comme c'est le cas en l'espèce.

Ainsi, tant que l'Accord bilatéral ne permet pas qu'un vin originaire d'un pays
puisse être élaboré avec du raisin provenant d'une zone limitrophe d'un pays
voisin, le règlement litigieux, qui adopte par anticipation un tel système,
n'est pas conforme au droit international et empiète sur les compétences de la
Confédération.

3.3 Au demeurant, l'interprétation proposée par le Conseil d'Etat ne va pas
sans poser d'importants problèmes de droit international public. En effet, la
souveraineté implique le droit exclusif de déployer les activités étatiques sur
le territoire qui en fait l'objet, ce qui vise très concrètement le contrôle en
principe exclusif des choses ou des personnes qui s'y localisent provisoirement
ou définitivement (Joe Verhoeven, Droit international public, 2000, p. 486;
Quoc Dinh Nguyen, Droit international public, 7e éd. 2002, p. 474 s.). On
constate donc que la simple application des règles générales du droit
international public consacrant le principe d'exclusivité de la souveraineté
territoriale s'oppose déjà à la mise en place d'un système d'AOC intégrant une
partie du territoire français, ne serait-ce qu'au regard des contrôles
culturaux que l'autorité genevoise doit être à même d'effectuer dans les vignes
ainsi situées à l'étranger. L'Accord bilatéral ne fait ainsi que réaffirmer le
principe général en question et n'y déroge aucunement.

4.
D'après les recourants, le règlement attaqué viole également le droit fédéral
dans la mesure où il accorde la désignation AOC Genève à du vin issu de vignes
situées en zone frontalière. Ils estiment que, d'une part, le droit fédéral ne
permet pas aux cantons d'étendre une AOC au-delà des frontières nationales et,
que, d'autre part, le vignoble considéré ne constitue pas une entité
géographique bien déterminée puisque le régime prévu fait dépendre l'AOC du
domicile en Suisse des propriétaires ou usufruitiers concernés. Le Conseil
d'Etat fait valoir, pour sa part, que l'art. 21 al. 3 de l'ordonnance sur le
vin ne vise pas que des situations "trans-cantonales" mais également des
situations "trans-nationales". Par ailleurs, l'aire géographique de l'AOC
serait bel et bien déterminée puisqu'elle correspond à la zone frontalière
telle que définie dans la loi fédérale sur les douanes du 1er octobre 1925 (RS
6 469 et les modifications ultérieures), à savoir une zone limitrophe qui
s'étend à 10 km de chaque côté de la frontière.

4.1 Selon la jurisprudence, la loi s'interprète en premier lieu d'après sa
lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si
plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher
quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les
éléments à considérer, soit de sa relation avec d'autres dispositions légales
(interprétation systématique), du but poursuivi, de l'esprit de la règle, des
valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé
(interprétation téléologique), ainsi que de la volonté du législateur telle
qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation
historique). Le sens que prend la disposition dans son contexte est également
important (ATF 132 III 18 consid. 4.1 p. 20/21; 131 II 361 consid. 4.2 p. 368
et les références citées dans ces arrêts).

4.2 L'art. 63 LAgr prévoit que les vins sont classés en vins d'appellation
d'origine contrôlée, vins de pays et vins de table (al. 1). Le Conseil fédéral
établit la liste des critères à prendre en compte pour les vins d'appellation
d'origine contrôlée et les vins de pays (al. 2). Les cantons fixent au surplus
pour chaque critère les exigences pour leurs vins d'appellation d'origine
contrôlée et pour les vins de pays produits sur leur territoire sous une
dénomination traditionnelle propre (al. 3).

L'art. 21 de l'ordonnance sur le vin, relatif aux vins d'appellation d'origine
contrôlée, a la teneur suivante:
"1 Par vin d'appellation d'origine contrôlée (AOC) on entend un vin désigné par
le nom d'un canton ou d'une aire géographique d'un canton.
2 Les cantons fixent les exigences applicables aux AOC; celles-ci doivent
prévoir:
a. une délimitation de l'aire géographique dans laquelle le raisin au minimum
est produit;
b. une liste des cépages autorisés;
c. une liste des méthodes de culture autorisées;
d. une teneur minimale naturelle en sucre par cépage autorisé;
e. un rendement maximum à l'unité de surface par cépage autorisé;
f. une liste des méthodes de vinification autorisées;
g. un système d'analyse et d'examen organoleptique du vin prêt à la vente.
3 Les cantons peuvent étendre une AOC au-delà de leurs frontières:
a. lorsque le vignoble constitue une entité géographique bien déter- minée, et
b. lorsque l'AOC commune est soumise aux mêmes exigences.
4 [...] 5 [...]"
La simple lecture de l'al. 3 précité ne semble pas de prime abord exclure
l'extension d'une AOC au-delà des frontières cantonales se confondant avec des
frontières nationales. Le texte italien ("al di là delle frontiere") n'est pas
plus explicite à ce sujet, alors que la version allemande ("über die kantonalen
Grenzen hinaus") précise qu'il s'agit des frontières cantonales.
L'interprétation littérale de la disposition ne permet toutefois pas de
trancher si la notion de frontière cantonale peut ou non se recouper avec celle
de frontière nationale.

4.3 En revanche, le législateur a évoqué la possibilité d'étendre une
appellation au-delà des frontières cantonales des "cantons concernés" (cf. art.
11 al. 3 de l'ordonnance sur le vin du 7 décembre 1998; consid. 4.4
ci-dessous), ce qui signifie qu'il envisageait uniquement les frontières
intercantonales et permet de rejeter l'interprétation d'une appellation à
vocation transnationale.

4.4 L'arrêté fédéral du 19 juin 1992 sur la viticulture (RO 1992 1986)
établissait une classification des moûts et des vins en trois catégories
(indication de provenance, appellation d'origine et appellation d'origine
contrôlée) ainsi que la réglementation relative aux dénominations. Dans son
message du 25 novembre 1991 relatif à cet arrêté (FF 1991 437), le Conseil
fédéral est d'avis qu'il faut s'en tenir au principe selon lequel l'étendue
d'une appellation d'origine devrait, sauf exceptions limitées, ne pas dépasser
les frontières d'un canton (FF 1991 459); les cantons peuvent obtenir, sur
demande, d'étendre l'appellation d'origine au-delà des frontières d'un canton,
lorsque le vignoble en question constitue une entité géographique bien
déterminée (région du Vully par exemple) (FF 1991 467).

La loi fédérale du 29 avril 1998 sur l'agriculture, adoptée à la suite de la
réforme de la politique agricole 2002, a notamment abrogé l'arrêté fédéral du
19 juin 1992. La protection de la désignation des vins est ainsi dorénavant
fondée directement sur la loi sur l'agriculture. Les désignations correspondent
en tous points aux notions fixées dans l'arrêté sur la viticulture et les
cantons règlent comme auparavant les désignations qu'ils ont adoptées (Message
du 26 juin 1996 concernant la réforme de la politique agricole, Deuxième étape
[Politique agricole 2002], FF 1996 1, p. 196 et 199).

Sur la base de la nouvelle loi sur l'agriculture, le Conseil fédéral a adopté
l'ordonnance du 7 décembre 1998 sur la viticulture et l'importation de vin
(ordonnance sur le vin; RO 1999 86), où il définit les notions d'appellation
d'origine, appellation d'origine contrôlée et indication de provenance. Lors de
la modification de l'ordonnance du 26 novembre 2003 (RO 2003 4915), il a
ajouté, pour les appellations d'origine contrôlée, que "les cantons concernés
peuvent étendre une AOC au-delà des frontières cantonales lorsque le vignoble
constitue une entité géographique bien déterminée" (art. 11 al. 3 de
l'ordonnance). L'ordonnance sur le vin du 7 décembre 1998 a été abrogée et
remplacée par l'ordonnance du même nom du 14 novembre 2007, actuellement en
vigueur.

Les messages relatifs à l'évolution de la législation sur l'agriculture et la
viticulture en particulier (cf. Message du 27 juin 1995 concernant le paquet
agricole 95, FF 1995 621; Message du 26 juin 1996 concernant la réforme de la
politique agricole: Deuxième étape [Politique agricole 2002], FF 1996 1;
Message du 17 mai 2006 concernant l'évolution future de la politique agricole
[Politique agricole 2011], FF 2006 6027) ne contiennent aucun commentaire sur
les frontières dans lesquelles l'AOC des vins devrait se circonscrire, ni sur
la possibilité offerte aux cantons d'étendre une appellation au-delà de leurs
frontières. Ce point n'a pas non plus suscité de discussions lors des débats
aux Chambres fédérales.

Il ressort des interprétations littérale et historique que l'extension d'une
AOC au-delà des frontières d'un canton ne doit, de façon générale, être admise
que restrictivement, en répondant pour le moins aux exigences de l'art. 21 al.
3 de l'ordonnance sur le vin. La possibilité d'une approche transnationale de
l'AOC ne trouve également aucun ancrage dans le texte de l'art. 11 al. 3 de
l'ordonnance sur le vin du 7 décembre 1998 qui, de manière explicite,
n'envisage que le cas de l'AOC intercantonale.

Finalement, l'éventualité d'une extension extranationale n'a jamais été
mentionnée dans les travaux préparatoires. Une interprétation historique de la
disposition amène ainsi à exclure la volonté du législateur de permettre aux
cantons d'étendre une AOC au-delà des frontières nationales. Cette
interprétation est au surplus conforme aux règles de droit international
exposées au considérant précédent (cf. consid. 3 ci-dessus).

5.
Il convient encore de procéder à une analyse systématique et téléologique de
l'art. 21 al. 3 de l'ordonnance sur le vin pour déterminer dans quelle mesure
l'extension d'une appellation au-delà de la frontière nationale serait
compatible avec la législation fédérale en matière d'agriculture et de
viniculture.

5.1 Le droit fédéral actuel prévoit trois classes de productions pour les vins
suisses, à savoir les vins d'appellation d'origine contrôlée (classe
supérieure), les vins de pays (classe médiane) et les vins de table (classe
inférieure). S'agissant de cette dernière catégorie, l'ordonnance sur les vins
précise que, "par vin de table suisse, on entend un vin issu de raisins
récoltés en Suisse" (art. 24 al. 1 de l'ordonnance). A plus forte raison, le
vin de qualité supérieure doit remplir ces exigences minimales et provenir de
vignes sises en Suisse. Quant au vin de pays, il est par définition issu d'une
région dont l'étendue dépasse celle d'un canton (cf. art. 22 al. 1 de
l'ordonnance); pour ce motif, le Conseil fédéral a estimé que sa réglementation
incombait à la Confédération (Message sur la Politique agricole 2011, op. cit.,
p. 6124). L'AOC au contraire se rapporte en principe à un vin produit à
l'intérieur d'un canton (cf. art. 21 al. 1 de l'ordonnance) et est laissé à la
compétence des cantons; ce n'est qu'exceptionnellement qu'elle peut s'étendre
hors du territoire cantonal. Si la Confédération dispose de la compétence pour
réglementer les appellations qui dépassent les frontières cantonales, il ne
peut en aller que de même a fortiori lorsque l'appellation s'étend au-delà des
frontières nationales, sous réserve des exigences explicites et contraignantes
de l'art. 21 al. 3 de l'ordonnance sur le vin.

5.2 L'exécution du contrôle de la vendange incombe aux cantons (art. 64 al. 3
LAgr). Celui-ci doit porter sur toute la récolte de raisin destiné à la
vinification, dans le but d'assurer le respect des dispositions de production
(art. 28 al. 1 de l'ordonnance sur le vin). Les cantons doivent également
contrôler la conformité des vins AOC aux exigences qu'ils ont fixées (art. 21
al. 4 de l'ordonnance); pour ces vins, l'art. 21 al. 6 de l'ordonnance fixe la
limite des rendements à l'unité de surface que les cantons ne doivent pas
excéder. Cela étant, on ne voit pas comment des autorités cantonales pourraient
effectuer des contrôles de la vendange sur territoire étranger, notamment pour
s'assurer que les limites à l'unité de surface sont respectées. Ces facteurs
sont toutefois indispensables pour garantir la qualité des produits AOC, raison
pour laquelle l'ordonnance ne permet l'extension d'une AOC hors d'un canton que
"lorsque l'AOC commune est soumise aux mêmes exigences" (art. 21 al. 3 let. b
de l'ordonnance). On peut relever à ce propos l'absence d'élément au dossier
établissant que les exigences en matière d'AOC seraient les mêmes sur le
territoire français que dans le canton de Genève ou qu'il existerait des
accords à ce sujet entre les deux pays.

Dans l'ATF 109 Ia 116, le Tribunal fédéral - saisi d'un recours contre un
arrêté cantonal exigeant que les vins commercialisés sous les appellations
d'origine valaisanne soient vinifiés en Valais - a constaté que l'autorité
cantonale compétente n'était pas en mesure de contrôler les vinifications
opérées en dehors des limites du territoire valaisan; cela signifiait
pratiquement que les autorités valaisannes étaient dans l'impossibilité de
garantir l'appellation d'origine valaisanne de vins dont la fermentation
n'avait pas été soumise à ce contrôle (consid. 5c p. 125). De même, on peut
constater que la possibilité offerte aux cantons d'étendre une AOC à des vins
issus de vignes situées à l'étranger ne leur permet pas de prévenir les risques
d'abus ni de garantir la qualité de leurs vins; or, des mesures telles que le
contrôle de la vendange visent aussi à protéger la bonne foi du consommateur
qui doit pouvoir s'attendre à un produit d'une certaine qualité lorsqu'il
achète un vin dont l'appellation d'origine est garantie (cf. ATF précité,
consid. 4d p. 124). L'extension d'une appellation hors des frontières
nationales apparaît ainsi incompatible avec le système des AOC.

5.3 Les prescriptions en matière d'AOC ont en effet pour but de garantir
l'authenticité des produits, notamment leur qualité et leur provenance. Elles
protègent ainsi les consommateurs en même temps qu'elles valorisent les
ressources spécifiques d'une région. La loi fédérale du 9 octobre 1992 sur les
denrées alimentaires et les objets usuels (LDAI; RS 817.0), qui tend à protéger
les consommateurs contre les tromperies relatives aux denrées alimentaires
(art. 1 let. c LDAI), s'applique également aux produits viticoles. Selon l'art.
18 al. 3 LDAI, sont réputées trompeuses notamment les indications propres à
susciter chez le consommateur de fausses idées sur la provenance de la denrée
alimentaire. De façon plus précise, l'ordonnance du DFI du 23 novembre 2005 sur
les boissons alcooliques (RS 817.022.110) fixe les exigences auxquelles doivent
satisfaire ces boissons, vin y compris, et règle les modalités d'étiquetage
(cf. art. 1 al. 1). L'art. 9 al. 2 de ladite ordonnance signale que sur les
vins suisses de la classe "Appellation d'origine contrôlée" doit figurer en
plus l'origine géographique correspondante. L'étiquette doit également
mentionner le pays de production, pour autant qu'il ne soit pas identifiable
d'après la dénomination spécifique, le nom ou la raison sociale et l'adresse du
producteur (art. 10 al. 1 let. c). En outre, l'art. 13 interdit le coupage des
vins suisses portant une AOC avec du vin étranger (al. 2); le coupage consiste
à mélanger entre eux des raisins, des moûts de raisin ou des vins d'origines ou
de provenances différentes (al. 1).

A lire ces dispositions, il ne fait pas de doute que la mention "AOC Genève"
sur des bouteilles de vin dont une partie ou la totalité des raisins provient
du sol français est propre à tromper les consommateurs. En effet, l'indication
de la provenance n'est pas correcte, puisque par "Genève" on entend usuellement
le canton de Genève - voire la ville de Genève - mais en aucun cas le
territoire qui se trouve au-delà de la frontière (cantonale ou nationale). A
cela s'ajoute que, au vu de la législation suisse, le consommateur ne peut pas
s'attendre à ce que du vin suisse certifié AOC soit produit ou coupé avec du
raisin cultivé en France.

6.
Il découle ainsi de l'interprétation de l'art. 21 al. 3 de l'ordonnance sur le
vin que l'extension de l'AOC Genève hors des frontières nationales, telle
qu'elle est prévue par le règlement litigieux, est incompatible avec les
exigences strictes du droit suisse en matière d'AOC. Cette interprétation est
au demeurant conforme au principe de la territorialité découlant de l'Accord
bilatéral et du droit international public général (cf. consid. 3 ci-dessus).
Par conséquent, la nouvelle teneur de l'art. 69 al. 2 let. a RVins viole
également le droit fédéral, sans qu'il soit besoin d'examiner le grief tiré de
l'"entité géographique bien déterminée".

On peut néanmoins relever à cet égard qu'il apparaît problématique de faire
dépendre l'attribution d'une AOC à des vignobles en fonction du domicile de
leurs propriétaires. Ce critère est en effet totalement étranger à la notion
d'entité géographique, déterminante en matière d'AOC et qui se rapporte à des
données objectives telles que les spécificités d'un territoire particulier, à
savoir la qualité du sol, l'exposition des terrains, les cépages utilisés, le
climat, etc. Une appellation d'origine est en effet liée à un produit et non
pas à une entreprise ou à une personne (Message du 25 novembre 1991 relatif à
l'arrêté fédéral du 19 juin 1992 sur la viticulture, FF 1991 467; cf. également
Yves Donzallaz, Le système d'appellation d'origine contrôlée dans le canton du
Valais, in CdA 1991, p. 81 et 88; Boisseaux/ Barjolle, La bataille des A.O.C.
en Suisse, 2004, p. 17 ss, qui mettent en évidence les spécificités des AOC
viticoles en Suisse).

7.
7.1 Les recourants contestent également la nouvelle teneur de l'art. 69 al. 2
let. b RVins, selon lequel les vins de zone peuvent, si les conditions sont
remplies, bénéficier d'une indication de provenance (catégorie II) ou d'une
désignation vin blanc, vin rouge (catégorie III). Ils relèvent que ces notions
ont été supprimées au niveau fédéral, depuis la modification de l'art. 63 LAgr,
et que la disposition attaquée est par conséquent contraire au droit fédéral.
Selon le Conseil d'Etat, la terminologie "indication de provenance" utilisée
dans la disposition transitoire de l'art. 69 al. 2 let. b RVins a été gardée
pour préserver la cohérence interne du règlement genevois.

7.2 Dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 (RO 1998 3048), l'art.
63 en relation avec l'art. 64 LAgr prévoyait que les vins étaient classés en
trois catégories, à savoir les vins avec appellation d'origine et appellation
d'origine contrôlée (catégorie 1), les vins avec indication de provenance
(catégorie 2) et les vins sans appellation d'origine ni indication de
provenance (catégorie 3). La nouvelle teneur de l'art. 63 LAgr, introduite par
la loi fédérale du 22 juin 2007 (RO 2007 6095 6107), classe les vins en vins
d'appellation d'origine contrôlée, vins de pays et vins de table. En vertu de
l'art. 187c LAgr, qui règle les dispositions transitoires relatives à la
modification du 22 juin 2007, les vins des millésimes 2007 et antérieurs
peuvent être élaborés et étiquetés selon l'ancien droit, et peuvent être remis
au consommateurs jusqu'à épuisement des stocks. Dans le même sens, l'art. 48 de
l'ordonnance sur le vin prévoit que les vins suisses issus des raisins des
vendanges 2007 sont élaborés selon l'ancien droit (al. 1); les vins suisses
d'appellation d'origine contrôlée issus des raisins de la vendange 2008 peuvent
être élaborés conformément aux exigences fixées par les cantons selon l'ancien
droit fédéral (al. 2) et les cantons doivent adapter leurs dispositions
relatives aux vins d'appellation d'origine contrôlée le 1er juin 2009 au plus
tard (al. 3). Ainsi, à partir des vendanges 2008, seuls les vins d'appellation
d'origine contrôlée peuvent encore être soumis à l'ancien droit, les autres
catégories devant être adaptées à la nouvelle législation. Il s'ensuit que dès
le millésime 2008, les cantons ne peuvent plus élaborer et étiqueter des vins
sous une dénomination inconnue du nouveau droit, telle que l'indication de
provenance. A cela s'ajoute que l'ordonnance du DFI sur les boissons
alcooliques interdit également le coupage des vins de pays suisses et des vins
de table suisses avec du vin étranger (art. 13 al. 2). Pour ces motifs, la
disposition litigieuse viole le droit fédéral et doit être annulée.

En outre, comme il a été vu ci-dessus, le canton de Genève n'a pas la
compétence de légiférer dans un domaine qui relève de l'Accord bilatéral. La
disposition contestée est également contraire au droit international.

8.
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours dans la
mesure où il est recevable et à l'annulation du règlement litigieux. Les
recourants, qui obtiennent gain de cause, ont droit à des dépens, à la charge
du canton de Genève (art. 68 al. 2 LTF). Il n'est pas perçu de frais
judiciaires (art. 66 al. 4 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable et le règlement du 2
juin 2008 modifiant le règlement du 28 juin 2000 sur les vins genevois est
annulé.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Une indemnité de 4'000 fr. est allouée aux recourants à titre de dépens, à la
charge du canton du Genève.

4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au mandataire du
Conseil d'Etat du canton de Genève et à l'Office fédéral de l'agriculture.

Lausanne, le 2 février 2009
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

R. Müller F. Mabillard