Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 1C.343/2008
Zurück zum Index I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008
Retour à l'indice I. Öffentlich-rechtliche Abteilung, Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten 2008


Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 1/2}
1C_343/2008/col

Arrêt du 9 septembre 2008
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Aemisegger et Fonjallaz.
Greffier: M. Rittener.

Parties
Ruth Kälin,
Union Démocratique du Centre, Genève (UDC-GE),
recourantes, représentées par Me Florence Castella, avocate,

contre

Commune de Vernier, rue du Village 9, 1214 Vernier, représentée par Me David
Lachat, avocat,

Conseil d'Etat du Canton de Genève, Chancellerie d'Etat, case postale 3964,
1211 Genève 3.

Objet
droits politiques, élections communales,

recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 1er
juillet 2008.

Faits:

A.
Le 29 avril 2007, une élection s'est déroulée dans la commune de Vernier (GE)
pour la désignation des trois membres du conseil administratif (exécutif). Ont
été élus Thierry Apothéloz et Yvan Rochat. Les autres candidats n'ayant pas
obtenu la majorité requise, un second tour a été organisé le 3 juin 2007.
Thierry Cerutti, candidat du parti "Mouvement Citoyens Genevois", a été élu à
cette occasion. Cependant, par arrêt du 5 février 2008, le Tribunal
administratif du canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) a admis
les deux recours formés contre cette élection et il l'a annulée. Il a considéré
que le scrutin en cause n'était pas l'expression fidèle et sûre de la volonté
des électeurs, au sens de l'art. 34 Cst., en raison de plusieurs irrégularités.
Le recours en matière de droit public que Thierry Cerutti a formé contre cet
arrêt a été rejeté par la Cour de céans (arrêt 1C_123/2008 du 29 mai 2008).

B.
Par arrêté du 18 juin 2008, publié dans la Feuille d'avis officielle du canton
de Genève (ci-après: FAO) du 20 juin 2008, le Conseil d'Etat du canton de
Genève a fixé au 28 septembre 2008 "la date du second tour de scrutin pour
l'élection d'un membre du Conseil administratif de la commune de Vernier". Cet
arrêté se référait à "l'élection complémentaire" annulée du 3 juin 2007 et
impartissait un délai au 11 août 2008 à midi pour le dépôt des candidatures, en
précisant ce qui suit: "seuls peuvent déposer une liste les partis politiques,
autres associations ou groupements qui ont participé au premier tour".
Le 26 juin 2008, la section genevoise du parti de l'Union Démocratique du
Centre (ci-après: UDC-GE) et Ruth Kälin ? membre de l'UDC-GE, citoyenne de
Vernier et conseillère municipale de cette commune ? ont recouru contre cet
arrêté auprès du Tribunal administratif. Elles soutenaient en substance que
l'élection du 28 septembre ne devait pas être considérée comme un second tour,
de sorte que la règle de l'art. 100 al. 2 de la loi cantonale sur l'exercice
des droits politiques (LEDP; RS/GE A 5 05) ? selon laquelle seuls les partis
ayant participé au premier tour pouvaient déposer des listes ? ne trouvait pas
application. De plus, l'arrêté contesté violait l'art. 34 Cst. car il ne
permettait pas de prendre en compte le "changement de choix" des électeurs
depuis le 29 avril 2007. Le Tribunal administratif a rejeté le recours par
arrêt du 1er juillet 2008. Il a considéré que l'élection du 3 juin 2007, qui a
été annulée et qui devait être répétée, était bien un second tour, de sorte que
l'art. 100 al. 2 LEDP s'appliquait.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Ruth Kälin et
l'UDC-GE demandent au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt ainsi que l'arrêté
du Conseil d'Etat du 18 juin 2008 et d'inviter le Conseil d'Etat à "convoquer
les électeurs de la commune de Vernier pour le premier tour d'une élection
complémentaire au Conseil administratif pour raison de vacance, au sens de
l'art. 103 al. 5 LEDP". Elles requièrent en outre l'effet suspensif. Le
Tribunal administratif a renoncé à présenter des observations. La Commune de
Vernier s'est déterminée; elle conclut au rejet du recours. Le Conseil d'Etat a
présenté des observations et conclut au rejet du recours, dans la mesure de sa
recevabilité. Il précise que l'UDC-GE n'a pas déposé de liste dans le délai
imparti par l'arrêté du 18 juin 2008.

D.
Par ordonnance du 19 août 2008, le Président de la Ire Cour de droit public a
rejeté la requête d'effet suspensif.

Considérant en droit:

1.
En vertu de l'art. 82 let. c LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours en
matière de droit public concernant le droit de vote des citoyens ainsi que les
élections et votations populaires.

1.1 La qualité pour recourir dans le domaine des droits politiques appartient à
toute personne disposant du droit de vote dans l'affaire en cause (art. 89 al.
3 LTF), même si elle n'a aucun intérêt juridique personnel à l'annulation de
l'acte attaqué (ATF 134 I 172 consid. 1.2 p. 174; 130 I 290 consid. 1 p. 292;
128 I 190 consid. 1 p. 192; 121 I 138 consid. 1 p. 139; 357 consid. 2a p. 360
et les références). Citoyenne active dans la commune de Vernier, la recourante
Ruth Kälin a donc la qualité pour agir.

1.2 Ont également cette qualité les partis politiques et les organisations à
caractère politique formées en vue d'une action précise ? tel que le lancement
d'un référendum ou d'une initiative ? pour autant qu'ils soient constitués en
personne morale, qu'ils exercent leur activité dans la collectivité publique
concernée par la votation en cause et qu'ils recrutent principalement leurs
membres en fonction de leur qualité d'électeurs (ATF 134 I 172 consid. 1.3.1 p.
175; 130 I 290 consid. 1.3 p 292; 121 I 334 consid. 1a p. 337; 115 Ia 148
consid. 1b p. 153; arrêt 1P.451/2006 du 28 février 2007, consid. 1.4 publié in
PJA 2007 p. 902 et les arrêts cités.). L'UDC-GE est un parti constitué en
association au sens des art. 60 ss CC et il exerce son activité notamment dans
la commune de Vernier, si bien que la qualité pour agir doit également lui être
reconnue.

1.3 Pour le surplus, interjeté en temps utile et dans les formes requises
contre une décision finale prise en dernière instance cantonale non susceptible
de recours devant le Tribunal administratif fédéral, le recours est recevable
au regard des art. 42, 86 al. 1 let. d, 90 et 100 al. 1 LTF.

2.
Dans un grief d'ordre formel qu'il convient en principe de trancher en premier
lieu, les recourantes se plaignent d'une violation de leur droit d'être
entendues en raison d'un défaut de motivation de l'arrêt querellé. Elles
reprochent en substance au Tribunal administratif d'avoir omis de statuer sur
des griefs qu'elles avaient valablement présentés. Dans la mesure où les griefs
en question se confondent avec les moyens présentés à l'appui de leur recours
en matière de droit public, il y a lieu exceptionnellement de trancher ceux-ci
avant d'examiner la question du droit d'être entendu.

3.
Selon les recourantes, le Tribunal administratif aurait violé les art. 100, 103
al. 5 et 182 LEDP en considérant que l'élection du 28 septembre 2008 était
convoquée en application de l'art. 182 LEDP et qu'il s'agissait d'un second
tour au sens de l'art. 100 LEDP. Elles soutiennent que ce scrutin devait être
considéré comme une nouvelle élection à la suite d'une vacance au sens de
l'art. 103 al. 5 LEDP.

3.1 Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a
LTF) ? y compris les droits constitutionnels (cf. Message concernant la
révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF
2001 p. 4132) ? ainsi que pour violation de dispositions cantonales sur le
droit de vote des citoyens et sur les élections et votations populaires (art.
95 let. c et d LTF). Saisi d'un recours pour violation des droits politiques,
le Tribunal fédéral revoit librement l'interprétation et l'application du droit
fédéral et du droit constitutionnel cantonal, ainsi que des dispositions de
rang inférieur qui sont étroitement liées au droit de vote ou en précisent le
contenu et l'étendue. Il n'examine en revanche que sous l'angle de l'arbitraire
l'interprétation d'autres règles du droit cantonal. En présence de deux
interprétations également défendables, il s'en tient en général à celle retenue
par la plus haute autorité cantonale (ATF 131 I 126 consid. 4 p. 131 et les
arrêts cités).

3.2 Les dispositions litigieuses de la LEDP ont la teneur suivante:
Titre II Votations et élections
Chapitre II Elections majoritaires
Section 1 Système majoritaire

Art. 100 Second tour
1Si un second tour de scrutin est nécessaire pour compléter l'élection, il a
lieu dans les 5 semaines suivant le premier tour.
2 Dans ce second tour, seuls peuvent déposer une liste les partis politiques,
autres associations ou groupements qui ont participé au premier tour.

Section 2 Types d'élections majoritaires
§ 3 Conseillers administratifs, maires et adjoints

Art. 103 Mode et date
[...]
Vacance
5 En cas de vacance, le nouveau magistrat est élu pour la fin de la période
administrative de quatre ans.

Titre III Voies de recours et sanctions pénales

Art. 182 Second scrutin
Si, à la suite d'un recours, un second scrutin est nécessaire, le Conseil
d'Etat en fixe la date.

3.3 On pourrait considérer que l'art. 100 al. 2 LEDP est lié au droit de vote
et qu'il en précise le contenu, dans la mesure où il restreint l'accès au
second tour. Cette question peut cependant demeurer indécise, dès lors que
cette norme n'a de toute façon pas été violée et que son application ne porte
pas atteinte à l'art. 34 Cst. (cf. infra consid. 3.4 et 4.2). Pour le surplus,
les autres dispositions mentionnées ci-dessus ne sont pas étroitement liées au
droit de vote et elles n'en précisent pas le contenu ou l'étendue, de sorte que
leur interprétation par l'autorité intimée doit être examinée sous l'angle de
l'arbitraire (art. 9 Cst.; pour une définition de l'arbitraire cf. ATF 133 I
149 consid. 3.1 p. 153; 132 I 13 consid. 5.1 p. 17). Appelé à revoir
l'interprétation d'une norme sous cet angle, le Tribunal fédéral ne s'écarte de
la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si
celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation
effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En
revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne
s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la
disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée,
même si une autre solution ? éventuellement plus judicieuse ? paraît possible
(ATF 133 II 257 consid. 5.1 p. 260 s. et les arrêts cités).

3.4 En l'occurrence, il ressort des pièces déposées par les parties ? notamment
des extraits de la Feuille d'avis officielle du canton de Genève ? que le
scrutin du 29 avril 2007 était le premier tour de l'élection du conseil
administratif de Vernier et que l'UDC-GE n'a pas participé à ce premier tour
(FAO du 13 avril 2007 p. 4). Comme seuls deux candidats ont été élus ? alors
que trois sièges étaient à pourvoir ? un second tour devait être organisé dans
un délai de cinq semaines, conformément à l'art. 100 al. 1 LEDP. Tel était
l'objet de l'arrêté du Conseil d'Etat du 2 mai 2007 "fixant au dimanche 3 juin
2007 la date de l'élection complémentaire d'un membre du Conseil administratif
de la commune de Vernier" (FAO du 4 mai 2007 p. 2). Cette formulation est
malheureuse, dans la mesure où la législation cantonale réserve l'expression
"élection complémentaire" aux scrutins organisés à la suite d'une vacance (cf.
art. 103 al. 6 et 111 LEDP). Il en va d'ailleurs de même de la législation
fédérale (art. 56 de la loi fédérale sur les droits politiques [LDP; RS
161.1]). Il est toutefois évident que l'élection du 3 juin 2007 n'avait pas un
tel objet, mais qu'il s'agissait bien d'un second tour pour l'élection du
troisième membre du conseil administratif. Ce second tour a été organisé dans
le délai de cinq semaines prévu par l'art. 100 al. 1 LEDP et, conformément à
l'art. 100 al. 2 LEDP, l'arrêté susmentionné précisait que seuls pouvaient
déposer une liste les partis politiques, autres associations ou groupements qui
ont participé au premier tour. En conformité avec cette règle, l'UDC-GE n'a pas
présenté de liste pour ce second tour (FAO du 16 mai 2007 p. 2).
L'élection du 3 juin 2007 ayant été annulée, le Conseil d'Etat devait fixer la
date d'un "second scrutin" conformément à l'art. 182 LEDP. C'est ce qu'il a
fait par arrêté du 18 juin 2008 "fixant au dimanche 28 septembre 2008 la date
du second tour de scrutin pour l'élection d'un membre du Conseil administratif
de la commune de Vernier" (FAO du 20 juin 2008 p. 2). Bien que l'intitulé de
l'arrêté ne le précise pas, il s'agit en réalité du "second scrutin" du second
tour, ce qui ressort de la suite du texte qui se réfère à l'annulation de
"l'élection complémentaire" (recte: du second tour) du 3 juin 2007.

3.5 La rédaction maladroite des arrêtés des 4 mai 2007 et 18 juin 2008 n'était
pas de nature à induire les recourantes en erreur, dès lors que celles-ci
connaissent manifestement le système électoral genevois et qu'elles sont
représentées par un mandataire professionnel. Par conséquent, elles ne
sauraient soutenir de bonne foi que l'objet du "second scrutin" du 28 septembre
2008 n'était pas un second tour.
Dans la mesure où il s'agit d'un "second scrutin", c'est l'art. 182 LEDP qui
s'applique pour sa convocation. Or, contrairement à l'art. 100 al. 1 LEDP,
cette disposition ne prévoit pas que l'élection doit avoir lieu dans un délai
déterminé. On peut toutefois attendre du Conseil d'Etat qu'il fixe la date de
ce scrutin dans un délai raisonnable, ce qu'il a fait en l'occurrence. En
effet, l'arrêt de la Cour de céans confirmant l'annulation du second tour a été
notifié le 6 juin 2008, de sorte qu'il n'apparaissait pas déraisonnable de
fixer le scrutin après l'été, en réservant le mois de septembre pour la
campagne électorale. L'art. 182 LEDP n'a donc pas été appliqué de manière
arbitraire.
Contrairement à ce que soutiennent les recourantes, l'art. 100 al. 1 LEDP ne
trouve pas application, dès lors que l'art. 182 LEDP est une lex specialis en
ce qui concerne la fixation de la date du "second scrutin". Il n'était donc
aucunement nécessaire que ce scrutin soit fixé dans les cinq semaines suivant
le scrutin annulé, ce qui serait au demeurant illusoire compte tenu de la durée
des procédures de recours. Quant à l'art. 103 al. 5 LEDP, il est étranger à
l'objet du présent litige, qui ne concerne pas un cas de vacance d'un
magistrat. De plus, il n'y a pas lieu d'appliquer cette disposition lorsqu'une
élection est annulée, ce cas de figure étant régi par l'art. 182 LEDP. En
revanche, la règle de l'art. 100 al. 2 s'applique, dans la mesure où l'objet du
"second scrutin" est clairement un second tour (cf. supra consid. 3.3). Ainsi,
cette disposition a été appliquée correctement et les autres normes mentionnées
ci-dessus n'ont pas été appliquées de façon arbitraire, de sorte que ce grief
doit être rejeté.

4.
Les recourantes se plaignent également d'une violation de l'art. 34 Cst., au
motif que l'arrêt querellé priverait les citoyens de la possibilité d'exprimer
un "changement de choix politique" qui pourrait être intervenu depuis
l'élection du 29 avril 2007.

4.1 L'art. 34 al. 1 Cst. garantit de manière générale et abstraite les droits
politiques, que ce soit sur le plan fédéral, cantonal ou communal. Selon l'art.
34 al. 2 Cst., qui codifie la jurisprudence du Tribunal fédéral établie sous
l'empire de la Constitution fédérale du 29 mai 1874, cette garantie protège la
libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression
fidèle et sûre de leur volonté (ATF 132 I 104 consid. 3.1 p. 108; 124 I 55
consid. 2a p. 58; 121 I 138 consid. 3 p. 141, 187 consid. 3a p. 190). Cette
disposition consacre la liberté de vote, dont la jurisprudence a notamment
déduit le droit pour chaque citoyen de participer à une élection, comme
électeur ou candidat, s'il remplit les exigences requises (ATF 125 I 441
consid. 2a p. 443), le droit de voter dans le secret et à l'abri de toute
pression ou influence extérieure (ATF 131 I 126 consid. 5.1 p. 132; 90 I 72
consid. 2a p. 73) et le droit d'exiger qu'aucun résultat ne soit reconnu s'il
n'exprime pas la libre volonté du corps électoral (ATF 129 I 185 consid. 7.2 p.
199; 123 I 63 consid. 4b p. 71; 121 I 138 consid. 3 p. 141). De plus, les
élections ne doivent pas se résumer à une confirmation des forces politiques en
présence; les électeurs doivent au contraire pouvoir se former une opinion sur
la base la plus libre et la plus complète possible (ATF 131 I 126 consid. 5.1
p. 132; 129 I 185 consid. 5 p. 192; 125 I 441 consid. 2a p. 444).

4.2 La règle de l'art. 100 al. 1 LEDP est claire et n'est pas sujette à
interprétation: un parti qui n'a pas participé au premier tour ne peut pas
déposer une liste au second tour. Cette règle n'a pas été remise en cause par
la jurisprudence et elle ne fait pas l'objet de critiques de la part de la
doctrine (cf. Yvo Hangartner/Andreas Kley, Die demokratischen Rechte in Bund
und Kantonen des Schweizerischen Eidgenossenschaft, Zurich 2000, p. 622; Pierre
Garrone, L'élection populaire en Suisse - Etude des systèmes électoraux et de
leur mise en oeuvre sur le plan fédéral et dans les cantons, Bâle 1991, p. 174
et 204). Elle n'apparaît au demeurant pas en contradiction avec les droits
politiques tels qu'ils sont définis par la jurisprudence susmentionnée.
Il n'y a pas lieu de remettre en question l'application de cette règle lorsque
le second tour a été annulé et qu'il doit être répété. La loi cantonale
applicable en l'espèce ne prévoit pas que le "second scrutin" doit être ouvert
à tous et rien de tel ne peut être déduit de l'art. 34 Cst. Au demeurant,
lorsqu'une élection doit être répétée, il apparaît compréhensible de se
replacer dans la situation qui prévalait lors du scrutin annulé. Or, comme ce
scrutin était un second tour, les règles y relatives trouvent application.
Les recourantes ne sauraient être suivies lorsqu'elles affirment que cette
solution consacre un "déni de démocratie" au motif que les électeurs seraient
restreints dans leur choix. En effet, s'il est usuel que certains électeurs
changent d'opinion entre deux scrutins, les systèmes électoraux adoptés en
Suisse veulent que ces changements s'expriment lors des élections ordinaires et
non pas en cours de législature, sous réserve des cas exceptionnels de vacance.
Ainsi, en s'abstenant de participer au premier tour de l'élection litigieuse,
l'UDC-GE ne pouvait pas ignorer qu'elle devrait attendre la fin de la période
administrative de quatre ans pour présenter un candidat, sauf si un siège
devenait vacant en cours de législature. En définitive, le fait que les
changements de rapports de force politiques se concrétisent en principe lors
des élections ordinaires, soit à la fin de la période administrative, ne porte
aucunement atteinte à la liberté de vote au sens de l'art. 34 Cst. Ce grief
doit donc être rejeté.

5.
Il convient encore d'examiner le grief de violation du droit d'être entendu en
raison d'un défaut de motivation de l'arrêt attaqué.

5.1 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst.,
comprend notamment le droit pour chacun d'exiger qu'un jugement ou une décision
défavorable à sa cause soit motivé. Cette garantie tend à donner à la personne
touchée les moyens d'apprécier la portée du prononcé et de le contester
efficacement, s'il y a lieu, devant une instance supérieure. Elle tend aussi à
éviter que l'autorité ne se laisse guider par des considérations subjectives ou
dépourvues de pertinence; elle contribue, par là, à prévenir une décision
arbitraire. L'objet et la précision des indications à fournir dépend de la
nature de l'affaire et des circonstances particulières du cas; néanmoins, en
règle générale, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les
motifs qui l'ont guidée (ATF 112 Ia 107 consid. 2b p. 109; voir aussi ATF 126 I
97 consid. 2b p. 102, 125 II 369 consid. 2c p. 372, 124 II 146 consid. 2a p.
149). L'autorité n'est pas tenue de discuter de manière détaillée tous les
arguments soulevés par les parties; elle n'est pas davantage astreinte à
statuer séparément sur chacune des conclusions qui lui sont présentées. Elle
peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige; il
suffit que le justiciable puisse apprécier correctement la portée de la
décision et l'attaquer à bon escient (ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 17; 125 II
369 consid. 2c p. 372; 124 II 146 consid. 2a p. 149; 124 V 180 consid. 1a p.
181 et les arrêts cités).

5.2 Devant le Tribunal administratif, les recourantes soutenaient en substance
que l'élection du 28 septembre 2008 ne pouvait pas être qualifiée de second
tour car elle n'avait pas été convoquée dans le délai de cinq semaines prévu
par la loi. Elles affirmaient donc qu'il s'agissait d'une élection
complémentaire au sens de l'art. 103 al. 5 LEDP. Elles se plaignaient en outre
d'une violation de l'art. 34 Cst. Il est vrai que le Tribunal administratif a
traité ces griefs de façon particulièrement sommaire. Il a néanmoins répondu
sur les points essentiels, en rappelant que l'élection du 3 juin 2007
constituait un second tour, que le délai de cinq semaines ne s'appliquait pas
pour un "second scrutin" selon l'art. 182 LEDP et qu'il ne pouvait pas être
question d'une élection complémentaire. Ces éléments étaient suffisants pour
permettre aux destinataires de l'arrêt querellé de comprendre les motifs ayant
guidé l'autorité et pour attaquer la décision à bon escient. Le Tribunal
administratif n'était pas tenu de répondre à tous les griefs développés par les
recourantes dans une écriture par ailleurs peu structurée, ce d'autant moins
que l'essentiel de leur argumentaire reposait sur la prémisse manifestement
erronée que le scrutin litigieux n'était pas un second tour. Il y a donc lieu
de considérer que l'arrêt attaqué satisfait aux exigences minimales de
motivation découlant de l'art. 29 al. 2 Cst.

6.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Avec l'entrée en vigueur de la
LTF, la pratique consistant à renoncer au prélèvement d'un émolument judiciaire
en matière de droit de vote des citoyens a été abandonnée (ATF 133 I 141
consid. 4 p. 142 s.). Les recourantes, qui succombent, doivent donc supporter
les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). La pratique qui
prévalait en matière de recours de droit public et qui consistait à allouer des
dépens aux collectivités ne disposant pas d'une infrastructure administrative
et juridique suffisante pour procéder sans l'assistance d'un avocat a également
été abandonnée (ATF 134 II 117 consid. 7 p. 119), de sorte qu'il n'y a pas lieu
d'allouer des dépens à la Commune de Vernier (art. 68 al. 3 LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1000 fr., sont mis à la charge de l'Union
Démocratique du Centre, Genève (UDC-GE) et de Ruth Kälin.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourantes et de la
Commune de Vernier, ainsi qu'au Conseil d'Etat et au Tribunal administratif du
canton de Genève.

Lausanne, le 9 septembre 2008

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:

Féraud Rittener