Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.227/2008
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Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
2C_227/2008-svc

Arrêt du 17 avril 2008
IIe Cour de droit public

Composition
M. et Mmes les Juges Merkli, Président, Yersin
et Aubry Girardin.
Greffier: M. Vianin.

Parties
AX.________,
recourante, représentée par Me Philippe Degoumois, avocat,

contre

Service des Migrations, Office de la population
et des migrations du canton de Berne (SEMI), Eigerstrasse 73, 3011 Bern,
intimé.

Objet
Autorisation de séjour,

recours en matière de droit public contre la décision du Tribunal administratif
du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, du 15 février 2008.

Faits:

A.
Ressortissante camerounaise née en 1954, AX.________ a épousé le 27 octobre
2000 BY.________, né en 1936, de nationalité suisse. Arrivée en Suisse le 11
avril 2001, elle a obtenu une autorisation de séjour qui a par la suite été
renouvelée à deux reprises.
Par jugement du 3 juin 2003 du Président de l'Arrondissement judiciaire de
Z.________, BY.________ a été autorisé à vivre séparé de son épouse et le
domicile conjugal attribué à cette dernière. Les époux Y.________ ont cessé la
vie commune le 30 juin 2003.

B.
Par décision du 18 janvier 2007, le Service des migrations de l'Office de la
population et des migrations du canton de Berne (ci-après: le Service des
migrations) a refusé de prolonger l'autorisation de séjour de AXY.________ au
motif qu'elle invoquait abusivement son mariage pour demeurer en Suisse.
Saisie d'un recours contre ce prononcé, la Direction de la police et des
affaires militaires du canton de Berne l'a rejeté par décision du 25 juillet
2007.
Le 22 août 2007, AXY.________ a recouru contre cette décision au Tribunal
administratif du canton de Berne. Par acte du même jour, elle a également
interjeté un recours auprès du Conseil exécutif du canton de Berne. Cette
dernière autorité a suspendu la procédure devant elle jusqu'à droit connu dans
la procédure devant le Tribunal administratif.
Le Tribunal administratif s'est saisi de la cause sous l'angle du droit à
l'octroi d'une autorisation de séjour (ou d'établissement) en vertu de l'art. 7
al. 1 de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des
étrangers (LSEE; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007), alors que la question
du bien-fondé de la décision entreprise au regard de l'art. 4 LSEE -
disposition qui laisse l'octroi de l'autorisation à l'appréciation de
l'autorité - ressortissait au Conseil exécutif. Par arrêt du 15 février 2008,
le Tribunal administratif a rejeté le recours, en considérant qu'aucun indice
concret ne laissait entrevoir une possible réconciliation entre les époux et la
reprise de la vie commune. Il a considéré que les motifs de la séparation - à
savoir, selon AXY.________, le comportement inadéquat et violent de son mari -
ne jouaient aucun rôle du point de vue du droit à l'autorisation, dès le moment
où la volonté de maintenir l'union conjugale avait cessé d'exister. Il a donc
estimé qu'il était superflu d'administrer de nouveaux moyens de preuve relatifs
aux prétendues violences conjugales, comme le demandait la prénommée. Au
demeurant, le Tribunal administratif a rejeté la requête d'assistance
judiciaire gratuite formée par cette dernière, au motif que le recours était
dénué de chances de succès.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, AXY.________
demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt
du Tribunal administratif du 15 février 2008 et d'ordonner la prolongation de
son autorisation de séjour. Elle conteste également le refus de l'autorité
intimée de lui accorder l'assistance judiciaire. A titre préalable, elle
requiert que son recours soit doté de l'effet suspensif et demande à bénéficier
de l'assistance judiciaire pour l'instance fédérale.
Par ordonnance du Président de la IIe Cour de droit public du Tribunal de céans
du 18 mars 2008, la requête d'effet suspensif a été admise.
Il n'a pas été requis d'observations.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr; RS 142.20) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2008 (RO 2007 5487). En vertu de l'art. 126
al. 1 LEtr, les demandes déposées avant l'entrée en vigueur de la loi sont
régies par l'ancien droit. La présente affaire doit donc être examinée à la
lumière de l'ancienne loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et
l'établissement des étrangers (LSEE; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007).

2.
2.1 Selon l'art. 83 lettre c ch. 2 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal
fédéral (LTF; RS 173.110), le recours en matière de droit public est
irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui
concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit
international ne donnent droit.
En vertu de l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un ressortissant suisse
a droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour. Pour juger
de la recevabilité du recours en matière de droit public, seule est
déterminante la question de savoir si un mariage au sens formel existe (cf. ATF
126 II 265 consid. 1b p. 266 s'agissant du recours de droit administratif au
sens des art. 97 ss de l'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire du 16
décembre 1943 [OJ; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2006]). La recourante est
mariée à un Suisse. Son recours est donc recevable sous cet angle.
La voie du recours en matière de droit public est également ouverte en ce qui
concerne le refus de l'assistance judiciaire, puisqu'à cet égard la décision
attaquée ne tombe sous aucune des dispositions de l'art. 83 LTF.

2.2 Au surplus, interjeté par une partie directement touchée par la décision
attaquée et qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa
modification (art. 89 al. 1 LTF), le recours est dirigé contre un jugement
rendu dans une cause de droit public (art. 82 lettre a LTF) par une autorité
cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 lettre d LTF). Déposé dans le
délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, il est
en principe recevable.

3.
Selon l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un ressortissant suisse a
droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour; après un
séjour régulier et ininterrompu de cinq ans, il a droit à l'autorisation
d'établissement; ce droit s'éteint lorsqu'il existe un motif d'expulsion. Quant
à l'art. 7 al. 2 LSEE, il prévoit que le conjoint étranger d'un ressortissant
suisse n'a pas droit à l'octroi ou à la prolongation de l'autorisation de
séjour, lorsque le mariage a été contracté dans le but d'éluder les
dispositions sur le séjour et l'établissement des étrangers et notamment celles
sur la limitation du nombre des étrangers. D'après la jurisprudence, le fait
d'invoquer l'art. 7 al. 1 LSEE peut être constitutif d'un abus de droit, en
l'absence même d'un mariage contracté dans le but d'éluder les dispositions sur
le séjour et l'établissement des étrangers au sens de l'art. 7 al. 2 LSEE (ATF
130 II 113 consid. 4.2 p. 117; 127 II 49 consid. 5a p. 56 et la jurisprudence
citée).
L'existence d'un abus de droit découlant du fait de se prévaloir de l'art. 7
al. 1 LSEE ne peut être simplement déduit de ce que les époux ne vivent plus
ensemble, puisque le législateur a volontairement renoncé à faire dépendre le
droit à une autorisation de séjour de la vie commune (cf. ATF 118 Ib 145
consid. 3 p. 149 ss). Pour admettre l'existence d'un abus de droit, il ne
suffit pas non plus qu'une procédure de divorce soit entamée; le droit à
l'octroi ou à la prolongation d'une autorisation de séjour subsiste en effet
tant que le divorce n'a pas été prononcé, car les droits du conjoint étranger
ne doivent pas être compromis dans le cadre d'une telle procédure. Enfin, on ne
saurait uniquement reprocher à des époux de vivre séparés et de ne pas
envisager le divorce. Toutefois, il y a abus de droit lorsque le conjoint
étranger invoque un mariage n'existant plus que formellement dans le seul but
d'obtenir une autorisation de séjour, car ce but n'est pas protégé par l'art. 7
al. 1 LSEE. Le mariage n'existe plus que formellement lorsque l'union conjugale
est rompue définitivement, c'est-à-dire lorsqu'il n'y a plus d'espoir de
réconciliation; les causes et les motifs de la rupture ne jouent pas de rôle
(ATF 131 II 265 consid. 4.2 p. 267; 130 II 113 consid. 4.2 p. 117 et les arrêts
cités).

4.
4.1 La recourante fait valoir que la rupture du lien conjugal est imputable à
son mari, qui aurait eu à plusieurs reprises un comportement violent à son
endroit et qui entretiendrait une relation extra-conjugale. De son côté, elle
aurait toujours souhaité et souhaiterait encore la reprise de la vie commune.
Dans ces conditions, on ne saurait lui reprocher d'agir abusivement en se
prévalant de son mariage. Il serait inadmissible "de soutenir les maris qui
épousent une femme d'origine étrangère, la font venir en Suisse et se
comportent violemment avec elle, voire même entretiennent des relations
extra-conjugales, ce qui engendre le renvoi de cette dernière dans son pays
d'origine".

4.2 Comme l'a relevé l'autorité intimée et comme indiqué ci-dessus (consid. 3),
les motifs de la séparation ne jouent pas de rôle du point de vue du droit à
l'autorisation en vertu de l'art. 7 al. 1 LSEE. A cet égard, seul importe le
point de savoir s'il existe encore un espoir de réconciliation ou si l'union
conjugale est définitivement rompue. Or, en l'espèce, les époux Y.________
étaient séparés depuis plus de quatre ans et demi lors du prononcé de la
décision attaquée. Il ressort d'un courrier adressé à l'intimé le 10 août 2006
par le mandataire d'alors de la recourante que "les époux Y.________ n'ont plus
conservé de contacts et n'envisagent pas une reprise de la vie commune"
(décision attaquée, p. 9). La recourante ne fait valoir aucun indice concret
que cette situation aurait évolué dans le sens d'une reprise de la vie commune.
Dans ces conditions, l'autorité intimée était fondée à considérer qu'il était
(manifestement) abusif de la part de la recourante de se prévaloir de son
mariage n'existant plus que formellement pour obtenir le renouvellement de son
autorisation de séjour sur la base de la disposition précitée. Partant, le
recours est mal fondé sur ce point.
Les motifs de la séparation peuvent éventuellement être pris en considération
par l'autorité compétente pour délivrer une autorisation en vertu de son
pouvoir d'appréciation, sur la base de l'art. 4 LSEE. L'examen du cas de la
recourante sous l'angle de cette disposition ne fait toutefois pas l'objet de
la présente procédure.

5.
Le droit à l'assistance judiciaire est défini en premier lieu par le droit
cantonal, dont le Tribunal fédéral ne contrôle l'application et
l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire; dans tous les cas,
l'autorité cantonale doit cependant respecter les garanties minimales déduites
directement de l'art. 29 al. 3 Cst., dont le Tribunal fédéral examine librement
le respect (ATF 129 I 129 consid. 2.1 p. 133; 128 I 225 consid. 2.3 p. 226).
Aux termes de l'art. 111 al. 1 de la loi bernoise du 23 mai 1989 sur la
procédure et la juridiction administratives (LPJA; RS/BE 155.21), "l'autorité
de justice administrative dispense du paiement des frais de procédure [...] la
partie dont l'indigence pour subvenir aux frais de procès est établie [...] et
pour autant que la procédure ne paraisse pas d'emblée vouée à l'échec".
Selon l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources
suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de
succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Un procès est dépourvu de chances
de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles
que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent guère être considérées
comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée
renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir
supporter (ATF 129 I 129 consid. 2.2 p. 133; 122 I 267 consid. 2b p. 271).

6.
6.1 La recourante fait grief à l'autorité intimée d'avoir violé son droit à
l'assistance judiciaire gratuite. Elle lui reproche en effet d'avoir admis que
son recours était dépourvu de chances de succès au terme d'un examen
approfondi, alors qu'elle aurait dû se limiter à examiner si, de prime abord,
son recours n'était pas dénué de chances de succès. Tel ne serait pas le cas,
puisque le litige porte sur la question de l'abus de droit à invoquer le
mariage. Il s'agirait d'une question d'appréciation. Au vu des circonstances de
l'espèce (mariage qui n'a jamais été considéré comme fictif, prolongation de
l'autorisation de séjour à deux reprises, union conjugale de plus de cinq ans,
séparation due exclusivement au comportement de l'époux), la recourante
pourrait prétendre au bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite aux fins de
sauvegarder ses droits.

6.2 A l'appui du grief de violation du droit à l'assistance judiciaire
gratuite, la recourante n'invoque aucune disposition de droit constitutionnel
ou cantonal, de sorte qu'il est douteux que le recours soit suffisamment motivé
à cet égard (cf. art. 106 al. 2 LTF). Quoi qu'il en soit, il est mal fondé.
S'agissant en tout cas de la condition liée aux chances de succès de la
procédure, l'art. 111 al. 1 LPJA n'est pas moins restrictif que l'art. 29 al. 3
Cst., de sorte que le grief doit être examiné seulement à la lumière de cette
dernière disposition.
Le recours devant l'autorité intimée était motivé principalement par le fait
que la séparation des époux Y.________ aurait été imputable au comportement
violent et infidèle de l'époux. Pour le reste, la recourante n'a pas allégué
d'indice concret de reprise de la vie commune, mais s'est limitée à faire
valoir que son mari et elle étaient "en bons termes" et qu'il n'était ainsi
"pas exclu" que la vie commune puisse reprendre (recours, p. 8). Dans ces
conditions, au vu de la jurisprudence constante selon laquelle les causes et
motifs de la séparation sont sans importance pour trancher la question de
l'abus de droit (manifeste) à invoquer un mariage n'existant plus que
formellement pour obtenir une autorisation, l'autorité intimée n'a pas violé
l'art. 29 al. 3 Cst. en estimant que les perspectives que la recourante
obtienne gain de cause devant elle étaient, de prime abord, notablement plus
faibles que les risques qu'elle succombe et en lui refusant, partant, le
bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite.

7.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure où
il est recevable. Les conclusions de la recourante apparaissant dénuées de
toute chance de succès également en instance fédérale, la requête d'assistance
judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF a contrario). Les frais de
justice seront fixés compte tenu de la situation financière de la recourante
(cf. art. 64 al. 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Des frais judiciaires de 800 fr. sont mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Service des
migrations et au Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires
de langue française, ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 17 avril 2008
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Merkli Vianin