Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.358/2008
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Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1C_358/2008

Arrêt du 28 janvier 2009
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Raselli.
Greffière: Mme Tornay.

Parties
A.________,
recourant, représenté par Me Jacques Borowsky, avocat,

contre

Service des automobiles et de la navigation de la République et canton de
Genève, route de Veyrier 86, 1227 Carouge.

Objet
transmission par SMS des coordonnées du détenteur d'un véhicule à partir du
numéro de plaques d'immatriculation,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 1er
juillet 2008.

Faits:

A.
Par un article, paru le 22 mai 2008 dans le journal "La Tribune de Genève",
A.________ a appris que le Service des automobiles et de la navigation de la
République et canton de Genève (le SAN, devenu l'Office cantonal des
automobiles et de la navigation de la République et canton de Genève [ci-après:
l'OCAN]) a mis en place un système permettant à quiconque d'obtenir, via
messagerie téléphonique (ci-après: par SMS), les nom, prénom et adresse du
détenteur d'un véhicule immatriculé dans le canton de Genève. Ces
renseignements sont disponibles sur simple envoi du numéro de plaques
d'immatriculation au numéro 939.
Le 26 mai 2008, A.________ a recouru auprès du Tribunal administratif de la
République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) contre "la
décision du SAN ayant pour objet la transmission des coordonnées du détenteur
d'un véhicule à partir du numéro de plaques d'immatriculation, communiquée par
voie de presse le 22 mai 2008".
Par arrêt du 1er juillet 2008, le Tribunal administratif a déclaré le recours
irrecevable, faute d'acte attaquable. Il a considéré en substance que
l'information communiquée au travers d'un article de presse sur la possibilité
d'accéder par SMS aux données personnelles d'un détenteur automobile ne
constituait pas une décision au sens de l'art. 4 de la loi genevoise du 12
septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA, RSG E 5 10).

B.
A.________ forme un recours en matière de droit public contre l'arrêt précité.
Il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et à la constatation que le
système de transmission des données mis en place par le SAN viole le droit
fédéral. Il requiert également qu'il soit fait interdiction à l'OCAN de
transmettre par SMS lesdites données.
Le Tribunal administratif s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du
recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'OCAN
et l'Office fédéral des routes concluent principalement à l'irrecevabilité du
recours, subsidiairement à son rejet. Par courrier du 10 décembre 2008, le
recourant s'est prononcé sur ces déterminations.
Considérant en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours
dont il est saisi (ATF 134 III 235 consid. 1 p. 236).

1.1 Formé contre un arrêt final (art. 90 LTF) pris en dernière instance
cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) sur la base du droit public cantonal (art.
82 let. a LTF), le présent recours est en principe recevable comme recours en
matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF, aucune des exceptions
prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recourant est directement touché
par le prononcé d'irrecevabilité de l'arrêt attaqué et a un intérêt digne de
protection à en obtenir l'annulation. Il a dès lors qualité pour recourir au
sens de l'art. 89 al. 1 LTF.

1.2 Le recourant ne saurait prendre des conclusions allant au-delà de l'objet
du litige. Or, en l'espèce, les juges cantonaux ont refusé d'entrer en matière
sur son recours. Seule la question de la recevabilité du recours cantonal peut
donc être portée devant le Tribunal fédéral qui n'a, à ce stade, pas à examiner
le fond de la contestation. En cas d'admission du recours, la cause devrait
être renvoyée au Tribunal administratif pour qu'il entre en matière sur le
recours et statue au fond. En conséquence, seules sont admissibles les
conclusions tendant à l'annulation de l'arrêt attaqué, à l'exclusion de celles
sur le fond, et des griefs à leur appui, qui sont irrecevables (cf. ATF 133 IV
119 consid. 6.3 p. 121).

1.3 Le prononcé d'irrecevabilité est fondé sur le droit cantonal de procédure.
Or, sous réserve des cas visés à l'art. 95 let. c à e LTF, la violation du
droit cantonal ne constitue pas un motif de recours. Il est néanmoins possible
de faire valoir que l'application des dispositions cantonales consacre une
violation du droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF, telle que
l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Le Tribunal fédéral n'examine
cependant un tel moyen que s'il est formulé conformément aux exigences de
motivation qualifiées prévues à l'art. 106 al. 2 LTF (cf. ATF 133 III 639
consid. 2 p. 639 s.; 133 II 249 consid. 1.4.2 p. 254). Il n'est pas certain que
le recours, essentiellement appellatoire, satisfasse auxdites exigences. La
question peut cependant demeurer indécise, dès lors que le recours doit,
quoiqu'il en soit, être rejeté.

2.
Sans se plaindre explicitement d'arbitraire, le recourant reproche au Tribunal
administratif d'avoir considéré que l'annonce par voie de presse de la
possibilité d'accéder par SMS aux données personnelles d'un détenteur de
véhicule ne constituait pas une décision au sens de l'art. 4 LPA.

2.1 Il y a arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., lorsque la décision attaquée
viole gravement une règle ou un principe juridique clair et indiscuté ou
lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice ou de
l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité
cantonale de dernière instance que si elle est insoutenable ou en contradiction
évidente avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif
ou en violation d'un droit certain. Par ailleurs, il ne suffit pas que les
motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que
celle-ci soit arbitraire dans son résultat (ATF 134 I 263 consid. 3.1 p. 266;
131 I 57 consid. 2 p. 61 et la jurisprudence citée).

2.2 A teneur de l'art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions "les
mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce,
fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet de
créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a), de
constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou
de faits (let. b) ou de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes
tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations
(let. c)". Cette disposition définit la notion de décision de la même manière
que l'art. 5 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative (PA; RS
172.021; Benoît Bovay, Procédure administrative, 2000, p. 77). La notion de
décision implique donc un rapport juridique obligatoire et contraignant entre
l'autorité et l'administré (cf. ATF 121 II 473 consid. 2a p. 477). En revanche,
de simples déclarations, comme des opinions, des communications, des prises de
position, des recommandations et des renseignements n'entrent pas dans la
catégorie des décisions, faute de caractère juridique contraignant (cf. arrêt
1P.315/1998 du 7 décembre 1998 consid. 1d, in Pra 1999 p. 481; Häfelin/Müller/
Uhlmann, Allgemeines Verwaltungsrecht, 5e éd., 2006, p. 182 ss et les
références cités; Tschannen/Zimmerli, Allgemeines Verwaltungsrecht, 2e éd.,
2005, p. 215 ss; Pierre Moor, Droit administratif, vol. II, p. 156; Bovay, op.
cit., p. 259 ss).

2.3 En l'espèce, l'information par voie de presse sur le système de
transmission des données personnelles d'un détenteur automobile, mis en place
par le SAN, ne peut être qualifiée de mesure individuelle et concrète; elle ne
crée aucun rapport juridique obligatoire, ne touche pas le recourant de manière
directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la
généralité des administrés. Le recours, formé dans l'intérêt général,
s'apparente ainsi plutôt à une action populaire qui est prohibée. Le Tribunal
administratif pouvait dès lors considérer sans arbitraire que ladite
communication par voie de presse ne constituait pas une décision sujette à
recours au sens de l'art. 4 al. 1 LPA.
Par ailleurs, citant Moor (op. cit., p. 157), le recourant se prévaut à tort du
fait qu'un renseignement fourni par l'administration doit être qualifié de
décision lorsqu'il s'agit d'une information communiquée à un tiers sur requête
de celui-ci et portant sur un administré déterminé. En effet, l'annonce par
voie de presse, seul objet litigieux devant le Tribunal administratif, ne
comporte pas les coordonnées d'un administré à un tiers: elle informe sur un
changement de pratique administrative concernant l'accès aux données relatives
aux détenteurs de véhicule, qui peuvent être communiquées à chacun,
conformément à l'art. 126 al. 1 de l'ordonnance du 27 octobre 1976 réglant
l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière (OAC, RS
741.51).

3.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est
recevable. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais de la présente
procédure (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à l'Office cantonal
des automobiles et de la navigation et au Tribunal administratif de la
République et canton de Genève ainsi qu'à l'Office fédéral des routes.

Lausanne, le 28 janvier 2009
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:

Féraud Tornay