Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
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I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.5/2008
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1C_5/2008

Arrêt du 29 février 2008
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Eusebio.
Greffier: M. Parmelin.

la société A.________,
recourante, représentée par Me Frédéric G. Olofsson, avocat,

contre

la société B.________,
intimée, représentée par Me Shahram Dini, avocat,
Département des constructions et des technologies de l'information de la
République et canton de Genève, Division juridique, case postale 22,
1211 Genève 8.

autorisation de construire complémentaire,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif de la République et canton
de Genève du 13 novembre 2007.

Faits:

A.
A. ________ et B.________ sont propriétaires de la parcelle n° 308, feuille
9, de la commune de Genève-Eaux-Vives, qui supporte un bâtiment d'habitation
constitué en propriété par étages au n° 12 de la rue Maunoir. La part de
copropriété de B.________ correspond aux combles de l'immeuble et celle de
A.________ aux logements répartis aux étages inférieurs.
Par décision du 10 juin 2004, publiée dans la Feuille d'avis officielle du 16
juin 2004, le Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement de
la République et canton de Genève, devenu par la suite le Département des
constructions et des technologies de l'information (ci-après: le
Département), a délivré à B.________ une autorisation définitive de
construire portant sur l'aménagement de deux appartements dans les combles de
l'immeuble, sur l'installation d'un ascenseur, sur la transformation de la
toiture ainsi que sur le rafraîchissement de la façade et de la cage
d'escalier.
En date du 14 juillet 2005, A.________ a demandé la révocation de cette
autorisation au motif qu'elle aurait été délivrée sur la base de faits
erronés et constitutifs d'actes de gestion déloyale.
Dans un courrier du 13 janvier 2006, le Département a informé la
constructrice du fait que les plans visés par l'autorisation de construire ne
mentionnaient pas les canaux de fumée dont la démolition était prévue aux
niveaux des combles, des surcombles et de la toiture et qu'ils ne
comportaient pas d'indication sur le passage des courettes sanitaires
figurant sur le plan des étages courants à travers les deux niveaux aménagés
dans les combles de l'immeuble. Il l'a invitée à régulariser la situation en
déposant une requête en autorisation de construire complémentaire.
Le 30 mars 2006, B.________ a déposé une demande d'autorisation de construire
complémentaire portant sur le maintien en l'état des canaux des cheminées et
des courettes des étages inférieurs. Par décision du 22 juin 2006, publiée
dans la Feuille d'avis officielle du 28 juin 2006, le Département a accédé à
cette requête. A.________ a recouru en vain contre cette décision auprès de
la Commission cantonale de recours en matière de constructions. Le Tribunal
administratif de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal
administratif ou la cour cantonale) a confirmé la décision prise le 23
janvier 2007 par cette autorité au terme d'un arrêt rendu le 13 novembre
2007.

B.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________
demande au Tribunal fédéral d'annuler les décisions prises par le Département
les 16 et 28 juin 2006, par la Commission cantonale de recours en matière de
constructions le 23 janvier 2007 et par le Tribunal administratif le 13
novembre 2007 et de révoquer ou ordonner aux autorités intimées de révoquer
l'autorisation de construire délivrée le 16 juin 2004 à B.________.
Le Département conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et
subsidiairement à son rejet. B.________ a pris des conclusions semblables.
Elle demande également que A.________ soit condamnée à une amende en
application de l'art. 33 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF; RS
173.110).

C.
Par ordonnance du 1er février 2008, le Président de la Ire Cour de droit
public a rejeté la demande d'effet suspensif présentée par A.________.

Considérant en droit:

1.
Dirigé contre une décision prise en dernière instance cantonale dans le
domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions,
le recours est recevable comme recours en matière de droit public selon les
art. 82 ss LTF et l'art. 34 al. 1 de la loi fédérale sur l'aménagement du
territoire (LAT; RS 700) dans sa teneur actuelle selon le ch. 64 de l'annexe
à la loi sur le Tribunal administratif fédéral (ATF 133 II 249 consid. 1.2 p.
251). Aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'est réalisée.
La recourante a pris part à la procédure de recours devant le Tribunal
administratif. En tant que copropriétaire de l'immeuble sis au n° 12 de la
rue Maunoir, elle est particulièrement touchée par l'arrêt attaqué qui
confirme l'octroi d'une autorisation de construire complémentaire dans les
combles de ce bâtiment sans son assentiment. Elle peut ainsi se prévaloir
d'un intérêt personnel et digne de protection à l'annulation de l'arrêt
attaqué. Sa qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF est à l'évidence
donnée. Les autres conditions de recevabilité du recours en matière de droit
public sont par ailleurs réunies de sorte qu'il y a lieu de statuer sur le
fond.

2.
A.________ reproche au Tribunal administratif d'avoir commis un déni de
justice formel en refusant de trancher la question de la qualité de l'intimée
pour requérir une autorisation de construire et engager les travaux autorisés
sans son accord au motif que cette question relevait du droit civil.
L'application des règles de droit privé est de la compétence du juge civil.
Cependant, le juge du contentieux administratif doit, sous réserve des
dispositions contraires, trancher les questions qui, posées isolément,
relèvent d'un autre organe, mais dont dépend sa décision (cf. André Grisel,
Traité de droit administratif, Neuchâtel 1984, p. 187 et les références
citées). On peut se demander ce qu'il en est à cet égard du point de savoir
si un copropriétaire par étage est habilité à déposer une demande
d'autorisation de construire sans l'accord des autres copropriétaires. Cette
question peut demeurer indécise. L'autorisation de construire complémentaire,
dont seule l'annulation était requise devant le Tribunal administratif, porte
en effet exclusivement sur le maintien en l'état des canaux de cheminées et
des courettes sanitaires aux niveaux des combles et des surcombles, qui ne
figuraient pas sur les plans du projet visés par le Département. La
recourante ne démontre pas, comme il lui appartenait de faire (cf. art. 106
al. 2 LTF; ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287), que le maintien de ces
éléments nécessitait son accord en vertu des règles sur la propriété par
étage. Quant à la question de savoir si ces mêmes règles font obstacle à
l'engagement des travaux autorisés par l'autorisation de construire du 10
juin 2004, elle excède l'objet du litige. La cour cantonale pouvait
d'ailleurs sans violer le droit fédéral considérer qu'elle ne relevait pas de
sa compétence. Sur ce point, le recours doit être rejeté dans la mesure où il
est recevable.

3.
La recourante estime que les conditions posées à la révocation de
l'autorisation définitive de construire délivrée à l'intimée en date du
10 juin 2004 seraient réalisées et reproche à la cour cantonale de ne pas
avoir examiné son recours sous cet angle. Le Département aurait dû refuser le
permis de construire aux motifs que l'intimée ne disposait d'aucun accès aux
canalisations d'évacuation des eaux usées et aux arrivées d'eau, d'une part,
et que les travaux engagés par B.________ seraient la source d'inconvénients
graves pour le voisinage et pour elle, d'autre part. Elle se plaint à ce
propos d'une violation de l'art. 22 al. 2 let. b LAT et de l'art. 14 let. a,
b et c de la loi cantonale sur les constructions et les installations
diverses.
La jurisprudence n'exclut pas qu'une décision entrée en force puisse être
modifiée lorsqu'elle ne concorde pas avec le droit en vigueur aux conditions
posées par la jurisprudence à la révocation des décisions dans les cas où,
comme en l'espèce, la loi ne renferme aucune règle à ce sujet (cf. ATF 121 II
273 consid. 1a/aa p. 276; 119 Ia 305 consid. 4c p. 310; 115 Ib 152 consid. 3a
p. 155; 109 Ib 246 consid. 4b p. 252). La recourante n'a cependant pas requis
la révocation de l'autorisation de construire délivrée à l'intimée le 10 juin
2004 et n'a pris aucune conclusion en ce sens devant le Tribunal
administratif. Elle s'est au contraire bornée à exiger l'annulation de
l'autorisation de construire complémentaire du 22 juin 2006 en relevant que
le Département aurait dû exiger une nouvelle demande d'autorisation de
construire et ne pas se limiter à requérir une autorisation de construire
complémentaire, dont les conditions n'étaient à ses yeux pas réunies. Cela
étant, elle ne saurait sérieusement reprocher à la cour cantonale d'avoir
examiné son recours sous cet angle exclusivement (cf. arrêt 1A.68/2004 du
16 décembre 2004 consid. 1.3). Il n'appartient pas davantage au Tribunal
fédéral d'examiner d'office et en première instance si les conditions d'une
révocation de l'autorisation de construire accordée le 10 juin 2004 à
B.________ sont réunies. Pour le surplus, la recourante ne cherche pas à
démontrer en quoi il était insoutenable d'admettre que les modifications
apportées au projet initial n'étaient pas de nature à justifier la mise en
oeuvre d'une nouvelle procédure d'autorisation de construire, mais qu'elles
pouvaient être examinées dans le cadre d'une procédure d'autorisation de
construire complémentaire.

4.
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est
recevable, aux frais de la recourante qui succombe (art. 65 al. 1 et 66 al. 1
LTF). Cette dernière versera des dépens à l'intimée qui obtient gain de cause
avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 LTF). Même si l'issue du recours
était prévisible, il n'y a pas matière à lui infliger une amende
disciplinaire en raison de procédés téméraires ou d'un comportement contraire
à la bonne foi en application de l'art. 33 al. 2 LTF, comme le demande
l'intimée. Une telle conclusion est d'ailleurs irrecevable.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la
recourante.

3.
Une indemnité de 2'000 fr. à payer à l'intimée, à titre de dépens, est mise à
la charge de la recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, ainsi qu'au
Département des constructions et des technologies de l'information et au
Tribunal administratif de la République et canton de Genève.

Lausanne, le 29 février 2008

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:

Féraud Parmelin