Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.571/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1C_571/2008

Arrêt du 19 mars 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Fonjallaz.
Greffière: Mme Tornay.

Parties
X.________SA,
recourante, représentée par Me Jean-Yves Schmidhauser, avocat,

contre

Conseil d'Etat de la République et Canton de
Genève,
agissant par le Département des constructions et des technologies de
l'information de la République et canton de Genève, case postale 3880, 1211
Genève 3.

Objet
protection des monuments, plan de site,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif de la République et canton de
Genève du
4 novembre 2008.

Faits:

A.
Sur la base d'une étude détaillée réalisée par son Service des monuments et des
sites, le Département des constructions et des technologies de l'information du
canton de Genève (ci-après: le département cantonal) a élaboré un projet de
plan de site n° 29559A-133 "Les squares de Montchoisy", en application des art.
38 ss de la loi cantonale du 4 juin 1976 sur la protection des monuments, de la
nature et des sites (LPMNS; RSG L4 05). Le périmètre du plan de site se trouve
en ville de Genève, entre la rue de Montchoisy, la route de Frontenex, l'avenue
William-Favre et la rue Ernest-Bloch et comprend quatre squares, séparés au
centre par les avenues Théodore-Flournoy et Ernest-Hentsch. Le règlement annexé
au projet de plan de site (RPS) prévoit que celui-ci a pour but "d'assurer la
protection de l'ensemble des squares de Montchoisy pour leurs qualités
urbanistiques, architecturales et paysagères, dans l'esprit du plan de
morcellement établi en 1927" (art. 1 RPS). Pour ce faire, le caractère de
l'ensemble du site doit être préservé, en particulier "les bâtiments dans leurs
principes architecturaux, notamment le gabarit, le volume, les matériaux et les
teintes ainsi que les aménagements extérieurs" (art. 3 al. 1 RPS). Quatre
catégories de bâtiments sont en outre distinguées: les "bâtiments maintenus" de
catégories A et B, qui présentent un intérêt en raison de leurs qualités
urbaines, architecturales et historiques (art. 4 RPS), les bâtiments avec
éléments intéressants, principalement en raison de leur qualité urbaine (art. 5
RPS) et les autres bâtiments (art. 6 RPS). "La modénature des façades, du
profil des toitures, des aménagements et des décors des halls d'entrée et des
cages d'escalier" des bâtiments classés dans la catégorie B doivent être
sauvegardés (art. 4 al. 3 RPS).

Ce projet de plan de site, qui a été soumis à enquête publique du 21 mars au 19
avril 2007, a reçu un préavis favorable du Conseil municipal de la Ville de
Genève. Une procédure d'opposition a été ouverte du 23 novembre au 22 décembre
2007. Le 21 décembre 2007, la société X.________SA, propriétaire de l'immeuble
sis 14, avenue Ernest-Hentsch sur la parcelle n° 1991 du registre foncier de la
commune de Genève section Eaux-Vives, s'est opposée au projet de plan de site.
Elle a notamment fait valoir que la classification de son immeuble dans la
catégorie B, qui fait obstacle à la construction d'attiques, était
disproportionnée et ne correspondait à aucun intérêt public. Par deux arrêtés
séparés du 17 mars 2008, le Conseil d'Etat de la République et canton de Genève
(ci-après: le Conseil d'Etat) a approuvé le plan de site n° 29559A-133 et
rejeté l'opposition de X.________SA.

B.
X.________SA a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de la
République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) contre les
deux arrêtés du Conseil d'Etat et conclu à leur annulation. Le 2 septembre
2008, le Tribunal administratif a procédé à une inspection locale en présence
des parties. Par arrêt du 4 novembre 2008, il a rejeté le recours. Il a
considéré en substance que les mesures de protection prévues par le plan de
site étaient conformes à la garantie de la propriété.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public et par celle du
recours constitutionnel subsidiaire, X.________SA demande au Tribunal fédéral
d'annuler cet arrêt et les arrêtés du 17 mars 2008 du Conseil d'Etat. Elle se
plaint d'une violation de la garantie de la propriété en ce sens que le plan de
site ne respecterait pas les conditions prévues à l'art. 36 al. 1 à 3 Cst. pour
les restrictions des droits fondamentaux. Elle invoque également une violation
de l'obligation de motiver et de l'égalité de traitement. Elle requiert en
outre la mise en oeuvre d'une inspection locale.

Le Tribunal administratif persiste dans les considérants et le dispositif de
son arrêt. Le département cantonal a présenté des observations et conclut au
rejet du recours.

Considérant en droit:

1.
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance
cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public de la
protection des monuments et des sites (art. 82 let. a LTF), le recours est en
principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82
ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. La
recourante a pris part à la procédure de recours devant le Tribunal
administratif. En tant que propriétaire d'un immeuble compris dans le périmètre
du projet de plan de site n° 29559A-133, elle est particulièrement touchée par
l'arrêt attaqué confirmant l'approbation dudit plan de site et le rejet de
l'opposition qu'elle avait formée à son encontre. Elle peut ainsi se prévaloir
d'un intérêt personnel et digne de protection à l'annulation de l'arrêt
attaqué. Elle a dès lors qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les
autres conditions de recevabilité étant par ailleurs réunies, la voie du
recours en matière de droit public est ouverte, ce qui entraîne
l'irrecevabilité du recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 LTF).

2.
Le Tribunal fédéral s'estimant suffisamment renseigné par le plan de site et
les photographies versés au dossier, il n'y a pas lieu de procéder à
l'inspection locale requise.

3.
Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, la
recourante se plaint d'une violation de son droit d'être entendue en raison
d'un défaut de motivation de l'arrêt attaqué. Elle soutient que le Tribunal
administratif n'aurait pas indiqué les motifs pour lesquels il y aurait lieu de
considérer que le bâtiment litigieux serait digne d'être protégé. Les juges
cantonaux n'auraient pas non plus mentionné les critères leur permettant de
conclure au respect du principe de la proportionnalité.

3.1 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.)
l'obligation pour le juge de motiver ses décisions, afin que le justiciable
puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient. Le juge
doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur
lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se
rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause.
Il n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits,
moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se
limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 134 I 83
consid. 4.1 p. 88 et les arrêts cités).

3.2 En l'espèce, le Tribunal administratif a relevé que l'intérêt du bâtiment
de la recourante, indépendamment de certaines qualités architecturales qui lui
étaient propres, découlait du fait qu'il avait été conçu et réalisé en
exécution d'un plan d'ensemble dessiné par l'architecte Maurice Braillard en
1927. Il s'est référé à l'avis de la Commission des monuments, de la nature et
des sites du canton de Genève, à celui de la Direction du patrimoine et des
sites ainsi qu'à l'étude réalisée en décembre 2006 par le Service des monuments
et des sites, qui reconnaissaient tous la valeur patrimoniale, architecturale
et historique des quatre squares de Montchoisy et des immeubles les entourant:
ces derniers formaient un ensemble architectural et urbain unique à Genève,
dans lequel volumes, gabarits, proportions, espaces libres, détails
constructifs et décoratifs se conjuguaient harmonieusement. Le Tribunal
administratif a encore souligné que le Conseil municipal de la Ville de Genève
avait délivré un préavis positif au plan de site. Les juges cantonaux ont aussi
précisé qu'ils avaient eux-mêmes observé, lors de l'inspection locale, que les
différents gabarits des immeubles reproduisaient le dénivelé de la pente, ce
qui conférait une cohérence à l'ensemble du site. La recourante prétend donc à
tort que le Tribunal administratif se serait contenté d'affirmer qu'il
n'existait aucun motif de s'écarter de l'appréciation des spécialistes ayant
diligenté l'étude du plan de site en question. De même, elle ne saurait se
prévaloir du fait que le Conseil d'Etat a admis, dans ses déterminations
antérieures, que le bâtiment litigieux présentait un intérêt "moindre" sur le
plan architectural, puisque la valeur de l'immeuble ne découle pas
principalement de ses qualités propres, mais de son appartenance à un plan
d'ensemble.

Par ailleurs, la lecture de l'arrêt attaqué permet de comprendre sans
difficulté la motivation relative au respect du principe de la
proportionnalité, retenue par le Tribunal administratif. En effet, celui-ci a
relevé que le règlement du plan de site, en distinguant quatre catégories de
bâtiments et en fixant des règles propres à chacune, ouvrait la voie à des
solutions nuancées, qui permettaient d'éviter de figer les bâtiments,
l'objectif principal étant de maintenir leur cohérence et de sauvegarder la
qualité de l'ensemble du site. Les restrictions apportées à la garantie de la
propriété par le plan de site et son règlement restaient dès lors adaptées et
adéquates pour atteindre le but poursuivi, ce d'autant plus qu'aucun élément ne
permettait de considérer qu'elles engendreraient des sacrifices trop importants
pour les propriétaires. La motivation du Tribunal administratif n'a d'ailleurs
pas échappé à la recourante, qui est précisément en mesure d'attaquer la
décision sur ce point. Par conséquent, le grief de la violation du droit d'être
entendu doit être rejeté.

4.
L'assujettissement d'un immeuble à des mesures de conservation ou de protection
du patrimoine naturel ou bâti constitue une restriction du droit de propriété
garanti par l'art. 26 al. 1 Cst.; pour être compatible avec cette disposition,
l'assujettissement doit reposer sur une base légale - une loi au sens formel si
la restriction est grave -, être justifié par un intérêt public et respecter le
principe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 126 I 219 consid.
2a p. 221 et les arrêts cités). La recourante soutient, s'agissant des
restrictions prévues dans le plan de site et applicables au bâtiment dont elle
est propriétaire, qu'aucune de ces trois conditions n'est remplie.

4.1 La recourante invoque en premier lieu le principe de la légalité, au sens
de l'art. 36 al. 1 Cst. Elle ne conteste pas que le périmètre des squares de
Montchoisy peut constituer un site au sens des art. 35 ss LPMNS. Elle ne met
pas non plus en doute que l'élaboration d'un plan de site à cet endroit repose
sur une base légale suffisante. Elle s'en prend uniquement aux mesures de
protection prévues par le plan litigieux, qui s'apparentent selon elle à un
"quasi-classement", et elle estime à cet égard que la base légale de l'art. 38
LPMNS est insuffisante.
4.1.1 Le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral, dans le contrôle de la base
légale d'un plan limitant les possibilités d'utilisation d'un immeuble, dépend
de la gravité des restrictions du droit de propriété du recourant. Si la
restriction est grave, le Tribunal fédéral examine librement la légalité de la
mesure de protection (ATF 126 I 219 consid. 2c p.222 et les arrêts cités). Si
la restriction n'est pas grave, il se borne à examiner si la juridiction
cantonale a interprété de manière arbitraire la norme invoquée comme base
légale (cf. ATF 130 I 360 consid. 1.2 p. 362; 126 I 213 consid. 3a p. 218, 219
consid. 2c p. 221 et les arrêts cités). Les mesures de conservation ou de
protection du patrimoine bâti constituent une limitation traditionnelle du
droit de propriété; en règle générale, elles ne portent pas d'atteinte très
grave à celui-ci. Les circonstances particulières de chaque situation sont
toutefois déterminantes; il faut ainsi vérifier si le propriétaire peut
continuer, en dépit de la mesure restrictive, de faire de son immeuble un usage
conforme à la destination de celui-ci et économiquement rationnel. Dans
l'affirmative, le rendement qu'il pourrait en retirer après reconstruction ou
transformation, s'il n'était pas soumis à la mesure en cause, n'entre pas en
considération (cf. ATF 126 I 219 consid. 2c p. 221; 118 Ia 384 consid. 4a p.
387; 112 Ib 263 consid. 4 p. 266 s. et les arrêts cités).
4.1.2 En l'espèce, le plan de site impose "le maintien de la modénature des
façades, du profil des toitures, des aménagements et des décors des halls
d'entrée et des cages d'escalier" des bâtiments classés dans la catégorie B
(art. 4 al. 3 RPS). L'obligation de "maintien" qui fait notamment obstacle à la
surélévation du bâtiment de la recourante pourrait être considérée comme une
restriction grave du droit de propriété, si elle empêchait durablement une
utilisation économique ou lucrative des locaux. La question peut toutefois
rester indécise puisque, même examinée librement, la base légale suffit.

En effet, les mesures prévues par le plan litigieux, qui tendent au "maintien
de bâtiments", disposent d'une base légale claire à l'art. 38 al. 2 let. a
LPMNS: cette disposition permet au Conseil d'Etat, par l'adoption d'un plan de
site, de prendre notamment "des mesures propres à assurer la sauvegarde ou
l'amélioration des lieux, telles que le maintien des bâtiments existants". Il
s'ensuit que l'exigence de l'art. 36 al. 1 Cst. est satisfaite.

4.2 La recourante ne conteste pas que le plan de site litigieux poursuive un
intérêt public de protection de l'ensemble des squares de Montchoisy pour leurs
qualités urbanistiques, architecturales et paysagères. Elle estime cependant
que cet intérêt public doit céder le pas devant l'intérêt public à la
construction de logements tel qu'il serait formalisé par la loi sur les
constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI; RSG L 5 05).
Elle prétend à tout le moins qu'aucun intérêt public ne saurait s'opposer à la
construction d'attiques sur le bâtiment dont elle est propriétaire.
4.2.1 D'après la jurisprudence, les restrictions de la propriété ordonnées pour
protéger les monuments et les sites naturels ou bâtis sont en principe
d'intérêt public (ATF 126 I 219 consid. 2c p. 221; 119 Ia 305 consid. 4b p. 309
et les arrêts cités). Tout objet ne méritant pas une protection, il faut
procéder à une appréciation d'ensemble, en fonction de critères objectifs ou
scientifiques. Pour le classement d'un bâtiment, la jurisprudence prescrit de
prendre en considération les aspects culturels, historiques, artistiques et
urbanistiques. La mesure ne doit pas être destinée à satisfaire uniquement un
cercle restreint de spécialistes; elle doit au contraire apparaître légitime
aux yeux du public ou d'une grande partie de la population, pour avoir en
quelque sorte une valeur générale (arrêt 1P.79/2005 du 3 septembre 2005, in ZBl
2007 p. 83; ATF 120 Ia 270 consid. 4a p. 275; 118 Ia 384 consid. 5a p. 389).

En règle générale, le Tribunal fédéral examine librement si une mesure de
protection est justifiée par un intérêt public suffisant; il s'impose toutefois
une certaine retenue lorsqu'il doit se prononcer sur de pures questions
d'appréciation ou tenir compte de circonstances locales, dont les autorités
cantonales ont une meilleure connaissance que lui, notamment en matière de
protection des monuments ou des sites (ATF 132 II 408 consid. 4.3 p. 416 et les
arrêts cités). Selon la jurisprudence en effet, il appartient de façon
prioritaire aux autorités des cantons de définir les objets méritant protection
(ATF 126 I 219 consid. 2c p. 222; 120 Ia 270 consid. 3b p. 275; 119 Ia 88
consid. 5c/bb p. 96; 118 Ia 394 consid. 2b p. 397; cf. aussi ATF 129 I 337
consid. 4.1 p. 344).
4.2.2 La recourante se prévaut d'abord du fait que la jurisprudence constante
du Tribunal administratif considérerait que l'intérêt public à la construction
de logements devrait prévaloir d'office sur les autres intérêts publics ou
privés, là où sévit la pénurie de logements. Cela ne ressort cependant pas des
deux arrêts du Tribunal administratif cités par la recourante à l'appui de son
affirmation: ces arrêts confirment l'existence du pouvoir d'appréciation dévolu
à l'autorité de décision qui est habilitée, en présence de deux intérêts
publics opposés et vu les circonstances concrètes, à faire prévaloir un intérêt
sur l'autre, sans que l'intérêt public à la construction de logements doive
nécessairement l'emporter sur celui lié à la protection du patrimoine. En
l'occurrence, le Tribunal administratif a estimé qu'il n'existait pas
d'éléments concrets permettant, en l'état, de considérer que l'adoption du plan
de site litigieux empêcherait la réalisation d'un nombre important de
logements. Le grief fondé sur la jurisprudence cantonale tombe donc à faux.

Le nouvel article 23 LCI dont se prévaut la recourante n'est pas plus en mesure
d'imposer la primauté de l'intérêt public à la construction de logements sur
celui à la protection du patrimoine, puisqu'il prévoit à son alinéa 3 que "le
département peut autoriser une augmentation de la hauteur du gabarit, à
condition que celle-ci ne compromette pas l'harmonie urbanistique de la rue".
L'alinéa 7 de cette disposition précise en outre que les dispositions relatives
à la protection du patrimoine restent applicables et renvoie par ailleurs
expressément aux art. 89 ss LCI qui prévoient des mesures de protection pour
les ensembles architecturaux du XIXe siècle et du début du XXe siècle.

La recourante conteste en outre le fait que le bâtiment dont elle est
propriétaire ait été classé dans la catégorie B visée par les prescriptions du
plan de site. Elle dénie tout intérêt architectural audit bâtiment et rappelle
qu'il n'a pas été construit à la même époque que les bâtiments réalisés par
l'architecte Maurice Braillard. Or, l'étude réalisée en décembre 2006 par le
Service des monuments et des sites a attribué le label "intéressant" au
bâtiment de la recourante, cette qualification ayant entraîné son
assujettissement au régime appliqué aux bâtiments de catégorie B selon l'art. 4
al. 3 RPS. Ces appréciations ont par ailleurs été avalisées par la commission
spécialisée et par la Direction du patrimoine et des sites. Comme exposé
ci-dessus, l'assujettissement de ce bâtiment à des normes de protection tient
d'abord au fait que celui-ci présente une valeur d'ensemble découlant de ses
rapports, tant sur le plan spatial que sur celui de l'organisation de sa
distribution intérieure avec les autres bâtiments situés dans le périmètre
protégé. Dans ces conditions, les juges cantonaux pouvaient considérer qu'il
n'existait aucun motif de s'écarter de cette appréciation et de dénier à
l'immeuble de la recourante la valeur que des spécialistes lui ont reconnue.

Enfin, relevant que certains immeubles alentours, plus hauts que le sien,
comprennent un attique ou un étage en retrait, la recourante considère que
l'interdiction de construire un attique sur son immeuble ne serait justifiée
par aucun intérêt public. Dans son écriture au Tribunal fédéral, le département
cantonal précise que les attiques desdits bâtiments, construits par
l'architecte Maurice Braillard, représentent une particularité qui remonte à
l'origine de la construction des squares et qui n'influe en rien sur la valeur
d'ensemble de ces bâtiments. De plus, les constatations faites par le Tribunal
administratif lors de l'inspection locale ont confirmé la préoccupation qui
animait Maurice Braillard de faire coïncider la hauteur des bâtiments formant
les squares de Montchoisy avec la pente naturelle du terrain: les différents
gabarits des immeubles reproduisent en effet le dénivelé de la pente, tant au
niveau des toitures qu'au niveau des rez-de-chaussée, ce qui confère une
cohérence à l'ensemble du site. La surélévation envisagée du bâtiment de la
recourante serait de nature à rompre cette cohérence. Dans ces conditions, et
avec la retenue dont doit faire preuve le Tribunal fédéral dans l'examen de
l'intérêt public, il faut admettre que les autorités cantonales pouvaient
prescrire les mesures prévues à l'art. 4 RPS en considérant qu'elles étaient
justifiées par un intérêt public.

4.3 La recourante estime ensuite que les mesures de protection prises à
l'encontre du bâtiment dont elle est propriétaire violent le principe de la
proportionnalité. L'interdiction de construire un attique qui découle desdites
mesures ne respecterait ni la règle de la nécessité ni le principe de la
proportionnalité au sens étroit.
4.3.1 Le principe de la proportionnalité exige qu'une mesure restrictive soit
apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne
puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité);
en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige
un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés
compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée
des intérêts; ATF 126 I 219 consid. 2c et les arrêts cités). L'examen, par le
Tribunal fédéral, de la proportionnalité d'une mesure de protection d'un
bâtiment ou d'un site est en principe libre mais, comme pour l'intérêt public,
il s'exerce avec une certaine retenue (cf. supra, consid. 4.2.1 et la
jurisprudence citée).
4.3.2 La motivation du Tribunal administratif relative au principe de la
proportionnalité a déjà été exposée ci-dessus (consid. 3.2). En classant le
bâtiment de la recourante dans la catégorie B, le Conseil d'Etat a prévu un
régime de protection plus nuancé que celui qui prévaut pour les immeubles
classés dans la catégorie A. Le principe de la nécessité est ainsi respecté. En
outre, il ressort du dossier et de l'arrêt attaqué que les mesures de
protection visent à maintenir la cohérence et à sauvegarder la qualité
d'ensemble du site qui prend notamment en compte la déclivité du terrain, ce
que la recourante ne conteste pas. Après avoir procédé à une pesée des
intérêts, le Tribunal administratif a considéré, à juste titre, qu'aucun
élément ne permettait d'établir que ces mesures engendreraient des sacrifices
trop importants pour les propriétaires. Les limitations prévues par le plan de
site paraissent dès lors adéquates, au regard de l'objectif de protection visé
par les autorités cantonales et ancré à l'art. 1 RPS.

Pour le surplus, la recourante, qui prétend que les mesures de protection
envisagées pour son bâtiment équivaudraient à un "quasi-classement" de ce
dernier, se prévaut à tort du considérant 2.4 de l'ATF 1P.842/2005 du 30
novembre 2006: ce considérant traite des exigences relatives à l'examen du
principe de la proportionnalité lorsque les mesures de protection ont pour
conséquence le maintien de l'affectation du bâtiment et l'obligation pour son
propriétaire de poursuivre, même contre son gré, une activité économique
déterminée. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce: la seule contrainte dont se
plaint la recourante est l'obstacle mis à la surélévation de son bâtiment. Dans
ces circonstances, les restrictions imposées par le plan de site ne sont pas
disproportionnées. La recourante se plaint donc à tort d'une violation de
l'art. 36 al. 3 Cst.

5.
Enfin, la recourante estime que le plan de site consacre une inégalité de
traitement qui résulterait du fait que des travaux de rénovation ont été
exécutés sur certains bâtiments situés dans le périmètre du plan de site, au
mépris du respect des matériaux et des couleurs d'origine de la façade desdits
bâtiments. Comme l'a relevé le Tribunal administratif, ce grief doit être
rejeté dans la mesure où il met en cause les conditions d'octroi
d'autorisations délivrées conformément à la planification et à la législation
antérieures au plan de site et ne porte pas sur les mesures de protection
prévues par ledit plan de site et son règlement, seuls objets de la présente
procédure.

6.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. La recourante, qui succombe, doit
supporter les frais judiciaires (art. 65 et 66 LTF). Le Conseil d'Etat n'a pas
droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.

2.
Le recours en matière de droit public est rejeté.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 francs, sont mis à la charge de la
recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante ainsi qu'au
Conseil d'Etat et au Tribunal administratif de la République et canton de
Genève.

Lausanne, le 19 mars 2009

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Féraud Tornay