Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2C.117/2008
Zurück zum Index II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice II. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
2C_117/2008

Arrêt du 17 avril 2008
IIe Cour de droit public

Composition
M. et Mmes les Juges Merkli, Président,
Yersin et Aubry Girardin.
Greffier: M. Vianin.

Parties
X.________,
recourante,
représentée par Me Laurent Maire, avocat,

contre

Service de la population du canton de Vaud, avenue de Beaulieu 19, 1014
Lausanne Adm cant VD,
intimé.

Objet
Révocation d'une autorisation de séjour,

recours en matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton de Vaud du 27 décembre 2007.

Faits:

A.
Ressortissante de Serbie-et-Monténégro née le 20 janvier 1984, X.________ est
entrée en Suisse le 23 octobre 2003 en vue de préparer son mariage avec
Y.________, ressortissant suisse. Le mariage a été célébré le 11 février 2004
et la prénommée a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour par
regroupement familial le 9 mars 2004. Aucun enfant n'est issu de cette union.

Le 17 février 2006, Y.________ a déposé une demande en divorce sans être
assisté d'un mandataire professionnel. Comme son acte ne répondait pas aux
exigences du code de procédure civile vaudois et qu'il n'a pas utilisé le délai
qui lui avait été imparti pour le régulariser, la procédure de divorce n'a
toutefois pas été engagée.

Le 2 août et le 21 décembre 2006, des mesures protectrices de l'union conjugale
ont été prononcées à la demande de Y.________ (requêtes respectivement du 6 mai
et du 24 novembre 2006). Entre autres mesures, les époux ont été autorisés à
vivre séparés pour une durée indéterminée; Y.________ a été libéré du paiement
de toute contribution d'entretien à l'égard de son épouse à compter du 1er
novembre 2006.

B.
Par décision du 20 juillet 2007, le Service de la population du canton de Vaud
(ci-après: le Service de la population) a révoqué l'autorisation de séjour de
X.________, qui était valable jusqu'au 10 août 2007, au motif que son mariage
serait vidé de toute substance et qu'elle n'aurait au surplus pas d'attaches
particulières avec la Suisse ni de qualifications professionnelles spécifiques.
Il s'est fondé ce faisant notamment sur les art. 4, 9 al. 2 lettre b et 16 de
la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers
(LSEE; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007).

Par acte du 17 août 2007, X.________ a déféré cette décision au Tribunal
administratif du canton de Vaud, qui a rejeté le recours par arrêt du 27
décembre 2007. Le Tribunal administratif a considéré que les époux X-Y.________
étaient séparés en tout cas depuis mai 2006, date à laquelle Y.________ avait
déposé une requête de mesures protectrices de l'union conjugale. Il a estimé
qu'aucun élément concret ne permettait de croire à une prochaine réconciliation
et à une volonté réelle de reprendre la vie commune, en refusant à cet égard de
déférer à la requête de X.________ de tenir une audience. Par conséquent, selon
le Tribunal administratif, le fait que l'épouse invoque le mariage pour obtenir
la prolongation de son autorisation de séjour constituait un abus de droit. Au
demeurant, il a considéré que la prénommée ne se trouvait pas dans une
situation où, selon la pratique de l'Office fédéral des migrations, en vue
d'éviter un cas d'extrême rigueur, l'autorisation de séjour peut être
renouvelée nonobstant le divorce ou la dissolution de l'union conjugale.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, X.________ demande
au Tribunal fédéral, principalement, d'annuler l'arrêt du Tribunal
administratif du 27 décembre 2007 et de prolonger son autorisation de séjour
d'une année et, subsidiairement, d'annuler l'arrêt en question et de renvoyer
la cause au Service de la population pour nouvelle décision, le tout sous suite
de frais et dépens. A titre préalable, elle requiert que son recours soit doté
de l'effet suspensif et demande à bénéficier de l'assistance judiciaire. Elle
dénonce une violation de l'art. 7 LSEE, de son droit d'être entendue et du
principe de l'interdiction de l'arbitraire.

Le Tribunal administratif s'en remet à justice quant à la recevabilité du
recours et propose de le rejeter sur le fond. Le Service de la population
renonce à se déterminer. L'Office fédéral des migrations propose de le rejeter.

Par ordonnance du Président de la IIe Cour de droit public du Tribunal de céans
du 7 février 2008, la requête d'effet suspensif a été admise.

Considérant en droit:

1.
La loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr; RS 142.20) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2008 (RO 2007 5487). En vertu de l'art. 126
al. 1 LEtr, les demandes déposées avant l'entrée en vigueur de la loi sont
régies par l'ancien droit. Par analogie, la présente affaire doit être examinée
à la lumière de l'ancienne loi fédérale sur le séjour et l'établissement des
étrangers.

2.
L'autorisation de séjour de la recourante est échue le 10 août 2007, durant la
procédure de recours cantonale. C'est donc à bon droit que l'autorité intimée a
traité la cause sous l'angle du renouvellement de l'autorisation de séjour.
Dans le cadre de la présente procédure, la cause doit également être examinée
sous cet angle.

3.
3.1 Selon l'art. 83 lettre c ch. 2 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal
fédéral (LTF; RS 173.110), le recours en matière de droit public est
irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui
concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit
international ne donnent droit.

En vertu de l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un ressortissant suisse
a droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour. Pour juger
de la recevabilité du recours en matière de droit public, seule est
déterminante la question de savoir si un mariage au sens formel existe (cf. ATF
126 II 265 consid. 1b p. 266 s'agissant du recours de droit administratif au
sens des art. 97 ss de l'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire du 16
décembre 1943 [OJ; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2006]). La recourante est
mariée à un Suisse. Son recours est donc recevable sous cet angle.

3.2 Au surplus, interjeté par une partie directement touchée par la décision
attaquée et qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa
modification (art. 89 al. 1 LTF), le recours est dirigé contre un jugement
rendu dans une cause de droit public (art. 82 lettre a LTF) par une autorité
cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 lettre d LTF). Déposé dans le
délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, il est
en principe recevable.

4.
Selon l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un ressortissant suisse a
droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour; après un
séjour régulier et ininterrompu de cinq ans, il a droit à l'autorisation
d'établissement; ce droit s'éteint lorsqu'il existe un motif d'expulsion. Quant
à l'art. 7 al. 2 LSEE, il prévoit que le conjoint étranger d'un ressortissant
suisse n'a pas droit à l'octroi ou à la prolongation de l'autorisation de
séjour, lorsque le mariage a été contracté dans le but d'éluder les
dispositions sur le séjour et l'établissement des étrangers et notamment celles
sur la limitation du nombre des étrangers. D'après la jurisprudence, le fait
d'invoquer l'art. 7 al. 1 LSEE peut être constitutif d'un abus de droit, en
l'absence même d'un mariage contracté dans le but d'éluder les dispositions sur
le séjour et l'établissement des étrangers au sens de l'art. 7 al. 2 LSEE (ATF
130 II 113 consid. 4.2 p. 117; 127 II 49 consid. 5a p. 56 et la jurisprudence
citée).

L'existence d'un abus de droit découlant du fait de se prévaloir de l'art. 7
al. 1 LSEE ne peut être simplement déduit de ce que les époux ne vivent plus
ensemble, puisque le législateur a volontairement renoncé à faire dépendre le
droit à une autorisation de séjour de la vie commune (cf. ATF 118 Ib 145
consid. 3 p. 149 ss). Pour admettre l'existence d'un abus de droit, il ne
suffit pas non plus qu'une procédure de divorce soit entamée; le droit à
l'octroi ou à la prolongation d'une autorisation de séjour subsiste en effet
tant que le divorce n'a pas été prononcé, car les droits du conjoint étranger
ne doivent pas être compromis dans le cadre d'une telle procédure. Enfin, on ne
saurait uniquement reprocher à des époux de vivre séparés et de ne pas
envisager le divorce. Toutefois, il y a abus de droit lorsque le conjoint
étranger invoque un mariage n'existant plus que formellement dans le seul but
d'obtenir une autorisation de séjour, car ce but n'est pas protégé par l'art. 7
al. 1 LSEE. Le mariage n'existe plus que formellement lorsque l'union conjugale
est rompue définitivement, c'est-à-dire lorsqu'il n'y a plus d'espoir de
réconciliation; les causes et les motifs de la rupture ne jouent pas de rôle
(ATF 131 II 265 consid. 4.2 p. 267; 130 II 113 consid. 4.2 p. 117 et les arrêts
cités).

5.
Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst.,
comprend notamment le droit pour l'intéressé de produire des preuves
pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves
pertinentes (ATF 133 I 270 consid. 3.1 p. 277; 127 V 431 consid. 3a p. 436; 124
II 132 consid. 2b p. 137). Le droit de faire administrer des preuves suppose
que le fait à prouver soit pertinent, que le moyen de preuve proposé soit
nécessaire pour constater ce fait et que la demande soit présentée selon les
formes et délais prescrits par le droit cantonal (ATF 119 Ib 492 consid. 5b/bb
p. 505). Par ailleurs, cette garantie constitutionnelle n'empêche pas
l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées
lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non
arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore
proposées, elle a la certitude que celles-ci ne pourraient l'amener à modifier
son opinion (ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 429; 119 Ib 492 consid. 5b/bb p. 505
/ 506).

Le droit d'être entendu implique également pour l'autorité l'obligation de
motiver sa décision. L'autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les
moyens des parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 133 I 270
consid. 3.1 p. 277; 133 III 439 consid. 3.3 p. 445; 130 II 473 consid. 4.1 p.
477).

6.
6.1 La recourante reproche à l'autorité intimée d'avoir admis, sans faire
preuve de la retenue commandée par la jurisprudence, qu'il était abusif de sa
part de se prévaloir de son mariage. Elle fait valoir que son union avec
Y.________ ne constituait pas un mariage de complaisance. En outre, elle ne
commettrait pas un abus de droit en se prévalant de son mariage, car il
existerait encore un espoir de réconciliation, ce que l'autorité intimée aurait
pu constater en tenant une audience et en entendant des témoins, comme elle
l'avait requis. Le refus de procéder à ces mesures d'instruction constituerait
une violation de son droit d'être entendue.

6.2 Le point déterminant est la question de savoir s'il y a encore un espoir de
réconciliation entre les époux X-Y.________, de sorte que leur union ne serait
pas rompue définitivement et qu'il ne serait pas abusif de la part de la
recourante de s'en prévaloir. Les autorités cantonales n'ont en revanche jamais
prétendu que le mariage en question aurait été fictif ou de complaisance, de
sorte que cette question n'a pas à être examinée plus avant.

Dans son recours du 17 août 2007 à l'autorité intimée, la recourante a demandé
son audition ainsi que celle d'un ami de son père, résidant à
Yverdon-les-Bains, qui l'avait accueillie lors de sa séparation d'avec son
mari. Cette personne aurait pu confirmer "quels ont été et quels sont les
sentiments de la recourante à l'endroit de M. Y.________" (p. 5). Son
témoignage devait "exclure définitivement tout doute [...] sur la sincérité du
mariage" (p. 10 s.). S'agissant de la possibilité d'une réconciliation, la
recourante s'est limitée à affirmer que "tout espoir de réconciliation n'est
pas perdu, pour autant que les époux acceptent que leur amour s'est transformé"
(p. 5). L'autorité intimée pouvait ainsi admettre, en procédant à une
appréciation anticipée des preuves, que les mesures d'instruction requises ne
l'amèneraient pas à modifier son opinion sur le point seul déterminant des
perspectives de réconciliation. Partant, elle n'a pas violé le droit d'être
entendue de la recourante en renonçant à la tenue d'une audience et à
l'audition du témoin précité.

Les époux X-Y.________ n'ont vécu ensemble que durant environ deux ans (de mars
2004 à mai 2006 au plus tard). Lorsque l'autorité intimée a statué, ils étaient
séparés depuis une année et demie environ et la recourante n'a fait valoir
aucun indice concret et sérieux de reprise de la vie commune. Dans ces
conditions, l'autorité intimée pouvait admettre que l'union était
définitivement rompue et qu'il était abusif de la part de la recourante de s'en
prévaloir dans le seul but de s'opposer à la révocation de son autorisation de
séjour. Partant, le grief de violation de l'art. 7 LSEE est mal fondé.

7.
7.1 La recourante voit une autre violation de son droit d'être entendue dans le
fait que l'autorité intimée n'aurait pas examiné son argumentation selon
laquelle l'autorité de première instance se serait fondée à tort sur l'art. 4
LSEE pour rendre une décision de révocation, de sorte que celle-ci serait
illicite. Elle fait valoir, en effet, que ce grief était essentiel ou à tout le
moins pertinent.

7.2 Quoi qu'en dise la recourante, le grief en question n'était plus pertinent
à partir du moment où, l'autorisation de séjour révoquée étant échue durant la
procédure de recours cantonale, la cause devait être traitée sous l'angle du
renouvellement et non plus de la révocation de ladite autorisation (cf. consid.
2). Au demeurant, l'autorité intimée a (aussi) confirmé la décision de
révocation en la fondant sur le seul art. 9 al. 2 lettre b LSEE. Ce faisant,
elle a tenu compte implicitement du grief de la recourante selon lequel cette
décision n'aurait pu reposer sur l'art. 4 LSEE. Le recours est donc mal fondé
également sur ce point.

8.
La recourante soutient encore que la décision attaquée serait arbitraire dans
la mesure où l'autorité intimée a refusé de procéder aux mesures d'instruction
requises et a omis de se prononcer sur le grief pertinent tiré de la violation
de l'art. 4 LSEE. Ce grief se confond avec les précédents, de sorte qu'il n'a
pas à être examiné plus avant.

9.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. Les conclusions
de la recourante apparaissant dénuées de toutes chances de succès, la requête
d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF a contrario).

Succombant, la recourante supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et
n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF). Les frais de justice seront
fixés compte tenu de sa situation financière (cf. art. 64 al. 2 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Des frais judiciaires de 1'000 fr. sont mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Service de
la population et au Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi qu'à
l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 17 avril 2008
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Merkli Vianin